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EAN : 9782809710236
288 pages
Editions Philippe Picquier (22/08/2014)
3.61/5   59 notes
Résumé :
La beauté du diable, ou comment le désir vient aux femmes. Le désir d'être belle, de se croire une reine, le désir d'allumer les regards de convoitise et d'envie sur son passage. "J'ai un secret. J'appartiens à un club. Vous pourriez l'appeler le club des passionnées de beauté. Mais ce n'est pas de la beauté des autres que nous sommes éprises. Nous sommes les véritables esthètes, nous portons notre beauté sur nous. Et même si nos maisons sont vieilles et délabrées, ... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (30) Voir plus Ajouter une critique
3,61

sur 59 notes
Les histoires d'addiction parlent souvent d'alcool ou de drogue mais beaucoup plus rarement de la dépendance aux vêtements, aux chaussures et aux sacs à mains !
Ici, la jeune japonaise que l'on suit pendant quelques années devient peu à peu une acheteuse compulsive, et cela l'entraîne dans une spirale infernale entre euphorie, exaltation, mensonges et gros soucis financiers au point de remettre toute sa vie en question.

Pendant toute une partie du roman, l'héroïne est accro au luxe et elle énumère consciencieusement les grandes marques françaises ou italiennes qui la font rêver.
Elle nous entraîne dans son obsession pour les vestes en cachemire, les sandales en cuir, les robes aux coupes parfaites et les sacs à main griffés, qu'elle assimile à la beauté, à la jeunesse et à la réussite.
Mais cet aspect futile s'estompe rapidement pour laisser place à une vraie histoire, celle d'une femme qui souffre, qui n'a pas la sensation d'avoir sa place dans la société, qui croit lutter contre un vide immense en achetant des robes en lamé ou des escarpins à talons vertigineux.

L'auteur nous montre un autre aspect du Japon, un Japon où la honte et le fait de perdre la face est une des pires choses qui puisse arriver à une personne, au point qu'on préfère parfois ne plus jamais parler d'une personne qui a fait honte à sa famille, un Japon compétitif, où les enfants sont poussés dès leur petite enfance à être les meilleurs dans tous les domaines, un Japon où les femmes sont mères au foyer ou reléguées à des postes subalternes en attendant de se trouver un mari pour les entretenir, un Japon qui rêve d'Occident mais qui est gouverné par les Yakuzas, un Japon enfin qui confond le bonheur et l'acquisition des biens au point de se perdre en route, au détour d'un temple, d'un jardin zen ou d'une salle de jeu.
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Pauvre Kayochan... pauvre petite Madame Bovary du Soleil Levant... Seuls vêtements, accessoires et cosmétiques de luxe ne viennent éclairer une vie familiale qu'elle juge étriquée et insipide. Pour lutter contre ce vide qu'elle sent croître en elle après les désillusions du mariage et du rôle de mère au foyer, elle met le doigt dans un engrenage infernal. La frénésie des achats compulsifs, des soldes privées, etc lui donnent, l'espace d'un moment, la sensation d'être pleinement vivante. Chimère de plus puisque rien ne peut combler durablement le gouffre en elle.

Jha Radhika est une auteure d'origine indienne qui a vécu un temps à Tokyo, ce qui lui a donné l'idée de ce roman. Elle retranscrit parfaitement des éléments constitutifs de la société japonaise : le mari dévoué jusqu'à point d'heure à son entreprise, la femme attachée au foyer et à l'éducation des enfants, ... Puis les dérives du consumérisme des folles années 80, avant l'éclatement de la bulle financière et de la grave crise économique qui ébranle l'archipel. le luxe n'en a pas moins continué à obséder nombre de Japonaises, parfois prêtes à tout pour un sac Vuitton, des chaussures Ferragamo et autres valeurs sûres du prestige vestimentaire occidental. Kayo en suit d'ailleurs la pente avec un abandon presque lascif.

Le thème n'est pas sans rappeler celui du roman de Murakami Ryu, Love and Pop.  Il y traite de la pratique de l'enjokosai, rendez-vous tarifés (pour ne pas dire prostitution ) auxquels se livrent lycéennes et étudiantes, voire collégiennes, avec des hommes plus âgés pour pouvoir s'offrir tous ces produits de grandes marques. La société japonaise étant ce qu'elle est, il est de bon ton de ne pas déparer par rapport au groupe et de suivre la tendance. Sous peine d'exclusion, condamnation sociale insupportable au Japon.
Le caractère "carcan" de cette société est dépeint à merveille par Jha Radhika, notamment avec le groupe des mères de famille ou encore le rôle des voisines qui exercent une pression sociale terrible, prêtes à enfoncer le clou qui voudrait dépasser, pour reprendre un proverbe nippon.

Avec talent, l'auteur nous entraîne dans la spirale compulsive de Kayo et dans les méandres de la condition féminine de l'archipel, avec son culte de l'apparence, du jeunisme et du luxe. Ça ne résume certes pas ce magnifique pays mais c'est néanmoins une réalité qui ressort dans d'autres romans et essais sociologiques comme ceux de Muriel Jolivet. La narration à la première personne rend l'histoire encore plus immersive car on se trouve dans la tête même de cette acharnée de la beauté.

J'ai pris grand plaisir à lire ce roman maîtrisé et finement écrit. Les passages dans le vieux temple, chez okaasan et otoosan, m'ont tout particulièrement ravie. Une lecture que je recommande chaleureusement.
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Kayo est une jeune japonaise qui a tout pour être heureuse : elle épouse son premier amour, qui va vite construire une carrière solide dans la banque et ils ont deux beaux enfants. Mais Kayo va très vite devenir totalement dépendante de son désir des belles choses : sacs, chaussures, vêtements haute couture... Tout est, pour elle, à acheter et à avoir dans sa garde robe. Elle possède au départ une belle somme d'argent donnée par sa mère, mais elle va très vite dépenser beaucoup plus et se mettre dans une situation qui n'accorde aucun retour en arrière...
Ce roman n'est pas un livre comme les autres, il ne s'agit pas ici de décrire la vie d'une accro au shopping ou d'une femme superficielle qui ne veut que de belles choses... On sent tout le malaise de Kayo, on est submergé par sa descente aux enfers et on a beaucoup de mal à ne pas pouvoir la prévenir de ce qui l'attend. C'est une héroïne attachante et dont la solitude nous attriste vraiment... Une écriture fluide couronne le tout et j'ai passé un bon moment de lecture.
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L'histoire se passe au Japon mais l'auteure est indienne; elle s'était fait un beau succès déjà avec le livre "L'odeur".
Ce livre, pour cette rentrée littéraire, devrait connaître du succés aussi.
Titre curieux qu'on comprend mieux dès les premières pages de ce livre écrit en anglais (titre original : "My beautiful Shadow").
Le diable ici, c'est le désir de consommation, d'être belle, d'avoir des vêtements luxueux et griffés, de se sentir élégante et remarquée.
Kayo est une jeune mère au foyer japonaise; Très vite elle s'ennuie dans sa petite vie étriquée: son mari, banquier, travaille beaucoup et lui consacre peu de temps, son quartier est triste, ses voisines l'espionnent constamment.
Pour compenser cette frustration grandissante, que les Japonais nomment "makkura", elle se met à fréquenter "les clubs de beauté" et devient une "accro" aux soldes privées et aux achats luxueux.
Le premier pas vers la dépendance est vite franchi. Bientôt la jeune femme va acheter de plus en plus compulsivement, et se retrouve dans la foule des femmes au foyer et des "office ladies" prêtes à tout pour avoir les plus belles marques sur le dos.
Et c'est l'engrenage fatal: consommation, folles dépenses, endettement croissant, arrangements avec la banque et les usuriers (de redoutables "yakouzas"..)
Un engrenage qui aurait pu être fatal mais heureusement le mari va enfin enrayer la spirale infernale...
Un livre très vivant, qui se lit d'une traite..
Cette Madame Bovary version Soleil levant nous fait découvrir les subtilités de la mentalité japonaise, et ce "carcan" qui enferme encore les jeunes femmes de nos jours.
On découvre les quartiers de Tokyo, les habitudes des Japonais, les rapports sociaux complexes, le poids des traditions familiales.
Un agréable moment de lecture.
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Je veux tout d'abord remercier chaleureusement Babelio et la splendide maison d'édition Picquier pour m'avoir fait découvrir ce roman.

Là, on l'on s'attendrait à une "confession d'accro au shopping" à la sauce nippone, c'est une surprise de taille que ce roman. Une descente aux enfers par addiction sur fond de surendettement, prostitution et secrets. Cette spirale du mensonge emporte l'héroïne dans un gouffre qu'elle nomme "makura", un état d'hébétude et de tristesse extrême. Des scènes parfois choquantes, émouvantes qui ne laissent en aucun cas indifférent. Un traitement intéressant du thème de l'addiction, peu ou pas abordée du point de vue vestimentaire. L'auteur décortique le cheminement psychologique de l'addiction (le déni, l'abandon, le renoncement, la joie intense quand l'addiction est satisfaite, le caractère éphémère de cette joie, la culpabilité et ainsi de suite comme un éternel recommencement).

L'écriture est limpide, claire et parfois crue. Les personnages secondaires qui gravitent autour de Kayo sont complexes et perturbants. L'auteur n'épargne personne dans ce monde où tous les gens ont un côté sombre (j'ai été particulièrement surprise par Ryu de ce point de vue).

Un roman qui laisse un certain malaise au coeur, l'empathie pour les personnages rend nauséeux face à leurs comportements contradictoires et excessifs. Un parfait contraste entre la société japonaise actuelle si standardisée et normée et les dérives énormes qu'elle provoque dans ce récit.

Mes scènes préférées : l'"oasis" de quiétude du séjour au temple, la révélation de l'interlocuteur de Kayo (à qui elle raconte son histoire).

Bref, ce roman est un lotus, une merveille ancrée dans des racines fangeuses et obscures.
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critiques presse (1)
Telerama
03 décembre 2014
Radhika Jha décrit à merveille l'absence de confiance en soi qui peut mener à l'addiction robotique et destructrice. Il y a, dans son écriture, une simplicité envoûtante, qui met à nu les comportements humains les plus déviants, et les plus déchirants. Postadolescente boulotte et suicidaire, incapable d'exister par elle-même, Kayo s'est construite dans la copie, l'imitation.
Lire la critique sur le site : Telerama
Citations et extraits (22) Voir plus Ajouter une citation
Quelle chose magnifique qu’un escalator – c’est comme marcher sur le dos d’un serpent. Vous avancez sans avoir besoin de bouger un muscle. Vous volez dans les airs mais vous êtes suspendue, vos pieds douloureux sont soulagés, délivrés de leur labeur. Du coup, vous vous tenez plus droite, vous vous grandissez. Vous relevez le menton et regardez devant vous avec avidité. Qu’allez-vous trouver aujourd’hui au club ? Comment les achats que vous ferez réécriront-ils l’histoire de votre vie ?
Tandis que vous vous élevez sans effort sur le nouvel escalier mécanique, très cher et très silencieux, vous éprouvez une excitation croissante, une impatience qui ne laisse place à aucun autre sentiment. Vous vous sentez vide mais heureuse car vous savez que le vide sera bientôt comblé.
Alors surgit cette émotion particulière que vous attendiez, cette sensation qui vous ramène sans cesse au departo. Elle commence comme un léger chatouillement dans les orteils, comme de petites bulles envahissant chaque cellule du corps. Mais ce n’est que le début. Une fois le joyeux pétillement retombé, une concentration silencieuse s’empare de l’esprit, tandis que commence la chasse.
[…] De même qu’en amour, quand enfin vous trouvez l’objet magique, le vêtement ou l’accessoire qui est fait pour vous, votre cœur se remplit de gratitude. Oui, de reconnaissance, car vous sentez sur vous la main des dieux. Vous avez été choisie. Vous avez gagné. Vous vous précipitez devant toutes les autres belles femmes intelligentes et déterminées qui font exactement la même chose que vous, vous vous emparez de l’objet de votre désir et cherchez la cabine d’essayage la plus proche. Si vous êtes un membre chevronné comme moi, nul besoin de chercher, vous savez où elles se trouvent. La topographie du departo est gravée dans votre cerveau.
Et maintenant, nous arrivons au cœur de mon club. Notre endroit de prédilection, à nous autres femmes – le salon d’essayage. Y entrer, c’est comme se retrouver seule avec son bien-aimé pour la première fois. Le moment est venu de tenir votre trophée entre vos mains et de goûter le plaisir de la propriété. Loin des regards indiscrets, vous pouvez caresser votre butin, l’embrasser et enfin vous glisser dedans. Dans le secret de la cabine d’essayage, vous savourez votre intimité. Là, vous en prenez possession pour la première fois.
Une fois satisfaite, je regagne le comptoir avec mon trophée. […] Et je suis heureuse. Et ce bonheur durera jusqu’à ce que je regagne ma chambre. Grâce à vous, les Américains, nous avons découvert le bonheurisme. Et maintenant, nous voulons que le monde entier soit heureux et achète, achète et achète encore, comme nous. Alors, la paix régnera dans le monde.
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Les gens disent que la frontière entre la vie et la mort est très claire. La vie est la vie, la mort est la mort et les deux ne se rencontrent jamais. Mais je crois qu'en réalité, elles cohabitent dans un même corps. On peut être vivant à l'extérieur - manger, boire, travailler - et se sentir mort à l'intérieur.
Lorsque mon mari m'a emmenée voir un prêtre pour me guérir de mes désirs mauvais, j'ai demandé au religieux comment il se pouvait qu'on soit vivant à l'extérieur et mort à l'intérieur. Il m'a répondu que c'était possible parce que parfois l'âme mourait mais l'esprit ne s'en rendait pas compte et ordonnait au corps de continuer à vivre.
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Quand ils sont venus au Japon après la Deuxième Guerre mondiale, les soldats américains ont offert à leurs "girls" des bas nylon extra-fins. Avant cela, la Japonaise moyenne ne portait pas de vêtements occidentaux, sauf si elle travaillait dans un bureau à l'occidentale ou si elle venait de la haute société chrétienne très occidentalisée.
Mais quand les Américains sont repartis, les citadines de toutes les classes sociales avaient adopté les tenues occidentales.
Désormais quatre-vingts pour cent des vêtements proposés dans les grands magasins comme Mitsukoshi ou Isetan, qui au départ ne vendaient que des kimonos, étaient importés d'Occident.
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Aussi n'en voulais-je pas à la douleur, elle n'était que l'envers de mon bonheur. Et là, dans ma petite maison en désordre qui sentait le poisson, j'étais heureuse comme je ne l'avais jamais été. C'est alors que j'ai pris conscience que la douleur pouvait avoir du bon. A travers elle, il est possible de se remémorer et revivre une expérience avec davantage d'intensité. La douleur effaçait aussi en moi tout sentiment de culpabilité.
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La voie qui permet d'accéder au statut de superwoman est voilée de mystère et le restera à jamais. Mais je vais dire où elle se trouve; Pour être une superwoman, vous devez créer en vous-même un jardin secret, dans lequel vous jetez toute votre fange - tout ce que vous ne pouvez ni dire ni ressentir -, votre lassitude, votre colère, votre haine pour votre famille et vos responsabilités, la routine immuable de votre vie. Dans le silence infini de la nuit, vous regardez pousser votre jardin du mal. Le jour, vous le piétinez et vous êtes une superwoman.
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