Au motel, "Bonne Pêche-Bon Repos" que tient Art, les clients découvrent des bungalows minuscules, des chaises dures, des planchers constellés de clous apparents. En guis de décoration, un paysage tocard, et pour se détendre, deux sièges de jardin en fer, ornés d'une coquille Saint-Jacques dont on garde l'empreinte dans le dos pendant vingt-quatre heures, même à travers la chemise. Dans le bungalow numéro un, une pancarte écrite à la main est clouée sur le mur, près de la porte : "Fermez cette fichue porte". Dans le deuxième on peut lire : " Ne pas nettoyer les poissons sur les tables de pique-nique. Combien de fois faudra-t-il vous le dire ? Utilisez la table qui est à côté des bateaux. Elle est là pour ça. Quiconque sera pris à nettoyer du posson sur les tables de pique-nique partira aussitôt avec armes et bagages. Oui, c'est à vous que je m'adresse. Pour l'amour du ciel, faites donc un peu attention!"
Un pasteur doit savoir surtout lire l'heure à l'horloge. A midi, il est temps de rentrer chez soi, de monter la flamme du réchaud sous le ragoût, de sortir les petits pois du congélateur. Tout le monde achète son rôti chez Ralph. Ce n'est pas exactement la viande la plus moelleuse du neuvième district fédéral, mais après quatre heures de cuisson, une fois qu'elle est en lambeaux, quelle différence ?
Garisson Keillor au National Book Festival de 2011