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4,43

sur 1109 notes

Critiques filtrées sur 5 étoiles  
Attention , pour découvrir cette merveilleuse friandise , il vous faut , allumer un bon feu dans votre cheminée , enfiler vos " charentaises " , vous enrouler dans un plaid bien doux sur votre canapé, prévoir un bon thé bien chaud et , surtout , surtout , couper votre téléphone et fermer votre porte à clé....Ca y est ?
Et bien voilà , vous êtes maintenant au Québec , en 1977, prés de l'immense lac de Pekuakami , dans la tribu nomade des derniers représentants des Innus .Capturée ? Mais non , bien que " blanche " ,vous avez épousé Thomas , un jeune Innui et , abandonnant une culture qui vous " contraignait " trop , vous avez choisi de le suivre sur les chemins de la liberté , au milieu des eaux lacustres , au milieu des bois et forêts , traversant les ronciers , affrontant les rigueurs de l'hiver ( Bon , pour ça , je vous ai aidée ) et même certains gros animaux ...
Regardée avec un certain doute au début ,vous observez , vous apprenez , vous respectez , vous aimez .....on vous respecte , on vous aime .
Quelle vie que celle de KUKUM ! Tout est difficile , la chasse , le travail des peaux , le transport des canoës , l'enfantement , et pourtant le bonheur et la joie de vivre inondent ces pages , les drames aussi , du reste , mais à la fin de cette lecture , on ne retient que ce que nous avons sans doute perdu en grande partie aujourd'hui , la douceur du respect , de la solidarité ,de l'amour ,de la simplicité , de la vie où la nature reine punit si on la maltraite et protège quand on s'adresse à elle avec retenue .
Il fait froid , trés froid dehors mais chaud , trés chaud dans les coeurs .Tout est beau dans ce récit lent , poétique , ce roman du " cercle de la vie "où la mort , comme celle de Malek , par exemple ,n'est vécue que comme un passage de témoin , un acte naturel même s'il est douloureux .
Sans doute ceux et celles qui adorent quand " ça bouge " se sentiront - ils un peu frustrés . Attention , la route et longue et il convient de savourer le chemin des hommes avant qu'il ne devienne , progrés oblige , chemin de fer , emportant avec lui des modes de vie désormais révolus ... détruits honteusement par des politiques et une société avides de " normalisation " et de profits ...
Pensez à boire votre thé , s'il est encore chaud , ou tiède ....Et vous allez voir , vous allez , aprés avoir tourné la dernière page , avoir envie de " retourner " chez Almanda , pensive et bien pelotonnée dans votre plaid .
Un trés bon moment en perspective , c'est mon point de vue mais ...vous n'êtes pas obligés de me croire .
A bientôt .
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Quel magnifique roman ! Tant sur la forme que sur le fond, c'est un sans faute. Un petit bijou que je serai bien contente de pouvoir partager avec mes enfants lorsqu'ils seront plus grands.

Je félicite tout d'abord les éditions Dépaysage pour leur ouvrage qui est tout simplement sublime : une couverture sobre mais accueillante, un petit format carré qui tient bien en main et une mise en page légère. Un pur instant de plaisir qu'ils ont bien voulu m'offrir via une Masse critique, et je les en remercie.

Même si le travail sur la couverture et la mise en page du livre est indispensable, nous savons bien qu'il est peu de chose face aux mots qui forment le récit. Mais il se trouve que Kukum n'est pas simplement un beau livre, il est surtout passionnant en tous points.

D'abord parce qu'il nous invite à un voyage, à la fois temporel et géographique, sur le Nitassinan (territoire Innu du Québec) à la fin du XIXème siècle. J'ai appris beaucoup de choses sur la vie des Indiens du Québec, leurs coutumes, leur artisanat (panier en écorce de bouleau, mitaines perlées...), leur mode de vie (chasse, tannage de peau...), leur langue aussi que j'ai trouvée extrêmement poétique et douce. La nature a une place essentielle dans ce roman, comme elle en avait une dans la vie des Innus. J'ai beaucoup aimé lire sur la vie en forêt, sur la remontée de la rivière Péribonka, sur le lien si fort qui unissait les hommes, les animaux et la nature.

La sédentarisation forcée de ce peuple Indien est au coeur du récit. Étant donné que cette transformation ne s'est pas faite sans heurts ni traumatismes, tant pour les Innus que pour la nature dans laquelle ils vivaient, on pourrait craindre un ton nostalgique, voire même carrément noir, ça n'aurait rien eu d'étonnant. Eh bien non. Michel Jean a choisi d'adopter un ton plutôt optimiste, à l'image du peuple Innu si bienveillant et accueillant. Et c'est aussi ce qui fait la force du récit.

On ne peut que s'attacher à Almanda, la kukum de l'histoire (la grand-mère en innu-aimun). Il émane des personnages une grande force et une belle sensibilité, tant vis à vis de la nature que des êtres humains, même s'il s'agit de colons blancs venus leur prendre leurs enfants. Il est intéressant de savoir qu'Almanda a réellement existé, Michel Jean racontant en fait l'histoire de son arrière-arrière grand-mère, d'origine irlandaise.

Bref, je vais m'arrêter là, ne voulant pas risquer de vous perdre. J'espère vous avoir donné le goût de suivre mes pas vers Almanda et les siens.
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Voilà un livre qui m'est allé droit au coeur, qui m'a émue de la première page à la dernière et m'a fait pleurer à plusieurs reprises.

L'histoire, racontée  à la première personne  par Almanda, peut sembler simple :

Almanda, une orpheline de quinze ans, née à la fin du 19ème siècle, n'hésite pas à quitter une vie de fermière pour épouser un jeune chasseur innu, membre des premières nations canadiennes, et courir les bois avec lui.

"J'ai grandi dans un monde immobile où les quatre saisons décidaient de l'ordre des choses. Un univers de lenteur où le salut dépendait d'un bout de terre qu'il fallait travailler sans cesse." (p17)

"Vivre à la ferme relève du sacerdoce. Les agriculteurs s'imaginent que leur terre les protège de la sauvagerie. En réalité, elle en fait des esclaves." (p23)

Il m'arrivait encore de penser de temps en temps à ma tante et à mon oncle. Chaque heure du jour, où que je soit, quoique je fasse, je savais où ils étaient et ce qu'ils faisaient. En choisissant la vie en territoire, j'avais choisi la liberté. Certes, celle-ci avait un coût et entraînait des responsabilités envers les membres de son clan. Mais j'avais enfin le sentiment de vivre sans chaînes." (p98/99)

Mais Almanda sera le témoin direct de la "grande histoire" : destruction du territoire des Innus par l'arrivée du progrès (coupes à blanc, domestication des rivières par des barrages, chemin de fer, ...), assimilation forcée, déplacement des enfants dans des pensionnats autochtones, ...

Comme je le disais, ce livre m'a bouleversée !

Tout d'abord, Almanda n'est pas un personnage de fiction, c'est l'arrière-grand-mère de l'auteur, Michel Jean, et ce dernier a su s'effacer complètement pour restituer de manière vivante la voix de son aïeule. Pendant toute ma lecture, j'avais l'impression d'être au coin du feu et d'écouter Almanda.

Ensuite, j'ai adoré l'écriture de Michel Jean. Elle paraît simple mais, tout comme l'histoire, mais il n'en est rien. Il a su mettre sur papier la tradition orale de ses ancêtres pour parler directement à notre coeur, nous qui le lisons.

Pour finir, Almanda est une femme extraordinaire (elle a été tellement vivante pendant ma lecture qu'il m'est impossible de parler d'elle au passé). C'est le même genre de femme que la Jane Eyre de Charlotte Brontë. Une femme qui affronte toutes les difficultés, aussi dures soient-elles, avec l'intelligence du coeur et qui jamais ne se plaint mais continue d'avancer car "la vie est un cercle".

Et j'ai oublié, c'est également une magnifique histoire d'amour !

Bref ! Un énorme coup de coeur pour KUKUM de Michel Jean aux éditions Dépaysage.
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Almanda , la narratrice, a quinze ans lorsqu'elle se marie avec Thomas ,très jeune lui aussi.
Ils vivent une belle histoire d'amour entre une jeune femme qui aime l'aventure et un jeune homme qui lui transmet ses valeurs.
Elle est orpheline, élevée par son oncle et sa tante dans une ferme . Elle fait partie des colons qui défrichent péniblement les terres pour les transformer petit à petit en zones agricoles.
Thomas fait partie des Innus, les autochtones du Québec. Sa famille , nomade, chasse dans les forêts autour du Lac-Saint-Jean. Ils sont trappeurs, vendent des fourrures tannent des peaux.
Almanda, très bien accueillie dans la famille de Thomas apprend petit à petit leurs coutumes et leur langue.
Ils auront neuf enfants.
Petit à petit, les chasseurs trappeurs installés dans les forêts voient leur monde disparaître au profit des usines à pulpe, des scieries. Les arbres sont abattus et descendus dans la vallée par flottage sur les rivières dont on ne distingue même plus l'eau complètement recouverte par les troncs. Leur zone de pêche devient même impossible à exploiter.
Les colons viennent chercher les enfants pour leur donner une instruction dans des pensionnats chrétiens où certains subiront les outrages des religieux.
L'actualité est revenue sur ces faits il y a peu de temps sous forme d'excuses du premier ministre.
Les Innus sont cantonnés dans des réserves où certains commencent à s'ennuyer. D'autres plus dociles, s'adaptent tant bien que mal et adoptent la culture des colons. C'est le cas de la famille d'Almanda.
On pourrait croire que cette histoire est très ancienne mais lorsqu' Almanda, déjà âgée, effectue un périple pour rencontrer le premier ministre afin que leurs enfants ne soient pas mis en danger par les véhicules des travailleurs de la région, on apprend qu'on est en 1950.
Lors de ce voyage, Kukum ( grand-mère en langue innue )nous fait remarquer la méfiance qui existe entre les Innus et les colons qui la regardent de travers.
Le racisme ou le non-respect de l'ancienne culture est encore présent.
Un récit vraiment intéressant sur la vie des Innus dans la forêt, des personnes aux mille ressources, proches de la nature . Un passage m'a quand même un peu heurtée au niveau de la chasse car ils semblaient chasser sans respect de la protection de la faune : en chassant des mères qui se promenaient avec leurs petits par exemple. Là,j'ai sauté de ma chaise.
Un autre passage m'a mieux plu : celui où la belle-soeur d'Alamanda lui dit que chasser n'est pas un exploit. L'animal fait le sacrifice de sa vie.
Michel Jean, l'auteur, est l'arrière petit-fils d'Almanda, la narratrice. Il regrette de ne pas avoir appris le langage de ses ancêtres bien qu'il soit complètement intégré à la population du Québec en tant que journaliste et écrivain bien connu.
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Je me suis toujours intéressée aux premières nations, celles qui vivaient sur place, dans le pays, bien avant l'arrivée des hommes blancs. Hommes blancs installés qui commençaient l'histoire du pays par leur conquête en oubliant volontairement l'histoire des premiers habitants dont ils avaient la plupart du temps éradiquer l'existence incomplètement ou non. Comment peut-on ainsi nier l'existence des autres ?


Kukum, qui veut dire grand-mère , s'inspire de la vie de l'arrière-grand-mère de Michel Jean, une femme blanche qui a choisi d'adopter le mode de vie de la communauté innue en épousant à 16 ans Thomas Siméon, au début du XXe siècle,
C'est sur les terres canadiennes, proches de Québec, qu'Almanda nous retrace l'histoire de son peuple nomade, chasseur et cueilleur, soucieux des jeunes comme des personnes âgées. Un peuple fier d'habiter les forêts et les bords de lacs majestueux, respectueux de la nature, ne prélevant que ce qui est nécessaire à la vie. Un peuple religieux également remerciant dieu et l'animal tué qui leur permet de manger à leur fin.
« En donnant sa vie, mush (l'orignal) permet au chasseur de vivre. Il faut le remercier. Respecter le sacrifice. »

Les Innus possédaient leur propre langage. « C'est une forme de langage adaptée à un univers où la chasse et les saisons dictent le rythme de la vie. » Un langage que les jeunes générations ne parlent plus. Arrachées de force à leur famille, elles ont été transplantées dans des pensionnats pour les formater et les transformer en « personnes civilisées. »
Ils connaissaient par coeur forêts, lacs, montagnes. Des paysages qui n'existent plus, usés et souillés par le défrichage intensif des barrages, des centrales électriques, des usines à papier.
« Sorte d'Atlantide innue, ce lieu n'existe plus que dans les souvenirs des vieux comme moi et il disparaîtra pour de bon avec nous. Bientôt. Comme s'effaceront les chemins de portage tracés avec patience par des générations de nomades. Tout ce savoir s'évanouira des mémoires où il vit encore. »

On y découvre aussi les rassemblements avec les autres nomades, les cérémonies de mariages, la transhumance d'un lieu à l'autre, l'art de fabriquer les tenues ou celui des contenants… tout un monde disparu.
J'espère par ces quelques mots vous avoir donné envie d'en découvrir bien plus au sujet d'Almanda et des Innus et ce qu'ils sont devenus. J'ai été très touchée par cette histoire, par l'effacement de ce peuple, par la bêtise des hommes blancs et leur ignorance de la nature. D'autant plus quand on en voit aujourd'hui les conséquences. Et je remercie Michel Jean, son arrière-petit-fils, d'avoir allumé la bougie du souvenir et d'avoir porté à la connaissance de tous leur histoire.
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Quel dépaysement ! L'auteur a écrit ce livre en hommage à son arrière grand-mère qui, jeune fille de quinze ans, a quitté son oncle et sa tante pour suivre un jeune innu dont elle tombera, et restera, amoureuse toute sa vie. On suppose que l'histoire se passe avant 1900. J'ai été enchantée et surprise de voir que ce peuple, que les américains pensent inférieurs à eux, est moins sexiste qu'eux. La femme peut tenir un fusil, chasser et fumer. Alors question égalité... Des gens accueillants et attachants.
J'ai été sous le charme de cette lecture qui apporte, quelque part, du bien-être avec cette femme courageuse, combattante et libre. Michel Jean nous offre une écriture singulière qui passe de la dureté de la vie à la poésie.
À découvrir pour ceux qui ne l'ont pas encore fait.
Lu la semaine où j'étais avec mon petit-fils. Pourquoi je dis ça, moi ? Ah oui parce que kukum en langue innue veut dire grand-mère.
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Avec beaucoup de réalisme et de tendresse, mais sans jamais tomber dans le pathos ou le sentimentalisme, Michel Jean nous narre la vie de son arrière-grand-mère, Almanda Siméon. Cette orpheline recueillie par sa tante et son oncle va voir sa vie bouleversée quand elle fera la rencontre d'un jeune Innu de Pekuakami. le coup de foudre est réciproque et marque le début d'une nouvelle vie pour Almanda qui va embrasser sans aucun préjugé la vie des Innus.

J'ai été très touchée par cette histoire et la relation fusionnelle entre Almanda et son mari qui dépasse la barrière de la langue et des différences culturelles. L'auteur arrive à nous faire ressentir la force des liens les unissant et la beauté de leur amour empreint de respect. J'ai également aimé la manière dont les Innus, et plus particulièrement les femmes, vont accueillir Almanda, l'aider à s'intégrer et à faire de ce mode de vie qu'elle ne connaît pas encore, le sien et ceci sans jamais la brusquer. Les moments de partage, de solidarité, de sororité, d'entraide, d'amour et de complicité ont rendu l'écoute de ce livre particulièrement agréable, d'autant que Dominique Pétin a fait un excellent travail pour donner vie à Almanda. Une jeune femme au fort caractère à la détermination à toute épreuve qui m'a impressionnée !

Elle fera de son mieux pour apprivoiser une langue et une culture différentes des siennes, tout en n'hésitant pas à remettre en question certaines choses comme le cadre des relations hommes/femmes. Sa grande ouverture d'esprit ainsi que son amour de la liberté semblent finalement faire écho à ceux du peuple innu que je ne connaissais pas, si ce n'est de nom. Ce roman est d'ailleurs l'occasion pour l'auteur de nous rappeler les injustices et violences faites à ces autochtones : racisme, préjugés, sédentarisation forcée les condamnant à revoir tout leur mode de vie, meurtres déguisés en accident, enfants arrachés à leur famille pour les « éduquer », c'est-à-dire les forcer à adopter les habitudes et valeurs des blancs…

Je dois dire que si j'avais déjà entendu parler de ces événements, les entendre narrer rend les choses encore plus réelles et terribles. Ce que l'on a fait subir à ce peuple et à ses enfants, qui ont connu la violence physique et mentale en plus du déracinement, est révoltant. Et pourtant, l'auteur arrive à nous raconter l'injustice sans aucune acrimonie… Il a préféré opter pour une narration immersive et chaleureuse qui n'occulte pas le pire, mais qui souligne surtout le meilleur chez un peuple dont j'ai apprécié de découvrir les coutumes et les valeurs. Une plongée dépaysante dans une nature enivrante et omniprésente, marquée également par la présence d'une femme forte dont j'ai apprécié la personnalité, l'humanité, et la farouche volonté de protéger sa famille, son peuple d'adoption et un mode de vie menacé par l'appétit vorace et les préjugés destructeurs des blancs…

En conclusion, ce livre, je n'avais pas prévu de le chroniquer mais il a laissé une marque bien plus profonde en moi que je ne le pensais, me poussant à vous en parler. Je connais très peu l'histoire du Canada, encore moins celle des Innus de Pekuakami, et pourtant, Kukum a su me toucher en plein coeur. J'ai aimé la manière dont Michel Jean nous narre en toute simplicité la vie de son arrière-grand-mère, une femme impressionnante éprise de liberté, tout en nous permettant de découvrir un peuple, sa culture, son mode vie et les violences dont il a été victime… Un texte fort avec des moments parfois difficiles mais un texte surtout lumineux où brille un bel esprit de solidarité et de liberté.
Lien : https://lightandsmell.wordpr..
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Un livre humain, l'auteur raconte l'histoire de sa kukum, sa grand-mère Innu.

C'est d'abord l'histoire d'amour de la jeune Almanda qui tombe amoureuse d'un Innu et qui quitte ses parents adoptifs pour vivre la vie libre de son mari. Libre oui, mais pas du tout oisive, beaucoup de tâches à apprendre et à accomplir chaque jour, avec toujours la préoccupation de la survie.

Ensuite, c'est l'émotion, comprendre comment ces Innus se sont sentis quand voulant retourner sur leur territoire de chasse, ils sont arrivés sur des coupes à blanc (des coupes de Blancs?) et qu'ils ont alors réalisé que les compagnies forestières ont pris possession des terres.

Et puis l'autre drame, la folie des pensionnats, qui consistait à retirer des enfants de familles qui vivent sur une réserve à six kilomètres d'un village où ils auraient pu aller à l'école, pour les envoyer à des centaines de kilomètres de chez eux, dans le but de les instruire et surtout de les « désindianiser »…

Ce n'est pas un texte de revendication, mais un livre qui explique les blessures des âmes, celles qu'il faut comprendre pour guérir les peuples.
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Kukum fait partie de ces livres, qui a défaut d'être un chef-d'oeuvre, rejoint immédiatement la liste des Indispensables, des Inoubliables. Ceux dont on dit : « Tu n'as pas lu Kukum ? Tu devrais ! » Kukum est une biographie, un compte-rendu fidèle d'une dame attachante qui a vécu la mutation d'un mode de vie ancestral vers la « modernité ». Modernité qui s'accompagnât de prédations multiples : celles sur les ressources naturelles, celles sur la culture des peuples premiers et, hélas, celles sur les corps soumis aux appétits de religieux indignes. Pas de fioritures stylistiques dans ce livre : sur des thèmes proches, Joseph Boyden, par exemple, est dans un registre plus flamboyant. Kukum ce serait une église romane quand « Le Chemin des âmes » serait une cathédrale gothique. Cependant, l'émotion que suscite ce livre n'en est pas moins importante. L'auteur, en privilégiant la sobriété d'un récit à hauteur de cette femme modeste, nous immerge dans ce bouleversement culturel que fut l'intégration forcée de ces peuples autochtones. Cette héroïne qui devint innue par amour n'a pas seulement épousé un homme mais une histoire et l'on comprend à la fin que son destin insolite prend aussi sa source dans les traumatismes de l'enfance. Enfance d'une femme révélatrice de l'enfance d'un pays : comme dans d'autres nations de ce continent, le phénomène colonial fut interne. Certains opprimèrent sans vergogne, certains furent complices, certains s'opposèrent aux différentes formes de coercitions et certains s'acculturèrent. Kukum témoigne de ces différentes orientations mais Michel Jean n'est jamais péremptoire. Comme son ancêtre, il pose un regard bienveillant mais lucide et offre une leçon de tolérance et d'espoir. Par les temps qui courent, je suis preneur.
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Tout d'abord un grand merci aux Editions Dépaysage et à Babélio pour ce magnifique livre gagné lors de la dernière opération Masse critique. Comme c'est souvent le cas avec des livres offerts dans ce cadre, c'est un ouvrage que je n'aurais pas découvert sans cela, vu qu'il s'agit souvent de maisons d'édition moins connues et c'est de nouveau un gros coup de coeur. Oui ce livre est un beau cadeau et j'espère qu'il trouvera de nombreux lecteurs comme il le mérite.

Je connais peu l'univers amérindien, qui ne me passionne pas plus que cela et j'ai beaucoup apprécié de le découvrir à travers cette biographie que Michel Jean a écrit sur son arrière grand-mère Almanda Siméon. Il qualifie ce livre de roman, je ne sais pourquoi, vu qu'il s'agit du récit de la vie de cette femme née en 1875 en Irlande et qui a vécu pratiquement un siècle au Canada dans la région du Lac St Jean. Ses parents ont émigré à la suite de la famine qui a ravagé l'Irlande, comme de nombreux autres, mais ils sont morts à leur arrivée. Almanda a trois ans et elle est recueillie par un couple chrétien qu'elle appellera son oncle et sa tante, ce sont des paysans pauvres. La terre est pierreuse et peu fertile, les agriculteurs ont une vie très difficile. Lorsqu'elle a quinze ans, elle rencontre Thomas Siméon, un jeune Indien Innu venu chasser près de la ferme, puis revenu exprès pour elle. le coup de foudre est réciproque, Almanda se sent enfermée dans son petit village et décide d'épouser Thomas. Elle est très bien accueillie dans le clan et sa nouvelle famille l'initie à la vie en forêt et au nomadisme. En quelques années, elle devient une vraie Innue et élève une famille nombreuse. Malgré les difficultés épisodiques d'une telle vie, leur famille est très heureuse durant plus de vingt ans, puis le vieux Malek meurt très âgé, il est le dernier Indien à avoir connu la région avant l'arrivée des colons. Les Indiens pensent que leur mode de vie est éternel et ils ne voient pas les signes avant-coureur du « progrès » qui ravage la forêt.

Un jour, la rivière est complètement bloquée par des troncs d'arbre que des bûcherons charrient vers le lac. Désormais les bois appartiennent au gouvernement et aux exploitants forestiers, qui la dévastent, puis les rivières sont emprisonnées par des barrages qui modifient le paysage. Les Indiens n'ont plus leur place sur leurs territoires traditionnels et vivent désormais dans la réserve à Pointe-bleue avec tous les problèmes que l'on connaît, l'oisiveté, l'alcoolisme et la violence, qui n'existaient pas auparavant. Dans le année 1930-40, le gouvernement décide d'assimiler de force les Indiens en envoyant les enfants en âge scolaire dans des pensionnats, créant ainsi de nouveau problèmes.

Ce livre est magnifique, il nous fait découvrir la vie traditionnelle de ce peuple en symbiose avec la nature, qui chasse pour se nourrir avec un grand respect pour les animaux dont ils prennent la vie. Ces personnes sont ouvertes, tolérantes et pacifiques, on est à des années-lumières des mythes violents véhiculés par les western. Mais si les Innus ont accueillis les blancs avec respect, la réciproque n'est pas vraie et déjà il y a un siècle, on a détruit leur culture au nom du progrès. Almanda connaîtra la fin de la vie traditionnelle et aussi l'amélioration qui surviendra à la fin de son existence quand le gouvernement tiendra enfin mieux compte des Indiens, même si tout n'est pas parfait, loin de là.

J'ai particulièrement aimé le ton du livre, très optimiste, jamais pleurnichard, ni revanchard. Alamanda s'est adapté aux différentes contraintes de sa vie avec courage, sa famille est très unie et l'amour n'a jamais déserté son couple. Elle raconte son amour avec force et pudeur. C'est un livre vraiment magnifique, un gros coup de coeur et j'espère qu'il aura le succès qu'il mérite. de plus il est imprimé sur un beau papier, avec une graphie aérée et un format carré original, ce qui en fait un très bel objet en plus de ses qualités documentaires et littéraires.
Lien : https://patpolar48361071.wor..
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