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Critique de Lutin82


L'histoire se déroule sur un continent unique, le Fixe. Quelques éléments disséminés ici et là, n'écartent pas la piste de la Terre, mais rien n'est moins sûr… En effet, le Fixe connaît une activité sismique et volcanique très importante, la tectonique des plaques travaille la planète dans ses tréfonds engendrant raz de marée, tsunamis, tremblements de terre, explosions des volcans. Pourtant, la vie existe. Hélas, le terrible Dieu local, le Père Terre est régulièrement d'humeur massacrante, et déclenche une Cinquième Saison : un hiver apocalyptique.

Malgré les forces dévastatrices à l'oeuvre les humains survivent d'épreuve en épreuve (ils sont coriaces ces bougres!). Proches de l'éradication lors des épisodes les plus durables, ils survivent en se regroupant en comm (pour communauté).

Les seules structures centralisées et continentales sont des lieux de savoir ou de maîtrise technique telle la 7° Université ou le Fulcrum . Ces deux centres accueillent des étudiants afin de les former. Si l'université a un périmètre classique, ce n'est pas le cas du Fulcrum.

I

l existe une catégorie méprisée, tenue à l'écart, et souvent tuée en bas-âge : les orogénes. Leur tort : ils vivent en symbiose avec la terre.

Ce système de magie, à défaut de meilleur terme, est tout à fait original et captivant.

Les orogénes ressentent secousses, mouvements de terrain et points chauds. Rien d'extraordinaire en cela; non seulement ils y sont sensibles mais ils possèdent la capacité de puiser cette énergie pour la transformer. Quand un orogène adulte maîtrise son talent si particulier, il peut l'utiliser pour atténuer voire gommer des secousses, ou geler le carreau d'une arbalète; après tout, ce n'est qu'une transformation de l'énergie par la voie calorique…

L'enfance est bruit, joie et chamaillerie. Une période pour se découvrir. Un jeu un peu brutal, une raillerie ou une contrariété peut révéler un don caché, et mettre au ban de la comm les enfants ainsi découverts. Dans le meilleur des cas, ils sont recueillis par le Fulcrum, dans le pire abattus sur place. Cette institution ne ressemble pas à un internat ou un orphelinat, le camp de redressement s'apparente davantage à la vie millimétrée et calibrée des élevés orogénes.

Ces artificiers de la terre ne sont pas les seuls possédant des aptitudes particulières. Ils sont encadrés par des Gardiens dotés d'un champ de nullité. Leur affectation à leurs pupilles s'opère dès le « recrutement » et pour la vie. Ils exercent un contrôle sur eux dès cet instant, et cette emprise tient à la fois de la manipulation que de la maltraitance psychologique (et physique).

L'auteur nous propose de suivre la vie de divers personnages. Une enfant, deux femmes, et un homme, pour l'essentiel. C'est surtout l'occasion de brosser les conditions de vie à différents stades et dans différentes conditions de l'orogéinité. L'enfant Damaya voit son secret découvert lors d'une chamaillerie, un Gardien la « recueille », commence son apprentissage entre douceur, prévenance et cruauté, et l'escorte jusqu'au Fulcrum où elle va poursuivre sa formation.

Si cette jeune fille, douée et solitaire nous évoque d'autres figures de la littérature (Hermione, par exemple), ce n'est pas le cas de Syénite, une jeune femme, 4 anneaux (hiérarchie propre au Fulcrum) entêtée, tout aussi solitaire, avec un potentiel très intéressant.

Son caractére est affirmé et acerbe, et bien qu'elle fasse profil bas au sein de cette institution, le lecteur sent un volcan qui couve sous les cendres. Une mission d'importance lui est confiée, doublée d'une requête précise. A son grand déplaisir, un mentor supervisera sa tâche, un 10 anneaux du nom d'Albâtre, et l'étalon qui doit lui donner un enfant… La double mission ne sera pas de tout repos (et pour cause), alors que tous deux se détestent au premier regard.

La dernière femme centrale du récit est Essun « vous« , qui vivez à Tirimo avec deux enfants et un mari, dissimulant votre différence… jusqu'au jour ou votre conjoint s'en aperçoit et massacre votre fils sous vos yeux…

Le récit alterne entre ces trois personnages principaux. La procédé narratif est habile, peu courant et peut surprendre initialement. Une fois plongé dans la lecture, et s'appropriant Essun, « vous« , l'immersion est totale; l'histoire est vécue avec les entrailles, les vôtres et celle de la terre. Il est évident que les trames possèdent une résonance entre elles, et qu'elles sont destinées à se rejoindre, mais le voyage en compagnie de ces tranches de vie éclaire le cas des orogéne avec précision et compassion.

Malgré leurs défauts, leurs caprices parfois, ils sont globalement attachants, voire très attachants, bien travaillés pour avoir de la consistance. Même les personnages secondaire gardent des traits de personnalité propres qui leur permettent de ne pas se fondre dans la masse des stéréotypes habituels.

La Cinquiéme saison est un roman captivant, proposant un univers torturé et une lutte pour exister savoureuse. L'auteur nous offre un récit alliant divertissement, frissons, et fond. Un prix Hugo mérité. L'envie de lire la suite est impérieuse…

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