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EAN : 9782749172385
256 pages
Le Cherche midi (17/02/2022)
4.21/5   12 notes
Résumé :
On croyait autrefois que la tyrannie future serait fondée sur les modèles des États totalitaires du milieu du xxe siècle. La prophétie était fausse. Ce sont les citoyens eux-mêmes, dans les sociétés démocratiques, qui organisent leur asservissement. Nul besoin de Big Brother : il y a Facebook, où les individus se dévoilent et se surveillent. On croyait aussi que, comme dans les procès faits à des artistes au xixe siècle, la censure continuerait à être l'apanage de l... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (4) Ajouter une critique
Pierre Jourde écrit ici un pamphlet au vitriol - mais la plupart du temps bien étayé - contre une idéologie dominante dans certaines sphères de la politique, des médias, et de la recherche, qu'on pourrait appeler - mais à notre détriment car ce terme est surtout utilisé par les partisans de cette idéologie, et certains de ses opposants qui, par amalgame, vise à discréditer tout le camp de l'émancipation.
D'une plume alerte, il dénonce les effets délétères de cette idéologie simpliste et victimaire, en nous rappelant fort justement que lorsqu'on a un marteau, tout ressemble à un clou - ou plus exactement aujourd'hui à un mâle blanc cis-hétéro, sur lequel il convient de taper le plus fort possible.
Par courts chapitres, donnant à l'essai l'impression d'une agréable discussion à bâtons rompus - l'auteur est davantage écrivain qu'analyste, et ne se prive pas d'allers-retours, bienvenus car ils enrichissent la réflexion - il montre comment une clique de pseudo-intellectuels rompent l'exigence d'une pensée symétrique et s'ingénient à nous montrer que 2 et 2 ne font plus forcément 4. Par son franc-parler, qui n'est pas sans lui faire prendre quelques risques certainement, Jourde peut ici se revendiquer comme le continuateur d'Orwell ou de Koestler qu'il invoque comme autant d'exemples de voix dans le désert de la pensée idéologisée, à d'autres époques.
L'ouvrage est franc, courageux, il est à lire, et incontestablement il remet les idées en place. Par fidélité à l'amour du contradictoire qui semble animer Pierre Jourde, on peut néanmoins lui adresser quelques critiques - d'ailleurs en partie irréconciliables contre elles, ce qui témoigne en faveur de l'essai.
Principale critique : il semble exagéré, ou pour le moins anticipé, de comparer le bâillon qu'applique la pensée "woke" aux intellectuels contemporains avec les interdits imposés par les idéologies totalitaires du siècle passé. Certes, une grande partie de la presse, de l'édition, de la recherche en sciences humaines et sociales censure les réflexions qui ne respecteraient pas cette grille de lecture imposée. Mais il reste loisible - luxe que n'avaient pas les Soviétiques, ni les nazis et leurs vassaux - au café du coin, en privé, ou même dans des médias "de droite" et résolument antiwokistes. Finalement ce que critique Pierre Jourde, c'est moins l'évolution de la société que celle de la frange dominante de la gauche, très puissante dans les milieux intellectuels. Et dans cette gauche-là, Pierre Jourde, parce qu'il est homme et blanc, a de moins en moins sa place. C'est éminemment problématique - mais moins que de vivre sous Staline ou Hitler.
Deuxième critique, qui en dérive : c'est très bien de dénoncer l'idéologie wokiste, mais encore faudrait-il proposer autre chose. Or Pierre Jourde, qui plaide pour le bon sens (ce qui est déjà beaucoup) n'apporte pas vraiment de proposition. Il témoigne qu'il a arrêté de croire dans le communisme, et au détour d'une ligne on apprend qu'il est plutôt hostile à la montée en puissance de l'écologie - phénomène qu'il assimile, à tort selon moi, à l'idéologie woke, mais comme il ne développe pas du tout ce point, ça ne vaut pas la peine d'en discuter. Pierre Jourde critique donc la gauche actuelle, mais que propose-t-il ? L'amour inconditionné des humbles, indépendamment de leur couleur de peau, de leur sexe, de leur âge ? Très bien, mais comment cela marche-t-il concrètement ?
Les trois autres critiques sont de moindre importance, il s'agit plutôt à mon sens d'un manque de rigueur bien excusable dans le cadre de l'écriture d'un essai.
3. Pierre Jourde échoue à prendre en compte les spécificités de la domination qui s'applique aux femmes, aux minorités sexuelles, aux personnes racisées (je pense, contrairement à lui, que le terme a du sens dans nos sociétés encore majoritairement blanches). Il démontre assez bien que ces spécificités ne sont pas TOUTE la domination (d'abord économique) ni même son pire aspect. Mais tout de même, il faudrait en tenir compte, et il ne le fait pas - ou alors pour condamner en termes très vagues le racisme et le sexisme.
4. A force de critique, il oublie peut-être que les vies valent d'être vécues au-delà des "tyrannies" a) économique et b) "wokiste". Par exemple, quand il compare le sort d'une princesse saoudienne employant des esclaves philippines dans sa résidence de Neuilly, et d'un vieux résistant gaulliste finissant ses jours dans un modeste EHPAD, il a raison de dire qu'il est ridicule de penser que la première est une victime absolue, mais il oublie de souligner que la vie du second est sans doute, à la fin, préférable car elle a eu du sens malgré les injustices. le vieux résistant gaulliste a vécu, pas forcément la princesse saoudienne.
5. Mais ici, cela montre qu'il a peut-être raison, le titre est quand même bien mal choisi. Je m'attendais à un pamphlet épicurien contre la dictature du bien-être, de la forme physique, voire de la "gentillesse", et d'un appel au cynisme. Non ce livre est bien une charge de la vieille gauche face au wokisme, pourquoi ne pas le dire ? Si le choix du titre a été imposé par l'éditeur, alors PJ a peut-être encore un peu plus raison que je ne le croyais.

A lire (et même, avec plaisir).

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Pierre Jourde est un cantalou qui a gardé son bon sens paysan et que les succès universitaires n'ont pas enivré. Comme quelques rares hommes de gauche il reste droit dans ses bottes et refuse la dérive islamo-gauchiste, intersectionnelle et autres balivernes.
Sa réflexion atterrée sur le débat intellectuel est alimentée par de multiples exemples de la dangereuse bêtise des nouveaux gardes rouges. Il argumente avec pertinence, réaffirme avec ferveur les valeurs universalistes et laïques de la gauche traditionnelle mais son combat parait perdu d'avance, il n'y a pas assez de Jourde dans les universités, les média et les politiques.
C'est la lâcheté des dirigeants qui nourrit la peur chez ceux qui voudraient se rebeller, quiconque s'oppose sera lâché par sa hiérarchie et ses pairs.
Les mouvements décolonialistes, féministes, anti-racistes autrefois nécessaires ne savent plus s'arrêter, la machine ivre de son inattendu pouvoir s'est emballée et s'installe dans la surenchère et bientôt la violence. Sans compter l'aspect économique: l'état aveugle finance associations, colloques et autres manifestations sans parler des "chercheurs" qui détruisent l'université.
Tout ce beau monde pétri de contradictions et d'antagonismes se rassemble face à son ennemi l'homme blanc occidental hétérosexuel. Celui-ci croyait naïvement qu'il s'était débarrassé de ses vieux démons et qu'il était devenu l'exemple à suivre, erreur fatale il a été désigné comme l'ennemi du genre humain, la cause de tous les malheurs de l'humanité. Sa mort est démographiquement programmée, pas besoin de théorie du Grand remplacement, les choses se feront d'elles-mêmes en quelques siècles, espérons seulement que certains n'aient pas envie d'accélérer le mouvement.
Merci à Pierre Jourde d'être courageux, de prendre le risque d'être médiatiquement cloué au pilori mais il saura se défendre.
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J'ai déjà consacré plusieurs chroniques à divers ouvrages attaquant le wokisme, et suis en train de lire celui de Pierre Jourde, où il manifeste ses qualités habituelles d'analyse, s'attachant particulièrement aux manifestations du monstre dans la sphère littéraire et intellectuelle.
Pour préparer une future critique de cet ouvrage, j'ai fait quelques recherches sur Internet sur Pierre Jourde et ses engagements j et je suis tombé sur une polémique qui l'a opposé à quelques collaborateurs de Médiapart sur le concept d'islamophobie. Une polémique de plus sur ce sujet, et je n'en aurais pas parlé si elle n'avait pas donné lieu à cette phrase "magnifique " dans un article dudit journal :
"Une religion a nécessairement une conception et une acceptation du Sacré. Pour autant, cette conception est parfaitement compatible avec différentes opinions, avec différents engagements politiques, et surtout avec une pensée scientifique qui n'est pas inférieure, ne vous déplaise, à celle de ceux qui ont relégué les religions à une naïve explication des événements du monde."
Oui, vous avez bien lu, et tout est dit : les explications religieuses du monde valent bien les scientifiques; et la créationnisme vaut bien l'évolutionnisme.
Alors lions ce livre, par respect pour un homme qui ose lutter contre ÇA.
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A lire absolument! que dire d'autre? Un plaidoyer pour la liberté et son exercice, la culture, la pensée, dans une période où les dérives des combats qui ont été et sont encore à mener laissent augurer le pire entre sectarisme identitaire des uns et lâcheté des autres. Les exemples à l'appui sont nombreux et sidérants, comme si la censure qui couche avec la délation n'en étaient qu'au début de la fondation d'une grande famille de l'intolérance. Big brother n'était qu' un rigolo! Inquisition is back.
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Citations et extraits (1) Ajouter une citation
Le problème est économique et culturel. C'est l'affranchissement de l'Occident par rapport aux modeles religieux et aux formes traditionnelles, à partir de l'émergence du rationalisme scientifique, entre le xvre et le xviiisiècle, qui a M permis cet épanouissement sans précédent des sciences et des techniques, mais aussi des arts, quand bien même leur propos et leurs sujets demeurent religieux dans beaucoup de cas.
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Videos de Pierre Jourde (22) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Pierre Jourde
Une version scénique et inédite de « Bookmakers », par Richard Gaitet, Samuel Hirsch & Charlie Marcelet
Avec Télérama et Longueur d'ondes
En dialoguant avec 16 auteurs contemporains qui livrent les secrets de leur ecriture, decrivent la naissance de leur vocation, leurs influences majeures et leurs rituels, Richard Gaitet deconstruit le mythe de l'inspiration et offre un show litteraire et musical.
Avec les voix de Bruno Bayon, Alain Damasio, Chloe Delaume, Marie Desplechin, Sophie Divry, Tristan Garcia, Philippe Jaenada, Pierre Jourde, Dany Laferriere, Lola Lafon, Herve le Tellier, Nicolas Mathieu, Sylvain Prudhomme, Lydie Salvayre, Delphine de Vigan et Alice Zeniter.
En partenariat avec Télérama et le Festival « Longueur d'ondes »
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