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EAN : 9782362291289
160 pages
Editions Bruno Doucey (18/08/2016)
4.29/5   7 notes
Résumé :
Jean Joubert nous a quittés en 2015. Sa voix nous manque, « c’est en silence désormais » qu’il nous parle. Mais avant de partir, le poète a pris soin d’adresser à ses amis les poèmes qu’il écrivait au fil des jours, depuis la publication de L’alphabet des ombres, comme autant de lettres pour conjurer l’absence. Ce sont ces poèmes inédits, fidèlement rassemblés, qui constituent ce livre. Pour avoir longtemps « courtisé la nuit », le poète n’ignore pas celle qui « s’a... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (4) Ajouter une critique
Les commentaires et extraits de quelques babeliotes m'ont donné envie de découvrir ce poète.Il a écrit aussi des romans -jeunesse et son roman " L'homme de sable" a eu le prix Renaudot en 1975 ( aucune critique de ce livre sur Babelio...) Pour ma part, je ne le connaissais pas du tout.

Comme il nous l'est précisé en introduction, ce livre relie le commencement à la fin en réunissant le premier recueil du poète , publié en 1955 et ses derniers poèmes inédits, entre 2010 et 2015 année de la mort de Jean Joubert.

J'ai découvert un univers très attachant, un peu hermétique parfois,mais sans que cela enlève de la beauté aux textes, fait de visions oniriques et d'images saisissantes et originales. On rencontre des sangliers furieux: "Telle une forêt en marche
dans la béance de la nuit
les sangliers dévalent les collines"

, des chats énigmatiques, une pierre qui se métamorphose, des roses ressuscitées..." J'attends
debout sur le rivage
la résurrection de la rose"

Je me suis sentie plus touchée par les derniers poèmes, où l'on sent affleurer la fin d'une vie: l'image de la mort,de la violence faite aux femmes, de la fugacité des choses, les souvenirs d'enfance y sont plus présents.J'ai notamment beaucoup aimé le poème "Village":
" mot bien-aimé sur les lèvres du jour
et le parfum d'enfance
qui fut parfum de lilas et rose
dans les jardins d'oiseaux"
qui restitue les décors chéris du passé.

Mais ce livre n'est pas que nostalgie ou jaillissement du rêve et de l'imagination. Il comporte aussi une bonne dose d'humour et d'auto-dérision, particulièrement dans le poème " Bravo, Mathis!", où un ami de l'auteur propose, plutôt que d'aller au zoo, de " rendre visite au vieux poète Jean Joubert" et l'enfant de répondre
: "- Non, dit Mathis résolument,
j'aime mieux aller voir les singes!"

De délicats haïkus se glissent aussi avec bonheur dans ce recueil
" Sur le lac,
parmi une centaine de canards
une mouette en exil."

Des poèmes variés, de qualité, une voix unique et inspirée, avec Jean Joubert, j'ai courtisé la nuit avec bonheur...


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J'ai reçu ce livre lors d'une opération masse critique, aussi je remercie Cabello et les éditions Bruno Doucet. Je me rends compte que je n'ai jamais "critiqué" de poésie sur le site, alors que c'est ce que je préfère à tout, de très loin. Mais il faut dire que ce n'est pas évident.
Pour ce recueil, il m'aurait fallu beaucoup plus qu'un mois. Car, à la différence du roman, la poésie ne s'use pas. Elle se lit et se relit, change de sens et de forme. Aussi ne puis-je donner sur le texte de Jean Joubert que des impressions. D'autant plus que le recueil est formé de deux opus : l'un écrit à 30 ans, le premier publié "les lignes de la main" (1955), l'autre dans les dernières années de sa vie ( autour de 2010-2015, à ce que j'ai compris.) Deux extrêmes, donc, dans une vie littéraire bien remplie par ailleurs de romans, notamment pour la jeunesse.
D'abord, ôtons-nous d'un doute, Jean Joubert écrit de la poésie contemporaine de qualité. Rien à voir avec les délires stériles de certains, dont je me demande toujours pourquoi on gaspille de l'encre, du papier, pour les éditer, quitte à discréditer encore ce langage fondamental et essentiel. Vous voyez le genre :
J'ai. VU. le chat. qui
fait. POPO. dans. sa. litière

Bref, rien de cela ici.
Premier recueil " Les lignes de la main".
On sent l'influence des autres, surtout Rimbaud : "je suis la palme et le vent qui brûle/et la cendre sur l'eau posée comme un poème" ( Je dors le front ouvert).
Le poète est au centre, il vit dans un monde de métaphores et d'images qui reflètent la réalité réduite à l'essentiel : recherche du sens, mélancolie, fuite du temps, angoisses. Aucune allusion au monde extérieur, 10 ans après la guerre, c'est un peu gênant. Ce qui me gêne aussi, c'est la vision des femmes, réduites à l'etat d'objet. :
"Tout change car un paysan
M'apporte en riant un renard
Une pomme, une fille nue" ( l'oeil)
Ou de Muse objet
"Dors à l'ombre de mes cheveux
Me disait-elle ;
Dors dans le bois de déraison,
Les yeux ouverts comme un enfant..."
Bon, la femme objet, muse, les cheveux, le poète enfant créateur, ça va 5 minutes avec les vieux du XIX ème, mais en 1955, on arrête, Jean.
A part ça, un très beau poeme original : "Elle passe, fragile...", écrit pour sa mère, on dirait :
" Elle m'écrit :
Mes filles sont grandes, les couloirs vides. La poussière a mangé les livres que j'aimais.
La grange croule où brillait le blé ; le puits se comble ; les chênes sèchent sous les lierres[...]
Elle m'écrit encore :
Mes yeux sont pleins des terres de l'enfance, des mains croisées, de longs passages prophétiques. Il me semblait entendre, hier encore, cette plainte des grues qui traversaient nos soirs d'automne dans le Nord. Ici, le ciel est vide : pas un indice, pas un cri ![ ...]"
Et de belles images, aussi,dans le seul poème qui me semble évoquer la guerre :

"Et lui qui fut soleil s'étouffe dans sa peur

Un chien léchait son sang aux marches de la mort" (A la mémoire d'un autre)
Deuxième recueil : Longtemps j'ai courtisé la nuit.
Composé de pièce non publiée sous forme de recueil, rassemblé après la mort du poète. Celui-ci, 50 ans apres le premier recueil, est reste le même. Mêmes défauts : influence encore lisible des autres, femmes objets.
Très beaux poèmes: douze chats et un poète, souvent je me retourne, le cavalier bleu. La mort, le vieillissement du corps hante le poète. Son père apparait dans des passages oniriques très beaux:
" puis le masque tomba
Soudain je reconnus mon père,
Le familier d'une forêt perdue. " ( Waou pour ce vers)
Magnifique aussi :
" Une seconde de plus
Sur le cadran de l'horloge.
Ah, je n'ai pas cessé de vieillir."
Voilà ce à quoi je songe à présent sur la poésie de Jean Joubert. Je le relirai régulièrement. Désolée d'avoir été longue.
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Etrange voyage que celui du lecteur au fil des poèmes de Jean Joubert.
Il nous amène lentement à découvrir son pays rêvé, celui de l'imagination peut être, ou celui de la mort sans doute, un pays fait de sable, de boue, de tétons nourriciers. Déconnecté du monde? Certes non, notre poète est bien de son temps. Mais à sa manière. C'est une troupe de sangliers nocturnes qui nous dévoile notre hypocrisie. C'est un chat noir qui ridiculise les théoriciens stériles. C'est une rose qui nous parle du temps qui fuit.
Hanté par la mort? Sans doute, derniers poèmes écrits avant sa disparition, l'auteur n'a pas d'amertume, n'en veut pas à Dieu, il accepte simplement ce lent glissement vers ailleurs, le sent venir, nous le fait partager.

Voyez ce recueil comme un atelier, vous avancez timidement, au milieu des oeuvres, pas toujours achevées, des outils, des couleurs, dans un joli bazar, comme si l'artiste venait juste de sortir. Chacun portera son regard, d'une manière qui lui est particulière, sur les oeuvres qui lui parlent le plus. Chaque voyage sera unique.

J'ai souri au détour d'une morale, réfléchi à une pensée qui me touchait, froncé les sourcils sur une strophe obscure. Mais jamais ne me suis ennuyé. Ce recueil est fait pour être dit, chanté presque. J'ai voulu en entendre la musique en lisant tout l'ouvrage à haute voix. On aurait pu me surprendre, chaque soir, à déclamer de la poésie, lunettes sur le nez, assis sur mon lit. La poésie est comme une plante sèche à laquelle la voix redonne l'eau de la vie, à laquelle la voix redonne le rythme lent d'un souffle. Tout ceci serait perdu et bien fade si on le lisait à la vitesse d'un roman, en survolant le texte.

C'est ma toute première fois, je n'avais jamais vraiment lu de poésie, et me voilà tout heureux d'un voyage que je ne désirais pas accomplir avant. Je ne résiste pas à vous citer le tout premier poème, court, et si dense à la fois:

Si je vivais comme je veux,
Si je vivais comme je rêve,
Je serai le Roi, l'Oiseleur,
Le Fou peut-être et, sous la mer
Châtelain d'un château d'hermines.

Mais je cesserai de rêver.

Merci aux éditions Bruno Doucey et à l'opération Masse Critique!
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Livre reçu dans le cadre d'une opération "Masse critique". Je ne suis pas connaisseur en poésie, mais dans un tout premier temps, le titre m'a attiré : "Longtemps j'ai courtisé la nuit". Une invitation au songe dès les premiers mots. Et l'ensemble du livre n'a pas déçu les espoirs du titre. Ce recueil de poèmes, assez courts, est presque une rétrospective de l'oeuvre de Jean Joubert. Des poèmes inédits, de différentes périodes, jusqu'à des écrits récents. C'est un livre à savourer en piochant un poème et en le laissant révéler tous ses arômes doucement, comme on laisse fondre un morceau de chocolat sur la langue, avec quelques vers en note de fond qui restent longtemps en bouche. Si la mort est présente, comme le laisse supposer le titre, l'humour et l'espoir sont aussi au rendez-vous. Même dans les poèmes écrits l'été 2015 :
"Alors qu'au loin grondent encore les ombres,
ici l'aube s'étire,
affirme son triomphe."
Ou parmi les poèmes de clôture du recueil :
"Au loin,
dans l'au-delà des ruses et des branches
un bel enfant rêveur lance dans la lumière
l'aile mauve d'un cerf-volant."
Ce bel enfant au cerf-volant, peut-être est-ce même le poète et ses vers ?
Très beau recueil.
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Citations et extraits (23) Voir plus Ajouter une citation
JE DORS LE FRONT OUVERT…

Je dors le front ouvert, je me promène,
Je dors, je suis la pierre et le feu,

Etranger, familier, tombé de nulle part

Comme en moisson les nielles de l’enfance.

La terre en croix me fait des confidences…

Je suis le fruit qu’on cueille et la feuille qu’on tranche ;

Je suis l’eau sous la dent plumeuse du moulin

Et l’ombre rousse de la plus pauvre des servantes

Que le jour vêt et que farde le vent.

A l’aube, je suis dans la soute,

Ami des rats, confident du voleur ;

Je suis la lampe et le doigt qui l’allège

Et le soleil aux plages des prisons.

Ai-je rêvé ? Me voici sur la place,

Pointe de lance et gueule du canon :

Je meurs debout, je termine une race.

Mes amis ne m’ont pas connu.

Je suis la palme et le vent qui la brûle

Et la cendre sur l’eau posée comme un poème.

Comme un poème né d’hier, le plus câlin,

Comme une soeur imaginée dans la maison,

Coupant le pain, versant le vin, comme un poème

Né de la terre et déjà vieux qui boite au loin.

Je suis l’été, la femme dans son lit

Et son amant et sa grande douceur

Et sa fatigue et la porte fermée

Et son attente aux marches du matin.

Je suis au feu l’aile qui se consume ;

Je suis au ciel l’aile recommencée,

Dans le courant la grâce d’un éclair

Et le buisson de lèvres du corail.

Je suis, je vais, je me promène,

Je dors le front ouvert dans un livre d’images

Et, faucheur de midi, j’aiguise les vivants

Pour leur apprendre à vivre et me donner raison.
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TRACES

Sur le ciment frais d’une allée
un oiseau jadis laissa
pigeon, colombe ou tourterelle,
l’empreinte de ses pas.


l’oiseau sans doute s’envola
vécut de saison an saison
puis fut mangé par la terre.

Mais la trace à jamais demeure
comme une longue et belle phrase énigmatique.

Il en est ainsi du poète
sur le chemin de l’écriture
dans une secrète espérance.
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PLUIE

Tard,
si tard,
la pluie vint
pour notre soif
et celle de la terre.

Après l’attente sourde et le désir,
enfin ce bruit de bouche et de baiser
sur les feuillages du jardin.

Une passante s’est penchée sur notre corps
et, le touchant du doigt,
l’a tiré de la cendre
et ramené vers la source du fleuve.

Ainsi abdique l’ordre sec
et, pour nos yeux,
c’est le miracle d’un désert
soudain comblé d’immenses fleurs.
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IL DISAIT ( extrait )

Je m’égare et vis à tue-tête.

J’oublie la clef de mon destin.

Il disait : j’annonce la fête

Des bras nus, des fruits et du vin

Et le grand règne des tempêtes.

J’ai le Mot, l’Astre, la promesse.

À la cassure bleue du temps

Ma bouche jamais ne se blesse :

J’approfondis au creux du vent
L’éternité d’une caresse.
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CELUI QUI MARCHE…

Celui qui marche dans la boue
n’y verra jamais que son ombre.

Celui qui marche sur le sable
parlera langage d’oiseaux.

Celui qui marche sur les eaux
Dialogue avec les étoiles.
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Vidéo de Jean Joubert
Poèmes de Jean Joubert, extraits de "Longtemps j'ai courtisé la nuit", et de Jean-Marie Berthier, extraits de "Ne te retourne plus".
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