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EAN : 9782702140321
258 pages
Calmann-Lévy (23/09/2009)
3.87/5   79 notes
Résumé :
« Rester éveillé. Le plus longtemps possible. Lutter contre le sommeil. Le calcul est simple. En une heure, je fabrique trente faux papiers. Si je dors une heure, trente personnes mourront... » Quand, à 17 ans, Adolfo Kaminsky devient l'expert en faux papiers de la Résistance à Paris, il ne sait pas encore qu'il est pris dans un engrenage infernal, dans une course contre la montre, contre la mort, où chaque minute a la valeur d'une vie. Durant trente ans, il exécute... >Voir plus
Que lire après Adolfo Kaminsky, une vie de faussaireVoir plus
Critiques, Analyses et Avis (16) Voir plus Ajouter une critique
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En 2009, à 30 ans, Sarah Kaminsky se posait la question : mais qui est mon "papa" ? Un agent secret, un résistant, un héros, un traître, un faussaire, un hors-la-loi, un moudjahid (combattant d'indépendance) ?

Le parcours de son père, Adolfo, né en Argentine en 1925 de parents juifs russes et émigrés en France en 1932, n'est pas ce qu'on pourrait qualifier de simple ou limpide.
De son propre aveu, à Sarah il aura "fallu deux ans d'enquête et une vingtaine d'interviews pour faire la connaissance du sieur Adolfo Kaminsky..."

À la bibliothèque virtuelle de Babelio j'ai ajouté 2 photos du père et de la fille Kaminsky.

Le récit démarre à Paris, en janvier 1944, la veille d'une rafle nazie. Adolfo Kaminsky, 19 ans, se trouve dans le métro parisien près de la station Père-Lachaise lorsque tout à coup un contrôle d'identité est effectué par la milice. Adolfo se fait passer pour Julien Kremer, 17 ans, Alsacien avec une carte d'identité de sa propre fabrication. mais la chemise brune veut aussi voir ce qu'il trimballe dans son sac. "Alors je lui offre mon sourire le plus niais" en affirmant : "mon casse-croûte, vous voulez voir ?" le métro est entretemps arrivé à la station Père-Lachaise et le milicien le laisse partir. Sur un banc du cimetière Adolfo essaie de recouvrir ses esprits pensant aux 50 cartes d'identité françaises vierges, sa plume, son encre, ses tampons et son agrafeuse qui se trouvaient en dessous de son casse-croûte !

Ce peut-être un peu long événement anecdotique mais authentique offre l'essentiel de la réponse sur la vraie nature d'Adolfo Kaminsky : un faussaire de génie qui fabrique des papiers pour des gens qui en ont un besoin vital ; un résistant de la première heure contre l'occupant et l'injustice ; un homme au grand coeur toujours prêt à aider son prochain ; un homme bigrement courageux qui prend des risques énormes et un homme foncièrement modeste.

Vivant à Vire en Normandie, l'invasion teutonne commence dans l'horreur pour la famille Kaminsky : la mère d'Adolfo est tuée et sa famille comme Juifs internée à Drancy. C'est grâce au consul argentin qu'ils sont libérés et l'adolescent de 17 ans rejoint aussitôt le Mouvement de Libération Nationale (MLN), où dans un labo obscur il fabrique de (faux) documents.

Pour ses coreligionnaires il en a fabriqué une montagne et de nombreux Juifs ont pu éviter les camps de la mort grâce aux papiers de Kaminsky. Après la guerre, le jeune homme a continué sur sa lancée en fabriquant des faux pour les Juifs désireux de s'installer en terre promise mais empêchés par les Britanniques, mandataires de la Palestine.

Pendant des années, Adolfo a délivré à des désespérés virtuellement autour du globe toutes sortes de papiers. Au Maghreb, Afrique du Sud, Amérique latine, aux États-Unis (les opposants de la Guerre du Vietnam), Haïti, etc.
Il en fournit aux dissidents en l'Espagne franquiste et la Grèce des colonels.
Avant finalement d'arrêter sa carrière de faussaire en 1971, un des derniers bénéficiaires de ses faux fut Daniel Cohn-Bendit pour participer à une conférence à Paris, en 1968.

Certains lui ont reproché de produire des papiers pour des membres du Front de libération nationale d'Algérie (1958-1962), mais je crois qu'il convient de considérer les motifs de Kaminsky qui agissait en son âme et conscience en faveur de ceux qu'il estimait être des opprimés.

Sa vie personnelle et sentimentale ont toujours été un désastre, mais il a pourtant toujours continué à aider les autres, selon Sarah Kaminsky dans une entrevue avec une journaliste du "Times of Israel" en mars 2017.

Mais ce "malheureux" nonagénaire a tout de même la chance inouïe d'avoir une fille talentueuse qui lui a consacré un témoignage merveilleux, dont je recommande la lecture avec enthousiasme.
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Sarah Kaminsky relate dans ce livre témoignage la vie «clandestine» qu'a vécue son père dès l'âge de 17 ans et une trentaine d'années durant.
Adolfo Kaminsky, juif né en Argentine dont les parents étaient d'origine russe va commencer par faire des faux-papiers pour la Résistance, sa formation de teinturier et son goût pour la chimie lui ayant permis d'acquérir une expertise pour effacer les taches d'encre (le fameux «effaceur» d'encre bleue, c'est lui!).
Après la guerre, ses convictions l'entrainent à poursuivre, toujours gratuitement (il ne veut pas être «mercenaire»), les causes légitimes à servir ne manquant pas: les juifs au départ de la Palestine avant la création d'Israël, les algériens pendant la guerre de décolonisation, les victimes de l'Apartheid en Afrique du sud, les «déserteurs» de la guerre du Vietnam, les victimes de Franco en Espagne, de la dictature portugaise ou de celles d' Amérique du sud...
Le témoignage de Sarah Kaminsky écrit à la première personne du singulier (et cela n'a rien de gênant car l'intéressé semble «répondre» à sa fille et il a eu la possibilité de relire le récit) permet de transmettre l'espèce «d'urgence» dans laquelle cet homme a vécu et les sacrifices personnels nécessaires qui ont du être faits. En réalité, aucune vie privée n'a été vraiment possible avant qu'il n'arrête cette vie de faussaire (même si il a eu deux autres enfants, de trois décennies plus âgés que Sarah Kaminsky, qui ont très peu vu leur père) car ils ne pouvait révéler à personne cette «double-vie».
On comprend l'admiration légitime de l'auteure pour son père mais je suis un peu étonnée, concernant son activité après-guerre, qu'il n'y ait aucun bémol : les engagements défendus sont toujours justes et toute son activité n'a servi uniquement que la bonne cause...
Reste que c'est un incroyable exemple de «résistance» et d'humanité doublé d'un hommage émouvant d'une fille à son père.
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« Me payer pour ce que je fais ? Jamais. »

Bon alors autant le dire tout de suite, ce petit bouquin, je l'attendais avec impatience tout comme sa lecture. le risque dans ces cas-là, c'est d'être déçu. Loupé. J'ai été soufflé par cette vie. Cette vie de faussaire qui traverse les conflits. Un faussaire qui se raconte dans ce livre par le prisme de sa fille Sarah Kaminsky. Un récit de vie où le sens des luttes, de la guerre, de la famille se retrouve à graviter autour de la vie d'un jeune faussaire en devenir.

Adolfo est confronté très tôt à la violence des hommes, car il est juif et adolescent durant la Seconde Guerre mondiale. Et très tôt, il questionne les raisons d'agir de son entourage, des membres de son village, des Allemands qui occupent la France, les raisons d'un premier conflit qui dure (la Seconde Guerre mondiale) et les moyens de participer à la fin de ce dernier. Pourquoi les déportations, pourquoi les stigmatisations, le jeune Adolfo reçoit ces questions de plein fouet alors qu'il est encore très jeune. Il croisera par la suite d'autres conflits pour lesquels il s'engagera.

Le reste des événements pour le jeune Adolfo va finir par s'enchaîner et est parfaitement résumé dans le titre : « Une vie de faussaire ». Et quelle vie. Ce serait dommage de livrer les débuts du personnage en tant que faussaire tout comme le contexte dans lequel il a grandi, mais ce que je peux vous dire, c'est que cet homme a fait très rapidement preuve d'une singulière maturité et a dépassé précocement ses questionnements d'enfant. La souffrance sous toutes ses formes qu'il va rencontrer à travers la Seconde Guerre mondiale va finir par agir comme un déclencheur. Un désir précoce de résistance émerge et on le voit naître ligne après ligne dans ce récit de vie. Ce désir est très bien restitué par sa fille, Sarah Kaminsky. Voici un extrait du résumé du livre, pour entrapercevoir le rôle du faussaire.

« Quand, à 17 ans, Adolfo Kaminsky devient l'expert en faux papiers de la Résistance à Paris, il ne sait pas encore qu'il est pris dans un engrenage infernal, dans une course contre la montre, contre la mort, où chaque minute a la valeur d'une vie. Durant trente ans, il exécutera ce méticuleux travail de faussaire pour de nombreuses causes, mais jamais pour son propre intérêt. »

« Jamais pour son propre intérêt », tout y est.

C'est aussi pour cette raison que cette biographie écrite par sa fille m'a autant touchée. Il y a quelque chose d'ultra sincère et en même temps de très humble dans le récit du père à sa fille (les questions de sa fille autrice, apparaissent ponctuellement dans le livre). Un récit aussi destiné à la mère de Sarah, Leïla (le livre lui est dédicacé en début d'ouvrage). C'est une grande aventure humaine mais c'est aussi une grande aventure familiale en sous-texte.

On distingue petit à petit dans ce récit la vie d'un homme qui parfois se perd, parfois prend le dessus face aux grandes luttes, aux grands conflits rencontrés. Ces deniers le dépassent souvent et pourtant, Adolfo cherchera une très grande partie de sa vie à avoir une prise sur eux, à s'engager contre ces conflits. À résister à cette violence. À y regarder de plus près, on voit aussi apparaître la vie d'un homme qui questionne le sens à donner à une vie de famille. Quel sens peut avoir cette vie de famille en parallèle à ces luttes qui paraissent au premier abord essentielles ? Que faire passer avant ? Les dilemmes sont nombreux, mais jamais tranchés. C'est une des grandes forces du personnage , mettre en perspective ses actes sans trancher systématiquement et ne jamais renier ses valeurs pour autant. Même si il faut remettre ces valeurs sur la table pour les sous-peser. Rien n'est acquis et la résistance du faussaire est exemplaire, elle est teintée d'un courage (un courage hors norme, vous le découvrirez), mais surtout elle est teintée de justesse dans tous les actes d'Adolfo Kaminsky.

Je ne saurais que trop vous conseiller la lecture de ce livre. Un grand témoignage pour ma part, qui va résonner longtemps.
Lien : https://lesmafieuses.wordpre..
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Une lecture très intéressante ! Je ne connaissais pas son histoire.
Il a eu une vie riche et impressionnante.
J'ai préféré la partie pendant la 2nde guerre mondiale mais j'ai beaucoup aimé découvrir la vie de cet homme qui a oeuvré à sauver et aider tellement de personnes.
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Sarah Kaminsky nous raconte la vie de son père, faussaire de génie. On découvre comment il a commencé, par le hasard des rencontres qui font une vie, pendant la Résistance. On comprend pourquoi et comment il a continué, quels ont été ses doutes et ses motivations.
J'ai beaucoup apprécié cette biographie, le ton très vivant, dynamique et rythmé : on ne s'ennuie jamais en découvrant le déroulement de cette carrière de faussaire. C'est un univers assez fascinant que j'ai découvert avec beaucoup de plaisir grâce à ce livre. le paradoxe entre les convictions morales et éthiques justes et l'illégalité des actions entreprises ressort en permanence et entraîne le lecteur à admirer le personnage courageux et « de parole » qu'est Adolfo Kaminsky. le livre est prenant, on s'attache et s'identifie au faussaire….cette vie aurait pu être un roman !
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critiques presse (1)
LeJournaldeQuebec
06 février 2019
Imaginez : l’histoire d’un expert en faux papiers pendant la Résistance et qui continuera son travail de faussaire après la Libération en aidant les rescapés des camps, les combattants du FLN, les révolutionnaires d’Amérique du Sud, les opposants aux dictateurs d’Espagne, du Portugal et de Grèce, tout cela raconté par sa fille qui a recueilli ses propos pour mieux connaître qui fut son père.
Lire la critique sur le site : LeJournaldeQuebec
Citations et extraits (15) Voir plus Ajouter une citation
Lui plaire m’a donné l’impulsion d’envisager un autre futur. Soudain, alors que je n’y avais jamais pensé auparavant, j’ai eu ce désir fou de tout reprendre à zéro. J’avais conscience d’avoir eu une chance inouïe d’avoir échappé à la prison, à la mort. J’ai fait le bilan. Après tout, clandestin, caché, homme de l’ombre, n’avais-je pas passé suffisamment d’années à offrir la vie ou la liberté à d’autres sans jamais me préoccuper de la mienne ?
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« Reprendre mes activités de faussaire n’a pas été une décision facile. Je me suis souvenu de mon premier faux. Le bien-fondé de mon action était alors incontestable. Transgresser la loi, il le fallait. Mais n’avais-je pas ainsi basculé sans retour dans l’illégalité ? J’avais toujours veillé à ce que mon savoir et mes techniques ne servent que des causes légitimes. J’avais toujours veillé à ne jamais transiger avec mon sens de l’éthique et de la moralité. »
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Comme beaucoup d’adolescents, pendant la guerre, je rêvais d’être résistant. J’avais une admiration farouche pour les hommes qui se battaient dans les maquis, alors que j’étais pacifiste, incapable de tenir une arme. Déjà, à l’école primaire, c’était mon petit frère, plus fort, plus courageux que moi, qui me défendait dans les rixes. Moi, j’étais le doux, le craintif, le contemplatif de la famille. Je rêvais d’être peintre, mais « ce n’est pas un métier », me disait-on alors. Il est certain que sans ces circonstances, sans la guerre, mon destin aurait été des plus banals. J’aurais été teinturier, au mieux chimiste.
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En 1944, j’ai compris que la liberté pouvait se gagner par la détermination et la bravoure d’une poignée d’hommes. L’illégalité, tant qu’elle ne bafouait ni l’honneur ni les valeurs humanistes, était un moyen sérieux et efficace à envisager.
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Dans mon souvenir, pour moi, la guerre commence là, même si le discours officiel mensonger s’évertuait à la cacher : s’il n’y avait pas de guerre, pourquoi y renvoyer les jeunes ? J’étais solidaire des manifestants rappelés, parce que j’avais déjà l’intime conviction que la France envoyait ses enfants à l’abattoir.
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Video de Sarah Kaminsky (1) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Sarah Kaminsky
Sarah Kaminsky raconte la vie de son père, faussaire pendant et après la Seconde Guerre Mondiale. Enregistré à TEDx PARIS le 30 Janvier 2010.
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