Jover Manuel – «
Ingres» - éd. Terrail (groupe Vilo), 2005 – format 22x18cm, 255p. (ISBN 978-2879392875)
Le premier mérite de cet ouvrage réside dans la qualité de reproduction des tableaux reproduits : les éditeurs et imprimeurs réalisent aujourd'hui de véritables tours de force (il suffit de comparer leur production avec ce qui se faisait il y a quelques décennies) pour le plaisir visuel des amateurs.
Le deuxième mérite, qui n'est pas moindre loin s'en faut, revient à l'auteur qui s'est bien gardé de fournir l'une de ces hagiographies béates trop fréquentes dans le domaine des biographies d'artiste.
Bien au contraire, l'auteur fait ressortir les tensions parcourant l'oeuvre de ce peintre qui souhaitait tant incarner le maintien du classicisme antiquisant le plus rigoureux tout en ouvrant (sans le vouloir ?) la voix à des procédés qui finiront par déstructurer la peinture, que ce soit dans le tracé parfois abracadabrantesque ou – surtout – dans l'utilisation iconoclaste voire néglige des couleurs. le malheureux
Ingres produisit des horreurs comme ce Napoléon 1er, ce Jupiter et Thétis ou cette apothéose d'
Homère (carrément hilarante, mais moins toutefois que la maladie d'Antiochius), mais il produisit aussi des portraits féminins fascinants (Louise de Broglie, la comtesse d'Haussonville et bien d'autres) pour culminer des dans nus qui le mèneront à l'apothéose (véritable cette fois) du «Bain turc», triomphe d'une féminité tentaculaire inscrite dans un cercle fermé.
Cet auteur est d'autant plus qualifié pour tenir ces propose qu'il a dirigé l'édition des «Ecrits et propos sur l'art» de J-D
Ingres publiée chez Hermann en 2006. Ce qui nous vaut un troisième intérêt de cet ouvrage : l'auteur cite de nombreux extraits des opinions et avis émis par d'autres personnalités (
Baudelaire, Gauthier etc), et termine par un bref paragraphe portant sur la postérité de J-D
Ingres à travers des peintres comme Matisse ou Picasso.
Un livre plaisant et stimulant pour l'amateur.