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Critique de ODP31


Géniteurs d'apprenants,
ou parents d'élèves pour les ploucs non-initiés, le continuum éducatif et nos humbles ingénieurs en science de l'éducation (hors vacances scolaires et grèves), vous déconseillent la lecture de la dernière masse langagière de Patrice Jean, ce Juda réactionnaire qui vient adultérer ici sur la Cène, pardon dans la salle des profs, leur génie progressiste.
Afin de ne pas assommer les quelques Babéliotes curieux de mes humeurs, je vais abandonner le jargon boursoufflé de nos pédagogues pour oser dire quelques mots du roman de Patrice Jean, lui-même professeur à ses heures perdues pour la littérature.
Je trouve hélas que cet auteur dont j'adore le style et la verve satiriste perd ici en qualité ce qu'il gagne en quantité avec ce troisième roman en un an. La société le chafouine, il ne manque pas de sujets qui bouillonnent ses globules, mais si je devais noter la copie, mon appréciation serait la suivante : élève brillant mais travail un peu bâclé. Peut mieux faire.
Pourtant le sujet, l'idéologie éducative, était porteur. On ne parle plus ici de transmissions de connaissances (trop ringard) mais de sensibilisation à des idéaux sociaux. L'élève, auparavant novice est devenu un apprenti, le prof descend de son estrade pour jouer le rôle d'un compagnon qui propose des outils dans le dialogue et dans la co-construction pour identifier les problèmes de la société et la changer en vue d'une plus grande justice égalitaire, verte… et des pas mures.
Comme à son habitude, Patrice Jean confie les clés de son récit à un personnage absurde, caricature du jeune prof de lettres qui trouve les devoirs ringards, les leçons dépassées, l'apprentissage des classiques ennuyeux. L'idéaliste veut immuniser la progéniture contre la tentation du capitalisme désastreux, réécrire l'histoire, déboulonner certaines grandes figures et chasser les derniers vieux dinosaures réfractaires aux techniques modernes d'enseignement.
Candide du pédagogisme pédant, Bruno Gigoire effectue donc sa première rentrée au lycée Malraux. Il est persuadé qu'il va éveiller les consciences des jeunes. Au diable l'instruction des fondamentaux.
La présence d'une statue Khmère dans le bureau du directeur, pillée au Cambodge par Malraux et son épouse pour effacer quelques dettes dans les années 20 et offerte au lycée, va provoquer une guerre civile au sein de l'établissement entre ce que des esprits éclairés par des lumières tamisées autour d'un zinc pourraient qualifier au quinzième jaune, les « Perchés » contre les « Réacs ».
Ce que je reproche à l'ouvrage, c'est la faiblesse de l'argument romanesque. Cette histoire de statuette est assez insignifiante. Elle aurait pu constituer une sympathique péripétie dans une trame plus élaborée. L'auteur aurait pu aiguiser ses mots autour des sujets inflammables qui ne manquent pas dans les collèges et lycées : le port de l'uniforme obligatoire stylé par Brigitte M (Crop top et décolletés du grand plongeoir versus combinaison intégrale du pensionnat de Chavagnes), les menus spécifiques à la cantoche (si une religion avait proscrit la macédoine ou le céleri rémoulade à mon époque, j'aurai adhéré de suite !), les toilettes non genrées pour LGBT constipés, l'évaluation des compétences avec le barème de l'Ecole des fans ou l'agressivité des parents persuadés d'avoir pondu des surdoués incompris à la chaîne (HPI – Haute Probabilité d'Idiots).
Une déception sauvée par le mauvais esprit qui souffle sur les pages de ce roman. Je proposerai bien le redoublement s'il existait encore.



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