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Les livres de la terre fracturée tome 3 sur 4
EAN : 9782290228777
512 pages
J'ai lu (11/03/2020)
4.13/5   375 notes
Résumé :
Le retour imminent de la Lune signifie-t-il la fin de l'humanité ou au contraire sa rédemption ? La réponse à cette question repose sur les épaules d'une femme et de sa fille. La première, Essun, entend se servir des pouvoirs qu'elle a hérités d'Albâtre pour bâtir un monde dans lequel les orogènes seraient libres. Mais pour la seconde, Nassun, il est trop tard. Elle a vu ce que le monde avait à offrir de pire, et elle a accepté ce que sa mère n'admettra jamais : qu'... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (45) Voir plus Ajouter une critique
4,13

sur 375 notes
J'ai eu un peu plus de difficultés avec ce dernier tome qu'avec les deux précédents, mais je ne crois pas que la qualité (toujours excellente) y soit pour quoi que ce soit : j'ai plutôt l'impression que la densité de l'ensemble demande d'étaler un peu cette lecture dans le temps, ce que j'ai fait, mais peut-être pas assez. Lire une série demande un dosage délicat : trop vite, on sature, trop lentement, on oublie des éléments-clés…

À nouveau, trois points de vue s'entremêlent : celui d'Essun, cette fois désignée au « tu » plutôt qu'au « vous » à mesure que le narrateur devient plus familier avec elle (maintenant, je suis curieuse de voir comment c'est rendu dans la VO) ; Nassun, la fille d'Essun, toujours dans une narration à la troisième personne ; et enfin, le fameux narrateur, au « je », qui finit par dévoiler des pans de son histoire et de celle des Saisons.

Je crois d'ailleurs que ces passages ont été parmi mes préférés : la cité de Syl Anagist a un côté fascinant, presque inconcevable, qui garde toujours une part de son mystère puisqu'on en sait très peu sur elle. Cela vient titiller le sense of wonder alors même que ses bases abjectes sont très clairement exposées et dénoncées, d'où un malaise un peu ambigu.

C'est toujours satisfaisant, dans un dernier tome, de voir les pièces du puzzle s'emboîter peu à peu, de constater avec un peu de fierté qu'on en avait deviné une partie, et de se laisser surprendre par le reste, qu'on n'avait pas vu venir. La narration si particulière qui nous suit depuis trois tomes se trouve ici pleinement justifiée. La fin peut paraître un peu expédiée : on glisse vite sur l'après, le destin de certains personnages reste en suspens ; mais cela fonctionne parfaitement avec le parti pris narratif, que l'autrice a décidé d'assumer jusqu'au bout.

Superbe trilogie, tant par son worldbuilding, ses personnages, sa narration, ses thématiques qui se renforcent mutuellement (maternité, ostracisation/racisme, enjeux écologiques). Et même si on n'adhère pas à tout, on ne peut pas dire qu'elle ait volé ses trois prix Hugo.
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Et voilà, l'heure est déjà venue de faire nos adieux à Essun, Nassun, Albâtre, Hoa et tous les autres. Récompensé comme ses prédécesseurs par le Prix Hugo (un sacré exploit), le troisième et dernier tome des « Livres de la Terre fracturée » s'est également vu décerner les Prix Locus et Nebula, soit trois des plus grandes distinctions qu'un ouvrage de SF ou de fantasy peut se voir attribuer. Un hommage amplement mérité pour ce qui concerne l'ensemble de la série, même si cet ultime opus est à mon sens le moins réussi. [Comme d'habitude lorsqu'il s'agit d'une suite, si vous n'avez pas encore eu l'occasion de lire les premiers tomes, je vous conseille de sauter ce paragraphe au risque de vous voir inévitablement révéler plusieurs pans de l'intrigue des précédents volumes.] L'action repart sur les chapeaux de roue après les événements marquants qui avaient mis un terme à « La porte de cristal ». On retrouve donc Essun et les Castrimiens sur la route, leur seule chance de survie résidant désormais dans un long périple devant les mener aux ruines de la cité de Rennanis, dont ils viennent de vaincre les anciens habitants. Seulement prendre la route en pleine Saison, même lorsqu'on possède un groupe nombreux, qui plus est composé de plusieurs orogènes, cela reste extrêmement périlleux, et tous ont bien conscience qu'ils risquent de subir d'énormes pertes. Essun, elle, a d'autres préoccupations en tête : outre les questions qui demeurent en suspens depuis qu'elle est parvenue à utiliser la puissance de la porte de cristal, c'est à nouveau le sort de sa fille qui la tourmente. Car si Nassun, qu'elle croyait perdue à jamais après avoir été enlevée par son père, est bel et bien toujours en vie, son sort paraît encore plus incertain que celui de sa mère. D'abord parce qu'elle vient de commettre un acte terrible qui la hantera toute sa vie. Ensuite parce qu'elle est désormais en compagnie d'un homme qu'Essun connaît bien et qu'elle a toutes les raisons de redouter. Et surtout, surtout, parce que la petite fille de dix ans fait preuve d'une maîtrise de l'orogénie absolument stupéfiante, au point de risquer de contrecarrer les plans de sa mère et l'avenir de l'humanité.

Nora Jemisin tient ici toutes ses promesses et s'attelle, page après page, à enfin apporter des réponses aux nombreuses interrogations qu'avait suscité la découverte de cette « Terre fracturée » et du mode de vie extrêmement rude de ses habitants. Pour se faire, l'autrice donne la parole à un « nouveau » (quoi que…) narrateur, qui nous permet d'avoir une vue plus globale de la situation et de comprendre comment les conditions de vie sur Terre ont pu se dégrader à ce point. Aux chapitres narrés à la troisième personne (Nassun), et à la seconde (Essun), viennent donc s'en intercaler d'autres, à la première cette fois. Ce retour au origine s'accompagne d'un grand nombre de précisions scientifiques assez poussées dont j'ai, pour ma part, eu beaucoup de difficulté à saisir le sens, ce qui explique sans doute pourquoi ce troisième opus m'a moins captivée que les précédents. Car cette complexité nuit à mon sens au récit, puisqu'elle a une incidence inévitable sur le rythme qui se fait ici beaucoup plus lent. Tout comme dans le précédent tome, force est de constater qu'il ne se passe pas énormément de choses dans cet ultime volume qui explique plus qu'il ne met en scène (contrairement au premier tome qui, lui, laissait les explications complètement de côté et nous plongeait directement au coeur de l'action, sans forcément nous fournir tous les codes dont nous avions besoin). le roman comprend cela dit son lot de scènes marquantes, comme la traversée du désert par les Castrimiens, ou encore le voyage de Nassun en véhimal, si bien qu'il serait malgré tout erroné de parler d'ennui. Bien qu'on ne se lasse pas en suivant les pérégrinations de l'une et l'autre des héroïnes, on passe malgré tout une bonne partie du roman dans une posture d'attente. Or, les événements que l'on sait inévitables, et qu'on espère ou redoute depuis le premier tome, arrivent tardivement et se révèlent finalement assez courts, ce qui ne manque pas de susciter étonnement et frustration. La conclusion, pour logique et émouvante qu'elle soit, paraît ainsi un peu bâclée : tout s'arrête soudainement, alors qu'on aurait aimé avoir tellement de précisions sur l'impact des événements qui viennent de se produire, aussi bien sur la Terre en général que sur les personnages en particulier.

Cette légère déception concernant la conclusion de la série, elle s'explique aussi et surtout par l'attachement profond qu'on éprouve pour les personnages, et c'est pourquoi, malgré les défauts précédemment mentionnés, ce troisième tome nous fait malgré tout passer un excellent moment de lecture. Essun est en effet le genre d'héroïne qu'on oublie pas, non pas pour ses exploits ou des qualités exceptionnelles, mais au contraire pour ses failles et sa vulnérabilité. Que ce soit en tant qu'amie, amante, ou surtout en tant que mère, le personnage passe son temps à se tromper, à regretter, à souffrir, et puis à recommencer à avancer, de plus en plus abîmée par le vie mais aussi de moins en moins seule. Notre héroïne est en effet désormais entourée d'une sacrée galerie de personnages qui, eux aussi, laisseront pour longtemps leur marque dans l'imaginaire du lecteur (pour ma part je ne risque pas d'oublier Albâtre de sitôt, tant il est rare qu'un personnage de fiction me touche à ce point). Nassun, la fille d'Essun, est elle aussi remarquable, son jeune âge la rendant peut-être même encore plus attachante que sa mère. Difficile de ne pas être bouleversé par les épreuves endurées par la fillette, de même que par l'amour inconditionnel qu'elle en vient à éprouver pour Schaffa, ou encore par le profond sentiment d'injustice qu'elle en vient à développer. Il s'agit d'ailleurs d'un autre des gros points fort de la série qui aborde avec intelligence et subtilité des sujets aussi graves et complexes que le racisme, le génocide, mais aussi le rapport des humains à la vie et à la terre, ou les éléments qui fondent une communauté. Il convient également de saluer la qualité de la plume de l'autrice qui fait preuve de beaucoup de délicatesse pour nous dépeindre les sentiments de ses personnages, sans jamais tomber dans la sensiblerie ou le voyeurisme.

Bien que légèrement déçue par ce troisième et dernier tome, c'est avec une grande tristesse et l'impression d'avoir vécu une formidable aventure aux côtés de personnages inoubliables que je termine ma découverte de ces « Livres de la Terre fracturée », série incontournable pour tout lecteur d'imaginaire qui se respecte. Une référence, à lire et relire.
Lien : https://lebibliocosme.fr/202..
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Relecture" audio mars 2023 : 3,5⭐ et même avis avec une approche facilitée par la lecture précédente mais avec le constat que si la compréhension n'est pas là il est très difficile de "relire" en audio !

💧 💧 💧

Ce qui est embêtant avec les séries c'est qu'en voulant faire un petit résumé du début du volume, on spoile le précédent ! Donc pas de résumé détaillé.

Essun a senti par les obélisques que sa fille Nessum est en vie et cherche à la retrouver et régler le problème de cette Cinquième Saison qui risque de durer des milliers d'années donc d'anéantir les humains quels qu'ils soient !

Ce volume devient plus « scientifique » mais à la façon de ce monde imaginé ! C'est une bonne chose parce que ça nous permet de comprendre la genèse de son état actuel mais ça complique grandement la compréhension du texte pour quelqu'un qui, comme moi, est une buse en sciences ! Mais comme j'ai cessé de me battre pour essayer de traduire, j'ai eu malgré tout une idée du pourquoi et du plaisir à voir venir le dénouement.

Chapeau l'auteure, à la lumière de mon faible savoir j'ai l'impression que ça tient la route. de plus la curiosité est attisée à chaque instant et fait qu'il est difficile de poser le livre. Une relecture sera nécessaire pour goûter toutes les subtilités de l'univers que N.K. Jemisin a créé !

CHALLENGE MULTI-DEFIS 2020
CHALLENGE PAVES 2020
CHALLENGE MAUVAIS GENRE 2020
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(Légers spoils sur les premier et deuxième tomes.)
N. K. Jemisin n'en était pas à son cours d'essai au moment de publier Les Livres de la Terre fracturée, mais c'est avec celle-ci qu'elle a déployé l'étendu de son talent et accédé à la reconnaissance internationale.
J'ai fini cette saga époustouflante il y a quelques mois et je trouve son succès largement mérité. L'écriture, le ton, l'univers, les personnages : tout cela était à la fois original, fluide et recherché.

Il est difficile de savoir par où commencer une critique sur un sujet aussi dense que cette saga. Comment faire pour vous restituer la complexité de ces personnages, de leurs relations, de leurs souffrances, de cet univers profond, intense ? N. K. Jemisin est fine psychologue, et son humour noir dépeint des situations affreuses et injustes dans lesquelles les victimes sont ceux qui ont toutes les raisons de prendre le pouvoir. Son écriture interpelle directement le lecteur : « Commençons par la fin du monde – pourquoi pas ? On en termine avec ça et on passe à quelque chose de plus intéressant. » Cet incipit est sûrement le plus percutant que j'ai jamais lu et restitue parfaitement le ton de cette saga : froide, cynique, désabusée.
Aucun personnage n'a à coeur de faire le mal. Mais nombreux sont ceux qui estiment qu'ils n'ont pas le choix, ou bien craquent et se déchaînent sur leurs proches avant de regretter. C'est un noeud d'histoires tragiques, d'incompréhensions, de non-communication qui conduisent à de terribles désastres.


Commençons tout bêtement par ce que j'ai préféré : l'univers.

C'est un monde hostile qui pourrait ressembler au nôtre dans quelques millions d'années, quand les Amériques viendront faire un bisou à l'Asie orientale et que l'océan Pacifique ne sera plus qu'un lointain souvenir.
Comme tous les autres océans, d'ailleurs.
Ce continent immense (que quelqu'un qui avait envie de perdre des amis a décidé d'appeler le Fixe) est soumis à des forces qui le déchirent : séismes, éruptions volcaniques et tsunamis sont le quotidien de l'humanité. Après lui, le néant : l'océan à perte de vue, avec quelques îles ici et là (mais il faudrait être fou pour vivre sur un piège aussi mortel).
Et puis, les obélisques. Des ouvrages énormes et magnifiques qui tournoient dans le ciel. Nul ne sait qui les a construit et comment – c'est bien la preuve que mêmes les meilleurs bâtisseurs et les plus puissants empires ne sont rien face à la colère du Père Terre.
Dans ce contexte marqué par la mort, la mémoire des temps anciens est inexistante. L'humanité est condamnée à survivre au jour le jour. Certains humains ont développé un talent extraordinaire : celui de maîtriser la terre. de déplacer des montagnes (littéralement), de provoquer ou d'empêcher les cataclysmes d'advenir. Dans n'importe quel autre univers de fantasy, ces personnes appartiendraient à une caste privilégiée. Dans cette histoire, ils terrifient la population, qui exerce contre eux un génocide monstrueux…
Et pour finir, les mangeurs de pierre. Des êtres entre l'humain et le minéral, qui « sont lents, au-dessus de la surface terrestre, hormis quand ils ne le sont pas ». Étranges et donc dérangeants, aux objectifs inconnus. J'adore les univers qui foisonnent de pistes mystérieuses et c'est exactement ce que m'a offert cette saga.


Deuxièmement : le système de magie m'a époustouflée. Bien construit, plus complexe qu'il n'y paraît, N. K. Jemisin n'a pas fait les choses à moitié quand elle a pensé l'orogénie. Tout est logique, chaque révélation s'emboîte parfaitement avec l'ensemble, et cependant il y a sans cesse des choses à découvrir – même au bout de trois tomes. Être orogène ne garantit pas de tout comprendre de son pouvoir, d'autant que le Fulcrum (l'organisation qui emploie et régule les quelques orogènes ayant le droit de vivre) limite la connaissance.
J'ai pensé à Brandon Sanderson pendant ma lecture : un auteur qui est lui aussi capable de densifier son histoire en cours de route, de créer des liens là où il n'y en avait pas (magie et histoire, magie et univers) tout en conservant une logique solide. Deux auteurs habiles qui se sont peut-être influencés mutuellement.


Et pour finir, je suis ébahie par le personnage d'Essun qui avait, à mes yeux, des atouts incroyables mais aussi d'immenses faiblesses. C'est une femme qui a l'habitude de vivre dans un environnement hostile et qui a su s'adapter. Une force de la nature, une créature brisée qui s'efforce de tenir debout en touchant le moins possible à ses blessures, en les laissant pourrir loin au fond d'elle. Les liens qu'elle tisse avec autrui sont retranscrits dans toute leur complexité et j'ai été extrêmement touchée par ce qui la relie à Albâtre, son mentor et ami : un étrange jonglage entre exaspération, rivalité, affection et incompréhension.
Découvrir son lien à Nassun, Jija et Hoa faisait partie de mes plaisirs de lecture et j'espère que vous explorerez cette densité pleine de chaleur et de douleur.


Le revers de la médaille, c'est que je ne me suis pas du tout attachée à Essun. Elle a tant souffert qu'elle a enfermé ses émotions et ses pensées loin au fond d'elle, où sa conscience n'accède plus. Sa stratégie, lorsqu'elle prend un coup dur, c'est d'oublier l'événement : « Oups, vous pensez. Prudemment, vous arrêtez. » Par conséquent, c'est le genre de personne à avoir du mal à se comprendre et à comprendre les autres. Sa maladresse m'a plusieurs fois fait lever les yeux au ciel, spécialement envers Albâtre. Mais aussi vis-à-vis de Tonkee, qui l'accompagne sur les routes, ou encore des Castrimiens. Les quelques flash-back de Nassun nous font également réaliser qu'elle était tout sauf une mère tendre et aimante. Elle est donc très peu démonstrative et j'ai ressenti très peu d'émotions en lisant des passages pourtant atroces. le genre de protagoniste qui vous tient à distance.
Elle est même si différente de moi que j'ai désapprouvé nombre de ses choix. Ce qui est extrêmement pénalisant pour une narration à la seconde personne du pluriel, narration qui ne cessait de me rappeler que non, contrairement à ce qu'on m'affirme, je ne suis pas Essun !

Autre défaut (un peu valable sur le second tome, mais surtout sur le troisième) : j'ai trouvé les descriptions extrêmement confuses en ce qui concerne les restes de la technologie de Syl Anagist. Difficiles à imaginer, curieusement lourdes (alors que le reste de l'écriture se distingue par sa nervosité et sa flexibilité), ce sont des passages qui m'endormaient et que j'ai dû relire plusieurs fois pour essayer de m'accrocher.


Et pour finir, comme le dit si bien Boudicca, la fin m'a laissée mitigée. La tension monte lentement pendant Les Cieux pétrifiés, mais le dénouement arrive si vite et se finit si bien que j'ai eu du mal à l'accepter. Comme une fausse note dans une partition, qui voulait sonner un peu trop haut, un peu trop heureux, et qui n'est pas en adéquation avec le reste.

En conclusion : je vous encourage à découvrir cette saga, surtout si vous êtes familiers des littératures de l'imaginaire et à condition que la noirceur ne vous rebute pas. C'était une lecture très riche qui ne m'a pas laissée indifférente, qui m'a fascinée, emportée, même si elle n'est pas dénuée de maladresses. Je ne pense pas que ça vaille trois prix Hugo, mais ça en mérite assurément un.
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Dernier volet des Livres de la terre fracturée, j'ai dévoré les deux premiers tomes et ai éprouvé le même plaisir à connaître la conclusion des aventures d'Essun et de sa fille.
Essun poursuit sa route avec les castriminiens, direction Rennanis, cité qui devrait permettre à la Comm de survivre à la cinquième Saison. La jeune femme est déchirée entre sa mission, ouvrir la porte de cristal, et le désir de retrouver Nassun dont elle sait à présent qu'elle possède une immense force et que Schaffa est à ses côtés. Schaffa, le Gardien, lutte sans relâche pour neutraliser les assauts de sa Pierre-noyau, qui le contraint à contrôler les jeunes orogènes qui sont sous sa responsabilité. Schaffa investi par Nassun comme père de substitution et pour lequel elle est prête à tous les sacrifices afin de lui éviter de souffrir.
On découvre aussi l'histoire d'Hoa - autre « outil » dans les mains d'une force supérieure – qui évolue dans la cité de Syl Anagyst. le mangeur de pierre et ses semblables - « vestiges dénaturés des Niess », un ancien peuple ennemi des sylanagestins - sont craints pour leur magie. Et l'on découvre ici l'histoire tristement humaine d'une société qui souhaite en éradiquer une autre par peur, par conviction de sa supériorité. Syl Anagyst a ainsi exterminé le peuple des Niess, préservant et transformant leur pouvoir, exploitant leurs ressources car « Il faut que quelqu'un souffre pour permettre aux autres de vivre dans le luxe. ». Ainsi nait le projet fou de la Geoarcanité, « enfermer les flux bruts magiques de la planète dans un cycle sans fin au service de l'humanité », asservissant la Terre pour toujours au profit d'une société inconsciente de ce que cela implique.
Le vrai talent de N.K Jemisin est de faire s'affronter plusieurs forces et projets : tout détruire car l'humanité ne mérite pas de seconde chance ou tenter de rééquilibrer les choses, de reconstruire une société plus inclusive, plus égalitaire qui vivrait en paix avec le Père Terre, apaisé d'avoir retrouvé sa fille la Lune.
Les deux projets nécessitent choix cornéliens et sacrifices pour la mère et la fille.
C'est une belle et tragique réflexion que tisse l'auteur en filigrane. Elle nous interpelle sur l'héritage que nous allons laisser, sur le fait que le bien-être des uns repose presque toujours sur l'esclavage, le pillage, le déni d'humanité. le propos est politique, il emprunte à différents registres qui renvoient tous au thème de l'exploitation : celle des richesses de la planète, de l'homme par l'homme…
« Personne n'a réellement envie d'affronter le fait que le monde est ce qu'il est par la faute d'ancêtres si arrogants, si égocentriques qu'ils ont cherché à réduire en esclavage la planète même ».

Challenge MULTI-DEFIS 2021

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Citations et extraits (28) Voir plus Ajouter une citation
Syl Anagist avait assimilé le monde entier depuis plus d'un siècle avant même ma création : il n'existait plus d'autre cité que Syl Anagist, plus d'autre langue que le sylanagistin – mais nul ne saurait avoir aussi peur que le conquérant ni être aussi étrange dans ses peurs. Il invoque sans arrêt des fantômes, terrifié à l'idée que ses victimes finissent par lui infliger ce qu'il leur a infligé – alors que, à vrai dire, elles n'ont aucune envie de se livrer à ce genre de mesquineries et sont passées à autre chose. Le conquérant vit dans la peur du jour où il apparaîtra aux yeux de tous qu'il n'est pas supérieur, qu'il a juste eu de la chance.
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L'énergie est une, bien qu'en des états et sous des noms multiples. Le mouvement crée la chaleur, équivalente à la lumière, qui ondule tel le son, lequel resserre ou disjoint les liens atomiques des cristaux, bourdonnants de forces plus ou moins puissantes. Résonance reflet de tout cela : la magie, émission rayonnante produite par la vie et la mort. Voici notre rôle : tisser les fils de ces énergies disparates. Les manipuler, les limiter et, à travers le prisme de notre conscience, produire une force unique qui ne puisse être niée. Transformer la cacophonie en symphonie. L'engin immense appelé Machine Plutonique est l'instrument ; nous sommes les accordeurs.

Voici notre but : la Géoarcanité. Laquelle vise à établir un cycle énergétique d'une efficacité infinie. Si nous réussissons, le monde ne connaîtra plus jamais le besoin ni le conflit... du moins est-ce ce qu'on nous dit. les contrôleurs ne nous donnent guère que les explications nécessaires pour nous permettre de jouer notre rôle. Il nous suffit de savoir que nous - petits nous sans importance - aiderons l'humanité à s'engager sur le chemin d'un avenir à l'éclat inimaginable. Nous sommes des outils, certes, mais de bons outils, servant un but magnifique. Il est facile d'y puiser une certaine fierté.
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Reconfigurer l'étranger en y injectant du familier ne l'aide guère, évidemment, parce qu'il n'y a rien de normal dans cette cité. Si les gens qui y ont vécu avaient des montures, il ne s'agissait pas de chevaux ; s'ils confectionnaient de la poterie ou des outils, ce n'était pas à partir d'argile ou d'obsidienne, et les artisans qui s'en chargeaient n'étaient pas de simples débiteurs. On parle des gens qui ont construit un obélisque, avant d'en perdre le contrôle. Qui sait quelles merveilles et quelles horreurs peuplaient leurs rues ?
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Quand la société à laquelle nous appartenons nous trahit, le processus de maturation comporte plusieurs phases. L'hypocrisie, la découverte de la différence, les mauvais traitements inexplicables ou incongrus nous tirent brutalement de notre complaisance. Suit une période d'égarement - nous sommes contraints de désapprendre ce que nous prenions pour la vérité, de nous immerger dans une nouvelle vérité puis de décider qu'en faire. Certains se plient à leur destin. Ils ravalent leur fierté, oublient la nouvelle vérité, embrassent le mensonge de tout leur être - parce qu'ils décident qu'ils ne valent pas grand chose. Forcément : si une société tout entière s'est vouée à leur assujettissement, ils ne peuvent que le mériter, n'est-ce pas ? D'ailleurs, même si tel n'était pas le cas, lutter serait trop douloureux ; ce n'est pas possible. Au moins, leur choix leur apporte un certain apaisement. Fugace.
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Le temps ne va pas tarder à manquer, mon amour. Je te propose d'en finir avec le commencement du monde. Tu es d'accord ? Tu es d'accord. Bon. Allons-y.

C'est tout de même étrange. Mes souvenirs évoquent des insectes fossilisés dans l'ambre, vies figées depuis longtemps éteintes, rarement intactes. Il n'en subsiste souvent qu'une patte, quelques écailles tombées des ailes, un morceau du métathorax - fragments qui seuls permettent de reconstituer le tout, restes brouillés, fondus par des fêlures sales erratiques. En affûtant mon regard pour scruter ma mémoire, les yeux plissés, je distingue des visages et des évènements qui devraient avoir un sens à mes yeux et qui en ont un... sans l'avoir. C'est bien moi qui ai été témoin de tout cela, et pourtant, ce n'était pas moi. Dans mes souvenirs, j'étais un autre être, comme le Fixe était un autre monde.
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Videos de N. K. Jemisin (11) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de N. K. Jemisin
N.K. Jemisin and Book Riot's Jenn Northington discuss Jemisin's novel The City We Became. This is a spoiler zone! No plot point is off the table from The City We Became!
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