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Critique de chocobogirl


A 40 ans, Hugo forme un joli couple avec Alice et leur petite fille Violette. Pourtant depuis le départ de Fred, c'est un peu le vide qui dirige sa vie. Fred, l'ami de toujours, qui a décidé de mettre fin à ses jours. Fred, dont Hugo se refuse à effacer le numéro de téléphone et persiste à appeler. Fred qui, dans son testament, laisse à ses 3 plus proches amis, des présents un peu décalés : un livre à celui qui ne lit pas, un accordéon, un monocycle. Tout ça n'a pas de sens, et la vie devient de plus en plus flottante pour Hugo en pleine crise existentielle.

Après le très chouette diptyque Une nuit à Rome, Jim poursuit sa veine intimiste avec un récit qui se penche à nouveau sur ces trentenaires / quarantenaires entre deux eaux et en plein doute sur leur choix de vie.
Nous suivons ici Hugo, sa petite famille et ses 2 copains de la bande à Fred, Étienne et Jean-Marc. le suicide de leur pote les a laissé chaos et c'est l'incompréhension, la colère même qui président désormais lors de leurs retrouvailles. le leg que ce dernier leur destine les laisse d'autant plus dubitatif qu'il ne leur ressemble en rien. Ils tentent néanmoins de reprendre leurs petites habitudes, les soirées entre copains où on ressasse une jeunesse qui n'est plus ou le footing où on n'hésite pas à regarder les jolies filles en terrasse.
Hugo semble le plus dépassé par tout ça. Vivotant avec sa compagne de jobs pas très glorieux, le quotidien s'égrenne de factures toujours trop nombreuses et de voyages sans cesse repoussés. La routine s'est peu à peu installée entre Alice et lui et, malgré l'amour, malgré la joie rayonnante de leur fille Violette, petites déceptions, fatigue et mensonges deviennent plus prégnant. Par exemple, il y a la mère d'Hugo qui s'invite une fois de plus pour une cohabitation dite temporaire avec le couple et que Hugo n'ose pas annoncer à Alice. La dernière s'est très mal passée entre les deux femmes et fut cause de nombreux heurts. Et puis, il y a cette pensée chez Hugo de vivre dans le mensonge :

« Combien de temps ça peut durer, se regarder droit dans les yeux sans se mentir ?
Est-ce qu'on est condamnés à ne jamais être ce qu'on paraît ?
Je suis un menteur, Alice, et je te ferais mal avec mes mensonges. Combien de temps je pourrai encore me regarder en face en sachant qui je suis vraiment ?
Combien de temps je pourrai… me taire ?…
J'ai envie de hurler. de hurler, comme seuls savent hurler… les morts… »

Jim et Tefenkgi nous raconte ici la vie. Celle d'une génération qui peine à grandir, à quitter le confort heureux d'une jeunesse sans nuages. La vie d'hommes et de femmes coincés dans un avenir fait de chômage, d'emploi mal payés, de quotidien étriqué qui semble loin des rêves de leur enfance. Où sont donc passés les grands jours ? En attendant, on patiente, on fait avec, on déconne aussi. Car Hugo est véritablement un menteur. Sa vie un peu lisse et tristounette comporte ses ombres et lorsque la révélation arrive en fin d'album, le lecteur a envie de crier, de l'envoyer paître. On ne l'avait pas soupçonnée, la vérité fait mal, et encore plus à ses proches.
Jim dévoile ses personnages et leur univers avec une douce tristesse. Leur quotidien se dévoile peu à peu et Hugo interagit souvent en voix off. On se prend d'affection pour ces hommes qui nous ressemblent avec leurs soucis, les morts qui les entourent, les copains qui ressourcent et la famille qui encombre parfois. La narration se déroule avec lenteur et l'auteur emmène inévitablement son lecteur sur un choc final totalement surprenant et terriblement frustrant ! L'album se ferme sur cette révélation et fait regretter que la suite de cette histoire se soit pas encore parue.
Lâcheté, mensonges, fuite. La crise de la quarantaine vue par Jim n'est pas très belle à voir. Les questions affluent, la mort des amis renvoie à notre parcours, à nos choix de vie, à nos erreurs. Hugo la gère plutôt mal mais il va devoir affronter ses responsabilités un jour ou l'autre. Une façon définitive de devenir adulte peut-être ?
C'est Alexandre Tefenkgi, l'auteur de Tranquille courage, qui illustre le scénario de Jim. Une collaboration fructueuse qui révèle la complicité des deux hommes. On retrouve la même lumière, la même douceur que dans Une nuit à rome. Si le trait se fait plus réaliste, il sait prendre son temps et distille une ambiance douce-amère qui séduit.

Où sont passés les grands jours ? est un récit profondément humain. Reflet de la vie dans toute sa mesure, avec ses failles, ses faiblesses, ses espoirs déçus, ses erreurs, cet album nous emporte avec délicatesse dans un quotidien banal pour mieux nous en révéler ses reliefs. Réflexion sur la vie, la mort, l'amour, l'amitié, le sens profond de l'existence, il se veut tout ça à la fois.
Lien : http://grenieralivres.fr/201..
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