« Tous les ans, on raconte des histoires autour du feu de camp. (…)
L'odeur épicée des pins blancs qui émane de l'obscurité de la forêt. L'antimoustique. La mousse détrempée. le mélodrame gluant et noirci des chamallows grillés. Une petite volée de chauves-souris qui giffle l'étendue du ciel bleu marine. Un ciel piqué d'étoile.
Année après année, on répète les mêmes histoires – épouvantables, terrifiantes et véridiques (…)
Un jour il y eut celle-ci :
La jeune fille qui, un après-midi d'été, file en douce de Pine Ridge, la colo des pom-pom girls, avec deux copines dans une petite voiture de sport rouge, et qui sourit à deux garçons à bord d'un break mangé par la rouille. »
Et c'est bien ainsi que tout commence : Trois jeunes filles insouciantes et sexy s'échappent en décapotable de leur camp de pom-pom girls pour aller nager un moment au lac des Amants au lieu de faire des abdos avec leur équipe. Sur la route, elles croisent deux garçons dans une voiture bien plus lente et l'une d'elle a le malheur de leur sourire… A cet âge-là, il en faut peu pour s'enflammer et les filles se rendent bientôt compte que les garçons les suivent. Elles décident alors de faire un brusque demi-tour avant d'arriver à la falaise du lac afin de retourner au camp sans qu'ils puissent les suivre ; Et en les croisant dans l'autre sens, elles les narguent une dernière fois en découvrant leurs poitrines.
« La Mustang rouge, pareille à une idée fugace et brillante qu'on aurait trempée dans du sang, fonçait entre deux murs de pins blancs qui s'étiraient loin devant à perte de vue, et loin derrière, dans les limites du rétroviseur. »
Une fois rentrée au camp, la conductrice se sent en sécurité et prête à se reconcentrer sur le sport, sa meilleure amie canon retourne à son activité préférée et séduit le maître-nageur avec qui elle passe toutes ses nuits dans la forêt ; Mais la troisième a un comportement étrange : L'air complètement azimutée et effrayée, elle pleure tout le temps, affirme qu'elle a vu les garçons rôder dans la forêt et les épier aux fenêtres, et prédit qu'un grand malheur va arriver… Est-ce sa mauvaise conscience, le remord et la peur qui la rendent parano, ou bien les garçons les ont-ils vraiment retrouvées ? Ou bien alors, connaissant l'auteure… Y aurait-il une autre explication, plus dramatique encore, à ce malaise qui plane sur le destin de nos trois pom-pom girls… ?
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Comme d'habitude, l'auteure nous plonge dans une atmosphère très étrange où planent le doute et le malaise. La prouesse cette fois, c'est qu'elle parvient à le faire tout en plantant un décor idyllique et baigné de soleil, d'insouciance, de rêves d'ado. La plage de l'étang et les baignades, le soleil aveuglant et les cigales, les nuits étoilées et les grillades de chamallows : chaque élément de ce roman contribue à la fois aux vacances de rêve et à la tension qui devient palpable. le récit prend un air des « Chair de poule » de ma jeunesse, ces histoires à raconter au coin du feu pour se faire peur. Et si, à l'arrivée des filles au camp, on leur a présenté les traditionnels fantômes de la forêt, il est certain que de cette forêt sera désormais hantée par d'autres cauchemars !
« La stridulation insistante des cigales remplissait l'espace. Elle marquait une pause puis reprenait, allait crescendo, et s'arrêtait comme si elle provenait des lignes du téléphone - frénétique, électrique, comme des milliers de mères hystériques jacassant dans le ciel. »
La lecture est très agréable dès les premiers mots car elle est imagée et rythmée. Je n'ai pas souvenir que le style de l'auteur m'ait autant marquée dans «
Les Revenants », en revanche l'esprit est le même : On flirte toujours entre le possible et l'impossible, la certitude et le doute, le réel et le surnaturel… Même s'il est plus court que «
Les Revenants », j'ai trouvé la fin de ce roman plus aboutie et satisfaisante car, non seulement nous obtenons des réponses à nos questions, mais en plus nous observons les conséquences des actes et décisions des filles dans leurs vie d'adultes des années après. Ce que j'ai aimé surtout, c'est la façon qu'a l'auteure de nous faire connaître son héroïne en insérant, habilement et sans jamais nous perdre, des flash-back de son enfance qui peuvent expliquer son comportement actuel. Une partie de nous est déterminée par notre enfance, mais nos actes actuels détermineront les adultes que nous deviendrons… Cette histoire a donc bien une morale ; A votre tour de percer le mystère de ces destinées en vous plongeant dans cette lecture idéale pour l'été !
« Je n'étais pas le centre de l'univers. Mais je l'étais quand même un peu. La Terre tournait autour du Soleil et non pas autour de moi. Mais rien de tout cela n'aurait existé si je n'avais pas été là pour le voir. »
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