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3,89

sur 835 notes
Ce texte est magnifique. Magnifique et dur. Dur mais lumineux.
L'écriture de Claire Keegan justifie le premier adjectif ; et le fond de son récit le confirme.
Elle dessine avec délicatesse les contours de la vie de Bill et Eileen, un petit patron et son épouse. Lui tient une affaire de distribution de combustibles (bois, tourbe, charbon...), elle est femme au foyer (un métier où il n'y a pas de dimanche, comme le dit l'un des personnages).
Deux êtres simples, courageux face au labeur et dont les principales richesses sont leurs cinq filles, l'affection qui les lie et leur droiture. Leur vie suit le cours des ans, entre jours de travail, fêtes religieuses, rendez-vous pour les enfants.
Claire Keegan remplit ces croquis à petites touches, donnant des détails concrets, pratiques, en lien avec les livraisons de charbon, les tâches ménagères, les cadeaux à acheter pour Noël qui approche. S'ajoute le décor de cette Irlande des années '80, la rivière, la neige, les oiseaux, les voisins, les usines qui ferment, le chômage.
Et le couvent.
Et les bruits qui courent à propos des filles qui s'y trouvent. Et les invitations à se taire.
À ne pas chercher à savoir si ces rumeurs sont justifiées.
À ne pas réagir si c'est le cas.

Bill livre du charbon dans toute la ville. Bill livre au couvent. Bill voit, comprend, hésite, réfléchit. Et Claire Keegan se montre tout aussi talentueuse pour mettre en scène les confrontations que le bonheur paisible de Bill et Eileen avec leurs filles. Elle donne vie avec le même réalisme et de manière saisissante à ces moments de tension, bâtis de regards, de sous-entendus, de silences, de mensonges. Et de questions. Ce genre de questions qui font vaciller le cours immuable des jours.
Claire Keegan montre alors, en nous offrant délibérément une conclusion brève, vive et éblouissante comme un éclair dans un ciel sombre, que son talent est plus puissant encore que ce qu'avaient laissé croire les pages précédentes.
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C'est ce genre de petites choses que j'aime dans un roman : le contexte social, une crise économique, la présence de la religion et l'hypocrisie ambulante.

Après, il faut tout bien mettre en scène sinon c'est le col plané assuré.

Ici, c'est mon coeur qui, une fois de plus, a pris un billet de parterre, se brisant en plusieurs morceaux après une chute.

Cette histoire, inspirée de faits réels puisque les couvents des Magdalene ont bel et bien existés et que ce qu'il s'y passait n'avait rien de catholique mais tendait plus vers les cercles de l'Enfer.

Cette histoire, on la dirait sortie d'un conte de Dickens : des gens pauvres, qui triment comme des esclaves, l'omniprésence de la religion, la toute puissance des religieuses et des jeunes filles exploitées.

Sérieusement, on pourrait croire que ce genre d'horreurs sont de l'époque révolue de la reine Victoria… Que nenni, ça existait toujours dans les années 90 puisque le dernier fut fermé en 1996 (merci Wiki).

Dans ce roman très court, très sobre mais bourré d'émotions, l'auteure met en avant l'hypocrisie habituelle des gens, ceux qui détournent la tête, qui ne veulent pas avoir ce qu'il s'y passe tant que leur linge est bien propre, qui colportent des ragots mais ne bougeraient jamais le petit doigt pour aider ces pauvres filles et qui, sans mauvaise conscience aucune, s'en vont à la messe de Minuit et fêtent Noël en famille.

De plus, il y a la peur… Les religieuses sont toutes puissantes, être admise dans l'école à côté est un honneur, une échelle pour s'en sortir et nos pingouins décident de qui y entrera. Les religieuses sont aussi des gros clients, payant rubis sur l'ongle et en ces temps de crises, on ne fait pas la fine bouche, alors, on ferme les yeux, on continue sa route et si la pingouin en chef vous donne un ordre, on l'exécute en disant « oui amen ».

Non, non, ne me faites pas croire que vous seriez des rebelles qui diraient non et qui tiendraient tête à la mère supérieure ! Nous sommes dans l'Irlande catho à mort et quand les soeurs font la pluie et le beau temps, on s'écrase car on ne veut pas perdre son gagne-misère.

Le récit est court, trop court… J'aurais aimé savoir ce qui allait se passer ensuite, même si je le devine… William Furlong n'est pas Zorro, ni Superman… Tout se paie dans la vie et parfois à un prix trop cher car dans sa ville, personne ne lui dira qu'il a eu raison, personne ne le félicitera, non, que du contraire, tout le monde le conspuera.

Puis, le jour om le scandale éclatera dans les années 90, tout le monde se placera de son côté, disant qu'il a raison, qu'il était un précurseur, un homme qui avait des couilles et la populace se ruera pour la curée sur ces religieuses dont elle a crain toute sa vie les représailles. Quand l'ennemi chute, on a du courage, avant, jamais.

Je ne jugerai pas la population car je ne sais pas si moi j'aurais eu le courage de m'opposer à ces bonnes femmes mariées à Dieu (ou Jésus) qui avaient bien trop de pouvoir dans leurs mains… et qui maintenant est passé à d'autres, puisque de toute façon ♫ Non, non, rien n'a changé… ♪

Une belle lecture, un récit tout en émotion, tout en questionnement, tout en douceur, un beau conte de Noël, sauf que derrière, il y a de la souffrance humaine dont les blessures ne guériront jamais.

Hélas, un récit trop court… J'aurais aimé plus de pages et ne pas quitter les personnages si abruptement sans recevoir de leurs nouvelles.

Lien : https://thecanniballecteur.w..
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Lire Ce genre de petites choses c'est comme se plonger dans un conte dont l'intrigue prendrait place il y a plus d'un siècle alors qu'il s'agit d'un roman dont les faits se déroulent en 1985. Cette impression était si forte chez moi que l'évocation de petites choses actuelles, telles que la circulation des voitures ou les jean's, me surprenait à chaque fois et me ramenait brutalement aux années 1980. Ainsi, par son écriture et l'histoire qu'elle a développée, Claire Keegan a réussi à créer une ambiance très particulière et envoûtante, me faisant parfois penser aux contes de Dickens ou d'Andersen. En peu de mots, avec une histoire toute simple, elle parvient à transmettre beaucoup de choses et surtout à mettre en lumière le passé sombre de l'Eglise catholique irlandaise. Remarquable !
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C'est un souffle léger, trois fois rien, un effleurement. Un texte à la beauté aérienne, porté par la plume fine et précise de Claire Keegan. Celle de L'Antarctique, Les trois lumières et A travers les champs bleus. Je le dis souvent, je le répète, la simplicité est ce qu'il y a de plus difficile à obtenir dans l'écriture. Trop et c'est le vide, pas assez et c'est la pesanteur. Un équilibre précaire, donc. Sur un fil. Là où chaque mot est pesé, chaque silence aussi. Tout est dans la retenue, l'espace laissé au lecteur finement guidé mais invité à ressentir. Ce genre de petites choses, c'est trois fois rien et c'est l'essence même de la vie.

Nous sommes en Irlande, au milieu des années 1980. Une petite ville, la crise économique, un hiver blanc et froid qui donne à l'entreprise de Bill Furlong, fournisseur de bois et de charbon un surcroit d'activité. Lui dont la famille (5 filles !) est à l'abri du besoin mesure au quotidien la détresse et la pauvreté qui l'entourent. Un homme sensible, attentif aux autres. C'est cette empathie qui le fait s'arrêter un peu plus que prévu dans le couvent voisin où, venu livrer sa cargaison il découvre des jeunes filles en haillons et vraisemblablement malnutries. Dans la ville, il se murmure depuis longtemps que les soeurs exploitent à l'abri de leurs murs des filles placées ici suite à un accident de la vie, souvent des filles-mères. Mais personne ne veut s'en mêler ni se mettre à dos la Mère supérieure par crainte de répercussions. Furlong sait qu'il a eu de la chance, né sans père mais accueilli avec sa mère dans la maison où elle était domestique. Chez lui, c'est le coeur qui va parler.

Trois fois rien. Un conte de noël qui semble passer dans un souffle blanc. Et pourtant. Dans ces pages, il y a ce que l'on retrouve à chaque étape d'une vie, à chaque carrefour de l'Histoire, quelles que soient les circonstances, petits ennuis ou drame national. Il y a la solitude face à sa conscience. le regard porté sur l'autre, la compassion bien sûr. Et le courage. Celui d'aller contre le mal et d'oeuvrer en phase avec ses sentiments et ses convictions. Il y a ceux qui ferment les yeux et ceux qui disent non. Ce n'est que ça. C'est tout simple. Et c'est pourtant l'essence de toute dramaturgie. C'est ce que fait passer Claire Keegan dans ce texte à la beauté gracile et à la portée universelle.
Lien : http://www.motspourmots.fr/2..
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1985. Nous sommes en Irlande. Keegan décrit, en très peu de mots, une sordide histoire. Un scandale qui a ébranlé le pays. Un couvent comme personnage principal. Il y a une blanchisserie à l'intérieur. Où l'on exploite les jeunes filles et où elles sont violentées. L'histoire est contemporaine, mais nous pouvons croire qu'elle se déroule au 19e siècle tellement les conditions de vies de ces blanchisseuses sont atroces. Et un homme ‘'ordinaire'', Bill, choqué par ce qu'il y a vu, tentera de faire s'éveiller les consciences. Cela aurait pu être très intéressant, mais malheureusement, l'autrice est tellement restée avare sur l'histoire de ce couvent, que le lecteur reste sur sa faim. Dommage…
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L'automne est arrivée, octobre est froid, les horloges reculées d'une heure. Bill Furlong, marchand de charbon et de bois, ne chôme pas. « Elle (la camionnette) est sur la route la journée entière, dit-il. Nous ne tarderons pas à rouler sur les jantes. » Bill est un brave homme, marié, père de cinq filles. Ils bosse dur, est sobre, va à la messe, est bon père de famille et bon mari. Bill est l'enfant illégitime d'une domestique. Sa grande chance fut que la patronne a gardé sa mère, alors que dans l'Irlande catholique, on a plutôt tendance à les foutre à la porte. Elle s'est même occupé de Bill. Oui, il a eu de la chance tout comme sa mère.

Bill ne s'en fait pas un étendard, non, il vit leur petite vie tranquille, jusqu'au jour où il livre chez les bonnes soeurs. Il sait ce que l'on dit au village. Les bonnes soeurs s'occupent de ces filles qui ont fauté et se retrouvent enceintes, bien fait pour elles !! Elles triment dans la blanchisserie tenue par les soeurs, telles des esclaves et leurs bébés sont soit morts, soit donnés ou vendus à des parents en mal d'enfants. Non pas des bonnes soeurs, mais de mauvaises personnes. Mais chut, on n'en parle pas, d'autant que cela fait vivre les commerces

Il voit, comprend lorsqu'une gamine, cachée dans la cave à charbon veut qu'il l'emmène et retrouve son bébé.

Ce petit livre (112 pages) est un condensé d'humanité. Les silences, les non-dits, les yeux fermés, les on sait, mais on ne peut rien faire, Bill Furlong les connaît par coeur. Il n'écoute que son coeur. pour nous offrir un joli conte de Noël.

Comme dans un précédent roman « Les Trois lumières », Claire Keegan parle de ces enfants mal aimés, abandonnés. Dans ce livre, pas de grandiloquence, simplement la vie quotidienne. La grande battisse austère où vivent ces enfants sous la coupe des soeurs n'est presque qu'évoquée, ce qui donne encore plus de force à la fin du livre.

J'ai aimé l'humanité de Bill dans la grisaille et le bien-pensant irlandais, j'apprécie qu'en si peu de pages, Claire Keegan soit capable de transposer l'atmosphère de cette période de la nativité.

Je me tourne de plus en plus vers cette maison d'édition dont j'apprécie la ligne éditrice.
Lien : https://zazymut.over-blog.co..
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J'ai été, il y a quelques années, choquée, marquée par le film The Magdalene sisters réalisé par Peter Mullan.

Ce récit aborde ce sujet sous un angle nouveau. C'est comme un conte de Noël. Un homme qui livre le bois au couvent découvre une jeune fille au fond de la réserve à charbon. Que faire ? Prier avec les autres comme si de rien n'était ? Accepter ce que l'institution et les autorités religieuses laissent faire, voire cautionnent ? Ou agir à son humble niveau, parce qu'un jour quelqu'un a osé agir de la sorte pour soi ? Quel comportement adopter face à l'injustice ? Être capable de se regarder dans le miroir le reste de sa vie même si notre décision a eu de lourdes conséquences, ou ignorer ce qui se passe, regarder ailleurs, et continuer sa petite vie tranquille mais ne plus jamais passer devant un miroir…

Bill Furlong est un héros ordinaire qui nous met du baume au coeur. Claire Keegan axe son récit sur cet homme, sur ses pensées, ses hésitations, ses actes.

La délicatesse et la suggestion, c'est ce qui caractérise l'écriture de Claire Keegan. Ses textes sont courts mais puissants, évocateurs. Dans un style épuré, elle parvient toujours à provoquer une émotion forte chez son lecteur. L'auteure égrène tout au long de son texte des remarques sur les difficultés économiques, la rudesse du climat, sans s'appesantir, juste pour que le contexte soit posé. Reste au lecteur à créer son film dans sa tête, ce qui est aisé, tellement le style de Claire Keegan laisse une grande part à l'imagination.
Lien : https://krolfranca.wordpress..
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Un texte très court qui se déroule en 1985 mais que j'ai eu du mal à situer à cette époque. L'atmosphère, l'histoire, me donnent l'impression que nous étions à une période plus ancienne.
Nous sommes avec Bill Furlong, un honnête homme, marchand de charbon et de bois. On revient sur son passé, il n'a pas connu son père et sa mère est morte quand il était enfant. Il a été élevé par Mrs Wilson, une riche veuve.
Il est marié, a cinq filles et est heureux même s'il se pose beaucoup de questions.
Un jour, lors d'une livraison juste avant Noël, il va découvrir avec stupeur que d'étranges choses se passent au couvent. Et il va prendre une importante décision.
C'est une lecture délicate et sensible mais malheureusement bien trop courte à mon sens. le livre évoque un scandale qui a ébranlé l'Irlande, celui des blanchisseries de la Madeleine, institutions religieuses dans lesquelles des jeunes filles étaient placées pour être "rééduquées" dans des conditions épouvantables.
Il est également question de ces couvents dans "Souviens-toi de Sarah" de Page Comann.
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Moi qui n'aime pas les auteurs bavards, j'apprécie vraiment le style d'écriture de Claire Keegan. Dans ce court roman, elle nous emmène en Irlande en 1985, dans un modeste village. Nous suivons le point de vue de Bill Furlong, aujourd'hui bon mari et père de 5 filles, propriétaire d'une entreprise de bois. Bill a un passé d'enfant sans père mais sa mère, domestique devenue enceinte, a été protégée par sa patronne qui a aimé et aidé Bill. Bill est devenu un homme rangé mais toujours attentif à la pauvreté et au malheur, contrairement à bien des catholiques de son village qui préfèrent ne pas s'occuper des autres. en allant livrer du bois au couvent, il trouve une très jeune fille grelottant dans le dépôt à charbon et devine comment sont traitées toutes ces filles-mères que les soeurs font durement travailler dans la blanchisserie ( il s'agit des "Magdalene sisters"). Bill a un cas de conscience: doit-il ne pas s'en mêler, comme sa femme le souhaite, ou compromettre peut-être l'avenir de ses filles en affrontant la pouvoir de l'église?
C'est l'histoire d'un héros ordinaire qui refuse d'aller à la messe pour se détourner ensuite des gens qui souffrent. C'est aussi un homme qui a pu surmonter ses blessures mais qui a besoin de savoir qui est son père, et qui va finir par le comprendre.
C'est une manière d'écrire encore une fois sans un mot de trop, avec des détails qui parlent d'eux-mêmes: la scène du couvent où les soeurs font semblant de bien traiter la jeune fille car il y a un spectateur est parlante. L'ambiance de cette petite communauté presque figée dans le temps et dominée par la présence de la religion est très bien rendue aussi.
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Plume fine et délicate pour dénoncer les maltraitances subies par de jeunes femmes dans les couvents au cours des années 80 en Irlande.

La vie rangée et besogneuse de Furlong est bouleversée à la veille de Noël quand il tombe par hasard nez à nez sur une jeune femme maltraitée par les soeurs du couvent de la ville. Tout son univers intérieur explose.

Un roman sincère et personnel.
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