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Pour venger son confrère Pedro de Arbués, assassiné en pleine cathédrale de Saragosse en 1485, le Grand Inquisiteur Tomas de Torquemada organise un gigantesque autodafé où sont brûlés des centaines d'hérétiques. Sous son impulsion, l'Inquisition espagnole est en train d'acquérir une puissance sans précédent. Pourtant, à sa grande fureur, des placards subversifs à l'effigie d'une rose se mettent à apparaître sur les murs de la ville. Un homme s'y intéresse de près : Angel de la Cruz, indicateur motivé par l'appât du gain, mais aussi artiste à ses heures. Il va bientôt croiser la route de Léa, fille d'un noble converti, au caractère bien trempé, elle aussi très versée dans les livres et les gravures. Tous deux vont se défier, pour finir par tenter de sauver leur liberté et celle de leur art.


Avec pour toile de fond la rumeur sanglante des persécutions religieuses du 15ème siècle espagnol, cette histoire dessine un joli motif poétique autour de deux personnages engagés dans la préservation de ce qu'ils ont de plus cher : l'art, fenêtre sur l'âme humaine, et ici, vecteur de liberté, symbolisée par cette rose épineuse, fragile et irréductible, d'une beauté d'autant plus délicate qu'elle fleurit dans le décor brutal d'un obscurantisme aveugle et meurtrier.


De Pedro Gracia de Benavarre et Bartolomé Bermejo jusqu'à Botticelli, en passant par les ateliers des graveurs et le nouveau pouvoir qu'ils donnent aux images en les reproduisant et en les diffusant, ce récit admirablement construit entrelace savamment les allégories pour nous livrer une histoire d'une grande beauté, aux messages intemporels : un hommage à la liberté de penser et de créer, à la puissance de l'art capable de parler sans mots, si bien comprise par les despotes de tout poil qu'ils ont toujours tenté de la contrôler et de la réprimer. Coup de coeur.

Lien : https://leslecturesdecanneti..
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Très jolie infidélité à l'Histoire, La rose de Saragosse est un roman délicat comme une fleur. Raphael Jerusalmy s'inspire de l'assassinat en 1485 de l'inquisiteur Pedro de Arbués dans la cathédrale de Saragosse pour tisser son intrigue. Qui assassina l'inquisiteur provincial chargé de la traque des marranes dans le royaume d'Aragon? On soupçonna les grandes familles de la cité qui voyaient d'un mauvais oeil le pouvoir grandissant du Saint-Office. Pour venger la mort de Pedro de Arbués, Torquemada mit en place à Saragosse un important autodafé au cours duquel on brûla des centaines d'hérétiques.
Raphaël Jerusalmy ne s'intéresse pas à l'identité des assassins de l'inquisiteur, mais à des placards collés le long des façades de la ville représentant le cadavre écorché de l'homme d'église. Le placard est signé d'une rose épineuse. Scandalisé par cette oeuvre subversive qui nargue l'Inquisition, Torquemada lance ses tueurs et ses mouchards sur la trace du mystérieux et talentueux graveur.
La rose est une allégorie de la résistance à l'obscurantisme religieux. Jerusalmy dépeint avec finesse la montée en puissance de l'Inquisition. D'abord réticente, une partie de la population de Saragosse finit par se plier à cette institution qui étend son pouvoir sur tout le territoire, gangrène le royaume d'Aragon, aidé en cela par l'assassinat de Pedro de Arbués, puis quelques années plus tard par le meurtre supposé du Santo Niño de la Guardia. Le décret de l'Alhambra de 1492, qui entraîne l'expulsion des juifs d'Espagne, achève la christianisation de la péninsule et l'unification des Espagne Médiévales.
Comment résister pendant sept ans aux tribunaux religieux, aux autodafés, aux bûchers, à la chape de plomb de l'obscurantisme, ? Deux figures se détachent, deux personnalités ô combien distinctes et pourtant si emblématiques de la société de l'époque, unies par l'amour de l'art.
Angel Maria de la Cruz y Alta Mesa, dont le patronyme n'est pas garant de privilèges, est le cadet d'une famille de la petite noblesse. Pauvre, méprisé, contraint de frayer avec la populace pour survivre, il ne sait pas encore qu'il est l'homme de la future Espagne. Car il est vieux chrétien et demain la pureté de son sang lui ouvrira toutes les portes. Léa de Montesa, quant à elle, est fille de conversos. Eduquée, cultivée, raffinée, elle est espèce négligeable, contrainte de taire ses capacités intellectuelles et ses dons naturels. « Elle n'est pas un homme. Sa sédition commence par là. En jouant du burin, elle ne défie pas uniquement la gent masculine. Elle menace les autres femmes qui se débrouillent très bien autrement, trichant, à la manière des artistes pour tromper la vigilance des pères et des maris. Léa s'insurge et se cabre d'une façon qui ne sied certainement pas à une demoiselle de la ville haute et que même ses servantes la voient d'un mauvais oeil car elles ne lui pardonnent pas son courage. Et puis, il ne faut pas oublier qu'elle n'est pas vraiment chrétienne. Ni Espagnole. Comme les roses de son patio, elle est greffée sur un plant qui n'est pas le sien. Et a beaucoup d'épines. »
Angel et Léa sont deux esprits libres, deux amoureux du beau, deux esthètes broyés par le fanatisme religieux. En faisant de l'art un outil de subversion, Raphaël Jerusalmy nous offre de très belles pages aussi délicates que la machine de répression est brutale. L'Homme aux yeux gris de Petru Dumitriu, s'ouvrait sur les mésaventures d'un converso fuyant Tolède, puis l'Espagne et se terminait dans l'atelier du Titien. La rose de Saragosse commence en Aragon et se termine avec Botticelli, comme si finalement la seule façon de survivre à la répression résidait dans l'exil, et dans le goût des belles choses.
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Voici un roman historique lumineux, porté par un récit mystérieux à l'écriture dense , à la fois épurée, subtile et elliptique, traversée par des portraits forts et simples, comme sait le faire l'auteur , dont j'avais lu avec bonheur "Sauver Mozart "en 2014.
Il tisse son récit de petites phrases à la fois puissantes et économes.
Nous sommes à l'automne 1485, à Saragosse , quand l'inquisition fait régner la terreur en Espagne...
Aprés le meurtre d'un prélat, membre de cette juridiction, le pére Arbués, dans la cathédrale de Saragosse, c'est le dominicain Torquemada qui est investi par le roi du titre de grand inquisiteur.

Qui est l'assassin ?
L'enquête se tourne vers les juifs convertis," naturellement" suspects , l'auteur se concentre entre deux personnages: Léa , la fille d'un riche converti , indépendante , espiègle et raffinée, élevée dans l'amour des livres et de l'art.Son pére , Menassé de Montesa, est un collectionneur précieux de gravures et de livres , possesseur d'une importante bibliothéque , avec un penchant pour les volumes mis à l'index et Angel de la Cruz, noble déchu, hidalgo en guenilles mouchard, indicateur de l'inquisition ,habitué aux moqueries ....mais artiste lui- même, toujours flanqué de son molosse impressionnant : Cerbero....
En même temps , une série de gravures satiriques --- infâme placard signé d'une rose épineuse placée en marge, telle une provocation, ------sont affichées dans toute la ville, en signe de résistance, au sein de ce royaume d'Aragon, autrefois béni, où vivaient ensemble chrétiens et Maures, juifs et païens , terre de liberté , peuple pugnace si jaloux, de son indépendance , tombé, hélas ! sous le joug d'une poignée de dominicains ....
"À quoi diable reconnaît- on un homme libre " ?
C'est un ouvrage mêlant religion et histoire , mais surtout l'art de la gravure, cousine de l'écriture, " Les graveurs , la plupart sont d'ailleurs anonymes . de simples faiseurs d'images....
Sous des apparences de naïveté dissimulent une acuité redoutable" ..." Cette alchimie des alliages , ce sortilège des pointeaux et des burins qui font surgir des images hors du néant ...." La gravure est l'art des rebelles...."
A l'aide d'une plume défiant les temps obscurs qu'elle évoque,retenue et sobre, l'auteur place l'art au coeur de ce roman , parmi les faux semblants , les non- dits, où chacun joue sa peau et porte un secret....
Une lecture à la fois vive et enrichissante, évocatrice où le mystère, l'art de la séduction et l'aventure exaltent la conquête de la liberté ....
La première de couverture est colorée et lumineuse .
Aux éditions Actes Sud .
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Pour une première rencontre avec Raphaël Jerusalmy, j'ai lu « La rose de Saragosse » un roman passionnant mêlant histoire, art et religion dans une époque tourmentée, celle de l'Inquisition espagnole.
Nous sommes en 1485. L'inquisiteur de Saragosse, Pedro de Arbuès, vient d'être assassiné au coeur même de la grande cathédrale. Ce crime va renforcer le pouvoir du Grand Inquisiteur Torquemada. Son arrivée sur place marque le début de persécutions accrues contre les Juifs et les conversos, ces Juifs convertis au christianisme. Angel de la Cruz, hidalgo au visage balafré profite de ces évènements pour gagner de l'argent en tant que « familier », Indic à la solde du plus offrant, suivi de près par un chien errant, cet homme frustre est aussi un artiste. Sa rencontre avec Léa de Montesa, fille d'un noble converti, élevée dans l'amour des livres et de l'art, va bouleverser sa vie. Ces deux personnages vont se défier, se rechercher, jouer de leur art pour se protéger et conquérir leur liberté.

Au-delà des personnages, au-delà de l'histoire, c'est l'art qui est au coeur de ce roman et surtout la gravure. L'art est donc une arme et ce n'est pas pour rien que tous les gouvernements cherchant à dominer une société s'attaquent en premier lieu à la liberté d'expression, aux journalistes mais aussi aux artistes. Les artistes sont aussi bien pourchassés que courtisés pour les politiques ou les religions. La rose de Saragosse est donc un hymne à la liberté artistique mais aussi un rappel à l'ordre : veillons sur nos artistes

À l'instar d'un graveur, Raphaël Jérusalmy trace à coup de stylet les personnages aussi complexes qu'attachants: Léa de Montesa, Angel de la Cruz, Yehuda Cuheno ou encore Torquemada sont décrits autant par les mots que par les blancs qui les entourent. Il y a un certain mystère sur ces pages et c'est aussi ce qui m'a séduite. J'ai aimé les non-dits, comme un trait de dessin à peine appuyé pour faire ressortir l'élément principal.
J'ai aimé ce roman finement ciselé par la plume élégante de Raphaël Jerusalmy.
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C'est en lisant le billet de Tatooa que j'ai eu envie de lire La rose de Saragosse. Mon ressenti est similaire et je crains de ne faire qu'un plagiat de billet ici.

Ressenti similaire, cela veut dire que j'ai beaucoup aimé. Pouvait-il en être autrement, alors que ce roman réunit des faits historiques comblés par une imagination qui rend le récit vraisemblable et un amour de l'art, de la gravure en particulier ?

Sans m'étendre sur le résumé, le livre cause de la montée en puissance de l'Inquisition espagnole, et des réactions de la communauté juive « convertie » (pas trop le choix), à la fois résistance via la caricature et préparation au départ. J'ai découvert l'assassinat du père Arbuès, prédécesseur de Torquemada comme Grand Inquisiteur, qui m'a fait penser à celui de Jules César aux ides de Mars (j'ajoute un lien vers une peinture, en commentaire). le portrait de Torquemada fait froid dans le dos, un tas de fanatisme fait homme. Je n'avais pas réalisé qu'il était contemporain de Savonarole. L'auteur Raphaël Jerusalmy décrit la réaction aragonaise à l'Inquisition comme loin d'être favorable. le fanatisme ne se propage pas si aisément, la noblesse rechigne à obéir aux diktats de l'Église.

Le roman cause aussi de la puissance du dessin pour frapper de moquerie les Puissants. La gravure est à l'honneur. L'auteur lui offre de magnifiques odes à sa gloire, des phrases et des métaphores poétiques. A cet art est associé l'égo des artistes méconnus mais fiers, qui confrontent leur talent à fleuret moucheté, obligé de le laisser dans la pénombre, l'un parce qu'elle est une femme, l'autre parce qu'il est un séide de l'Inquisition.
Je ne suis pas amateur de la technique narrative qui change le point de vue dix fois par chapitre. Il ne permet pas de s'imprégner des personnalités, de s'y installer comme sous une couette. Pourtant ici cela n'empêche pas de ressentir la force des personnages : Léa, Angel, Yehuda, Torquemada lui-même, esquissés au fusain et pourtant éclatants – de perversion pour certains – comme sur les dessins d'Angel. Même Cerbero, le chien d'Angel, a droit régulièrement à son point de vue.

Ressenti similaire – j'y reviens – sur la sensation de pas avoir assez de pages. Il y a beaucoup d'ellipses, en particulier sur l'arrestation des « caricaturistes » et sur la torture. Un voile pudique est déposé pour les cacher aux lecteurs. L'information parvient depuis l'extérieur de la scène, comme dans le théâtre antique qui ne montrait pas l'action mais la racontait.
La question se pose : aurais-je aimé lire les scènes affreuses que j'imagine ? Voir les personnages auxquels je me suis attaché brisés par le fanatisme et la torture ? Tout cela pour allonger le récit ? J'hésite sur la réponse. Peut-être cette dimension devait-elle rester en coulisse afin que ne resplendisse seulement que l'amour de l'art.

Ce fut une très belle lecture, sur une époque qui méritait un éclairage.
¡ Adelante !
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Aux premiers pas de la mondialisation quand s'illustraient sur les mers espagnoles et portugais, la communication balbutiante avait la rapidité des goélettes.
L'invention du livre sera l'affaire des lettrés, des religieux, pas de profanes.
Restera la gravure.
Aussi léger qu'un smart phone, aussi anonyme qu'un pseudo, aussi rapide qu'un tweet, la gravure, d'une seule esquisse, est en mesure de diffuser un message rageur tel un tweet. Propageant des rumeurs sous le manteau au nez et à la bure des dominicains, l'utilisation de la gravure ébranla les pouvoirs de l'inquisition.


Raphael Jerusalmy élabora sur cette invention une diabolique intrigue, qui pris de court le dominicain Torquémada investi par le roi du titre de grand inquisiteur.

Est-ce la perfide caricature du grand maître de l'inquisition qui déclencha ses fureurs ou la mémoire d'un fieffé prêtre inféodé pieusement au respect pointilleux des désirs du grand Torquémada ?
La réponse du Maitre fût immédiate et féroce, à l'image de ses saintes aigreurs, c'est tout simplement l'horreur qu'il convoqua, en mettant en place à Saragosse un autodafé au cours duquel on brûla des centaines d'hérétiques ( des hommes de toutes religions, convertis ou non, à traduire par de possibles opposants ).


Qui surveiller ? Sinon les artistes, et tous les autres, les plus nobles comme les plus vertueux, les grands et les manants, les juifs, les ottomans. tous sont soupçonnés.
Angel de la Cruz, noble déchu au visage balafré, indicateur de l'inquisition, mais artiste lui- même, toujours précédé de son molosse Cerbero, est sous haute surveillance.


Léa de Montesa, fille d'un noble converti, défie ses admirateurs, Angel de la Cruz ou Yehuda Cuheno . Maîtresse de son art, elle espère conserver son rang, et protéger sa famille.

Des gravures où apparaissaient la rose, pouvaient brûler les doigts des plus téméraires et des plus déterminés des opposants au régime de cette Espagne livrée au St Office.


Cette fièvre monastique ébranla le pape lui même qui condamna de la plus verte des bulles, l'incendiaire de la chrétienté. Ce dominicain n'avait rien compris, le pape espérait conquérir les âmes pas les brûler même par amour !
Raphael Jerusalmy donne un éclairage de la situation de l'Espagne très intéressant. Car la question sous jacente, est celle-ci, qui tirait les ficelles de cette fièvre dominicaine ? La gouvernance d'un pays par les flammes de l'enfer a ses limites.


Les jours furent rudes pour les juifs, et au premiers rangs desquels les convertis.
Surprenante lecture de cette douloureuse période.



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L'art, le dessin, la gravure, le fanatisme religieux. ça ne pouvait que me plaire, non ?
Un petit livre - trop petit, j'aurais apprécié un peu plus de pages - vraiment intéressant, allégorique, à la fois poétique et terrible, écrit pourtant avec des phrases courtes, actuelles et percutantes.
C'est un mélange exotique, souvent tenté, pas souvent aussi réussi, un mélange de sensibilité et de réalisme, d'histoire et de poésie, d'obscurantisme (avec Torquemada, l'inventeur des autodafés, le brûleur de livres "non chrétiens", provoquant la perte d'une grande partie de l'histoire espagnole (711 à 1492), rien que ça...) et de lumière (l'art qui ouvre l'esprit), d'ambiguïtés, de soumissions et de rébellions, et de foi.
C'est trop effleuré pour être réellement choquant, à peine évoqués les brasiers et tortures de l'inquisition, mais se concentre l'air de rien sur tout ce qui sous-tend cette période noire de l'Histoire. Vu, bien sûr, du côté juif, peuple destiné à l'errance, éternelle, dans ce livre...
Je n'ai sans doute pas "vu" tout, car en ce moment je lis pour ne pas penser, justement.
Bref, c'est très bien, j'y reviendrai peut-être en un temps plus calme et plus clément.
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Voilà qui me réconcilie avec Raphaël Jerusalmy après mon manque d'enthousiasme pour La confrérie des chasseurs de livres.

A Saragosse, en 1485, le meurtre de l'inquisiteur Pedro de Arbués est le prétexte tout trouvé pour Torquemada, le Grand Inquisiteur ,pour se lancer dans une chasse féroce et sans scrupule à ceux qui osent défier le pouvoir religieux et renforcer les persécutions faites aux juifs, qu'ils aient persisté dans leur religion ou qu'ils soient nouvellement convertis.

Pour parvenir à ses fins, Torquemada a , en particulier ,de nombreux indics, les familiers, dont Angel de la Cruz, un noble désargenté qui va rencontrer Léa de Montessa, la fille d'un riche juif converti : leur passion de l'art les rapproche.

Jeu du chat et de la souris entre Angel et Léa, entre Torquemada et ceux qui osent afficher dans la ville, ces fameux placards, en l'occurrence des caricatures le visant en particulier, signées d'une fine rose avec épines . Et n'est pas toujours chasseur celui qui le croit , c'est le pouvoir merveilleux des romans de travestir la réalité sous forme de croquis et de roses et de faire rêver que la violence n'a pas toujours le dernier mot .

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Ce roman est imprégné du climat malsain et menacant de l'Inquisition et plus particulièrement sous les traits de Torquemada le Grand Inquisiteur qui est de passage à Saragosse.La brutalité et l'ignominie de cette vague sanglante de bêtise s'oppose au raffinement et la subtilité de la famille de Menassé et plus encore de la jeune Léa à travers l'Art de la gravure dans ce qu'il a de plus travaillé et de plus délicat.Le Familier, Angel de la Cruz apparaît comme le trait d'union entre ces deux mondes et semble révéler chez chacun ce qui l'habite au plus profond de son être.
Si l'écriture est indéniablement travaillée et gorgée de culture, je n'ai pas succombé au charme du jeu de séduction vanté dans la 4ème de couverture.Les égos m'ont parus trop importants pour laisser une place à l'émotion et j'ai trouvé plus de rivalité ou de quête narcissique que de véritables regards portés sur l'Autre en terme de séduction...Comme toute critique, la mienne est evidemment subjective...Je ne voudrais pas qu'elle empêche le désir de découvrir ce roman car je pense sincérement que c'est un écrit de qualité.
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Ravie de retrouver la plume de Raphaël Jerusalmy dont La confrérie des chasseurs de livres m'avait beaucoup plu. Et pas mécontente de le suivre à nouveau dans son exploration du 15ème siècle, une époque particulièrement clé tant en termes d'inventions que de combats pour la liberté. L'auteur choisit le prisme des arts, pour illustrer les luttes contre l'ignorance propice à toutes les dictatures. A commencer par celle de la toute puissante Église catholique.

Dans La confrérie des chasseurs de livres, François Villon devenait le héros bataillant, sous l'influence de Louis XI pour favoriser la propagation des livres et ainsi de la connaissance, face à la censure de l'église de Rome. Avec La rose de Saragosse, nous sommes une vingtaine d'années plus tard, en 1485, en Espagne où l'Inquisition fait régner la terreur sous l'égide de Torquemada. On envoie rapidement au bûcher à cette époque, des listes circulent, incroyants, infidèles ou autres "mal convertis"... la délation vit certaines de ses grandes heures, on connaît le principe et le type de politiques qui visent à la favoriser. Certains en vivent d'ailleurs, comme cet Angel de la Cruz, un noble déchu et désargenté qui vend ses services au plus offrant. Un indic qui possède néanmoins un réel talent de dessinateur même s'il l'utilise pour mieux traquer ses proies. A Saragosse, un petit malin s'amuse à narguer Torquemada, des caricatures gravées et signées d'une rose s'affichent sur les murs, déclenchant la fureur du grand Inquisiteur. "A quoi, diable, reconnaît-on un homme libre ?" enrage Torquemada. Bien décidé à dénicher le ou les coupables, Angel, flanqué de son horrible chien Cerbero s'intéresse de plus en plus près à deux familles, les de Montessa et les Cuheno, des juifs convertis dont les plus jeunes, Léa et Yéhuda sont amis depuis l'enfance. Commence alors un jeu du chat et de la souris sur fond d'affinités artistiques, tout en ombres et lumières.

Encore une fois, Raphaël Jerusalmy orchestre un roman vif, sur les traces de ceux, anonymes ou célèbres qui ont oeuvré sans relâche pour la liberté et le libre arbitre. Liberté de penser, liberté de créer et de diffuser sa vision des choses. Il trouve le ton juste pour exalter le pouvoir de l'art et des mots magnifiques pour parler de la gravure "l'art des rebelles" dit Léa, "Elle détourne encre et papier de l'usage que leur ont assigné les scribes. Elle élargit le stylet de l'emprise des lettres et des signes, lui donnant plus de leste. Elle émancipe nos regards des diktats auxquels les peintres l'astreignent. Elle oblige à voir autrement. Sans artifices ni demi-teintes".

Et le lecteur d'admirer une fois encore cet art subtil qui consiste à rapprocher les époques, à puiser dans les vastes archives de la connaissance pour mieux mettre en garde sur les dangers qui guettent notre siècle. Et à rappeler les valeurs qui fondent le monde libre.
Lien : http://www.motspourmots.fr/2..
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