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Pietrolino tome 0 sur 3
EAN : 9782731622737
94 pages
Les Humanoïdes associés (26/10/2011)
4.19/5   8 notes
Résumé :
Paris, sous l'Occupation. La vie y est terne, grise et douloureuse. Toutes ces restrictions, ces exactions, ces injustices... C'est dans un autre monde qu'il faudrait s'échapper pour retrouver le goût de la fantaisie, du rire et oublier quelques instants la sordide réalité quotidienne.
Pietrolino est ce magicien. Accompagné de Simio, son fidèle compagnon de route qui veille sur lui (c'est lui qui nous conte l'histoire), Pietrolino le saltimbanque enchante, le... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (4) Ajouter une critique
Confident de ses silences
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Cette intégrale regroupe les deux parties, initialement parues en 2 albums, le premier Pietrolino, tome 1 : le clown frappeur en 2007, et le second en 2008 Pietrolino, tome 2 : Un cri d'espoir 2008. C'est l'oeuvre d'Alejandro Jodorowski pour le scénario, et Olivier Boiscommun pour les dessins et les couleurs.

En pleine seconde guerre mondiale, à Paris, les soldats allemands tirent sur un immeuble, puis finissent par balancer des grenades à travers les fenêtres du premier étage. Sous les ordres d'un officier nazi, ils pénètrent ensuite dans le bâtiment. Les piétons entendent une série de rafales, ce qui signifie que les soldats ont tiré à bout portant. Ils font ensuite sortir les survivants avec les mains sur la tête. Dans la rue, la scène a été observée par Pietrolino, un homme tout habillé de blanc, Colombella vêtue d'une robe rouge collante et suggestive, et Simio un nain en habit de singe avec une flute à la ceinture. Ils regardent les soldats faire monter les prisonniers dans une camionnette. La rafle étant terminée, ils pénètrent dans un bistrot, en se demandant si le patron les acceptera. Ce dernier Pantalone s'exclame dès qu'il les voit qu'il ne veut pas de mendiant dans son établissement. Pietrolino s'offusque en le reprenant, car ils sont des saltimbanques, pas des mendiants. Colombella s'approche du comptoir et fait son numéro de charme : Pantalone accepte qu'ils donnent une petite représentation.

Un peu de temps plus tard, Pietrolino installe son castelet, pendant que Simio joue de la flute pour faire patienter les clients attablés en train de prendre un petit ballon. Une fois les tringles et les rideaux installés, Pietrolino se tient debout immobile pour se concentrer. Tout à coup, il s'anime à nouveau. À partir de ce moment-là, il n'est plus maître de lui-même, il est comme possédé. En faisant illusion de son corps, il est capable de faire voir à son public, une multitude de chose. Ce jour-là, c'est un monde sous-marin avec ses poissons, ses plantes aquatiques, ses méduses et ses algues qui apparaissent comme par magie aux yeux des spectateurs, stupéfaits par tant de beauté. Curieusement, c'est en disparaissant totalement derrière les choses auxquelles il donne vie, qu'il est le plus vivant. Pendant ce temps-là, Pantalone agite une liasse de billets sous les yeux de Colombella, sous-entendant qu'ils peuvent être pour elle si elle se montre sage. le mime a fini la première partie de son numéro, mais les spectateurs ne donnent qu'un unique ticket de rationnement J3. Il se prépare pour la deuxième partie, enfilant un gant aux couleurs du drapeau français à la main droite, et un avec la croix gammée sur la main gauche. Avec ses mains, il mime un combat entre animaux préhistoriques. L'Allemagne nazie était un monstre fort mais stupide qui tentait de dominer le faible. Lorsque ce dernier est en difficulté face au géant, les spectateurs retiennent leur souffle. Discrètement Pantalone appelle les Allemands pour dénoncer le mime.

Il s'agit d'un album dont la genèse remonte en 1970 quand Marcel Mangel rencontre et engage Alejandro Jodorowsky, artiste chilien, ayant utilisé le mime dans son premier film Fando et Lis (1968). Il lui demande de lui écrire un spectacle vivant qui ne verra pas le jour faute de financement, puis de le transformer en un album. Celui-ci est dédié au mime Marceau (1927-2007). le lecteur découvre donc un trio : le héros dont l'histoire porte le nom, une belle jeune femme dont il est amoureux, et un compagnon faire-valoir. La scène d'introduction montre la barbarie des occupants lors de la seconde guerre mondiale, le pouvoir de l'imagination et la puissance d'évocation d'un artiste, d'un créateur. Dès la page 14, le lecteur constate qu'il est bien dans une histoire de Jodorowski avec une séquence d'une violence éprouvante : l'officier nazi martèle les mains du mime à grands coups de bottes, jusqu'à ce qu'elles soient brisées et qu'il ne puisse plus s'en servir. L'artiste ne peut plus créer car son moyen d'expression est irrémédiablement détruit. le lecteur frémit en voyant le talon appuyer sur la main, avec des taches de sang. C'est d'une terrible cruauté, sans que les dessins ne virent au gore. le dessinateur réalise des planches descriptives, avec une mise en couleurs sophistiquée apportant relief, textures et ambiance lumineuse.

S'il peut être a priori intimidé à l'idée de plonger dans un ouvrage d'un auteur aussi ambitieux qu'Alejandro Jodorowski, le lecteur se rend vite compte que l'histoire se déroule de manière linéaire et simple : l'arrestation de Pietrolino & Simio par les nazis, le passage en camp de travail, le retour à Paris après la Libération, et la tentative de remonter un spectacle. Pietrolino est très touchant en artiste brisé, devenu incapable de créer à nouveau, à la pensée de ne plus jamais faire rêver les gens. le personnage est très touchant dans sa gentillesse, ses convictions morales, son empathie, ses élans du coeur. Simio est tout aussi touchant avec son dévouement pour l'artiste, son amitié indéfectible, son partenariat professionnel l'incitant à aider le mime à trouver d'autres façons d'exprimer son talent. Il n'éprouve donc aucune difficulté à entrer dans l'histoire, à ressentir de l'empathie pour ces individus malmenés par la vie, mais animé par un réel goût pour la vie. Dès la première page, il est impressionné par la consistance des dessins. Il identifie aisément les immeubles haussmanniens, la belle berline Citroën, les uniformes militaires allemands, la belle devanture du bistro. le dessinateur combine les formes détourées par un trait encré fin et la couleur directe pour l'intérieur de ces formes, apportant de nombreuses informations visuelles supplémentaires. Au fil des séquences, le lecteur admire d'autres lieux : les bouteilles d'alcool sur les rayonnages derrière le comptoir, les rideaux du castelet, la locomotive à vapeur, le Champ de Mars et les pieds de la Tour Eiffel, les petits fanions tricolore lors du bal, le petit chapiteau avec sa toile de tente rapiécée, les roulottes en bois, le très grand chapiteau du cirque de grande envergure avec sa toile impeccable, dans une belle plaine enherbée, les gradins du cirque.

L'empathie avec les personnages fonctionne dès la première page. En découvrant Pietrolino, le lecteur voit un grand échalas un peu dégingandé, dont l'apparence évoque un peu celle de Marcel Marceau, sans être une représentation photographique, ni une caricature. Il remarque l'expressivité un peu appuyée de son visage, ce qui est cohérent avec son mode d'expression artistique. Il découvre également Simio, sa petite taille, son langage corporel un peu exagéré pour son rôle de faire-valoir comique, aussi un physique qui atteste bien de son âge, avec sa calvitie précoce et son visage un peu empâté. Colombella fait penser à Jessica Rabbit, avec ses cheveux roux, sa longue robe rouge même si elle n'est ni lamée ni fendue jusqu'aux hanches, et ses courbes généreuses que ce soit sa poitrine ou son bassin. Pantalone est un peu plus caricatural, très empâté, avec un visage méprisant vis-à-vis des individus qu'il ne peut pas utiliser, doucereux et servile avec les représentants de l'autorité. le dessinateur ajoute donc régulièrement une touche humoristique dans la représentation des personnages, les rendant plus sympathiques, et plus agréables à regarder. le lecteur peut percevoir que l'intention de ce registre graphique est de rendre le récit accessible à un lectorat de jeunes adolescents, en cohérence avec le ton du scénariste.

Par moments, le lecteur remarque que l'artiste a choisi de simplifier la représentation d'un élément ou d'un autre. Dès la première page, il a épuré le dessin de la chaussée et du trottoir des rues de Paris. Par la suite, les roues des wagons du train semblent trop petites, les allées du Champ de Mars manquent de texture de gravier, les gradins du chapiteau sont uniformes, mais cela ne reste que quelques éléments. D'un autre côté, chaque page s'avère très riche visuellement, et l'équilibre entre le degré de précision descriptif, et les choix d'exagérer une expression, de simplifier un élément, d'aller vers une vision plus imaginaire permettent d'intégrer les éléments poétiques du récit, sans solution de continuité. À de nombreuses occasions, le lecteur ralentit son rythme pour prendre le temps de savourer un visuel inattendu, ou en décalage avec la réalité concrète : la méduse et les poissons exotiques nageant devant les clients du café de Pantalone, l'imperméable de l'officier nazi entre armure et déguisement grotesque, la liesse populaire lors du bal de la Libération, le mime du boxeur contre le kangourou, Pietrolino offrant son coeur, les tourterelles venant se poser sur les bras étendus de Pietrolino (même si l'une d'elle en profite pour se soulager), la capacité d'emporter le public avec les mimes, et bien sûr la séquence de fin.

Pietrolino est donc un mime qui en effectue quelques-uns au cours du récit, et la narration aussi bien en dialogue qu'en images incite le lecteur à considérer ce récit plus comme un conte que comme la biographie d'un personnage de fiction. Il termine le récit avec le sourire, et une forme de contentement modéré pour une histoire gentille et tout public. Dans le même temps, il a bien conscience de la qualité de l'hommage rendu au Mime Marceau, par exemple avec le chapeau candélabre de Pietrolino lors d'une représentation. En outre, il a ressenti que tout au long du récit, il est question de création artistique. Pietrolino a eu les mains brisées et la pensée de ne plus jamais faire rêver les gens l'anéantit chaque jour un peu plus. Il se dit également que les différents mimes du personnage comportent une dimension politique, que ce soit le théâtre de mains au cours duquel il ridiculise l'occupant, ou le spectacle final au cours duquel il étend par coup de poing avec gant de boxe, des officiels représentant l'autorité hypocrite. En revenant au début de l'histoire, il retrouve la phrase de l'officier nazi dans le café disant : Dommage que la fin de l'histoire manque autant de réalisme. Or elle s'applique littéralement à la fin de l'histoire. En y repensant, il se dit qu'Alejandro Jodorowsky a construit ce récit comme une allégorie de l'artiste, le mime Marceau, mais de lui aussi. Avec cette prise de recul, il est alors possible de considérer cette bande dessinée à la fois hommage, métaphore, et roman, comme une profession de foi : celle du créateur Jodorowsky sur la nature de son art, son engagement, sa vision de sa place d'artiste dans la société.

Une bande dessinée remarquable. Il s'agit d'un récit relativement court (92 pages) et accessible d'Alejandro Jodorowsky, avec une narration visuelle agréable, conjuguant une approche descriptive et une sensibilité poétique. Cette histoire peut être lue par de jeunes adolescents, aussi bien que par des adultes. Les premiers sont séduits par ce mime aux mains cassées, mais continuant à créer, avec des images souvent douces, savoureuses, concrètes et poétiques. Les seconds s'attachent tout autant aux personnages, apprécient plus l'hommage au Mime Marceau, et perçoivent l'allégorie de la vocation de l'artiste, véritable profession de foi du scénariste.
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L'histoire se passe quelque part en France durant l'occupation nazie. Les soldats allemands sont partout et font régner la terreur.
C'est au milieu de cette illustration de la grande Histoire que va s'imbriquer la petite, par l'entremise d'un spectacle mis en scène par trois saltimbanques dans le bistrot du coin. L'un d'eux, Pietrolino, s'affaire à subjuguer la foule grâce à ses incroyables aptitudes de mime. Il enchaîne aussitôt derrière son castelet avec son tour fétiche, sa « parade des mains », qu'il présente avec virtuosité : un gant bleu blanc rouge sur l'une d'elles, rouge à croix gammée sur l'autre. La tension face au danger d'une telle représentation donne toujours des frissons, largement récompensés par les ovations d'un public entièrement acquis à la cause. le frisson se transforme vite en sueur lorsque les agents de la Wehrmacht entrent dans l'établissement... c'est le tournant d'une vie : Pietrolino en perdra l'usage de ses mains...

Cette vie romancée d'un mime est une belle histoire, touchante et emprunte de poésie. On y côtoie de beaucoup l'univers du cirque une fois passée la façade de la guerre, avec ses arts de rue, ses acrobates, ses dompteurs et ses clowns.
Pietrolino est un personnage attachant bien que particulier. D'aucuns diraient qu'il n'a pas toute sa tête... il est parfois simple d'esprit en tout cas, s'émerveillant devant la beauté des choses ou perdant pied à la réalité par moments. Nous suivons sa déchéance et sa reconstruction, une émancipation qui ne se fait pas sans déraison : Pietrolino donne l'impression d'être un peu hors du temps. On a du mal à le situer dans le monde contemporain dans lequel il évolue.

[...]

Alexandro Jodorowsky est un homme aux multiples talents, des talents qui l'amènent à côtoyer plusieurs mondes, oscillants entre la bande dessinée qu'il chérit et le cinéma qu'il affectionne tout autant, en passant pas les planches et... le mime ! Autant de facettes d'une même vie qui lui ont fait rencontrer des centaines de personnes fascinantes et lui ont permis de travailler avec les plus grands (on pense notamment à Moebius, mais aussi à Boucq ou Giménez).

Olivier Boiscommun est un auteur complet de bande dessinée, surtout connu pour ses planches hautes en couleurs et pour son travail sur Anges (avec Dieter). Il a fortement contribué à la réussite de Pietrolino, adaptant le pantomime de Jodorowsky pour en faire quelque chose de visuel bien qu'en deux dimensions.

[...]

Chronique complète à lire sur BenDis... !
Lien : http://bendis.uldosphere.org..
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Pietrolino est un mime, qui au cours d'un spectacle dans un bar, se fait briser les mains par des nazi n'appréciant guère sa représentation de la seconde guerre mondiale. Trahi par sa compagne, c'est avec son fidèle compagnon de spectacle, Simio, qu'il se retrouve dans un camp de travail en Allemagne.

A la Libération, Pietrolino devient ainsi le clown frappeur, exerçant son art dans ses spectacles au sein d'une petite troupe itinérante. Leur avenir se ternit le jour où un grand cirque professionnel s'installe juste à côté de leur petite roulotte. Forcés de partir, Pietriolino, Simio et Alma (la nouvelle recrue dont il est amoureux) s'obstinent à rester, jusqu'à ce que le destin fasse remarquer leur talent et convainc l'obtus directeur de les engager.

Une série en deux tomes qui nous emmène dans le Paris de la seconde guerre mondiale jusqu'à la vie d'un cirque mais sans oublier d'être plein de poésie et de charme!

A découvrir absolument!
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Pietrolino est l'histoire d'un saltimbanque qui joue avec ses mains.
Un jour, il perd l'usage de ses mains et se retrouve au bagne à casser des cailloux .
Sa vie change lorsqu'il rencontre le Directeur du Grand Cirque.
Une très belle BD émouvante par son scénario signé Jodorowsky, touchante pas ses personnages, rayonnante par la très belle illustration de Olivier BOISCOMMUN.
Une BD en deux volumes avec laquelle qui se lit bien, c'est bien fait.
C'est un coup de coeur BD

Lien : http://www.humano.com/work/283
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Citations et extraits (10) Voir plus Ajouter une citation
Le soir-même, nous étions en pleine représentations, et le spectacle était à son paroxysme. Un décor immense représentant les Nations Unies et les délégués venus du monde entier discutaient de l'avenir de la planète. Ils se faisaient des courbettes hypocrites, signaient des traités ou encore se disputaient, tandis que couché dans la rue, déguisé en pauvre bébé abandonné en guenilles, je pleurais affamé et inconsolable, en versant des torrents de larmes.
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Durant cette période sombre, il n'était pas rare que ce soit le son des mitraillettes qui rythme nos journées. Les ténèbres que nous traversions à cette époque apportaient à chacun son lot de chagrin, de terreur et de désespoir.
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Curieusement, c'est en disparaissant totalement derrière les choses auxquelles il donnait vie, qu'il était le plus vivant.
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Je vais garder pour moi ce qui se passa ensuite. De toute façon, vous ne me croiriez pas. Mais je peux vous dire une chose... il était magnifique.
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Tout d'abord, il ressentit de la haine pour toutes les souffrances qu'elle lui avait fait subir, puis une immense compassion devant sa déchéance.
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