AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
EAN : 9782021022483
168 pages
Seuil (04/03/2010)
3.2/5   172 notes
Résumé :
Je l'ai rencontré un soir de printemps. Je suis devenue sa maîtresse. Il m'a initiée au maniement des armes. Il m'a fait cadeau d'un revolver. Je l'ai abattu d'une balle entre les deux yeux.
Que lire après SévèreVoir plus
Critiques, Analyses et Avis (34) Voir plus Ajouter une critique
3,2

sur 172 notes
Une liaison sado-masochiste entre un "prince de la finance et sa putain" (sic). Relation sulfureuse à souhait, puisque les rôles de domination/soumission ne se limitent pas aux jeux sexuels. L'homme est richissime, donc tout-puissant (il manipule les ministres à l'envi), tyrannique, sadique avec tous, sans scrupules, sans tabous. Il jouit d'humilier, mais aussi d'être maltraité lorsqu'il le décide, et de frôler la mort de très près. C'est sa maîtresse qui domine lors de leurs "séances", mais c'est toujours lui qui fixe les règles.

Si le "maître" se révèle aussi répugnant que pitoyable, la jeune femme paraît en revanche attachante et paumée. Son témoignage suscite bien des questions. Amour ou vénalité de sa part ? Besoin de se sentir indispensable à un homme, indubitablement. Sexe ? oui, du tendre (très rarement) au plus dérangeant (principalement). Argent, pouvoir et perversité par-dessus tout... Quid du mari ? lui aussi pervers ? ou lâche et veule ?

Régis Jauffret s'est inspiré pour écrire ce roman de l'affaire "Edouard Stern". Cette fiction est l'occasion pour le lecteur de prendre conscience de son propre voyeurisme. de sa jubilation malsaine à se repaître de sordide et de détails indécents, de son plaisir mesquin à voir un riche/puissant tomber, traîné dans la boue, victime de sa sexualité (cf. DSK).

Malgré le sentiment de malaise qui ne m'a pas quittée, j'ai dévoré ce roman. Ceci notamment grâce à une plume précise qui va à l'essentiel, au fond de la fange, sans exhibitionnisme pour autant.

--- Régis Jauffret, un auteur que j'ai envie de découvrir davantage.
Commenter  J’apprécie          335
Ça faisait un petit moment que je passais devant les romans de Régis Jauffret, et qu'à chaque fois, au moment de l'acheter...Hop! Il se faisait griller la place par un(e) autre auteur(e).
Depuis, ça y est. J'en ai un en ma possession. Il a rejoint illico, ses compagnons d'écriture dans ma biblio. Ma mission, depuis, c'était le lire, mais au moment de le saisir...Hop!.....
Depuis, Trois jours, le cap est franchi, la rencontre à eu lieu ; et c'est avec une grande joie que je lui décerne mon prix : 4 étoiles Babelio.
Clap! Clap! Clap!...
(Mais afin de le lire, fallait-il déjà qu'il l'écrive)...
___ ___ ___
_ Salut kiki! Tu sais l'histoire dont je t'ai parlé l'autre jour, celle sur laquelle j'aurais bien écrit un truc... Bah, ça y est, enfin...c'est pratiquement fini.
*Ah ouais, t'as pas traîné ! Cool! Et alors ?
_ T'as pas ça toi, qu'est super bon...
*Attend ! attend ! Essaye pas de me flatter, t'as quoi derrière la tête ?
_ Rien, j'te jure, je le pense..
*Tu le pense ? Mouais... après tout, c'est plutôt vrai :-)) bon, vas-y...accouche.
_ T'as pas une idée de titre ?
*Aahh..ok.. voyons voir...
La femme, le mari, l'amant.
_ non... trop sobre.
La tueuse, le mari, l'amant ?
_ Trop polar.
L'élève, le mari, le maître ?
_ Trop scolaire.
L'objet, le mari, le dominateur.
_ non, c'est nul, ça sonne pas !
La putain, le cocu et le banquier.
_ Trop Dorcel.
La belle, le soumis et l'autre ordure...
_ Non, tu t'énerves là, j'vois bien. Laisse tomber...
*Tiens écoute... j'en ai un qui claque là ... : SÉVÈRE.
_ Pwouaow!! Ça c'est bon !
Ça ne dis rien, mais ça interpelle.
Ça annonce la couleur sans donner de direction.
C'est mystérieux et inquiétant.
Quoi...qui est sévère ? L'homme..la femme..la vie ???
Merci kiki, j'ai mon titre...Yes!
Faudrait une petite accroche maintenant...
*Dis que ça parle d'amour et de haine.
_ Plutôt banal, non?
*Rajoute : pouvoir et humiliation.
_ Tu crois ?
*Bien sûr, et il faut qu'il y ait le mot SEXE, écrit quelque part. Ne pas négliger ça...
_ T'a raison kiki, sexe, ça marche tout le temps... quelle bande de malades tout de même...
Je parlerais aussi d'une maîtresse et son amant, dans la quatrième de couv.
*Tu vois, tu piges vite... parle de flingue aussi. Tu grapilleras toujours deux, trois psychopathes de plus. le polar ça marche pas mal.
_ Bon, si avec tout ça
*Pop,pop,pop,pop!!!! Pas si vite mon petit Régis...
Tu veux pas un dernier tuyau ?
Attention, Il est de taille... Mais là, t'accroches direct les médias, les critiques, les vautours...
On va en parler de ton bouquin, crois-moi !
_ Je t'écoute...
*Tu lui colle un p'tit bandeau à ton bouquin, et dessus, t'inscris : "LE PUISSANT BANQUIER, ÉDOUARD STERN, RETROUVÉ MORT DANS UNE CHAMBRE D'HÔTEL, DANS UNE TENUE DE LATEX ROSE. SA MAÎTRESSE ET MEURTRIÈRE, PASSE AUX AVEUX. VOICI LEUR HISTOIRE".
_Oulala!!! T'es taré ou quoi ?
Tu veux que je finisse sur la paille à coups de procès ? Mieux... que j'me prenne une bastos en pleine tête ?
Ils sont dangereux ces mecs là... même morts.
Non, je prendrai pas ce risque.
*Dis que c'était juste ta base d'inspiration alors... que tu t'es laissé aller sur les perversions et la nature de leur relation...
_ Humm...je préfère. Ça peut m'éviter des embrouilles.
Faut que tu comprennes kiki, ce gars là, il était ce qu'il était, mais maintenant qu'il s'est fait refroidir, dans la tête des gens, il est devenu la victime. Tu comprends ?
*Je comprends surtout que tu baisses ton froc ! Tu veux faire du Musso? Ah, ah, Mr Grimaldi...
_ T'es con quand tu t'y mets !
*Écoute...je traîne souvent sur un site dédié à la lecture...Babelio...tu connais ?
_ Non.
*Ça m'étonne pas, passons...
Sur ce site, t'as moyen de laisser un avis sur une lecture qui t'a touché, ou même un livre que t'as pas aimé d'ailleurs. C'est un moyen d'échanger sur des coups de coeur, de gueule, ou des impressions, enfin bref, y'a des mordus(es) littérature qui viennent te lire. Bon, pour être honnête avec toi, je fais pas partie des plus lu, et j'échange que très peu, mais ceux qui me lisent, c'est pas des marioles, tu vois ?
Je toucherai deux mots de ton livre dans un de mes billets, avec un coup de bol, t'auras peut-être un effet bouches à oreilles...tu saisis ?
_Ok, de toute façon, ça coûte rien d'essayer...
*Voilà ! Et pour en revenir sur l' apitoiement des gens sur "ta" sois-disante "victime", je toucherai un mot également sur ces parties de chasse aux loups, oryx, hippopos et même éléphants.
Putain ! Un mec qui bousille un éléphant... Je vais pas m'apitoyer sur son sort, moi. Quoi qu'il lui arrive... Rien à foutre de sa gueule !...
Et la plus part des gens, il digère pas si tu touches à un éléphant. C'est comme ça, on en voit jamais, mais il sont dans le coeur des gens. Cherche pas... c'est bien comme ça.
J'aurais même pas besoin de parler des fox-terrier qu'il achetait dans les refuges pour tester ses mines anti-perso dans son parc du Val de Loire.
Quelle grosse merde!
Bref...et raconte l'histoire en te mettant dans la peau de son assassin..."elle".
Parle du mépris qu'il avait du monde, parle de sa maîtresse amoureuse, maso-préfabriquée, joujou qu'on écrase.
De mon côté, j'en rajouterai une couche, sur ces parasites pervers, à qui tout le monde mange dans la main, politiques de tout pays, comme lambdas. Je ferai le lien avec lui et la sympathie que m'inspire un Elon Musk, un Trump, ou un Émir du Qatar, entre autres.
Je préciserai aussi que t'as mis une part de fiction dans cette histoire, et que je n'en connais pas le pourcentage. Comme ça, tu seras dédouaner. Tu pourrais même faire une petite préface dans ce sens. On est jamais trop prudent.
Tu vois Régis, c'est pas le bouquin du siècle que t'as pondu là, mais il fait réagir, et puis, ton style est plutôt cool.
Ah! Une dernière chose... Ça te dérange si j'ajoute que t'aime bien fouiller dans la merde, comme même...
_ Pffff ! C'est une chouette image de moi, que tu vas véhiculer ! Sympa ! Bien, après-tout, c'est sûrement un peu vrai... allez, vas-y !
* Bon, je bouge. À plus Régis ! Je vais poster ça sur le site...bye!
_Bye!




*








Commenter  J’apprécie          94

Je m'étais montré dithyrambique à la lecture des 500 nouvelles de “Microfictions”, si controversées.
Il faut dire que Jauffret aime saupoudrer dans sa narration un humour (mais en est-ce ?) sardonique, sulfureux et acide.

Dans ce court livre narrant l'histoire d'un crime commis par une femme prise dans une relation sado-masochiste avec un homme riche, c'est du Jauffret pur jus.
Du sarcasme à souhait, jouant sur le fil entre le fait divers et l'invention : “Dans ce livre, je m'enfonce dans un crime. Je le visite, je le photographie, je le filme, je l'enregistre, je le mixe, je le falsifie. Je suis romancier, je mens comme un meurtrier.”

Avec Jauffret, il faut pouvoir respirer, lire à petits pas, comme j'ai pu le faire entre deux nouvelles calibrées d'une page et demie.
Avec ce roman, j'ai été un peu noyé, comme un plongeur en apnée qui ne peut rejoindre la surface.

Mais je sais qu'il existe un deuxième tome de “Microfictions” …
Commenter  J’apprécie          230
"Je l'ai rencontré un soir de printemps. Je suis devenue sa maîtresse. Il m'a initiée au maniement des armes. Il m'a fait cadeau d'un revolver. Je l'ai abattu d'une balle entre les deux yeux."

Cette sécheresse, pas un mot de trop, ce ton froid, définitif, m'ont donné envie d'aller voir un peu plus loin.

J'ouvre le livre de Jauffret et je tombe sur le préambule. (J'avoue, j'aime pas tellement les préambules, et autres introductions..., ils m'empêchent de rentrer dans ma lecture aussi vite que je le voudrais.) Bon, je lis le préambule... je cite :

"Je suis romancier, je mens comme un meurtrier. Je ne respecte ni vivants, ni morts, ni leur réputation, ni la morale. Surtout pas la morale. Ecrite par des bourgeois conformistes qui rêvent de médailles et de petits châteaux, la littérature est voyou. Elle avance, elle détruit."

"Je suis brave homme, vous pourriez me confier votre chat, mais l'écriture est une arme dont j'aime à me servir dans la foule. D'ailleurs quand vous lui aurez appris à lire, elle tuera tout aussi bien votre chat."

"Ne croyez pas que cette histoire est réelle, c'est moi qui l'ait inventée. Si certains s'y reconnaissent, qu'ils se fassent couler un bain. La tête sous l'eau, ils entendront leur coeur battre. Les phrases n'en ont pas. Ils seraient fous ceux qui se croiraient emprisonnés dans un livre."

Et bien, quel programme ! Alors, après ça, je suis allée vérifier, plus avant dans le livre ; voir si Jauffret était un maître de la provocation, si cette annonce n'était qu'un bel effet de manche, si l'arme dont il nous menace n'était qu'un pétard mouillé.

"Sévère", l'histoire d'un meurtre, une femme tue son amant, elle raconte, depuis la cellule où elle est emprisonnée, cette "généalogie" du crime.Elle replace les pièces du puzzle pour nous, ou pour elle ; comment elle est devenue la "secrétaire sexuelle" d'un homme riche, puissant, et malade. Malade de l'argent, de la violence, du pouvoir. Malade dans son rapport aux autres, qui n'existent que pour être achetés, vendus, humiliés, réifiés. Malade enfin dans son rapport à lui-même, à son corps, à ses peurs d'enfant.

Partant d'un fait divers réel : l'assassinat du banquier suisse Stern en 2005, Jauffret met des mots sur l'indicible de cette histoire. le fait divers ne compte pas - il a raison de le dire dans le préambule : "Ne croyez pas que cette histoire est réelle, c'est moi qui l'ai inventée" -, Jauffret tend à l'universel, l'exemplarité ; comment la société broie les êtres, comment le rouleau compresseur fonctionne si bien sur nous.

"Ne croyez pas que cette histoire est réelle"... L'écrivain ment comme un meurtrier. Il manipule aussi. C'est tout le malaise que l'on ressent à la fin du livre. Qu'a-t-il fait de nous - lecteurs - pendant ces quelques pages ? Il nous a fait voyeurs, haletants jusqu'au dénouement pour quelques détails sordides. Il nous a rendus complices de cette époque de banquiers, de négociateurs, qui transforment les corps en métal.

"Sévère", c'est elle, c'est le système dans lequel nous rampons, grave et austère, qui n'a le droit ni à la chute ni à la faiblesse, et qui pourtant nous y réduit.
Commenter  J’apprécie          81
Une liaison sadomasochiste et sulfureuse unit, depuis quatre ans, un prince de la finance et un prostituée de luxe. Si la femme soumise est souvent le jouet sexuel du richissime homme d'affaires, parfois les rôles s'inversent : le tout-puissant homme jouit aussi d'être humilié, maltraité, enveloppé dans une combinaison en latex et de se faire violer la bouche par un revolver chargé. Sa vie comporte si peu de soucis qu'il a besoin d'adrénaline. Il joue avec le danger, avec la mort. Il chasse l'éléphant en Afrique et baise avec une femme potentiellement dangereuse à qui pourtant il offre un revolver, qu'ils utilisent dans leurs jeux sexuels. C'est un piètre homme, au fond. Il utilise ses petits pouvoirs pour diriger le monde, et se sent puissant de butter de gros mammifères. En dehors de ça, le vide, à part sa maîtresse, sa « secrétaire sexuelle », une femme paumee et vénale, qui l'aime au fond, mais d'un amour de folle. Elle lui demande de l'épouser, il refuse. Elle lui demande un million de dollars à la place, parce que ça vaut bien un mariage, parce qu'elle lui a donné son corps entier, et tout son être. Cela vaut bien un million de dollars, non ? Ce ne serait qu'une preuve d'amour. C'est si peu d'argent, après tout, pour un multi milliardaire. C'est comme se couper une mèche de cheveux et l'offrir à l'être aimé, lui faire un virement d'un million, exactement pareil. Un symbole sacré, seulement ça. La preuve : elle ne l'aurait même pas utilisé, cet argent. Elle le voulait comme une relique. D'ailleurs, ne paye-t-il pas des oeuvres d'art une petite fortune ? Elle est son oeuvre en art, sa plus belle. Elle mérite la dépense. Aucun tableau ne l'a fait ejaculer comme elle peut le faire. L'amant hésite, elle lui fait du chantage, refuse de le voir. Il cède par faiblesse : il s'est accoutumé à la présence de sa putain, et surtout à pouvoir disposer d'une femme dont il peut jouir à sa guise. Il lui fait un virement puis se rétracte, et reprend le million : « C'est cher payé pour une putain! ».

Vexation, amertume, dépit, haine. Elle songe à le faire chanter. N'a-t-elle pas des photos de lui très compromettantes ? Et puis non, finalement. Ne pas se venger ainsi. Alors, elle lui enfile la combinaison de latex, et au cours d'une séance sadomasochiste, elle tire sur lui à bout portant. Les dernières balles, c'est pour l'achever. Elle a appris ça de lui : on ne laisse pas un animal agoniser, c'est cruel. Elle l'aime, alors elle abrège ses souffrances. Voilà.

Le roman commence après le meurtre. Elle réécrit l'histoire depuis sa prison, commençant par les coups de feu tirés dans la combinaison en latex. S'il avait été face à elle, visage découvert, elle n'aurait jamais pu tirer. Elle l'aime ! Alors elle l'a habillé avant. C'était comme tirer dans une poupée en latex. Ensuite la fuite, puis les interrogatoires de la police, l'hôpital psychiatrique et enfin la prison. C'est tout.

Lui, c'est Édouard Stern. Regis Jauffret n'a rien inventé. Il a lu le fait divers, et l'idée de le réécrire du point de vue de la meurtrière lui a plu. C'est un roman pour voyeuristes, assurément. On y trouve tout ce qui fascine : le pouvoir, l'argent, les perversions sexuelles, la perversité, la convoitise, la violence, la folie, la transgression. On le lit comme on regarde par la vitre de la voiture lorsque l'on dépasse un accident de la route. On voudrait bien voir, peut-être un corps, une main arrachée, un peu de sordide. C'est un brin malsain et surtout sans intérêt, et pourtant on ne peut guère s'en empêcher.

Cependant, en art, le sordide et l'indécence doivent avoir un but, une finalité étudiée, autrement c'est juste une suite de trash dont le lecteur se blase. C'est presque gratuit, à moins d'avoir le goût également des histoires à la DSK : jouir de la chute d'un homme puissant, victime de sa sexualité. Je suppose que ça conforte le lecteur dans sa moraline : Ah ! Il l'a bien cherché !

Hey oui. Sans doute l'a-t-il cherché, d'ailleurs. Pourquoi pas ? Il n'ignorait pas qu'elle était dérangée et qu'elle tenait à ce million. Il s'est cependant laissé attacher, sachant qu'elle possédait un flingue. C'est lui-même qui lui avait offert et appris à s'en servir ! Il aurait pu aussi bien se tuer lors de l'une de ses partie de chasse, où se faire descendre par l'un de ses nombreux ennemis. Aimer le danger et le frôler, c'est aussi ne pas ignorer qu'on peut y laisser sa vie.

Et après ? Se prendre une balle en érection, n'est-ce pas une belle façon de crever ? À moins que l'excitation sexuelle lui ait fait oublier tout ça, et perdre toute rationalité. Possible aussi. Un homme qui bande ne réfléchit pas. Mais alors, pourquoi ne pas l'écrire ? Choisir une hypothèse, la développer, tenter d'expliquer.

La préface était prometteuse, pourtant : « Je suis romancier [...] , je ne respecte ni vivants ni morts ni leur réputation, ni la morale. Surtout pas la morale », mais l'ensemble est décevant. le support n'est pas sans intérêt, au fond : lui est assoiffé de pouvoir, d'argent, de violence et de sexe . Et elle, elle est étrangement cinglée. Deux être psychiquement torturés et hors normes, en somme. Une analyse psychologique pertinente et profonde aurait pu engendrer un chef-d'oeuvre. Mais non, c'est plat. Ça se contente de décrire, ça n'explique rien. Aucun processus logique (car même les fous ont une logique) n'est explicité. Jauffret a sans doute cru se montrer audacieux, en donnant à voir le cul, le revolver dressé comme une bite dans des parties fines et scandaleuses. Il s'est trompé : c'est facile à faire, ça. La vraie audace aurait été de se lancer dans une analyse pertinente, de creuser, d'oser la dimension psychologique intelligente, le grand recul. Non. Trop compliqué, ça. Et moins vendeur. Sans doute.
Commenter  J’apprécie          10

Citations et extraits (31) Voir plus Ajouter une citation
PRÉAMBULE
La fiction éclaire comme une torche, Un crime demeurera toujours obscur. On arrête le coupable, on découvre son mobile, on le juge, on le condamne, et malgré tout demeure l'ombre, comme l'obscurité dans la cave d'une maison illuminée de soleil. L'imagination est un outil de connaissance, elle regarde de loin, elle plonge dans les détails comme si elle voulait explorer les atomes, elle triture le réel, elle l'étire jusqu'à la rupture, elle l'emporte avec elle dans ses déductions remplies d'axiomes qui par nature ne seront jamais démontrés.
Oui, mais la fiction ment. Elle comble les interstices d'imaginaire, de ragots, de diffamations qu'elle invente au fur et à mesure pour faire avancer le récit à coups de schlague. Elle est née de mauvaise foi, comme d'autres naissent bleus ou complètement idiots. D'ailleurs, elle est souvent bête, Quand la logique ralentit sa course, elle sait sauter l'intelligence comme un obstacle.
Commenter  J’apprécie          120
Je l'ai rencontré un soir de printemps. Je suis devenue sa maîtresse.Je lui ai offert la combinaison en latex qu'il portait le jour de sa mort.Je lui ai servi de secrétaire sexuelle. Il m'a initiée au maniement des armes.Il m'a fait cadeau d'un revolver. Je lui ai extorqué un million de dollars. Il me l'a repris.Je l'ai abattu d'une balle entre les deux yeux. Il est tombé de la chaise où je l'avais attaché. Il respirait encore. Je l'ai achevé. Je suis allée prendre une douche. J'ai ramassé les douilles. Je les ai mises dans mon sac avec le revolver. J'ai claqué la porte de l'appartement...
Commenter  J’apprécie          110
J'ai été proche des hommes riches, ils me rassuraient. L'argent sent bon, ces types dégagent un parfum de banque d'affaires, de marbre rose, de tableaux de maître, de salons vastes comme un parvis, de lits frais dont chaque jour le personnel change les draps, de piscine chaude, fumante, surplombant la ville dans l'air glacé de décembre. Et les senteurs de kérosène dont on perçoit furtivement les effluves quand le jet s'arrache au tarmac, du cuir des berlines, et des dressings spacieux comme des boutiques, aux étagères chargées de cachemire, aux costumes de flanelle dans leur housse, aux chaussures italiennes bâties autour des répliques en plâtre de leurs pieds afin de ne pas les épuiser en séances d'essayage. Une odeur plus irrésistible encore que celle des phéromones qui précipitent de parfaits inconnus dans les bras l'un de l'autre.
(p. 20)
Commenter  J’apprécie          60
J'ai commencé à pleurer. Les larmes jouaient un rôle important dans sa vie. Celles qu'il versait lui faisaient retrouver ce fantasme d'enfant maltraité par sa mère. Une excitation étrange, au-delà du désir de souffrance, de domination. Quand il basculait dans ce gouffre, il ne recherchait même plus de contact sexuel. Son sexe se rétractait, comme si il cherchait lui aussi à remonter jusqu'au début des années 1960 quand sa mère le douchait à l'eau froide dans la vielle baignoire peinte de l’hôtel particulier de Neuilly. Un rêve dont il jouissait infiniment quand il était éveillé. Un cauchemar qui le réveillait la nuit.
Commenter  J’apprécie          40
Le corps a été transporté au laboratoire de la police scientifique. Le médecin légiste a raconté à l'audience qu'il avait découpé le latex avec un cutter.
_J'ai eu l'impression de le démouler.
La cagoule avait empêché la tête de voler en éclats. Le thanatopracteur n'a eu qu'à boucher le trou qui perçait son front. On a pu l'exposer, et faire son éloge funèbre devant la dépouille.
Comme si les victimes étaient toujours innocentes. Comme s'il était juste de subir des années de prison pour un geste aussi fugace....
... je l'ai soulagé d'une vie brillante et noire comme la laque de son catafalque. Une vie de prédateur, dont le cynisme faisait l'admiration de la presse économique prompte à s'agenouiller devant les crapules qui engraissent leur capital de spéculations, comme les paysans d'autrefois, leur cochon d'ordures.
Si on jugeait les victimes, on les condamnerait souvent à des sanctions plus lourdes que leur assassins.
On rétablirait pour eux, la peine de mort dont leur meurtrier les a châtiés.
Commenter  J’apprécie          20

Videos de Régis Jauffret (64) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Régis Jauffret
Augustin Trapenard accueille Tatiana de Rosnay pour "Poussière blonde", roman qui raconte la rencontre entre une femme de chambre et Marilyn Monroe, paru chez Albin Michel. A ses côtés, Sonia Kronlund présente "L'Homme aux mille visages", l'histoire d'une extraordinaire imposture éditée chez Grasset, François Garde évoque "Mon oncle d'Australie", paru chez Grasset. Régis Jauffret publie, lui, "Dans le ventre de Klara", aux éditions Récamier, et Julia Malye, âgée d'à peine 18 ans, présente son premier roman, "La Louisiane", paru chez Stock.
autres livres classés : faits diversVoir plus
Les plus populaires : Littérature française Voir plus



Lecteurs (350) Voir plus



Quiz Voir plus

Retrouvez le bon adjectif dans le titre - (6 - polars et thrillers )

Roger-Jon Ellory : " **** le silence"

seul
profond
terrible
intense

20 questions
2816 lecteurs ont répondu
Thèmes : littérature , thriller , romans policiers et polarsCréer un quiz sur ce livre

{* *} .._..