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Noël Arnaud (Éditeur scientifique)Henri Bordillon (Éditeur scientifique)
EAN : 9782070321988
247 pages
Gallimard (25/11/1980)
4.05/5   28 notes
Résumé :
"Tout est dans Faustroll, affirmait Boris Vian, y compris la manière de cuire un mouton vivant jusqu’à la halte du cuit-à-point".
Le Faustroll est le maître-livre d’Alfred Jarry. Au cours de sa navigation sur terre ferme, le savant docteur révèle au singe Bosse-de-Nage « qui ne savait de parole humaine que ha ha », à l’huissier Panmuphle qui consigne tout par écrit et au lecteur les plus singulières quintessences de la littérature, de l’art et de la science d... >Voir plus
Que lire après Gestes et opinions du Docteur Faustroll, pataphysicien - L'amour absoluVoir plus
Critiques, Analyses et Avis (5) Ajouter une critique
Que dire de plus du Dr Faustroll ? J'ai envie de dire QUE POURRAIT-ON ENLEVER sans qu'il n'y paraisse ? Tout ou rien : la parole y est profusion, riche de symboles, d'allusions, de clins d'oeil, de clins d'yeux, de parodies. Paris parodie… Parodie des parodies même ! Quel feu d'artifice en tout cas pour célébrer la naissance de la pataphysique comme science. Car là aussi il y a beaucoup de vérité. Où ça là ? Dans l'absurde, la moquerie et l'imaginaire.

Et que dire de l'Amour Absolu sinon que Jarry y mêle Ève et Marie, Joseph et Adam, l'amour, le sexe, l'inceste, la vie, l'éternel et la mort… tout se dit, se mélange en symboles et farces tragiques avec la mort du condamné pour point final.
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Étrange, étrange...

Ce livre en prose poétique rend un hommage particulier à la littérature puisque cette dernière permet à Faustroll de voyager dans les dimensions contenues dans les 27 ouvrages de sa bibliothèque. Pourquoi 27 précisément ? Les annotations que j'ai trouvées dans mon édition tentent une explication :

« On s'est demandé parfois pourquoi la bibliothèque du docteur Faustroll contenait vingt-sept volumes. La réponse est simple, bien que nous ayons erré quelques années avant de la découvrir : les livres pairs sont vingt-sept parce que les écrits que l'Eglise tient pour canoniques sont vingt-sept : ils constituent le Nouveau Testament, la parole de Dieu, une révélation surnaturelle. »

Bien plus étrange encore, nous découvrirons cette science absolue qu'est la 'Pataphysique (l'apostrophe est essentielle et distingue la science de la vulgaire Pataphysique que n'importe quel mortel aurait pu mettre au monde). du jargon de beau parleur, vous direz-vous ?
Sachez encore que la 'Pataphysique dispose d'un manifeste et de définitions très précises. Voici pour vous clouer le bec :

« La 'pataphysique sera surtout la science du particulier... Elle étudiera les lois qui régissent les exceptions ou, moins ambitieusement, décrira un univers que l'on peut voir et que peut-être l'on doit voir à la place du traditionnel, les lois que l'on a cru découvrir de l'univers traditionnel étant des corrélations d'exceptions aussi, quoique plus fréquentes, en tout cas de faits accidentels qui, se réduisant à des exceptions peu exceptionnelles, n'ont même pas l'attrait de la singularité. »

Avec la 'Pataphysique, vous pouvez tout faire, et même calculer la surface de Dieu.

Du mystère en pages. Étrange, bien étrange...
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« Gestes et Opinions du Docteur Faustroll, Pataphysicien » (1980, Gallimard, Idées, 247 p.)
« Siloques, superloques soliloques et interloques de pataphysiques » (2003, le Castor Astral, 96 p.)
Collège de Pataphysique « Anthologie pataphysique : de l'Antiquité à nos jours » (2015, Editions du Sandre, 397 p.)
en voila un trio qui vaut largement le duo du Père et de la Mère Ubu

Souvent, j'ai évoqué la pataphysique. Encore faut-il la définir, comme le fait le Docteur Faustroll « La pataphysique est la science des solutions imaginaires, qui accorde symboliquement aux linéaments les propriétés des objets décrits par leur virtualité ». Pour plus de précisions, on ajoutera à cette définition, celle de Jean Arp dans « un Mouton à quatre tiges » de fin 1964. « J'aime les calculs faux / Car ils donnent des résultats plus justes ». Ceci dit, en adoptant une position moins élitiste « il faut donc bien nécessairement admettre que la foule (en comptant les petits enfants et les femmes) est trop grossière pour comprendre les figures elliptiques, et que ses membres s'accordent dans le consentement dit universel parce qu'ils ne perçoivent que les courbes à un seul foyer, étant plus facile de coïncider en un pont qu'en deux ». Afin d'illustrer cette position, il faut évidemment donner des exemples que les membres de la foule puissent comprendre. « Ils communiquent et s'équilibrent par le bord de leurs ventres, tangentiellement. Or même la foule a appris que l'univers vrai était fait d'ellipses, et les bourgeois mêmes conservent leur vin dans des tonneaux et non des cylindres ». Pendant que le Docteur Faustroll délivre la bonne parole « Au dessous de tout, la chlorophylle, comme un banc de poissons verts, suivait ses courants connus dans les canaux souterrains du chou ». Si ce n'est pas l'illustration de la théorie par des cas concrets, il faut alors se poser la question de la prégnance du Docteur Faustroll.
le Docteur Faustroll est un savant, pour preuve sa bibliothèque qui ne comporte pas moins de « vingt-sept volumes dépareillés, tant brochés que reliés », plus « trois gravures pendues à la muraille ». Il est expulsé de son domicile au 100 bis de la rue Richer, le 8 février 1898 par la mairie du Qe arrondissement qui lui envoie Maître Panmulphe, huissier, le tout pour 11 francs et 30 centimes en sus de la somme de 372000 francs qu'on lui réclame pour onze termes de loyer échus. Faustroll se déplace sur un bateau, qui est en fait « un crible allongé » avec « des mailles assez ouvertes pour laisser passer une grosse épingle », laissant des « trous vides, au nombre approximatif de quinze millions quatre cent mille ». Il est aidé sur son esquif par « Bosse-de-Nage, singe papion, moins cyno- qu'hydrocéphale ». Ce dernier ne sait dire que « Ha ha », et « il n'ajoutait rien d'avantage ». Cette navigation est un clin d'oeil à Rabelais.
Après avoir disserté sur Dieu « Dieu transcendant est trigone et l'âme transcendante théogone, par conséquent pareillement trigone. / Dieu immanent est trièdre et l'âme immanente pareillement trièdre », Jarry termine par un savant calcul de la surface de Dieu, défini comme « ± Dieu est le plus court chemin de 0 à ∞ dans un sens ou dans l'autre ». On remarquera dans cette définition, deux points importants. Dieu possède un prénom qui est « ± ». Cela peut avoir de l'importance lors des diners en ville, suivant les personnes rencontrées. Il convient aussi de signaler que Boris Vian a fait reprendre ces calculs et en déduit la valeur mathématique de Dieu, qu'il publiera dans les « Mémoire concernant le calcul numérique de Dieu par des méthodes simples » (1977, Cymbalum pataphysicum, 14 p.). Ensuite, on adoptera la définition de Dieu par Faustroll « Dieu est le point tangent de zéro et de l'infini ». Cette définition publiée en 1900, a-t-elle hantée les nuits du tout jeune Arthur Koestler, voilà un point de l'histoire littéraire à élucider.
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«Gestes et opinions du docteur Faustroll, pataphysicien peut et doit se lire comme un récit de voyage, la relation d'un long périple qui conduit le savant docteur, expulsé de son domicile, non point vers des pays "imaginaires" mais dans les univers bien réels nés de l'imagination des poètes et des peintres du symbolisme ou de plus loin encore. Des livres, des tableaux, que l'huissier a saisis pour gage de loyers impayés, sont évoqués, insaisissables à jamais, peuplant les îles où le docteur aborde, des êtres, étranges, horrifiques ou séduisants ; ainsi l'impécunieux docteur est riche de toutes les merveilles jaillies de l'art et des rêves des hommes et il converse à chaque escale avec les créatures uniques qui ont le pouvoir de traverser les temps et les mondes.
[...] Qu'on remonte aux origines homériques ou celtiques du récit de voyage, toute errance est quête, apprentissage et appréhension de la connaissance, laquelle ne compte que si elle est absolue. Mais le docteur Faustroll, c'est son originalité, est un Socrate à l'envers ; il ne cesse d'apprendre, et de nous apprendre, qu'il sait déjà tout. Sa mort même ne lui fait rien découvrir puisque, dès sa naissance, qui lui donne aussitôt soixante-trois ans, il est déjà au-delà et en dehors des catégories et des dimensions communes.
L'Amour Absolu raconte l'histoire d'un homme condamné à mort pour avoir tué sa mère après s'être livré avec elle à des relations incestueuses. On constate aussitôt l'absurdité d'un tel "résumé" qui définirait tout aussi bien un roman naturaliste pimenté de situations vaudevillesques et de grivoiserie (ce qui, au demeurant, n'était pas rare dans la littérature fin-de-siècle). L'équation érotique de Jarry n'est pas aussi simple : la femme est à la fois la mère, la maîtresse, la soeur, l'épouse et la Sainte Vierge car le condamné à mort est Dieu et il lui faut vivre, avant que l'aube paraisse, toute sa genèse et sa passion tel Dieu en son Fils.»
Noël Arnaud, Henri Bordillon.
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Voilà une expérience de lecture tout à fait particulière. Un langage obscure avec un lexique riche et rare, un style volontairement hermétique, bien qu'emprunté à l'écriture des notaires, des scientifiques et de Rabelais, une pléiade de références que le lecteur moyen (moi) ignore et qui crée une inflation de notes qui viennent rendre la lecture encore plus difficile, tout semble fait pour entraver le lecteur.

Pourtant on a ce sentiment que le texte qui nous est balancé à la figure constitue une nouveauté nécessaire. Sans rien y comprendre, on prend plaisir à cette lecture et on a le sentiment que quelque chose de limpide est caché sous l'incroyable complexité d'une histoire très simple, qu'une formule mathématique peut nous donner la solution de tout : "Dieu est le point tangent de zéro et de l'infini". le voyage du docteur, de l'huissier et de Bosse-de-Nage, dont le discours constitue l'apogée philosophique du texte ("ha ha"), est le fruit d'un délire raisonné. On entre dans un (ou plusieurs) monde(s) absolument imaginaire(s) et nouveau(x), on rencontre des être drolatiques qui sont en fait des amis de Jarry, paraît-il, on pousse des logiques absurdes jusqu'au bout et on atteint au terme de l'odyssée, car ce roman est aussi une réécriture de L'Odyssée, la vérité.

La quête du pataphysicien, après avoir expérimenté tout et n'importe quoi, aboutit à des formules mathématiques qui permettent de définir la surface de Dieu, de manière certes complètement loufoque, mais sérieuse. C'est à force de n'y comprendre rien qu'on comprend tout. Ne pas comprendre Jarry est donc nécessaire pour le comprendre. Compris ?
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Citations et extraits (14) Voir plus Ajouter une citation
Comme il faisait soir, quand Bosse-de-Nage tira notre as sur le rivage, le roi selon sa coutume attendait la mort et le crapaud bayait, fonctionnellement. Le palais était tendu de noir et l'on avait préparé des chaises longues pour les corps et des philtres afin d'obscurcir la conscience des agonies. Bosse-de-Nage, quoique ne le professant point par une loquacité inconsidérément variée, se piquait d'être déontologue, et se crut obligé de revêtir un habit noir et de couronner son crâne, semblable à une cucurbite malintentionnée, d'un chapeau belge dont les vibrations lumineuses s'accumulaient en longueurs d'onde égales à celles de son costume, et dont la figure simulait la moitié d'un globe défunt.
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Lettre télépathique du docteur Faustroll à Lord Kelvin

« Mon cher confrère,

«l y a longtemps que je ne vous ai donné de mes nouvelles; mais je ne pense pas que vous ayez cru que je fusse mort. La mort n'est que pour les
médiocres. Il est constant néanmoins que je ne suis plus sur la terre. Où, je ne le sais que depuis fort peu de temps. Car nous sommes tous deux de cet
avis que, si l'on peut mesurer ce dont on parle et l'exprimer en nombres, qui sont la seule chose existante, on sait quelque chose de son sujet. Or
jusqu'à maintenant je savais être ailleurs que sur la terre, comme je sais que le quartz est ailleurs, au pays de dureté, et moins honorablement que le
rubis; le rubis que le diamant; le diamant que les callosités postérieures de Bosse-de-Nage.
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La ’pataphysique sera surtout la science du particulier... Elle étudiera les lois qui régissent les exceptions ou, moins ambitieusement, décrira un univers que l’on peut voir et que peut-être l’on doit voir à la place du traditionnel, les lois que l’on a cru découvrir de l’univers traditionnel étant des corrélations d’exceptions aussi, quoique plus fréquentes, en tout cas de faits accidentels qui, se réduisant à des exceptions peu exceptionnelles, n’ont même pas l’attrait de la singularité.
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LE PRÉSIDENT MIGRATEUR

Le Président de la République, à l'instar de l'hirondelle, du martinet, de l'omnibus, du pigeon et du commis-voyageur, accomplit des migrations périodiques.

[...]

Cercle vicieux:

Le Président n'obéit point à la température, mais à la pesanteur.
Il oscille, tel un pendule, de ci et de là avec Paris pour centre.
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Pourquoi chacun affirme-t-il que la forme d’une montre est ronde, ce qui est manifestement faux, puisqu’on lui voit de profil une figure rectangulaire étroite, elliptique de trois quarts, et pourquoi diable n’a-t-on noté sa forme qu’au moment où l’on regarde l’heure ?
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Vidéo de Alfred Jarry
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Quelle pièce de théâtre nous montre le pitre le plus grotesque jamais imaginé dans une étourdissante fête du langage et s'ouvre… sur un gros mot ?
« Ubu Roi » d'Alfred Jarry, c'est à lire en pochez chez Etonnants Classiques.
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