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Quel est le point commun entre une guerre annoncée et la loi 48 sur les loyers? le monologue intérieur que nous livre cet homme solitaire, précaire à plus d'un titre : une fiancée évanescente, un ami pragmatique mais qui vit sur une autre planète,la perpétuelle question de sa légitimité, un chez soi en sursis pour cause de réhabilitation et de loyer impayé, le sentiment de son incapacité à conduire son destin.

Les images qui défilent sur les écrans en cet hiver de l'année sont celle d'une propagande ourdie par les USA contre le l'Irak, au prétexte avoué de venger l'humiliation du 11 septembre, mais qui servent d'autres intérêts plus mercantiles dont l'unité est le baril. Envouté par ce feuilleton médiatique, le narrateur est en proie à un autre combat. le 15 mars, date annoncée pour l'offensive guerrière est aussi une date fatidique quand on ne règle pas son loyer... Les promoteurs viendront-ils à bout des fantômes qui hantent les lieux, à commencer ce voisin invisible? le dérisoire d'une vie ordinaire rejoint l'impudeur des corps mutilés exposés sans vergogne sur les millions d'écrans de spectateurs au mieux indifférents . La seule issue est de renoncer à son sentiment de puissance individuelle pour se fondre dans le groupe, au risque de s'y perdre.

Si ratiocination il y a, c'est à un niveau très élaboré de langage que le narrateur se livre. Ce sont les répétitions qui donnent cette illusion de processus mental familier. La langue est autrement riche que celle qu'utilisent nos pensées ordinaires, particulièrement quand elles flirtent avec l'obsession.

Belle réflexion sur l'absurdité du fonctionnement de l'humain, qui, élément insignifiant dans son groupe de pairs, est collectivement coupable des comportements absurdes de la horde, pour peu qu'il ait su s'y faire accepter.



Lien : http://kittylamouette.blogsp..
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Dans ce court récit, tout est écho et résonance.
Les bombardements de la guerre en Irak et les travaux de rénovation de l'immeuble.
L'ancien locataire juif caché dans la cave et le narrateur qui vit au troisième sans payer son loyer.
Les SMS d'Hannah et la solitude de l'ancien vigile.
Les grosses voitures du riche ami chinois et le risque d'expulsion.
Et en guise de trait d'union, la voisine nonagénaire qui connaît toute l'histoire.
Ce n'est pas le premier roman de Serge Joncour que je lis, et ce n'est pas non plus mon préféré. Trop bref, peut-être, trop citadin. J'aime mieux ses récits retirés du monde.
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Serge JONCOUR, Que la paix soit avec vous (Flammarion, 2006)
La paix, cet "anti-héros" de Serge Joncour, l'avait presque trouvée dans le Paris de 2002.
Il est seul sur son palier, dans ce vieux studio sous les toits dans ce vieil immeuble décrépit et chargé d'histoires ou plutôt d'Histoire. Vigile, désormais inapte au travail après un drame, sa vie bascule lorsque soudain la lumière s'allume dans l'appartement soit disant abandonné en face du sien.
Qui est ce voisin, qui était-il ? La vieille Kinsver, voisine du bas va le lui révéler, comme le drame qui s'est produit ce matin de juillet 1942.
La paix, il n'en est plus question dans ce monde qui prépare l'invasion de l'Irak.
Et si c'était la solution ? Et si cette guerre devenait vraiment mondiale et nous entrainait vers le chaos salvateur ?
Pourtant, même pour les solitaires, les rencontres peuvent être belles. Celles que l'on fait en côtoyant ses voisins âgés ou celles qui conduisent à l'amour idéalisé au détour d'une promenade dans le Marais _ véritable appel vers un ailleurs. L'écriture est sublimée et poussée au paroxysme du Romantisme le plus pur notamment à travers cette relation amoureuse fantomatique d'un autre temps avec Hannah _ une lointaine évanescente dont la chevelure blonde ondulante pareille à un long fleuve nous fait nostalgiquement remonter le cours du temps jusqu'à la Source originelle :


"Bagdad c'était la ville aux trois murailles, une oasis qui ne redoutait rien, dans ses ombres Schéhérazade taisait sa beauté, elle masquait son corps dans le noir, de soleil en soleil, on attendait la suite de l'histoire. Des vents de sable enrôlaient les corps dans leurs vestiges, dans les effluves d'un parfum venu de Grenade ou des poussées d'Alhambra..."

Mais la guerre et le chaos sont très proches et peuvent prendre bien des formes, comme celle du promoteur qui rachète l'immeuble et qui entame les travaux juste au dessus du petit studio, mettant en péril l'équilibre de notre héros et de tous ses voisins. Et si du chaos ressortait une lueur d'espoir ? Si cette "invasion" domestique était l'occasion de repartir dans la vie ?

Dans ce roman Serge Joncour renoue avec le héros un peu paumé, en marge de la société mais qui finalement se laisse apprivoiser pour sortir de sa solitude.
Un livre plein d'espoir qui nous démontre que rien n'est définitif et que, même dans le conflit, l'Homme peut trouver une source de renouveau.









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un très bon roman de Serge Joncour dans lequel on retrouve son humour grinçant. L'auteur porte un regard acéré sur la société. Une belle réussite.
Lien : http://madimado.com/2011/11/..
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Que la paix soit avec vous de Serge Joncour ( J'ai lu, 254 pages)

Depuis la perte de son emploi, le narrateur végète dans son appartement au troisième étage d'un immeuble vétuste.Il vit de façon spartiate et dans la crainte d'être expulsé,
n'acquittant plus son loyer. En outre, l'immeuble sis dans le quartier prisé du Marais
est convoité par des promoteurs.
La phrase d'ouverture du roman est percutante : « je suis bien la personne au monde avec laquelle je passe le plus de temps ». le narrateur trompe sa solitude scotché à sa télé, qui déverse son flot d'horreurs, ses images anxiogènes.
Son quotidien est ponctué par les journaux télévisés qu'il commente et consigne
dans une sorte de journal couvrant la période de novembre 2002 à avril 2003.
Il nous replonge dans le syndrome du SRAS ( 1), dans les prémices de la guerre en Irak.Il dévoile ses convictions pacifistes : « que la paix soit avec vous », son antiaméricanisme. Il montre comment le matraquage des images en boucle influe sur le spectateur qui ne fait plus la différence entre réalité et fiction. Cette addiction déclenche la psychose générale : « le monde joue à se faire peur ». La guerre omniprésente gangrène l'atmosphère dans tous les foyers. Les mesures antiterroristes sont mises en vigueur. Les manifestations et marches pour la paix se multiplient.

Pour le narrateur qui souffre d'agoraphobie, y participer relève du défi. Il vit presque en misanthrope. Il dévoile l'incident qui l'a coupé de sa famille et renvoyé à sa solitude du fils unique. Sa chambre ne fut-elle pas le premier laboratoire de son isolement ? Il fréquente par nécessité la concierge et la propriétaire. Par elles, il découvre le passé de l'immeuble, l'identité des locataires précédents, mais le mystère de son voisin, Monsieur Grossmann, (qui a échappé à la rafle des juifs, contrairement à sa femme et à leur enfant), demeure. Pourquoi de la lumière, une plante qui change de place, un papier bleu glissé sous la porte qui disparaît ? Qui détient le secret ?
La deuxième énigme qui éveille la curiosité du lecteur, concerne le narrateur taraudé de culpabilité lorsqu'il se réfère à « l'accident » : « Ne pas se dénoncer n'arrange rien ». Son commerce avec l'ami chinois permet à Serge Joncour de mettre en exergue les différences entre la culture chinoise et française. Cet ami « qui veille à sa réintégration », « maîtrise la ville, il a l'avenir, la femme, le monde au bout de ses doigts », le sort et le distrait. Si le narrateur n'a pas réussi à séduire la serveuse chinoise, il a su faire craquer Hannah, une jolie blonde rencontrée Place des Vosges.
Celle-ci se rappelle à lui par texto et lui annonce sa venue. Mais le héros est-il prêt à aimer ? le roman se termine avec la cessation supposée des hostilités, donc l'espoir pour une population qui a vécu l'enfer de la guerre et voudrait croire que «  ce sera la dernière ».
Pour contrebalancer l'atmosphère pesante, assombrie par la guerre, l'auteur déploie
sa dose d'humour «  les guerres, c'est la seule façon de voyager » et distille quelques scènes cocasses. Son combat avec la bestiole qui le terrorise, la recherche de la télécommande égarée, le travelling sur la poubelle qu'il déplace pour dégager la rue,
le bruit dont il ne déteste pas la provenance sont des instants de légèreté dans ce roman aux accents de gravité et de solitude.A l'heure où la presse est envahie de rétrospectives de mai 68, Serge Joncour nous livre une trace documentaire du conflit en Irak. Il dénonce les guerres qui laissent des traces indélébiles ainsi que l'impact néfaste des médias portés à la surenchère. Il anticipe et subodore que dans dix ans les films proposés auront pour trame les événements actuels. Un roman aux résonances plus qu'actuelles, que ce soit la télé réalité ou la « guerre réalité ». L'auteur décrypte le comportement du spectateur victime d'addiction à son petit écran cacochyme, qui « télécommande » sa vie. Il souligne combien les lieux, les murs ont une mémoire.

Le roman se termine par une tendre déclaration amoureuse d' Hannah : «  Toi, je manque »,(le « I miss you ») anglais, touchante par sa maladresse, rappelant Dora ( dans L'écrivain national). Attirance réciproque «  moi aussi », comme une chanson de Gainsbourg. La paix est dans leurs coeurs, l'avenir à eux.
Ces mots échangés marqueraient-ils la fin de la solitude du héros, sauvé de son huis clos oppressant par l'amour ? Hannah va-t-elle réenchanter sa vie ?
Et si toute une vie pouvait se jouer sur une rencontre ?

(1) SRAS : Syndrome respiratoire aigu sévère.
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Bon livre que j'ai lu juste après le 11 janvier 2015, c'était totalement d'actualité : vivre des images cruelles en direct live. J'ai beaucoup aimé le parallèle entre l'immeuble et la guerre en Irak.
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Il y a beaucoup de choses que j'ai aimées dans ce bouquin, dont évidemment le style ! C'est un roman de la solitude, celle des âmes perdues, un roman où se croisent quelques fantômes (certains bien vivants, d'autres très très morts !), et où se dessine la fin d'un monde, entre deux guerres, deux effondrements de certitudes.
C'est souvent touchant, ça met même le doigt là où ça fait mal, et malgré le style de Serge Joncour que j'adore, je me suis parfois sentie un peu à distance..
Ça ne sera pas mon roman préféré de l'auteur mais j'ai passé un bon moment, apprécié la prose juste et percutante, et finalement c'est plutôt positif !
(Ceci dit, je crois que je vais relire le machiavélique "U.V" 😊)
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