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EAN : 9782721002228
150 pages
Editions des Femmes (16/11/1982)
4.04/5   47 notes
Résumé :
An Antane Kapesh signe un réquisitoire accablant contre les Blancs : « Quand le Blanc a voulu exploiter et détruire notre territoire, il n’a demandé de permission à personne, il n’a pas demandé aux Indiens s’ils étaient d'accord. »
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Critiques, Analyses et Avis (10) Voir plus Ajouter une critique
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Terrible réquisitoire, lucide et intelligemment mené, d'une amérindienne innue contre ce que le "Blanc" a fait - et fait encore - à son peuple et à son territoire (Nord du Québec) ; l'écriture n'est pas violente mais la démonstration implacable...
Point par point, cette "maudite sauvagesse" raconte : leur vie d'avant, elle a vécu jusqu'en 1953 dans "le bois" et "sous la tente", leur culture, leur nourriture, leurs comportements ; tout ce que l'homme blanc s'est acharné à détruire, et qui entraîne à présent des agissements que la société actuelle ne pardonne pas.

L'exemple de l'alcool est très parlant : pas d'alcool dans la vie que menaient les "Indiens" avant l'arrivée du Blanc.
Extrait p 101 : " Autrefois le marchand d'alcool est venu ici à l'intérieur des terres pour chercher de quoi gagner sa vie. Alors il a commencé par construire un bar... Quand il eût terminé et qu'on eût permis à l'Indien de boire de l'alcool, les Blancs et les Indiens buvaient ensemble au bar." Mais cela n'a pas duré, très vite on a servi les Indiens dans des verres différents, une fois les Indiens arrivés on ouvrait les fenêtres et c'est dans la cave finalement qu'on les a servi.
" Après son arrivée ici dans notre territoire, dans le Nord, Le Blanc a tout fait pour que nous suivions, nous aussi les Indiens, son mode de vie : il nous a maltraités et il a fait de l'argent avec nous." (p 109)
" C'est vraiment dommage n'est-ce pas, qu'aujourd'hui les jeunes Indiens soient si bons pour causer des problèmes ? Mais cela vient du Blanc, n'est-ce pas ? Il y a quarante ans, nous n'avions jamais vu de Blancs ici à l'intérieur des terres, et les jeunes Indiens ne posaient pas de problèmes, lui ai-je dit... Les bars non plus, il y a quarante ans, nous n'en avions jamais vu ici ; le bar ne causait pas de problèmes à l'Indien et l'Indien ne causait pas de problèmes au marchand d'alcool." ( p 115)

L'exemple de la scolarisation forcée, et donc de la perte de la culture et surtout de la langue, est tout aussi bouleversant ; An Antane Kapesh se demande comment il se fait qu'elle ne comprenne pas ses propres enfants et que ceux-ci ne comprennent pas leur mère ! Il faudrait qu'ils soient d'abord instruits dans leur propre langue, avant de l'être en français.

C'est une femme en colère qui écrit, d'une façon parfois un peu naïve, comme un enfant qui cherche à appréhender le monde dans lequel il est arrivé, une mère qui n'a pas pu élever ses enfants comme elle le souhaitait avec son mari, une épouse contrariée que son homme doive travailler en usine ; avant les hommes chassaient et en vivaient.

On apprend beaucoup en lisant ce livre indispensable pour comprendre les problèmes des amérindiens ; c'est la loi des plus forts et des plus nombreux et ce n'est pas simple d'admettre que parfois les "hommes blancs" se comportent comme de vrais sauvages...

Dans ce livre, le récit en français est imprimé sur les pages de droite et sur celles de gauche, se trouve le récit en langue innue.
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Témoignage difficile à lire, tellement c'est frustrant de constater à quel point les « Blancs » ont ravagé la vie des Autochtones. C'est une histoire d'intimidation, d'humiliation, de violences à répétition et d'étroitesse d'esprit de la part des « Blancs » qui ont agi tels de grands colonisateurs, avec un regard ethnocentrique face au peuple qui les a accueillis. N'ayons pas peur de mots, il s'agit bien d'un génocide culturel. C'est une lourde histoire qui s'étale sur des centaines d'années. Aujourd'hui, je me questionne sur comment me détacher de cette étiquette de « Blanche » malgré la couleur de ma peau? Que puis-je faire concrètement pour participer au processus de réconciliation entre les Allochtones et les Autochtones? J'imagine que lire cet essai biographique fait sûrement partie des actions à poser pour y arriver…
Dans un autre ordre d'idées, j'ai trouvé intéressant que l'autrice transcende la tradition orale de son peuple en utilisant l'écriture (rappelons-nous que ce livre fut écrit initialement en 1975). Cette oeuvre littéraire se fait témoin de l'émergence d'une « néo-oralité » chez les Autochtones au Québec. Comme le rapporte l'anthropologue Louis-Jacques Dorais, l'utilisation de l'écriture chez les écrivains autochtones leur permet de s'affirmer sur le plan identitaire, tout en maintenant un contact avec la pensée de leurs ancêtres. le fait que l'autrice ait écrit dans sa langue maternelle vient d'autant plus renforcer cette position.
Dernière observation, j'ai trouvé étonnant qu'An Antane Kapesh ne parle pratiquement jamais de l'entrée de la religion catholique dans les communautés autochtones. C'est tout de même une religion qui provenait des Blancs… Néanmoins, par ses écrits, on peut en déduire qu'elle croit en Dieu et qu'elle ne conteste pas l'évolution des croyances spirituelles et religieuses des Autochtones à la suite de leurs contacts avec les Blancs.
C'est définitivement un livre à faire lire à tout notre entourage! Il devrait même se trouver dans les lectures du cours d'histoire à l'école secondaire...
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Ayant lu plusieurs livres provenant de la littérature autochtone et ayant vécu avec le peuple innu, je désirais lire ce livre depuis un bon petit bout déjà. Me plonger dans la pensée d'une autochtone ayant vécu de façon traditionnelle et ayant vécu - connu des gens qui ont vécu- l'arrivée des "blancs". Je ne fus pas déçue, ce livre est cru, franc et sans concession. Il montre bien combien les peuples indigènes ont été tassés, placés dans un coin pour ne pas déranger et surtout ne pas nuire aux projets mercantiles des différents hommes d'affaires. Leurs vies ont été bouleversées, chamboulées alors qu'ils se suffisaient à eux-mêmes avant l'arrivée de l'homme "blanc". Des besoins ont été créés, des vices sont apparus (consommation d'alcool, entre autres) les laissant démunis et sans repères stables. Tout cela est d'une tristesse sans nom et sans retour.

An Antane Kapesh s'est exprimé de façon claire, sans nuance ni gants blancs - sans vouloir faire un mauvais jeu de mots- et c'était nécessaire afin que soit entendu sa voix, compris son message. Je ne sais pas si nous sommes rendus là, collectivement, mais dans un cadre où plusieurs d'entre nous voulons la réconciliation, certaines façons d'exprimer les choses devraient être modifiées. Par exemple, lorsqu'elle dit que: " Si mes enfants vont dans une école (...) c'est Le Blanc qui les a contraints, uniquement pour les gâcher et faire de l'argent avec eux". Ce genre de pensée est dangereuse. Bien-sûr, c'est une tare de l'esprit de l'homme de toujours se croire supérieur à différent de lui; c'est ce que le "Blanc" a démontré encore dans ce cas-ci. Mais de croire qu'il voulait gâcher l'indien et que c'était son seul but ; non ce n'est pas possible. L'indien dérangeait de par ses va et viens sur le territoire, oui, tout à fait, l'homme "blanc" devant la différence s'est cru supérieur, oui absolument, mais de généraliser ces comportements aux hommes "blancs", je crois que c'est néfaste, car cela amène des pensées polarisantes qui ne soutiennent pas la réconciliation et entretiennent la haine. En tout cas, encore une fois, je salue le travail d'An Antane Kapesh à cette époque, mais la reproduction de ce discours sans nuances, peut être dangereuse aujourd'hui.
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La seule et unique fois où j'ai entendu parler de An Antane Kapesh, c'est dans le dernier récit de Naomi Fontaine SHUNI. A la fin de cette lecture, ce fut comme une évidence, je devais à tout prix lire JE SUIS UNE MAUDITE SAUVAGESSE. Hasard de la vie, depuis fin août, les éditions Mémoire d'Encrier propose à ses lectrices et lecteurs une nouvelle édition et une nouvelle traduction de ce récit.


Un récit terriblement percutant et accaparant d'une justesse rude et d'une honnêteté essentielle.


Les mots tels des lames acérées et des larmes de colère, An Antane Kapesh exprime le désarroi de tout un peuple déraciné violemment de leur Terre. Elle élève leur voix unique et solidaire dans le but sacré et irrévérencieux de raconter aux nouvelles générations leur héritage volé dans le but, essentiel, que ces dernières n'errent plus.

Un témoignage magistral dans lequel résonne la force d'un peuple détrôné, désoeuvré, désillusionné. Un témoignage poignant et déchirant contre la cruauté Blanche et cette idée absurde que leur société est meilleure que celle des Innus. Un témoignage alarmant et désopilant. Un cri du coeur au profit d'un peuple qui a perdu son identité.


Comment ne pas avoir de profonds sentiments envers ce récit ? Comment ne pas se sentir petit face à ses mots ? Comment ne pas se sentir lamentable face à ses constats, à ses vérités ? Comment ne pas se sentir humain ? Comment ne rien dire face à un tel discours ? Des questions qui amènent tant de question. An Antane Kapesh porte-parole et bienfaitrice de son peuple. Que ses mots résonnent pour l'éternité afin de ne jamais oublier.


L'innue est avant tout une langue orale. La traduction est juste merveilleuse. On y retrouve la force, la conviction, le courage qui animent An Antane Kapesh, conférant à son récit un discours fédérateur, franc et sans ambiguïté.


Un livre qui doit rejoindre votre bibliothèque sans hésitation !
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Ce n'est pas un livre c'est un témoignage, non, un cri du coeur devant l'injustice. Mais surtout, c'est une dénonciation. Aujourd'hui, nous Autochtones, ne pouvons que décrire les conséquences de la colonisation, ses suites. An Antane Kapesh raconte comment elle et les siens l'ont vécue. Ce qui m'a particulièrement frappé, c'est sa colère. Les Innus l'expriment si rarement.... Merci.
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Citations et extraits (6) Voir plus Ajouter une citation
Depuis que j’ai entendu mon père et les autres Indiens raconter cette histoire, il y a une seule chose qui m’ait rendue heureuse et très fière : c’est toujours l’Indien qui a pris soin, à l’intérieur des terres, de tous les étrangers qui ont eu l’idée de venir sur notre territoire. Et jamais nous n’avons entendu raconter qu’un des étrangers dont les Indiens aient pris soin dans le bois, et qui se trouvait pourtant seul, n’ait été maltraité et offensé par eux de la façon dont le Blanc, lui, nous traite, nous, les Indiens.

C’est la raison pour laquelle aujourd’hui je dis : avant qu’un seul Blanc ne vienne ici sur notre territoire, nous étions déjà civilisés. Depuis que le Blanc est notre voisin, presque chaque jour nous l’entendons dire : « Les Indiens ne sont pas civilisés. » Depuis qu’il est notre voisin sur notre territoire, nous les Indiens, nous constatons souvent que le Blanc est moins civilisé que nous.
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Notre mode de vie à nous, Indiens, était le meilleur. Mais après avoir accepté de nous faire tromper, après qu’on nous ait fait abandonner notre culture indienne et après nous être laissés piétiner par le Blanc, à présent nous ne valons rien ni dans une culture ni dans l’autre. A mon avis il aurait mieux valu conserver la vie que Dieu nous avait donnée à vivre en tant qu’Indiens et conserver la langue indienne que Dieu nous avait donnée à parler. Si le Blanc, à son arrivée sur notre territoire, avait gardé pour lui sa culture et sa langue française ou encore si, en venant ici pour s’enrichir avec notre sol, il n’avait pas brutalisé les Indiens et s’il n’avait pas toujours voulu les exploiter, aujourd’hui il n’y aurait probablement pas de conflit entre lui et nous.
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Nous avons été étonnés que mon fils soit blessé par deux policiers blancs. La raison de notre étonnement c’est que, quand nous avons vu le policier au début, nous ne l’avons pas pris pour n’importe qui. Nous avions entendu dire qu’on fait prêter serment à chaque homme qui travaille comme policier pour qu’il fasse son travail avec droiture. C’est pourquoi nous nous étonnons du fait qu’il n’y ait toujours que les Indiens que les policiers maltraitent et fassent entrer à l’hôpital en les arrêtant. Depuis le temps où les policiers nous maltraitent, jamais nous n’avons entendu dire qu’un seul Blanc n’ait été blessé et expédié à l’hôpital par eux.
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Moi j’estime qu’il est très important de faire de grands efforts pour nous mettre à la recherche de notre culture et de notre langue indienne et pour la conserver. A mon avis, de tous les peuples de la terre, il n’y en a vraisemblablement aucun qui ait la fierté de la culture et de la langue du peuple voisin. Nous Indiens, avions une culture indienne et une langue indienne dont nous pouvions être fiers.
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Après nous avoir enseigné sa culture et volé la nôtre, que le Blanc ne se tourmente pas de chacun de nos agissements qui proviennent de la culture blanche ! Qu’il ne vienne pas écrire d’articles de journal sur l’alcool alors que c’est lui qui nous l’a donné ! C’est le Blanc qui nous a appris à être constamment ivres.
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