Ce roman est plaisant à lire et bien écrit. Sur fond d'histoire d'amour entre deux jeunes gens, l'auteur nous parle de la colonisation avant l'indépendance (La motivation des colons c'est la domination) et des traditions et coutumes des peuples de la montagne du Cameroun. La femme, notamment, se montre réfractaire si on la force à épouser quelqu'un qu'elle n'aime pas et finit toujours par l'emporter.
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... un marché de l'importance de celui de Marua (...) Des Haussa armés de leurs tambours se frayaient un chemin dans la foule et vantaient à l'aide de leurs instruments les marchandises offertes par les bouchers, dont les &tals couverts de mouches noires emplissaient à eux seuls un bon quart de la superficie du marché. Sous les grands arbres se voyaient des pots en grès fabriqués par les femmes Gisiga, et amenés à dos d'âne. Des Kotobos, qui venaient de la plaine du Tchad, avaient étendu sur le sol le contenu de grands sacs de poissons séchés, et les hommes des Bananas, de haute taille et entièrement nus, étaient arrivés des marais du Logone avec des charges de bois à brûler, et d'autres charges de bois qui servaient à la construction de maisons en pisé. Il y avait des marchands de flèches empoisonnées, des marchands de chapeaux de paille, et encore d'autres qui vendaient des harnais et des fouets (...)
Indifférent, le garçon, debout sur le remblai de pierres qui défendait la ferme, contemplait les lumières clignotantes de l'avion, une rouge et une verte, jusqu'à ce qu'elles eussent disparu, avalées par un nuage. Le grondement des moteurs persista quelques instants encore, et puis les chants des coqs, dans tous les villages dispersés dans la colline, saluèrent la naissance du jour. Et ce fut le concert des mille bruits qui, tous les matins, depuis le début des temps, marquait le lever du soleil, dans les montagnes de Mandara.
Lorsque ces peuples de cultivateurs aux moeurs pieuses avaient quitté les plaines fertiles pour se réfugier dans les montagnes, afin d'échapper aux hordes des cavaliers soudanais, la région était déserte. L'aigle et le chat sauvage régnaient en maîtres, et la gracieuse antilope daman avait pour elle seule les pâturages des collines, et trouvait abri au milieu des chaos rocheux.
Ecoutez-moi bien, Vigneroux: jadis, personne ne désirait que nous fussions autres que ce que nous étions! (...) Vous pensez peut-être que jadis nous aurions dû être moins durs, plus humains, plus libéraux? Peut-être. Mais alors, nous n'aurions jamais pu venir nous implanter ici. Vous me rétorquerez peut-être que nous aurions pu obtenir les mêmes résultats , au point de vue économique, si nous avions utilisé des méthodes humaines, si nous avions traité les noirs de façon à leur faire prendre conscience du fait qu'ils étaient aussi des êtres humains, et peut-être nos égaux... Comme s'il s'agissait de cela! Nous sommes venus ici pour dominer. Pour savourer notre domination par tous les moyens possibles (...) C'était là notre mission, notre justification...
pp. 81, 82
Une jeune fille est comme une goutte de rosée sur un brin d'herbe. Elle miroite et étincelle dans le soleil mais ne bouge pas de place. Et puis soudain une seconde goutte de rosée coule le long du brin d'herbe, touche la première et l'emmène avec elle sur le sol. Rien ne peut la retenir.