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Critique de oiseaulire


Elfriede Jelinek met à nu les mécanismes de l'exploitation économique de la femme par l'homme, soutenu, afin que rien d'elle n'échappe au rouleau compresseur, par tout le groupe familial. ll s'agit là d'un pamphlet politique : quelque soit la classe sociale considérée, la femme est le prolétaire de l'homme. A la ville les femmes sont les prolétaires des prolétaires, à la campagne les prolétaires des paysans.
Elle examine à travers ces deux exemples (ville, campagne), le mécanisme, pas si délicat que ça, du sentiment amoureux qui prédispose la jeune fille, dès son plus jeune âge (quatorze ans ici), à rechercher activement cette exploitation par peur de l'échec personnel, ambition d'élévation sociale, manque d'imagination, ou désir de fuir un milieu familial brutal. Souvent les quatre à la fois. D'emblée elle accepte de n'avoir d'existence qu'à travers l'Homme, comme s'il était son unique destin. Au fait, l'est-il ?
Quant à l'homme dépeint par Jelinek, il est porté par des intérêts antagonistes de ceux de la femme : aversion pour l'amour qui dure, pour le couple, surtout légitime et pour l'enfant ; instinct de répandre son sperme dans le plus de ventres possible ; passion pour les objets, surtout ceux qui vrombissent et rugissent ; brutalité ; fréquentation assidue de la taverne, vrai foyer suivant son coeur où il baigne dans une douce torpeur alcoolisée comme dans un liquide amniotique.
L'auteure nous tend un miroir grossissant du fonctionnement économique du mariage à travers des phrases courtes, cyniques, où on reconnaît des réalités que l'on a déjà rencontrées sur son chemin mais que l'on préfèrerait cacher sous le tapis. Ce miroir est très efficace, on voit tous les détails et ce n'est pas réjouissant. A moins que l'on préfère succomber à une jubilation mauvaise : ils sont vraiment trop bêtes, laids, haineux, tant pis pour eux ! L'espèce humaine aurait-elle un tropisme vers l'asservissement, la bouteille et la violence ?
Ce livre est le pendant, moderne et cru, du si mondain et raffiné "Lady Suzan" de Jane Austen. le roman de Elfriede Jelinek analyse l'institution du mariage au 20 ème siècle dans une Autriche populaire et dans une région où sévit le chômage ; Jane Austen dépeint la même institution au 19 ème siècle dans la haute société en Angleterre.
L'essentiel demeure inchangé : le mariage est l'union du maître et de l'esclave, où le rapport parfois s'inverse pour un bref instant. Restent deux prisonniers.
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