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Olivier Orban (01/01/1975)
3.33/5   3 notes
Résumé :
Saint-Simon au bordel… Fabienne Jamet, sentimentale, sûre d'elle, mordante, poétique, exaspérante, tendre, clairvoyante, vitriolante, règne sur le One Two Two de 1930 à 1946.
Hommes politiques, artistes, gangsters, financiers, ducs, rois, anonymes défilent dans les salon set les chambres du 122 de la rue de Provence. L’œil de Fabienne les détaille aussi crûment qu'un microscope. Passions. Faiblesses. Rencontres.
Histoire d'une dame galante ? Vie et mor... >Voir plus
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Que lire après One Two Two : 122, rue de ProvenceVoir plus
Critiques, Analyses et Avis (1) Ajouter une critique
Au 122 rue de Provence, dans le 8ème arrondissement se trouvait le One-Two-Two, célèbre maison close, aussi luxueuse que le Sphinx et le Chabanais. L'établissement fut ouvert en 1924 par Marcel Jamet, un Breton qui fit ses armes à Buenos Aires, où les « travailleuses » françaises étaient alors en vogue, ainsi que par sa première femme Doriane (Fernande pour l'état civil). Réservé à une clientèle fortunée, le One-Two-Two avait pour particularité de proposer des chambres à thème pour le grand frisson: le tipi indien, la chambre des glaces, la cabine de l'Orient Express avec diffusion d'un fond sonore….On pouvait aussi y venir pour le bar et le restaurant (avec serveuses nues sous leurs tabliers). Acteurs français, chanteurs, industriels, têtes couronnées, stars hollywoodiennes, tous venaient y passer des soirées durant l'entre-deux-guerres. Puis vint l'Occupation. La clientèle changea…
L'histoire de la « Maison » nous est narrée par un témoin clé, Fabienne (Georgette pour l'état civil), une jeune femme dont les parents tenaient un hôtel et qui choisit la prostitution. Aimant l'argent et le luxe, Fabienne devint l'une des pensionnaires du 122, puis la gouvernante, et enfin la taulière en convolant en justes noces avec Marcel.

Fabienne aimait les riches et les puissants, les excentricités sexuelles d'une clientèle qu'une cinquantaine de femmes tentaient de satisfaire (environ 300 clients par jour, de 16 heures à 4 heures du matin). Et elle s'épanche très volontiers sur sa clientèle. L'ouvrage vaut surtout pour les anecdotes concernant le fonctionnement d'une maison de passe connue même à l'étranger. On venait au Chabanais ou au One Two Two comme on allait visiter les Champs Elysées. Mais c'est sans aucun doute les parties consacrées à l'Occupation (la plus longue), puis à la Libération qui sont les plus intéressantes, même si Fabienne a le patriotisme fluctuant et une éthique à géométrie variable. Elle espère la victoire de la France, râle parce que la populace prend la route en 1940 alors qu'elle et son mari se replient sur leur résidence secondaire. Mais très vite, les affaires reprennent. Fabienne va demander à la Kommandantur la réouverture de son établissement, acceptée certes, mais pour les troufions. Inacceptable pour Madame Jamet. Elle ne veut plus voir la soldatesque profiter des plus belles filles de Paris, et obtient que non seulement le 122 soit réservé aux officiers allemands mais aussi à une clientèle nationale triée sur le volet: « J'avais rendu le One Two Two à la France. »

Les années d'Occupation racontées par Fabienne valent leur pesant de tickets de rationnement. Elle vit dans une bulle- ses meilleures années- auprès de gentlemen germaniques: « Je me souviens de ces SS tout en noir, si jeunes, si beaux, souvent d'une intelligence extraordinaire, qui parlaient parfaitement le français et l'anglais», fait l'éloge des trafiquants du marché noir, (Joanovici,…), de ses chers amis Rudy de Mérode, (Frédéric Martin, pour l'état civil, de  la Gestapo de Neuilly, vol d'or et déportations)et le sympathique Otto qui avait sa table réservée (Otto Brandt pour l'état civil, empereur du marché noir)…. Elle apprécie moins les truands de la Gestapo française et de la Brigade nord-africaine de la rue Lauriston. Ils sont mal élevés et font des histoires...

A la Libération, des hordes de GI mal dégrossis vont souiller le 122, sans compter les Résistants qui volent et demandent des comptes… Puis vient l'année 1946 qui sonne la fin de la récréation. Les maisons closes ferment, Marcel et Fabienne ne peuvent plus vendre du pain de fesse (alors qu'on croise régulièrement dans Paris d'anciens trafiquants et collaborateurs qui vivent la belle vie), l'avenir s'annonce terrible pour les épouses et les femmes en général puisque les maisons » les « protégeaient » des agressions…
Devenue veuve et fauchée, Fabienne Jamet prend plaisir à se remémorer sa jeunesse et les litres de champagne qui coulèrent au 122 de la rue de Provence, loin du vulgum pecus et de la politique, avec des pensionnaires qui multipliaient les passes mais qui vivaient comme des privilégiées, bien plus heureuses qu'à l'usine (!) Elle règle quelques comptes avec Martoune (Marthe Lemestre pour l'état civil), qui gérait le Sphinx avec son mari et qui avait publié Madame Sphinx vous parle,
La lecture de One Two Two est tout de même plaisante, et la mauvaise foi de la narratrice pas piquée des hannetons nous saute au visage.
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Citations et extraits (5) Ajouter une citation
Mistinguett venait seulement lorsque des gens l'invitaient. Elle avait horreur de payer. Comme Maurice Chevalier, d'ailleurs. C'est drôle, ces gens dont on dirait que les billets de banque leur collent aux doigts, alors qu'ils sont pleins aux as. J'ai vu arriver Josselyne Garci, toute blonde, si jolie. Elle était mariée avec Jules Berry, qu'elle a vite laissé tomber pour Saunier -un truand, très beau, devenu rapidement un des patrons de la Gestapo de Lyon. Pendant des mois Berry promenait un chagrin épouvantable. Qu'il était triste! Il fut vengé quelques années plus tard lorsque Saunier a été fusillé. La carrière de Josselyne a sombré dans la débâcle de la Collaboration.
Susy Solidor aimait venir passer une soirée. Une grande femme avec un casque de cheveux blonds. Elle vivait avec une antiquaire très à la mode du faubourg Saint-Honoré.
Chez moi, on pouvait aussi croiser une actrice célèbre qui venait avec son amant, un officier de la Wehrmacht. Tous deux montaient régulièrement au fouet! Je n'ai jamais su lequel frappait l'autre.
On voyait souvent Vincent Scotto, un habitué qui avait offert une guitare à Marcel, ou Tino Rossi, en compagnie d'un type de la Gestapo, très mince, tiré à quatre épingles. Tino, déjà un peu rondouillard, prétentieux, désagréable, refusant de chanter la moindre chanson pour mes filles qui mourraient d'envie de l'entendre.
Heureusement qu'elles avaient Edith Piaf pour les consoler. A l'époque, elle vivait avec Georges Flament, un acteur un peu maquereau sur les bords, qui a aussi drivé Viviane Romance, l'actrice de Naples aux baisers de feu.
Edith, quelle merveille!
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Le maharadjah de Kapurthala était d'un autre style. Il avait un oeil de verre. Aussitôt arrivé, il choisissait deux ou trois filles. Les bouteilles de champagne valsaient. Puis, c'était une tradition, dès qu'il était rond, défoncé, il perdait son oeil. On me faisait appeler. Dans la chambre ou dans le salon, je trouvais mes trois femmes, fesses en l'air, en train de chercher l'oeil du prince hindou. A mon tour, je m'y mettais. La règle du jeu consistait à ne pas trouver le postiche qui, bien sûr, scintillait sur le tapis. Quand Karputhala en avait assez du spectacle, il disait:
- Je m'en vais. Si vous le trouvez, faites-le-moi porter au Ritz.
Et, il partait sans payer. Dans la matinée, je téléphonais à la réception du palace:
- Nous avons retrouvé l'oeil de son Altesse.
Invariablement, l'homme aux clés d'or me répondait:
-On ne peut pas déranger le prince qui est en prières.
Un moment plus tard, un groom arrivait au One avec l'argent de la nuit et des cadeaux pour chacune des chercheuses d'oeil.
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Des non-bordeliers, j'en ai connu beaucoup. Michel Simon, entre autres. Lui, c'était un type de la rue Saint-Denis. Il aimait les putes ordinaires, celles qui se tenaient devant les petits hôtels. Quand il venait passer une soirée au One avec des amis, il ne montait jamais. Nous n'étions pas son style. En revanche, toutes les filles des Halles le connaissaient.
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Les forts de Paris, qui avaient été célèbres pendant la résistance en 1870, ne furent détruits qu'en 1918. Vers les années 1900, les murs en ruine et les terrains vagues qu'ils englobaient étaient devenus le royaume des malheureux, des mauvais garçons, des filles de joie dans la débine, des chiffonniers et des gitans. Une de leurs roulettes avaient recueilli Marcel. Pour payer sa soupe, ils l'envoyaient à la chasse. A la chasse aux rats. Il y en avait partout dans Paris. Ils pullulaient dans les cours, les caves d'immeubles, aux Halles, le long de la Seine, les plus méchants étant encore ceux des fortifs qui étaient véritablement affamés. Pour chaque rongeur, tué, un service de dératisation donnait un ou deux sous. Et le gosse y allait, armé d'un bâton.
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Le tout cinéma est toujours venu au 122. Beaucoup d'acteurs célèbres qui, le plus souvent, y passaient la soirée pour bavarder. Gabin, par exemple. Il arrivait avec sa belle gueule du Jour se lève et de Quai des Brumes. Ses copains montaient, lui allait s'accouder au bar. Toujours d'un triste! Ce n'était pas facile de lui arracher trois mots.
Hollywood défilait, Marlene Dietrich, Cary Grant, le producteur Warner, Mae West, Kathrin Hepburn Tyrone Power, Humphrey Bogart...
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