Paul JORION, anthropologue et sociologue, questionne, dans cet essai édité chez Fayard (16 mai 2018), la poignée d'hommes qu'il considère comme phares pour notre humanité qui, pourtant, ne semble guère chercher d'où elle vient, qui elle est, où va-t-elle et comment ?
Son constat est pourtant alarmant. Sa question de départ n'est déjà plus de savoir ce que sont les êtres humains. Il la pose au passé : « Qui étions-nous ? » tant il est vrai que les caractéristiques qui fondaient l'Homme s'estompent et laissent le champ à celles qui définissent l'Homme augmenté, les cyborgs, les robots, les machines pourvues d'une intelligence artificielle déjà supérieure à celle de l'Homme.
Paul JORION, poils à gratter pour l'Homme à courte vue, regarde ce ‘sapiens' et la relation qu'il développe avec son environnement, la Terre. C'est un fait, il la néglige, la saccage, l'exploite et l'appauvrit comme s'il était le dernier occupant des lieux. «
le dernier qui s'en va éteint la lumière » était déjà le titre évocateur d'un des précédents ouvrages de l'auteur. Tout se passe comme si la majorité des êtres humains d'aujourd'hui ne se préoccupait pas du devenir du monde au-delà de leurs propres vies ou, au mieux, de celles des deux, trois générations à venir. Et pour l'observateur qu'il est, ceux qui s'en préoccupent le font dans un esprit de pur ultralibéralisme qui ne les font agir que s'ils en tirent un intérêt immédiat et à leur seul profit ! La question devient alors : « L'homme aura-t-il le temps de conquérir l'espace et de le coloniser avant que la vie terrestre ne soit devenue impropre à la survie humaine. Sachant les conditions difficiles de vie hors de notre terre, les êtres qui iront coloniser l'espace et exploiter ses richesses seront-ils encore des hommes ou des machines plus intelligentes que l'Homme ?
Science-fiction, diront certains … Non, répond
Paul JORION ! Et de proposer une analyse des pensées de
Confucius, Socrate,
Aristote, Paul de Tarse, Hegel,
Nietzsche et
Freud, ou moins attendus, Machiavel,
Shakespeare,
Victor Hugo et aussi
Mao Tsé-toung ou
Jacob Taubes. A chaque pas, dans l'histoire de la pensée humaine, le lecteur découvre des pans entiers de vérité et de contre-vérité que la pensée politique des pouvoirs successivement en place a cherché à taire. Curieusement, ces phares que l'auteur choisit pour éclairer notre route, se complètent, se répètent, se nuancent et se confortent, au-delà de leurs différences. C'est bien l'être humain en marche qui soulève ces questions et pourrait se nourrir des réponses. Mais, jusqu'à quand ?
En intitulant son ouvrage « Défense et illustration du genre humain »,
Paul JORION rend hommage à l'être, tente de le protéger mais aussi de le secouer pour l'aider à sortir de la torpeur où il s'est installé. L'identité humaine est une question qui demande un traitement d'urgence ! le genre a besoin de trouver des voix qui n'acceptent pas la situation actuelle, l'effilochage de nos valeurs, de nos conditions de vie. Les réponses existent, il faut écouter et entendre ce que les philosophes de l'Histoire ont dit de l'Homme. Il faut accepter humblement la non-universalité de la pensée occidentale, s'ouvrir à la pensée chinoise, trouver de nouveaux équilibres. Il faut mesurer ce qu'apporte la réciprocité positive dans l'agir des peuples. Il nous faut restaurer l'Homme, le re-susciter à la vie et son à-venir…
Si l'écriture n'est pas toujours des plus simple à suivre, le propos est interpellant. Il est temps que l'Homme s'illustre dans la défense de l'espèce humaine… Sans quoi, nous ne serons plus !