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EAN : 9780190253226
400 pages
Oxford University Press (01/01/2017)
5/5   1 notes
Résumé :
Pendant la seconde moitié du X°s, Byzance s'engage dans une série de conquêtes spectaculaires : au sud-est contre les Arabes, en Bulgarie, et enfin dans les terres géorgiennes et arméniennes. Au début du XI°s, l'empire est l'état méditerranéen le plus puissant. Son essor est aussi économique, démographique et, en même temps, intellectuel. Pourtant, cinquante ans après, ce projet impérial s'effondre, quand la désunion politique, la mauvaise gestion de l'impôt, la déf... >Voir plus
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Que lire après Streams of gold, rivers of blood, the rise and fall of Byzantium 955 a.D. to the First CrusadeVoir plus
Critiques, Analyses et Avis (1) Ajouter une critique
Le byzantiniste Anthony Kaldellis a publié en 2017 "Streams of gold, rivers of blood / The rise and fall of Byzantium, 955 A.D. to the First Crusade" (littéralement, "Ruisseaux d'or, rivières de sang, l'essor et la chute de Byzance de 955 à la première Croisade"), livre d'histoire qui diffère profondément de sa production habituelle. Il y renoue avec l'histoire des batailles, dont on a dit tant de mal, et relate ces cent cinquante années d'histoire byzantine avec un grand souci du détail, recourant non seulement aux sources romano-byzantines, mais aussi arméniennes, géorgiennes, latines et arabes. Régulièrement, une pause dans le récit permet de faire le point et de réfléchir au chemin parcouru. Il y a en effet de quoi s'étonner qu'un état qui a privilégié la guerre défensive après Justinien et Héraclius, du VII° au X°s, devienne soudain conquérant et offensif, atteignant les frontières idéales d'équilibre entre l'Orient et l'Occident (des Balkans au sud de l'Italie, jusqu'au nord de la Syrie) pour tout perdre en peu d'années, face à des ennemis d'un nouveau type (Normands et Turcs). L'ouvrage se termine sur un nouveau récit de la Première Croisade dans son contexte, et nous retrouvons ici le Kaldellis redresseur d'erreurs historiographiques et de traditions fausses. le lecteur sera aussi intéressé par son récit du schisme de 1054 entre les papes de Rome et l'église orthodoxe.

L'auteur signale au passage à quel point la formule "decline and fall" peut provoquer le byzantiniste : tous les préjugés contre lesquels il a écrit ses livres sont contenus dans ces mots de Gibbon, savant inégalable aux préjugés inébranlables. "Decline and fall" devient ici "rise and fall", par une sorte de clin d'oeil. On s'amusera aussi que Kaldellis dédie cette histoire d'un empire qui résista à mille ans d'invasions, aux migrants de la Mer Egée et à ceux qui les aident.
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Citations et extraits (13) Voir plus Ajouter une citation
Premières invasions turques : 2. Les Seldjoukides.
Les conquêtes seldjoukides sont le moment le plus crucial de l'histoire du Moyen-Orient depuis la conquête arabe du VII°s. Un nouveau monde musulman en naquit et elles déclenchèrent des forces qui frappèrent l'Asie Mineure romaine* aux pires moments et circonstances... Les Seldjoukides étaient un rameau de la famille étendue des nomades turcomans (turcs) d'Asie Centrale, qui combattaient en mercenaires au service des divers états à l'est de la Mer Caspienne. De manière frappante, l'essor des Seldjoukides reflète celui des Normands, mais à l'échelle plus vaste de l'Asie Centrale. Ils étaient de rusés opportunistes impitoyables avec la faiblesse, qui changeaient d'employeurs à leur propre avantage ; des raids lucratifs sur l'Iran oriental leur attirèrent plus de partisans, ce qui leur permit de pratiquer des invasions armées, des conquêtes exponentielles, et la soumission des états. Des panégyristes ultérieurs leur inventèrent un mythe d'origine commune pour unifier cette confédération militaire des Turcs dont les fondateurs, tout comme les fils de Tancrède de Hauteville en Italie, furent dotés d'une légitimité religieuse et dynastique.

La création d'un empire seldjoukide provoqua des migrations de masse de nomades turcomans vers l'ouest : Iran, Azerbaïdjan, Caucase, Anatolie. La dynamique de ce phénomène tenait aux relations tendues entre les tribus, en quête de pillage et de pâturage, et les sultans Tughril Beg (mort en 1063) et son neveu Alp Arslan (1063-1072). Un chef vainqueur pourvoyait ses hommes en butin par des pillages et en bons pâturages. Le Caucase romain* offrait les deux.

*Romain : l'historien nomme l'empire "byzantin" par le nom officiel qu'il se donnait, "empire romain".

p. 196
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Société byzantine au XI°s : histoire culturelle.
Ce que nous pourrions appeler en gros "classe moyenne supérieure" devient maintenant visible dans nos sources, en nombre suffisant, pour la première fois. Elle envoie ses fils aux écoles de Psellos et de Xiphilin, espérant leur procurer des places dans les degrés inférieurs de l'administration impériale en expansion. Alors que l'horizon social de la littérature était auparavant limité à un tout petit cercle, nous observons maintenant, dans les lettres de Psellos et les poèmes de Christophoros de Mytilène, un groupe bien plus large de correspondants participant à des échanges culturels auparavant réservés à l'élite, demandeurs d'une culture classique et d'épigrammes pour orner leurs donations religieuses. Leur richesse a été sûrement à l'origine d'un essor des constructions dans les provinces, dont il ne nous reste plus aujourd'hui que des églises. Les chercheurs futurs feraient bien d'examiner si cette classe, avec l'influence de Psellos, n'est pas liée aux changements qui intervinrent dans les goûts et l'esthétique de Byzance, et à cette attention à l'humain, au trop humain dans tous les aspects de la vie quotidienne, cette ouverture à l'érotisme, et ce désir de critiquer les valeurs établies. L'élite la plus riche du XI°s, venant de secteurs provinciaux plus diversifiés, semble avoir été prête à prendre en compte plus d'aspects de la vie humaine, que la cour et l'Eglise plus conservatrices et plus pieuses du X°s.

p. 189
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Pas de "féodalisation" de l'empire.
Enfin, les guerres civiles du XI°s n'ont rien à voir avec un imaginaire processus de féodalisation. Bien au contraire, les Comnènes accèdent au pouvoir à un moment où toutes les terres, appartenant aux paysans ou aux "grands propriétaires", étaient passées aux mains des Turcs. Les Comnènes s'élevèrent, non sur la base de leur pouvoir socio-économique, mais grâce à leur carrière militaire et politique. Anne Comnène dit que son père (Alexis), au moment de l'usurpation, "n'était en rien un homme riche". N'oublions pas l'image d'un jeune Alexis visitant ses terres ancestrales de Kastamone, abandonnées à cause des raids turcs. Psellos évoque dans les années 1070 la ruine des riches, qui ont perdu leurs terres et leurs revenus - au moment même où les historiens modernes prétendent qu'ils étaient sur le point de s'emparer de l'état. Le patriarche Xiphilin augmenta ses dons charitables car "la situation avait empiré, les riches n'avaient plus accès à leur patrimoine, ni aux fortunes qu'ils avaient amassées, ni aux dons impériaux qu'ils recevaient, alors que les pauvres n'avaient plus aucun revenu" (Psellos). Loin d'être conquis par l'aristocratie terrienne, sous les Comnènes c'était l'état qui aidait financièrement la classe dominante. Les propriétaires terriens, loin d'utiliser leur pouvoir socio-économique pour asseoir leur influence politique, comptaient sur leur carrière militaire pour acquérir du pouvoir à l'intérieur de l'état, afin d'assurer leur survie socio-économique.

p. 277
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(Sur la prétendue "féodalité" byzantine, à l'issue des campagnes bulgares de Basile II, 1004-1018).

La guerre permit aussi à l'empereur d'augmenter son pouvoir relatif dans la société byzantine, au-delà du prestige et des dépouilles qu'il gagna avec ses victoires. D'abord, l'archevêché autocéphale d'Ohrid était maintenant sous l'autorité directe de l'empereur, pas du patriarche. Ensuite, une grande part de l'aristocratie militaire bulgare intégra le service impérial et se trouva dépendante des grâces de l'empereur, sans aucun lien avec la classe militaire d'Asie Mineure. Troisièmement, le conflit balkanique et les possibilités d'avancement qu'il offrait permirent à l'empereur de créer une aristocratie militaire romaine* ne dépendant que de lui dans cette nouvelle zone de conquête et d'enrichissement. C'est au cours de ces campagnes que nous entendons pour la première fois les noms des familles qui monteraient sur le trône au XI°s (Diogène, Botaniate, et les Comnène, qui furent les protégés de l'empereur). L'empereur bâtit ainsi sa propre classe d'officiers, ou aristocratie militaire. L'état impérial façonnait encore le paysage social et politique.

*l'auteur rend aux "Byzantins" le nom qu'ils se donnaient, Romains, héritiers de l'empire romain d'Orient de Constantin.

p. 127
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(La question de l'aristocratie et de la "féodalité").
Les historiens du XX°s ont préféré voir dans les événements - la substance du récit - les reflets de surface de soulèvements socio-économiques plus profonds, avec des tonalités de lutte des classes pour la terre et le pouvoir, et un état en compétition avec les Grands ou quelque "aristocratie terrienne" imaginaire pour le contrôle de la paysannerie. En réalité, nous n'avons que des conflits de personnes au plus haut niveau de l'armée, pour le commandement de cette armée, et, par extension, pour le trône. Les officiers supérieurs tentaient de conquérir la place de co-empereur quand l'héritier dynastique était mineur, ou bien cherchaient à le renverser par une rébellion. Rien de nouveau. Il n'y avait aucune classe sociale de Grands en dehors des officiers que l'on voit apparaître dans les sources. Certains d'entre eux étaient riches, bien sûr, mais nous ignorons leur degré de richesse. Aucun d'entre eux ne disposait de ressources personnelles qui auraient pu menacer le pouvoir de l'état, ni comme individus, ni comme groupe social. Leur puissance provenait du service. Les empereurs pouvaient se débarrasser d'eux et de leurs familles (comme ce fut le cas des Phokas et des Maleinoï), rien qu'en leur retirant les offices et les commandements, et ils pouvaient en promouvoir d'autres pour prendre leur place. C'était toujours une aristocratie de service, et sous Basile II elle intégra des Bulgares, des Arméniens et des Géorgiens.

p. 149
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