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Fasquelle (01/01/1922)
4.14/5   7 notes
Résumé :
Valeria Messalina fut la troisième épouse de l'empereur romain Claude et donna naissance à Britannicus. Sa conduite scandaleuse et son dévergondage sans borne finirent par provoquer sa perte. Soupçonnée de comploter contre l'empereur, elle fut sommairement exécutée en 48.

L'impératrice Messaline est célèbre pour son appétit sexuel hors du commun, voire sa nymphomanie. La tradition antique unanime colporte à son endroit des récits complaisants et sans... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (1) Ajouter une critique
Alfred Jarry raconte l'histoire de Messaline, la troisième épouse de l'empereur Claude, en nous étourdissant dans un tourbillon de mots. le fond de l'histoire est tirée de Suétone et Tacite mais la manière est érudite voire absconse, à tel point que certains passages, d'une grande poésie, font irrésistiblement penser à du Mallarmé.
Dans ce court récit de Jarry, la vie de Messaline est prétexte à sublimer la sensualité, la recherche d'un plaisir divin en évitant avec brio les écueils libidineux liés à la réputation de nymphomanie de l'impératrice.
L'accumulation de mots oubliés ou inconnus (de moi en tout cas) m'a enivrée pour m'amener à comprendre ce que Jarry ressent de la vie de Messaline : sa recherche de la chair est une recherche du bonheur, auprès du plus beau des romains ou dans les lupanars de Subure. Peu importe que Messaline ait été ou non fidèle à ce portrait, la question ici est le lien étroit qui existe entre des moeurs qu'on qualifie de dissolues et le bonheur. Des siècles de morale, religieuse ou non, ont contribué à éloigner ou au moins à voiler la proximité entre les deux.
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Citations et extraits (4) Ajouter une citation
Messaline - Extrait :
Cette nuit-là, comme beaucoup de nuits, elle descendit de son palais du Palatin à la recherche du Bonheur.
Est-ce véritablement l’impératrice Messaline qui vient de dérober son corps souple à la gloire de soie et de perles de la couche de Claude César, et qui rôde maintenant par la rue obscène du Suburre, à pas de louve ?
Il serait moins inouï que ce fût la Louve même de bronze, la basse et allongée statue étrusque au col tors, aïeule de la Ville, gardienne de la Ville, au pied du Palatin, en face du figuier ruminal où abordèrent Romulus et Rémus, qui ait secoué de sa tétine insensible la lèvre arrondie des jumeaux royaux, ainsi qu’on renonce à une couronne d’or, et qui, après un bond du haut de son piédestal, choisisse un chemin à ses griffes, bruissantes ainsi que la traîne d’une robe trop chamarrée, parmi les tas d’ordures
du faubourg.
Cette forme qui erre avec un froissis de traîne ou de griffes, c’est bien quelque chose comme une bête en chasse, mais que n’accompagne point l’odeur abominable de la louve. A-t-on jamais senti le rut d’une statue ?
Or c’est un monstre plus infâme et plus inassouvi et plus beau que la femelle de métal, qui retourne à sa tanière : la seule femme qui incarne absolument le mot que, bien avant la Ville fondée, dès la première parole latine, on jette à la face des prostituées dans un crachat ou dans un baiser : Lupa, et cette abstraction vivante est un pire prodige que l’âme subitement infuse à une effigie sur un socle. Le plus vieux mythe du Latium renaît dans cette chair de vingt-trois ans : la Louve, nourrice des jumeaux, n’est qu’une figure d’Acca Larentia, déesse tellurique, mère des Lares, la Terre qui enfante la vie, l’épouse de Pan qu’on adore sous l’espèce d’un loup, la prostitution qui a peuplé Rome...
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Le Bonheur, qui habite là, ainsi qu’une inscription en lettres rouges le précise, emplit-il donc toute sa demeure, que son exubérance déborde et soit cette saillie au-dessus de sa porte ?
L’emblème animal et divin, le grand Phallus en bois de figuier est cloué sur le linteau, comme un oiseau de nuit contre une grange ou un dieu au fronton d’un temple. Ses ailes sont deux lanternes de vessie jaune. Sa tête est fardée de vermillon comme la propre face de Jupiter Capitolin.
Au-dessus, lisible dans la clarté des lanternes, la banderole de l’enseigne de toile claquerait au vent si le dieu roide ne l’appliquait entre soi et la muraille qui est son ventre.
En face de l’animal pendu, la catin Auguste, de la chair des empereurs divins, déguisée par un très vaste manteau de pourpre sombre dont chaque pli est une gouttière de ténèbres, dans le noir de son capuchon où sa perruque blonde (Messaline est brune) allume une étoile, plus déesse que la Larentia, a l’air de la Nuit elle-même, évoquée du ciel au sifflant appel de son hibou qui agonise.
Or ce n’est qu’une femme qui s’est aperçue que son mari vient de s’endormir.
Claude César s’est assoupi à force de Vénus, mais...
Est-ce qu’il est permis au mari de Messaline de jamais dormir ?
On est époux de Messaline pendant le moment d’amour, puis encore et toujours à cette condition que l’on puisse vivre une ininterruption de moments d’amour.
Son seul mari est celui qui ne dort pas, et Messaline est venue, dans le costume fauve des courtisanes, chaussée de leurs bottines écarlates comme elle foulerait, à gué sanglant, la vigueur épuisée de Claude, vers celui qui ne dort pas, la bête-dieu, l’Homme toujours debout à droite et à gauche, de qui veillent les deux lanternes.
Elle n’a qu’une suivante, la prostituée professionnelle et insigne qui, dans une joute d’amour prolongée un jour et une nuit la surpassa d’un chiffre, essuyant le vingt-cinquième mâle.
L’impératrice a jugé faire assez humble hommage de gladiateur vaincu en octroyant à celle qui l’a domptée de porter sa traîne à titre d’esclave.
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On était à la fin de l’automne. En conséquence, pour moquer le mesquin tour de rôle des saisons, symbole de l’unité successive des maris selon le préjugé, elle n’imagina rien de mieux que de gonfler quand même la pulpe ridée des raisins feus, et de donner, sur la joue du palais impérial, un simulacre de vendanges en l’honneur de son mariage de ce jour-là et de Bacchus, pupille de Priape.

Au milieu d’ormeaux en caisses, arqués sous les grappes ensachées, et de la danse et du chant d’esclaves maquillées en Bacchantes, au gémissement, jusqu’au sang, des pressoirs et au bouillonnement des cuves, le couple nuptial, en déshabillé de peaux de boucs et Messaline cheveux épars et secouant un thyrse, sentit l’encens du vin baiser ses cothurnes, puis enfumer sa tête jusqu’à ce que tout prît pour eux l’allure désordonnée d’une ronde, comme les dieux se réjouissent au tournoiement des soleils.

Et cette gyration d’hommes, plus confuse que l’écrasement des raisins, c’était le monde de tous les anciens amants de la nouvelle mariée, depuis Mnester en Pan, vêtu d’une peau de loup, jusqu’au prostitué Césoninus, en Bacchus couronné, imberbe, coiffé d’une calotte de lierre, et de qui Messaline avait jadis voulu se prouver le mâle...

Tous, sauf leur doyen, Narcisse, qui s’était abstenu par une jalousie tardive et subite, l’acte nuptial seulement alors apparu réel, parce qu’écrit, à sa nature de secrétaire.
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La maintes fois meurtrière laissait grâce dans son cœur, assez infini pour la générosité, à tous les amours passés, et ne reconnaissait au veuvage que cette commodité de calendrier, flétrie par Sénèque, de pouvoir dater des différents maris et non des consulats. Car si une femme, qui apprend par son sexe, est capable de se souvenir du nom de ses époux, elle n’est pas informée de tous les consuls : il y en a qui sont morts, ou loin, ou eunuques, et ils sont tous doubles.

Et elle se persuada en si absolue sincérité que l’amant de la minute présente était son légitime mari, qu’elle prit des dispositions pour célébrer de même sorte, dans l’ordre de ses futurs amours, mais sans renoncer aux antérieurs époux, une pluralité de justes et indissolubles noces.
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Quelle pièce de théâtre nous montre le pitre le plus grotesque jamais imaginé dans une étourdissante fête du langage et s'ouvre… sur un gros mot ?
« Ubu Roi » d'Alfred Jarry, c'est à lire en pochez chez Etonnants Classiques.
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