Citations sur De regrettables incidents (18)
Aux exilés, seule la nuit est indulgente. Le sommeil n'a ni lieu ni temps. Tout s'efface. Si un rêve surgit, il ignore le présent. Le dormeur rejoint le monde inaltérable où, depuis toujours, il mène une seconde vie, loin de la première. Il s'évade des barreaux où, comme un oiseau captif, il se cogne au réel. Il plane au-dessus des songes, dont les scènes se succèdent sans heurt et ne sauraient l'atteindre. Le temps ne s'écoule plus. Les choses se superposent sans souci d'avant ou d'après. Est-ce le bonheur? C'est au moins la quiétude. On s'en satisferait, mais, inexorablement, le matin revient et l'exil recommence.
La vie est un théâtre. A peine nés, on nous pousse sur les planches. Nous saisissons au vol un costume, un masque pour nous couvrir. On nous glisse un texte plein de trous... On improvise vaille que vaille jusqu'à ce qu'on tombe sur son destin.
Il s’en est sorti avec la conclusion qu’une exposition trop intense à l’amour pouvait très bien provoquer un cancer à l’âme.
Heureusement que Dieu s'est exporté en Afrique ! Où trouverait-Il encore des cœurs sensibles pour Le servir. L'abbé Nzinga semble en confidence avec Lui . Il Lui cause à mi-voix. Il excuse l’assemblée qui s'occupe de tout sauf de prier. La vie est difficile pour les pauvres humains. Dieu aurait peut-être pu fabriquer un monde plus simple, au lieu de ce fatras inextricable de bien et de mal dans lequel ils se débattent.
( p 149)
De toute façon, Arsène Chockier, que ses parents avaient pris soin d’engendrer à titre unique et définitif afin de préserver l’héritage, n’a jamais manifesté le moindre intérêt pour les activités ancestrales de la famille. Malgré une scolarité tumultueuse, il se flatte d’occuper un poste à l’université de Liège, dans le département de philosophie, une science à laquelle personne, à Jalbour, ne comprendrait rien, ce qui le dispense d’en faire étalage. La seule expression de son érudition tient dans une certaine façon de lever le menton qui confère à ses paupières l’obliquité caractéristique des universitaires se penchant vers le commun des mortels. (p. 82-83)
La vie est un théâtre. A la fin, les masques tombent. Mais c'est trop tard. La pièce est finie. (p.287)
Une exposition trop intense à l'amour pouvait très bien provoquer un cancer de l'âme. (p.211)
Mes parents ont supporté leurs souffrances grâce à leur foi. Quand nous sommes arrivés ici, je me suis mis à lire les textes qui leur avaient donné tant de force, moi, qui, en bon communiste, avais renoncé à toute religion. Eh bien, je dois te le dire, Olia, il n'y a rien, rien dans les Ecritures, qui puissent expliquer la souffrance de l'innocent [...]. J'espère que Dieu non plus n'est pas responsable. J'espère qu'Il n'a aucun pouvoir sur tout cela. Sinon, qui pourra Lui pardonner?
Aux exilés, seule la nuit est indulgente. Le sommeil n'a ni lieu ni temps. Tout s'efface. Si un rêve surgit, il ignore le présent. Le dormeur rejoint le monde inaltérable où, depuis toujours, il mène une seconde vie, loin de la première. Il s'évade des barreaux où, comme un oiseau captif, il se cogne au réel. Il plane au dessus des songes, dont les scènes se succèdent sans heurt et ne sauraient l'atteindre. Le temps ne s'écoule plus. Les choses se superposent sans soucis d'avant ou d'après. Est-ce le bonheur ? C'est au moins la quiétude. On s'en satisferait, mais, inexorablement, le matin revient et l'exil recommence.
La vie est un théâtre.A peine nés,on nous pousse sur les planches.Nous saisissons au vol un costume,un masque pour nous couvrir.On nous glisse un texte plein de trous.Les bons et les méchants sont déjà sur scène.Comment les distinguer? On improvise vaille que vaille jusqu'à ce qu'on tombe sur son destin,tandis que,tapi dans le noir,de l'autre côté de la rampe,un regard fait de centaine d'yeux nous dévore en silence.