La stridulation insistante des cigales remplissait l'espace. Elle marquait une pause puis reprenait, allait crescendo, et s'arrêtait comme si elle provenait des lignes du téléphone - frénétique, électrique, comme des milliers de mères hystériques jacassant dans le ciel.
Quelle surprise néanmoins, habitués comme nous l'étions de penser qu'il s'agissait d'un tout petit homme ou d'un vieux petit garçon, d'apprendre longtemps après par des égyptologues qui le passèrent aux rayons X que, selon toute vraisemblance, nous avions affaire à une fille, probablement prépubère, une sorte de servante de la royauté. Son squelette présentait certains attributs - au niveau des côtes, du pelvis, des os fémoraux - suggérant qu'elle était morte jeune. Les fibres du tissu qu'ils analysèrent montrèrent que ce type de trame correspondait à celui des vêtements portés par les riches. Elle avait probablement était enterrée vivante avec son maître à la mort de ce dernier. A présent, elle se trouvait dans le bureau de mon beau-père, dans un cercueil de verre.
Un peu comme une Blanche-Neige qui aurait très mal fini.
Une Blanche-Neige morte et moisie.
Aucun prince n'aurait souhaité embrasser une chose pareille.
Le bruit de fond orchestré par les cigales avait totalement disparu. Il s'était soudain interrompu en fin d'aprè-midi, et personne, pas même Miss Vaseline ne savait si l'on devait ce répit à la tombée de la nuit ou à la mort des insectes. Toutefois, on ne pouvait pas nier le changement. Les cigales s'affaiblissaient, tombaient des arbres l'une après l'autre en une pluie écoeurante de corps fripés crachotant dans la poussière. c'était comme si on avait appuyé sur un énorme interrupteur qui les auraient fait taire d'un coup. Quelle étrange sensation que de pouvoir entendre de nouveau le chant des oiseaux et le bruit des branches d'arbres.
je n'étais pas le centre de l'univers. mais je l'étais quand même un peu. la terre tournait autour du Soleil et non pas autour de moi. mais rien de tout ça n'aurait existé si je n'avais pas été là pour le voir. Si Je n'avais pas été là tous les matins pour la regarder, la maquette du système solaire, de notre monde, ne tournerait autour de rien.
(...)à 40 ans, tu auras une peau tannée comme du cuir". mais nous savions toutes les deux que cela m'était égal. Ça n' avait pas d'importance. 40 ans qui pouvait imaginer que j'aurais un jour 40 ans ?j'avais 17 ans et un bronzage parfait
ensemble, Désirée et le maître nageur formaient un drapeau étrange -lui dans son maillot à bannière étoilée, elle en bikini bleu marine-, un drapeau dont les morceaux étaient cousus de chair
j'étais gentille. tout le monde le disait. amicale. pleine d'allant. On m'avait appris à sourire devant l'appareil photo, aux personnes âgées, au public. tous les deux me répétaient que le plus important était de sourire, que les choses qui me tracassaient (trèbûcher, marcher en contretemps de la musique) ne comptaient pas si je pensais bien uà sourire. alors j'ai souri. toutes les photos le prouvent
Mais c'était bien moi sur ce polaroid - un double inconnu de moi-même. On aurait dit que plusieurs heures de cette nuit s'étaient écoulées avec et sans moi.
Je me trouvais bien là, mais QUI avais-été ?
A cet instant, je me suis juré de ne jamais plus boire autant, et j'ai tenu promesse. (p.101)
Quand j'étais petite, nous vivions sur la base aérienne d'un Etat humide et caniculaire où tout nous était étranger. D'ailleurs, je l'envisage toujours comme une autre planète (appelée Passé, ou Enfance, ou Jadis). (p.42)
Je m'imaginais toujours Bob Larson nimbé d'une lumière crue, souriant d'un air endormi, comme s'il se satisfaisait d'observer le monde de derrière une vitre. (p.32)