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Critique de ODP31


Chant du coq pour cette rentrée littéraire dans les terres lotoises et chant du cygne pour une époque révolue dans nos champs.
En semant ses mots, Serge Joncour vient de soigner mon allergie à la campagne. Après cette lecture, je n'ai qu'une envie, sniffer du pollen, conduire un tracteur et freiner les temps qui courent… trop vite. Si j'ai les yeux rouges, c'est que son histoire vient de labourer ma mémoire en jachère, macarel. La larme à l'oeil succède à la goutte au nez.
Pour construire son roman, je me suis imaginé Serge Joncour en train de ventiler de vieux éphémérides, détachant des pages jaunies qui correspondaient à des évènements climatiques, politiques, sociologiques et pleins d'autres trucs en "iques" survenus entre 1976 et 1999. Peut-être un mirage lié à la désertification des campagnes, fil rouge et vert du récit.
Entre la sécheresse de 76 et la tempête de 99, il s'en est passé des choses dans le monde, en France, dans le Lot et dans la ferme des Fabrier.
Alexandre, la campagne comme compagne, a pris perpette dans la ferme familiale. Ses soeurs vont succomber aux sirènes de la ville. Comme l'amour n'est pas toujours dans le pré, le jeune homme s'éprend à distance de Constanze, étudiante est-allemande qui partage une colocation avec une des soeurs à Toulouse. Pour impressionner sa belle et ne pas trop passer pour un plouc, notre homme va fricoter dangereusement avec des activistes qui ne veulent pas de la centrale nucléaire de Golfech. Dans le genre rebelle et réfractaire au progrès, il y a aussi, Crayssac, un voisin qui participa à la lutte du Larzac et des parents hostiles à l'élevage intensif, pas encore folle la vache, et à un projet d'autoroute.
De l'élection de Tonton au nuage de Tchernobyl, des courses du samedi au Mammouth à l'arrivée du Minitel, Serge Joncour mêle petite et grande histoire. Dans ce roman rétrospectif d'une grande force narrative, la résistance au changement n'est pas une tare mais une vertu tant qu'elle ne vire pas à la violence. Alexandre est un homme des champs pragmatique, pas un utopiste, sauf quand il s'agit d'amour ou de la sauvegarde de ses terres. le progrès l'inquiète mais l'attire. Ces tiraillements donnent vraiment chair aux personnages.
Le récit alterne avec une grande poésie le quotidien austère de la vie à la ferme et les escapades plus ou moins réussies d'Alexandre dans la mythologie urbaine.
Un grand moment de lecture qui permet aussi de comprendre pourquoi nous en sommes là, si las, hélas.
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