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Critique de Zora-la-Rousse


“Chaque fois que l'on refuse 1 milliard pour le logement, c'est 10 milliards que l'on prépare pour les tribunaux, les prisons, les asiles de fous.” écrivait l'abbé Pierre.

Au sortir de la deuxième guerre mondiale, le pays est en ruine. Plus d'un tiers de la population française se retrouve sans logement, survivant dans des bidonvilles et autres taudis. Une crise du logement s'installe, touchant surtout les couches populaires mais se généralisant très rapidement à tous.

Cependant, nous apprend Xavier de Jarcy, cette crise larvait déjà dès la fin des années 30, et le problème fut longuement réfléchi par le régime de Vichy. D'une manière surprenante et plutôt inattendue, beaucoup d'anciens hauts-fonctionnaires de cette époque furent reconduits dans leur réflexion et leurs tâches en la matière, ce qui explique une certaine continuité dans les idées et intentions. En effet, le logement restera encore quelques années dans les esprits des décideurs considéré comme le moyen d'« éduquer » les gens du peuple, en les privant de bistrots, de cafés par exemple pour les remplacer par des bibliothèques ou autres lieux de culture, bref : « l'hygiénisme social ».

Les décisions sont donc prises en haut lieu, depuis Paris, sans jamais consulter les citoyens, rarement les régions ou les maires des grandes villes. La conséquence directe de cette politique résidera dans les faibles moyens attribués à cet énorme chantier, l'État privilégiant dans les années 50 ses dépenses militaires pour les guerres de Corée et d'Indochine… Pourtant, et paradoxalement encore, ce même État mène un politique nataliste forte, avec succès, et les enfants naissent et grandissent, mais dans des conditions déplorables.

Les industries s'installent, le secteur du bâtiment encore très artisanal au sortir de la guerre se modernise à son tour, au plus grand bonheur des architectes. Il faut faire évoluer le logement en fonction de nouvelles technologies ou normes, apporter l'eau, le courant, concourir à l'hygiène, mais aussi penser au parc automobile, aux infrastructures de transport, scolaires ou de garde pour les jeunes enfants… Par manque de moyens, les ambitions seront très vite revues à la baisse, les surfaces habitables diminuées, les constructions annexes abandonnées.

On finit par construire en nombre mais mal. Les premiers à en pâtir sont les enfants, qui tentent d'échapper à l'exiguïté de leur logement pour se retrouver perdus dans ces grands espaces sans âme. On a besoin de main d'oeuvre pour les usines, mais on ne se soucie guère des conditions de vie des ouvriers… L'histoire des « Cités de banlieue » est dramatique, l'issue apparaît fatale quasiment dès son amorce, et pourtant, elle a pu se dérouler jusqu'au paroxysme atteint dans les années 70.

C'est un ouvrage dense et documenté que nous livre là Xavier de Jarcy, effrayant sur certains points mais nécessaire pour comprendre notre société actuelle. Rien n'arrive jamais par hasard...
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