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Critique de YvPol


YvPol
09 septembre 2011
Nous avons parfois -j'avoue, j'ai parfois- pour les romans dits régionaux -voire de terroir- des a priori négatifs. Ce roman breton, écrit par un Breton (né à Quimper), se passe en Bretagne, dans les Montagnes Noires ; on y parle parfois le breton (avec notes bas de pages, ouf !) et est édité dans la collection de l'éditeur qui se nomme Terres de France. Régional et terroir donc. Oui, mais il est vachement bien ! Tout simplement. C'est le dernier volume d'une fresque bretonne écrite par Hervé Jaouen et qui contient quatre tomes. Je n'ai pas lu les précédents, mais no problem, ils se lisent indépendamment les uns des autres.

Qu'est-ce qui fait que ce roman est -je me cite, on n'est jamais si bien servi que par soi-même- "vachement bien" ? Mais tout, ai-je envie de vous répondre. Par exemple, l'intrigue s'évente assez vite (disons que quelques indices et une perspicacité au dessus de la moyenne -si si, je maintiens, au pire ça fait vantard, au mieux, on me croit, et là mon aura croît- m'ont fait deviner assez vite le secret de famille). Mais, malgré cela, j'ai dévoré ce roman ; c'est un signe qui ne trompe pas. Tellement de romans ne tiennent qu'à l'intrigue, qui une fois devinée perdent tout leur intérêt. Pas là.

Quelques pistes pour cerner mon engouement :

Les lieux d'abord, empreints de légendes, d'histoires plus ou moins glaçantes. Un climat typique aussi qui permet d'opacifier et de densifier le secret.

Les personnages ensuite. Ils sont laids, difformes pour certains, parfois terriblement hostiles, antipathiques, mais avec d'autres côtés plus attachants. Nul n'est tout noir ou tout blanc. Sylviane est une belle jeune fille, mais pas facile, avec du caractère et quelques "casseroles" qu'elle traîne. Sa relation avec sa mère est tendue, voire totalement haineuse. Mikelig, le père est un petit bonhomme que la polio à déformé et empêché de grandir. Il voue un amour total à sa femme. Aurore, la mère, l'objet de l'amour aveugle de Mikelig et qui le lui rend bien d'ailleurs -cet amour intense, qui surmonte tout, même les événement les plus indignes-, est le personnage central du livre : sa corpulence, son caractère, sa description éclipsent un peu les autres
Le mariage, ah oui, parlons-en. Tout un chapitre, inoubliable, lui est consacré. Aurore est du Nord, Mikelig local : une rencontre des deux cultures et une union étonnante, précédée d'un enterrement. La description d'Hervé Jaouen est un grand moment, on s'y croirait. J'en rigole encore. Il paraît même que dans le Nord, on parle encore du cheval breton qui tractait le corbillard (en 1963, en Bretagne, dans les petits villages, les corbillards n'étaient pas encore tous motorisés)

Enfin, l'écriture. Quelle langue ! Point d'artifices. du direct. du franc. du cru. du franchouillard argotique mâtiné de breton. Les scènes un peu chaudes, parce que Madame n'est pas avare non plus de ses charmes, au plus grand bonheur de son mari, sont très drôles, et permettent de se détendre entre deux révélations pas reposantes. Cette langue et l'humour inhérent font eux aussi passer des scènes terribles plus facilement, ou alors, au choix, en rajoutent encore dans l'horreur, la dégradation et le sordide
Un bouquin pas commun, des personnages qui marquent et que je n'oublierai pas de sitôt et une langue percutante, efficace et jouissive. J'irais bien voir si leurs aïeux des trois tomes précédents sont aussi barrés.

Un roman de la rentrée littéraire, mon dixième, le plus déjanté, le plus frais sûrement grâce à l'air marin breton.
Lien : http://lyvres.over-blog.com
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