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Roland Cahen (Autre)
EAN : 9782070323722
288 pages
Gallimard (13/10/1986)
4.12/5   127 notes
Résumé :
Cette oeuvre est une des plus importantes de Carl Gustav Jung (1875-1961). Concise, allant à l'essentiel, elle se situe au centre même de la pensée du savant qui, avec Freud, puis par-delà Freud, oriente la vie psychologique et mentale de l'humanité dans des voies nouvelles. Son sujet est la clé de la vie intérieure.
Tout le monde nouveau des profondeurs humaines, exploré par Jung, est axé sur un dialogue ,ou plus précisément une " dialectique entre le moi et... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (9) Voir plus Ajouter une critique
Avant de parvenir à la dialectique du Moi et de l'inconscient, foutons à la poubelle la persona. La première étape que nous devons franchir est celle de la distinction entre le Moi et ce masque que nous revêtons à chaque fois que nous devons survivre aux épreuves de la vie sociale. Jung définit la persona comme étant « le masque d'un assujettissement général du comportement à la coercition de la psyché collective». le surpassement de cette épreuve nécessite de comprendre la différence qu'il existe entre l'inconscient personnel et l'inconscient collectif. Nous partons de cette simple petite remarque, que chacun a pu ressentir un jour ou l'autre dans une sorte d' « inquiétante étrangeté » : « L'inconscient semble détenir des éléments autres que les simples acquisitions de la vie personnelle » avant d'expliquer, à une autre échelle, les similitudes qui existent entre les différentes civilisations et systèmes religieux. L'inconscient collectif irrigue les individus et nourrit leurs constructions à la manière d'un champ morphique. « C'est cet état de choses qui explique, par exemple, le fait que l'inconscient des races et des peuples les plus éloignés les uns des autres présente des analogies, des correspondances remarquables, analogies qui se manifestent entre autres dans le phénomène, déjà souvent mis en évidence, de la concordance extraordinaire des formes et des thèmes mythiques autochtones, sous les latitudes les plus diverses. »


Cette première étape de différenciation est importante mais ce n'est pas celle qui retient le plus l'attention de Jung. Lorsque la persona est tombée, il faut s'attaquer à l'anima. L'anima, voilà ce qui intéresse Jung !


L'anima est inconsciente, mystique, introvertie. Dans Ma vie, Jung parlait de sa jeunesse qu'il avait sentie partagée entre deux personnalités : la personnalité A, extravertie, curieuse et sociale, et la personnalité B, renfermée, introvertie et intellectuelle. Cette expérience aura certainement encouragé Jung à développer cette étrange dualité qu'il a très tôt sentie en lui pour lui donner le nom d'anima. S'il est possible de liquider rapidement la persona sitôt les mondanités terminées, l'anima se montrera plus coriace à surmonter. Alors que la persona est en grande partie consciente, l'anima est inconsciente et se fait facilement passer pour la partie la plus authentique de nous-mêmes. Elle est celle qu'on pense être notre personnalité profonde, notre petit secret dorloté au plus profond de notre être… un gros bluff !


L'individu qui reste trop loin de son anima risque de mal la connaître. La prenant pour ce qu'elle n'est pas, il deviendra névrosé. Il imagine que son Moi revendique les ambitions vilipendées par la société ou l'entourage ou qu'il se caractérise par les jugements rapides que les autres émettent à son sujet sans y penser vraiment. L'individu a cru entendre son anima parler à travers une cloison mais parce qu'il n'a pas le temps, parce qu'il n'est pas assez courageux ou parce qu'il ne voit pas la cloison, il n'approche pas son oreille pour vérifier que celle-ci ne l'a pas trompé. L'anima est délaissée, personne ne l'écoute, ou personne ne l'écoute bien. Elle sanglote et rend l'individu morose, déprimé, névrosé. C'est ce stade qu'il faut dépasser, et c'est pour cela que Jung propose de converser dans sa Dialectique du moi et de l'inconscient. Encore une fois, si on a luMa vie, on se souviendra de la période dépressive traversée par Jung au cours de sa carrière : au lieu de fuir sa dépression dans le travail ou la distraction, il l'avait prise à bras-le-corps et lui avait fait subir un interrogatoire : qui es-tu ? que veux-tu de moi ? que fais-tu en moi ?


« Poser la question [à l'anima] sur [un] mode personnel a un gros avantage : ainsi, en effet, la personnalité de l'anima se trouve reconnue et acceptée et une relation entre le Moi et l'anima devient possible. […]"


Il faut élever ce dialogue avec l'anima à la hauteur d'une véritable dialectique. Chacun, on le sait, a la particularité et aussi l'aptitude de pouvoir converser avec lui-même. Chaque fois qu'un être se trouve plongé dans un dilemme angoissant, il s'adresse, tout haut ou tout bas, à lui-même la question (qui d'autre pourrait-il donc interroger ?) : « Que dois-je faire ? » ; et il se donne même (ou qui donc la lui donne en dehors de lui ?) la réponse. »


Pour rendre cette méthode plus concrète, Jung cite cet exemple de dialectique entre un homme dépressif et son anima :
« Lorsqu'une dépression s'emparera de lui, il ne devra plus s'astreindre soit à travailler, soit à telle ou telle contrainte pour oublier et fuir, il devra au contraire accepter sa dépression et, en quelque sorte, lui donner la parole. […] Ce n'est ni une faiblesse, ni un relâchement sans consistance, c'est au contraire une tâche difficile qui exige le grand effort de conserver son objectivité en dépit des séductions du caprice : on transforme ainsi l'humeur en objet observable, au lieu de la laisser s'emparer du sujet qu'elle domine. le malade aura à faire en sorte que son état d'âme dialogue avec lui : son humeur devra lui révéler et lui préciser comment et de quoi elle est faite, et en fonction de quelles analogies fantasmatiques on pourrait tenter de la cerner et de la décrire. »


Non dogmatique comme toujours, Jung rappelle cependant qu'il n'existe pas une seule méthode qui serait universellement efficace. de même, l'anima ne donne pas une réponse unique et durable. A chacun de l'explorer personnellement. En d'autres termes, Jung propose une approche qui doit se montrer à chaque fois originale. En renouant avec son anima, l'état névrotique s'éloigne. On peut presque dire que cette méthode mobilise toute notre capacité d'attendrissement. Il faudrait se reculer, regarder l'anima, la bercer du regard et la questionner sans animosité. Il ne suffira pas d'une seule conversation qu'on mène à l'arrache sans considération pour son interlocuteur. La dialectique n'est pas un interrogatoire de justice biaisé qui doit conduire à la condamnation sans appel mais doit plutôt s'envisager comme une suite longue et progressive de dialogues nocturnes, menés loin de l'agitation extérieure, pour découvrir qui est cet étrange squatteur avec qui on cohabite depuis des années dans le silence et la méfiance.


Cependant, nous devons rester sur nos gardes. L'anima, dans la mesure où elle est inconsciente, peut devenir un adversaire redoutable au cours de la conversation. Elle peut nous berner pour se venger des longues années de silence auxquelles nous l'avons contrainte, nous faisant par exemple croire que nous avons réussi à la mater et que nous sommes parvenus à un niveau de conscience supérieur. C'est le phénomène de l'inflation. le Moi croira ainsi connaître tous les petits secrets bien cachés de l'Univers. Jung parle alors de personnalité-mana :


« La composante mana de la personnalité est une des dominantes de l'inconscient collectif, l'archétype bien connu de l'homme fort, qui s'est manifesté à travers toute la vie de l'humanité sous les multiples aspects du héros, du chef, du magicien, du medicine-man, du saint, du souverain, qui règne sur les hommes et les esprits, du roi, de l'ami de Dieu. »


Jung va plus loin que Nietzsche et son Zarathoustra, que tous les grands prophètes et initiateurs qui se sont laissés griser par la connaissance acquise –comme si une connaissance ne pouvait jamais être fausse !


« La connaissance plus approfondie, le rapprochement cohérent d'éléments précédemment séparés et dissociés de soi-même, l'impression d'avoir ainsi, semble-t-il, surmonté le conflit moral, donnent à une certaine catégorie de sujets un sentiment de supériorité pour lequel le terme de "ressemblance à Dieu" ne semble pas excessif. »


Liquider la persona, reconnaître l'anima et ne pas se laisser griser par la mana : telles sont les étapes que devra surmonter l'individu pour dépecer son Moi de tous les parasites encombrants, scories d'une vie sociale mouvante et souvent contradictoire. La raison de l'existence de ces entités semble un peu rapidement éludée, mais il ne relève sans doute pas de notre fonction de les expliquer (à la limite, ce serait peut-être une tâche qui plairait à celui qui a confondu son Moi avec la mana). Peu importe, gardons cette problématique sous le coude pour une prochaine réflexion. Une fois que ces étapes ont été franchies (Jung n'affirme pas qu'un être humain a déjà réussi cet exploit, on ne saura d'ailleurs pas si cette ambition est réaliste), le Moi peut alors s'acheminer tranquillement vers le Soi, version psychanalytique de l'Absolu.


« Ainsi le Soi est aussi le but de la vie, car il est l'expression la plus complète des combinaisons du destin que l'on appelle un individu ; et non pas seulement le but de la vie d'un être individuel, mais aussi de tout un groupe au sein duquel l'un complète l'autre en vue d'une image et d'un résultat plus complets. »


Il semblerait donc que le Soi n'attende pas qu'on se prenne la tête avec nos névroses, ni qu'on cherche le pouvoir absolu par la maîtrise d'un quelconque savoir illusoire : le Moi peut se rapprocher le plus possible du Soi à condition qu'il s'accepte comme une donnée provisoire et contingente. Il va falloir faire avec ce joujou dans cette vie, sans mater la vie des autres pour voir comment ils se débrouillent, sans rester matériellement attaché aux expériences vécues et aux expériences à venir. Quasi-ode à l'insignifiance qui laisse toutefois un peu sceptique car, après tout, Jung s'est peut-être laissé prendre lui aussi au piège d'une mana margouline, avide de connaissances, rusant pour faire croire qu'elle snobe le pouvoir et qu'elle est autre chose qu'une mana distrayante. Et si ce n'est pas le cas, Jung peut-il prétendre être le philosophe de génie que nous attendons tous, à chaque génération ?


« ... seul est philosophe de génie celui qui parvient à élever une vision primitive, qui n'est qu'un déroulement naturel, à la dignité d'une idée abstraite, et à en créer un patrimoine conscient de la collectivité des hommes. C'est en promouvant cette élaboration qu'il oeuvre de façon personnelle ; et c'est dans cette élaboration individuelle de son esprit que réside la valeur personnelle qu'il peut légitimement se reconnaître, sans basculer dans une inflation. »


Au-delà de l'inconscient collectif et de la mana, on ne peut pas affirmer qu'il n'y ait rien. Mais si ces trois stades nous permettent déjà de nous dépouiller et d'avancer, alors ils sont suffisants. La suite au prochain épisode.
Lien : http://colimasson.blogspot.f..
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Dialectique du moi et de l'inconscient est une oeuvre pivot de la psychologie analytique. Carl Gustav Jung y décrit les mouvements à première vue désordonnés et chaotiques des différents éléments de la psyché qu'il a découverts et développés au cours de sa carrière, pour les rendre signifiant dans le cadre de la dynamique du processus d'individuation.

La première partie de l'ouvrage pose les fondements des forces en présence : Jung définit ce qu'est le Moi, l'inconscient individuel et l'inconscient collectif (qui est l'une de ses découvertes majeures), et expose l'originalité de sa théorie en la positionnant par rapport aux théories psychanalytiques de l'époque (notamment celles de Freud et d'Adler). Il décrit un Moi inscrit dans une dynamique impossible à tenir, tiraillé entre les exigences du monde extérieur et pour lequel il se cache derrière la Persona (c'est la personnalité sociale, archétype issu de l'inconscient collectif et personnel et soumise au type de société dans lequel on vit, à ce qu'elle valorise, à la liberté et la responsabilisation qu'elle propose aux individus), et les exigences du « monde intérieur », de l'inconscient, présenté dans l'ouvrage comme étant l'Anima (ou l'Animus pour les femmes). Il explique très clairement pourquoi plus les éléments de l'inconscient les plus niés et ignorés par l'individu sont ceux qui ont le plus de puissance sur le Moi, et donc dans la vie de tous les jours. Jung pose comme fondements de la libération du Moi sa confrontation avec ces archétypes, en expliquant les enjeux de ce qu'il appelle la libération de l'individualité ou processus d'individuation, sujet principal de la seconde partie de l'ouvrage.

L'individuation consiste à déplacer le centre du Moi de façon à y incorporer des éléments de l'inconscient, c'est-à-dire à tendre vers l'archétype du Soi. de façon pragmatique, il s'agit de transformer les complexes autonomes (les archétypes de l'Anima et celui de la personnalité mana) en fonctions support (c'est-à-dire en force dans laquelle le Moi peut puiser), en reconnaissant leur existence, puis en se confrontant à eux, et enfin, en les assimilant. C'est la description de cette dialectique qui a donné son nom à l'ouvrage.

Le chemin de l'individuation est long et semé d'embuches. Jung explique pas à pas les différents risques liés à l'exploration et la mise au grand jour des ressources de l'inconscient.
L'individuation est réservée à quelques uns, poussés par une nécessité intérieure à explorer toujours plus en avant ce qu'ils sont. Il est d'ailleurs difficile d'ignorer les appels de l'inconscient : ce dernier se rappelle à notre bon souvenir au travers de tocs, d'obsessions, d'angoisses, bref, de symptômes généralement associés aux névroses, qui sont finalement, et avant tout, des invitations directes de notre inconscient à entamer le dialogue.
Ceux pour qui l'individuation n'est pas une nécessité sont également invités à prendre conscience de leurs courants intérieurs contraires, en vue de ne plus se faire balloter au gré des pulsions inconscientes et ce, quelle que soit l'étape à laquelle ils se trouvent ou choisissent de s'arrêter. Finalement, Jung nous invite à devenir responsable de notre vie en prenant conscience de nos actes, et à interagir de façon vraie avec les autres, notamment en arrêtant de projeter sur tout un chacun les fantasmes issus de nos archétypes.

Ce que j'aime particulièrement chez Jung, c'est ce message qui nous exhorte à être acteur et responsable de sa vie, à être autonome et vrai dans sa relation avec l'autre. Nul besoin de 20 ans de psychanalyse (même si une « petite tranche » peut aider), la prise de conscience de ce qui est caché et la prise en considération de ce dont il s'agit permet d'avoir une meilleure connaissance et une meilleure maitrise de ses actes. C'est un message plein d'espoir, qui invite chacun à se repositionner non seulement par rapport à ce qu'il est ou par rapport à l'autre, mais également par rapport à sa place dans la société, au regard qu'il porte sur le monde.

Cet ouvrage est riche et complexe : on y apprend ou comprend toujours de nouvelles choses, même lors d'une seconde ou d'une troisième lecture. le développement proposé par Jung est ardu : il n'a pas une approche directe des messages qu'il passe, des développements qu'il fait, des concepts qu'il aborde. Il a plus tendance à aborder différents sujets, et à laisser le lecteur faire ses propres rapprochements.
Il ne s'agit pas d'une introduction à la théorie Jungienne : comme l'ont dit Saule et Eric Eliès, cet ouvrage est à déconseiller à ceux qui ne connaissent pas les principaux fondements et éléments de la « psychologie des profondeurs ». En effet, Jung fait appel aussi bien aux différents archétypes qu'à la notion de complexes autonomes, aux symboles de l'âme, à la typologie des individus, etc… qui ont fait l'objet d'ouvrages dédiés.

Si j'avais un reproche à faire à ce livre, ce serait peut-être sa légèreté vis-à-vis des processus liés à l'Animus (thématique souvent reléguée à un « identique que pour l'Anima »), et l'absence quasi-totale de référence à un archétype qui me semble pourtant bien nécessaire à l'approche de l'individuation : l'Ombre.
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Jung nous propose dans «Dialectique du moi et de l’Inconscient» un schéma général qui semble bien couvrir toute la diversité de la psyché humaine.
Il distingue trois états de conscience, on pourrait les représenter sur un axe :

INCONSCIENT COLLECTIF__INCONSCIENT PERSONNEL___MOI

- L’INCONSCIENT COLLECTIF dont les contenus, supposés communs à tous les hommes, sont les ARCHÉTYPES, sont pensés dans un mode qui est celui du DÉLIRE. C’est par une capacité innée d’IMITATION, que l’on récupère probablement très jeune ces repères qui restent inconscients tout simplement parce qu’ils n’ont pas pu passer par une phase conscience qui n’existait pas encore. Les contenus sont riches, autonomes, puissants et non maitrisables. En fait, c’est ce bon vieux monde des esprits identifié depuis longtemps.

- A l’opposé LE MOI est l’image consciente de soi que l’on construit et qu’on mémorise, toujours disponible pour se définir. Cette image ignore complètement les archétypes même s’ils l’influencent fortement. Elle bâtit une explication du monde fabriquant des SAVOIRS élaborés à partir du RAISONNEMENT. C’est la capacité LOGIQUE qui assure la permanence de la représentation.

- L’INCONSCIENT PERSONNEL serait le réservoir qui s’alimente par le débordement des trop-pleins qui se créent dans l’INCONSCIENT COLLECTIF et dans le MOI. D’un côté les archétypes deviennent visibles sous formes de MYTHES, ils se développent dans les REVES qui peuvent pénétrer la conscience qui entraperçoit leur fonctionnement sur le principe de l’ANALOGIE.

- De l’autre côté, L’INCONSCIENT PERSONNEL se remplit des pensées du MOI qui deviennent inconscientes sans que cela soit forcément irréversible. Les contenus sont proches de l’ART, ce sont des CRÉATIONS qu’un pouvoir d’INVENTION fait affleurer juste à la surface du MOI.

Jung appelle SOI la totalité du psychisme d’un individu.
Son idée clé est que chacun se construit mentalement par un processus d’individuation qui est : l’élaboration du SOI par intégration des trois états de conscience.
Par ailleurs, il semble naturel que chez chacun, il y ait un positionnement préférentiel sur l’axe inconscient/conscient, pourtant l’individuation n’est absolument pas une sorte de progression qui irait du négatif inconscient au positif conscient. A ce positionnement le cerveau fonctionne à un régime particulier qui convient bien pour certains contenus et certains modes d’être, par contre il est ignorant et aveugle pour d’autres contenus et d’autres modes d’être qui sont privilégiés pour d’autres positionnements. Par exemple, positionné sur le MOI, l’intégration du rationnel se fait bien, par contre l’intégration des contenus de l’INCONSCIENT COLLECTIF est facilement niée, ce qui crée un déséquilibre nuisant au processus d’individuation.
Intégrer les contenus des trois modes est bien sûr extrêmement problématique, tout simplement : les contenus inconscients sont illisibles pour le conscient et vice versa.
En déclinant quatre positionnements sur l’axe des états de conscience, on saisit mieux comment l’individu est enfermé dans un type de SOI, ignorant parfois totalement les autres modalités, ce que Jung diagnostique comme un effacement de l’individu dans le collectif.

1/ Si le SOI est positionné très près de l’INCONSCIENT COLLECTIF :
Le monde est fortement irrationnel se développant par la faculté d’IMITATION.
Le mode de pensée est le DÉLIRE ayant la SENSATION des ARCHÉTYPES.
Le mode d’être est la FOLIE, son style est PROPHÉTIQUE.
Exemples : + Les prophètes, les gourous… Aussi les philosophes théoriciens du monde - Les délirants.
Privilèges : Visions totales intriquées avec des émotions.
Difficultés : Le simple bon sens est problématique, le vrai et le faux, la réalité et la pensée deviennent indiscernables.

2/ Si le SOI est positionné entre l’INCONSCIENT COLLECTIF et L’INCONSCIENT PERSONNEL :
Le monde est faiblement irrationnel se développant par la faculté d’ANALOGIE.
Le mode de pensée est le RÊVE ayant l’INTUITION des MYTHES.
Le mode d’être est la POSSESSION, son style est l’ADORATION.
Exemples : + Les héros, les chevaliers - Les disciples, les suiveurs, les fans.
Privilèges : Visions où les archétypes se personnifient sous forme de croyances mythologiques ou religieuses.
Difficultés : Impossibilité de comprendre la causalité sans y adjoindre des croyances superstitieuses.

3/ Si le SOI est positionné entre L’INCONSCIENT PERSONNEL et le MOI :
Le monde est faiblement rationnel se développant par la faculté d’INVENTION.
Le mode de pensée est la CRÉATION appréhendant par le SENTIMENT l’ART.
Le mode d’être est la SOLITUDE, son style est celui du MEDIUM.
Exemples : + les Artistes - Les originaux, les rêveurs.
Privilèges : Découverte des valeurs esthétiques, révélation du beau.
Difficultés : Fuite dans un monde incommunicable.

4/ Si le SOI est positionné près du MOI :
Le monde est fortement rationnel se développant par la faculté de la LOGIQUE.
Le mode de pensée est le RAISONNEMENT donnant des EXPLICATIONS des SAVOIRS.
Le mode d’être est l’ALIENATION, son style est DOGMATIQUE.
Exemples : + Les scientifiques - Les matérialistes
Privilèges : Vivre les illusions d’un monde totalement compréhensible.
Difficultés : Les archétypes sont niés par la logique et ressurgissent de manière incontrôlable. La dimension spirituelle est minimisée ou supprimée.

Cet essai de Jung présente une théorie très puissante, son seul défaut, qui est aussi un danger est qu’elle nous incite à douter de notre représentation du monde et à nous remettre en cause de façon assez radicale. Sauf à la rejeter complètement, on ne peut guère l’appréhender d’un point de vue passif, elle agit sur nous.
Une tentative de réfutation pourrait dire : oui, mais moi je suis proche d’un de vos types et je veux bien admettre qu’il y a d’autres types, mais ils n’ont rien à voir avec moi. C’est justement ce que Jung pointe : alors, vous n’êtes pas capable d’intégrer vos différentes composantes, vous vous croyez un individu, vous n’êtes qu’un clone de votre type.
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J'ai lu de très nombreux livres de Freud, quelques-uns de Lacan, je laissais une dernière chance à la psychanalyse avec Jung.
Décidément ce n'est pas pour moi.
Je ne comprends pas non plus qu'il soit tant conseillé de les lire, de les maîtriser, ces livres n'ont (quasiment?) aucune utilité dans la relation d'aide et ont même une orientation malsaine et toxique. Comment des professeurs de psychologie (dont certains sont aussi des femmes) cautionnent-ils ce genre de choses ? :
« La femme est la compagne de l'homme; elle fait partie de sa vie et lui appartient. »
« Dans la mesure où la femme est jolie, les opinions de son animus ont pour l'homme quelque chose d'enfantin et de touchant qui l'incite à une attitude bienveillante de guide et d'éducateur paternel ; mais, dans la mesure où le côté sentimental de l'homme ne se sent pas concerné par le charme de la femme en question, dans la mesure où le charme féminin ne constelle pas la disponibilité sentimentale chez l'homme, celui-ci escompte chez la femme compétence et aide valable et non plus incapacité touchante et bêtise solennelle ; dès lors les opinions toutes faites de l'animus de la femme ont, aux yeux de l'homme, quelque chose de suprêmement irritant, surtout à cause de leur manque de fondement […]
Chez les femmes intellectuelles, l'animus suscite des arguments et des raisonnements qui voudraient être logiques et critiques, mais qui, pour l'essentiel, se bornent la plupart du temps à ceci : un point faible qui est secondaire sera transformé, au prix d'un contresens, en la thèse principale. […] A leur insu, de telles femmes ne poursuivent qu'un seul but : irriter l'homme et le faire sortir de ses gonds [...] »
Rappel : l'anima est la part « féminine » chez l'homme (comprendre hystérique), et l'animus la part masculine chez la femme (comprendre rationnelle).
En gros une femme intellectuelle est donc malade et croit dire des choses censées mais en fait non (bien sûr son animus ne donne qu'une apparence de rationalité) et en plus elle fait ça pour faire chier les hommes (c'est bien connu, y'a rien de plus chiant qu'une femme qui pense).
« Une femme possédée par son animus est toujours en danger de perdre sa féminité, son personnage féminin adapté, exactement comme l'homme, dans des circonstances analogues, risque de devenir efféminé. »
Femme qui pense = malade = pas féminin (féminin = sois belle et tais toi. Je ne sais pas ce qu'il fait des moches) = mal
Homme qui ressent des trucs = malade = pas masculin = mal.
« Lorsqu'on cherche à se faire une image de la personnalité qui s'exprime par ces complexes, on est contraint parfois à la conclusion qu'il ne peut s'agir que d'une femme hystérique – d'où la dénomination d'anima ! »
Hum...
J'ai acheté deux livres de Jung, je le regrette. Je vais survoler l'autre mais franchement, je déconseille. J'en ai tellement eu marre que je n'ai pas lu les 10 dernières pages).
Le plus flippant dans ce livre ? C'est qu'on enseigne encore ce genre de choses en psycho...
J'ai été assez dure dans ma critique, surtout que j'ai trouvé Jung moins mauvais que Freud et Lacan, il y a tout de même quelques concepts plutôt intéressants (voir utilisables), mais franchement on trouve bien mieux dans des livres plus récents.
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Je suis plutôt content.
Content car finalement Jung a une vision qui me plaît bien de son travail et redore un peu la psychanalyse. Il a réellement abandonné Freud à ses bêtises, son complexe oedipien à la ramasse, son transfert limité, son analyse des rêves tout aussi limitée...
Jung a hélas pour lui un côté théoricien et philosophe. Hélas car il se dit vouloir rester dans le clinique, dans le "concret" et tente de donner corps à ses préceptes théoriques. Ca ne marche pas trop dans ce livre.
Dans ce livre, il y a aussi un peu trop de répétitions, mais sans doute ce n'est qu'à ce prix qu'il juge qu'on puisse arriver à comprendre ce qu'il souhaite communiquer... Il n'a sans doute pas tort.
Les concepts qu'il met en avant : le Moi, le Soi, l'animus et l'anima, la persona et la personnalité mana, sont assez clairs. Compréhensibles à mon sens et relativement praticables. Et qui correspondent fort à tout un pan dans la philosophie et dans les spirituelles qui se taillent actuellement une bonne part du lion... On sort de l'homo occidentalus qui n'a rien comprus en terme de spiritus à la vision plus complète et harmonieuse (ou tendant vers l'harmonie) de nos chers amis orientaux. Ca fait du bien. On le sent précurseur. On le sent ouvert. Je me réconcilie avec lui, que j'avais un peu hâtivement classé dans les bêtes psychanalystes... Je suis donc content.
Attention c'est un homme du début du 20e siècle et donc concernant les différences homme-femme, on peut parfois grincer des dents ou doucement rigoler, tellement cliché parfois... Mais bon, c'est de son époque. (Mais en est-on sorti ? Vraiment ??)

Bon, ben Finalement, Jung : j'aime bien.
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Citations et extraits (83) Voir plus Ajouter une citation
C’est un fait évident que la moralité d’une société, prise dans sa totalité, est inversement proportionnelle à sa masse, car plus grand est le nombre des individus qui se rassemblent, plus les facteurs individuels sont effacés et, du même coup, aussi la moralité, qui repose entièrement sur le sentiment éthique de chacun et, par le fait même, sur la liberté de l’individu, indispensable à son exercice.

C'est pourquoi tout individu, en tant que membre d'une société est inconsciemment plus mauvais, dans un certain sens, qu'il ne l'est lorsqu'il agit en tant qu'unité pleinement responsable. Car, fondu dans la société, il est en une certaine mesure libéré de sa responsabilité individuelle. Ceci explique qu'un groupe important qui ne serait composé que d'hommes excellents équivaudrait en tous points, pour ce qui est de la moralité et de l'intelligence, à une espèce de gros monstre, balourd, obtus, impulsif et sans discernement. Plus une organisation est monumentale et plus son immoralité et sa bêtise aveugle sont inévitables (Senatus bestia, senatores boni viri : les sénateurs sont des hommes bons et le Sénat est une bête cruelle).

La société, en favorisant dans tous ses membres individuels automatiquement les qualités collectives, laisse le champ libre, par le fait même, à toutes les médiocrités, cultivant à bon marché tout ce qui est en passe de végéter de façon irresponsable : dès lors l’oppression des valeurs et des facteurs individuels est inéluctable.

Ce processus commence dès l’école, continue au cours de la vie universitaire et imprime son sceau à tout ce qui, de près ou de loin, concerne l’État. Plus un corps social est petit, plus est grande l’individualité de ses membres ; plus sont grandes leur liberté relative et les possibilités d’une responsabilité consciemment assumée.

Hors de la liberté, point de moralité. (pp. 74-75)
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Chez les malades mentaux on peut en effet observer avec un relief accru et comme agrandi tous les phénomènes qui, chez les êtres normaux, n'existent qu'à un degré léger. Lorsque j'étais encore médecin à la clinique psychiatrique de Zurich, je fis une fois visiter les salles des malades à un profane intelligent. Il n'avait encore jamais vu du dedans un asile d'aliénés. Lorsque nous eûmes terminé, il s'exclama : "C'est formidable, vous avez ici en petit toute la ville de Zurich, une quintessence de la population ! C'est comme si on avait réuni et collectionné, dans leurs exemplaires les plus classiques et les plus démonstratifs, tous les types humains que l'on rencontre quotidiennement dans la rue ! Tous les "zèbres" et tous les "tordus" de la ville dans leurs exemplaires les plus rares, expression de toutes les vicissitudes et de toutes les hauteurs de la vie !" Je n'avais jusqu'alors jamais envisagé les choses sous ce angle ; mais cet homme avait en grande partie raison.
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Ce n'est pas chose insignifiante que de voir s'effondrer, chez un être humain, l'attitude et les structures conscientes. C'est en petit une véritable fin du monde, le sujet a l'impression que tous les éléments qui constituaient sa vie retombent dans une manière de chaos originel. Il se sent abandonné, désorienté, vulnérable à l'extrême, tel un navire sans gouvernail et livré aux fureurs des éléments. C'est du moins ce qui semble être et l'impression qu'il en a. L'expérience montre que la réalité est un peu différente : en fait, l'être, abandonné par son conscient, est retombé dans ses plans inconscients collectifs, auxquels il est livré.
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Le développement de la personnalité chez le primitif, ou mieux, le développement de la personne, est une question de prestige magique. La figure du medecine-man ou celle du chef de la tribu sert de guide : tous deux se distinguent par la singularité des parures, par des signes extérieurs, et par leur façon de vivre, l'ensemble exprimant leur rôle. Les signes extérieurs particuliers délimitent et isolent l'individu ; la possession de secrets rituels renforce cet isolement. Par ces moyens, et par d'autres de même sorte, le primitif se crée une enveloppe que l'on peut appeler sa persona, son masque. Chez le primitif, d'ailleurs [...] il s'agit bien de véritables masques qui, pour les fêtes totémiques par exemple, servent à la transformation et à l'exaltation du personnage. Par le masque, l'individu sélectionné est mis en marge de la sphère de la psyché collective, et, d'ailleurs, dans la mesure où il parvient à s'identifier à sa persona, il s'y dérobe réellement. Cet affranchissement de la psyché collective lui confère aux yeux de sa tribu un prestige magique.
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Pour reprendre l'expression de Pierre Janet, la psychée collective embrasse les "parties inférieures" des fonctions psychiques, la part profondément enracinée, qui se déroule et s'exerce en quelque sorte par automatisme, cette part héritée et présente en chacun, donc impersonnelle et suprapersonnelle, de la psychée de l'individu. Au contraire, le conscient et l'inconscient personnel embrassent les "parties supérieures" des fonctions psychiques, donc la part qui a été acquise et développée ontogénétiquement.
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