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Critique de florence0805


Elle et Lui racontent leur histoire à tour de rôle. Elle, c'est Jeannette, fille d'Almanda et de Thomas, découverts dans Kukum. Lui, c'est Michel, son petit fils .
Jeannette, de son vrai nom Shashuan Pileshisk (Hirondelle, en français) se remémore son enfance ; elle raconte sa fascination pour le Lac Pekuakumi (Saint-Jean en français) ; les longs voyages, à la fin de l'été, vers les territoires de chasse : l'organisation minutieuse avant le départ, puis la remontée du Lac et des rivières en canoë, les longues marches à travers bois avec de lourdes charges sur le dos, la faim parfois dévorante et l'entraide bien présente, les veillées et les histoires fascinantes de son grand-père autour du feu. Mais le coup de foudre pour un jeune homme vivant chez les blancs la pousse à suivre le chemin inverse de sa mère Almanda, Irlandaise qui avait adopté le mode de vie des Innus en épousant Thomas. Son mariage conduit Jeannette à quitter les siens. Pourtant à la fin de sa vie, l'Hirondelle choisit de revenir à Mashteuiatsh (Pointe Bleue en français).
Michel se rend aux funérailles de Jeannette, qui vient de mourir à l'âge de 100 ans. En remontant le temps, il cherche à comprendre comment le choix de vie effectué par sa grand-mère a déterminé la vie de toute sa descendance, implantée dans le monde des Blancs. Il a fallu qu'une autre Jeannette, nièce de celle qui vient de décéder, lui souffle : « Michel, l'Indien, tu l'as en toi » pour qu'il perçoive que ses racines Innus font bien partie de son ADN. Au fil de ses souvenirs, l'identité de Michel se construit ; et c'est avec émotion que le lecteur assiste à son évolution au fil du roman, à la réappropriation de son identité autochtone.
Mais au-delà de l'histoire familiale, c'est toute l'histoire du peuple Innu que Michel raconte, l'histoire volée, qu'on ne lui a jamais enseignée à l'école : « Je ne connais rien de l'histoire des Innus. On ne m'en a rien dit à l'école. On m'a parlé des Grecs et des Romains ». Sur un ton dépourvu de rancoeur, Michel nous bouleverse lorsqu'il raconte les humiliations vécues à l'école ou le racisme rencontré dans sa vie professionnelle.
La construction du roman est tout simplement époustouflante, car les chapitres se répondent : en évoquant les souvenirs de sa grand-mère, Michel se rend compte à quel point elle et ses ancêtres lui ont transmis leur amour de la nature : « J'ai toujours aimé la forêt. Je m'y sens bien. »
D'Elle à Lui Michel Jean restitue à la fois son parcours personnel et les savoirs ancestraux, dans sa très belle langue à la puissance évocatrice et où chaque mot est pesé.
Tout me semble résumé dans cette très belle phrase énoncée par Michel Jean lors du Festival America : « Si nous on raconte pas nos histoires, qui va le faire à notre place ? »

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