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EAN : 9782889277223
650 pages
Editions Zoé (05/11/2020)
4.83/5   6 notes
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« Les gens de Seldwyla » est un roman du romancier suisse allemand Gottfried Keller, traduit par Lionel Fechlin (2020, Editions Zoe, 656 p.)
La petite ville de Seldwyla, quelque part en Suisse allemande, dans, « lieu agréable et riant » à l'écart du progrès. Ville presque aussi connue que Clochemerle dans le Beaujolais, dont Gabriel Chevalier a narré l'installation d'un édicule public par le maire Barthélémy Piêchut qui s'en ouvre à Tarfadel, l'instituteur « Je veux faire construire un urinoir, Tafardel. […] Enfin, dit-il, une pissotière ! »., publié en 1934 et souvent ré-édité depuis. Vous y découvrirez madame la baronne Alphonsine de Courtebiche, le curé Ponosse, le notaire Girodot, les notables du village, ainsi que l'ineffable demoiselle Justine Putet, qui veille scrupuleusement sur la bonne utilisation de l'édifice. Encore maintenant, la place du village commémore l'introduction de ces bienfaits de l'hygiène moderne.
Retour à Seldwyla et à Gottfried Keller (1819-1890). Débutant romancier, avec « Henri le Vert » (1992, Aubier Montaigne, 572 p.), roman d'apprentissage pour le jeune Henri, qui abandonne sa mère et son village natal pour découvrir la grande ville. « Au reste, l'homme apprend tous les jours quelque chose, et personne ne saurait dire sûrement ce qu'il croira au soir de sa vie ». Keller devient chancelier d'Etat à Zurich, notamment pendant la transformation libérale de la Suisse en 1848.c'est un écrivain réaliste, avec une rare lucidité. Il cultive une délicieuse ironie et se laisse volontiers entraîner dans la satire carnavalesque. Il ajoute cependant « un supplément d'imagination » qui transforme la réalité en idylle aussi bien qu'en farce grotesque. A l'opposé, son goût pour l'ironie bascule parfois dans une satire acide de la société.
Ces nouvelles ont paru une première fois en 1856 sous forme d'un premier tome avec 5 nouvelles, puis, avec 3 nouvelles en plus en 1874. le présente édition re-traduite par Lionel Fechlin et Claude Haenggli (2020, Editions Zoé, 656 p.) regroupe toutes les nouvelles, avec une postface de Daniel Rothenbühler. Admirée par Nietzsche, cette oeuvre vive et malicieuse, évocation en plusieurs épisodes d'épisodes de la vie quotidienne, est d'une couleur et d'une fraîcheur qui sautent aux yeux et aux oreilles « quand sonnent les cloches dans la lumière d'un jour clair ».

« Pancrace le boudeur ». Tout commence par une veuve, pas forcément éplorée, à qui son défunt mari laisse « une petite maison délabrée, un champ de pommes-de-terre près de la porte de la ville, et deux enfants, un fils et une fille. Avec sa quenouille elle gagnait de quoi acheter le lait et le beurre pour assaisonner les pommes-de-terre qu'elle plantait elle-même ». Sachant que « le pot au beurre laissait partout voir le fond », bien qu'il fût de faïence verte, et que les enfants se plaignaient. « le fils était un garçon de quatorze ans, d'un air assez peu avenant, avec des yeux gris et des traits sérieux. […Esther], sa soeur avait douze ans, avec une jolie figure, des cheveux châtains longs et épais, de grands yeux bruns, et la peau remarquablement blanche ». Il arrivait souvent à Pancrace de se fâcher tellement « qu'il en boudait deux fois plus longtemps, et qu'en secret il s'en allait pleurer lui-même ».
Constatant qu'il n'y a rien à gagner à rester au village, il s'en va, en boudant. « Les vieux faillis et les pauvres gens par contre travaillaient à qui mieux mieux du marteau, de l'aiguille, de l'alène, du ciseau, et employaient utilement la longue journée pour se gagner une soirée libre, qu'ils savaient maintenant apprécier d'autant mieux. Sur la petite place où habitait la veuve, on ne voyait rien ».
Bien plus tard, voilà que survient la merveille de la journée. « Une voiture découverte, conduite par un postillon, déboucha à grand bruit sur la paisible petite place qu'éclairait encore à demi le soleil du soir. Dans la voiture était un homme portant la casquette des officiers français, avec une moustache et une impériale, le visage brûlé par le soleil et sillonné en plusieurs endroits de traces de balles et de coups de sabre. Il était enveloppé dans un burnous comme en portent les militaires français en Afrique, et il appuyait ses pieds sur une énorme peau de lion jetée au fond de la voiture. Sur le siège devant lui étaient posés un sabre, une longue pipe turque, et d'autres objets d'une tournure étrangère ».
« Monsieur le colonel, car c'était là le titre du fils fugitif, ôta sur-le-champ sa casquette avec la politesse que lui avait enseignée la dure expérience de la vie ». Il ramène une peau de lion, « un lion vivant que j'ai tué ».

« Roméo et Juliette » au milieu des champs, des montagnes et de la verdure. Mais Gottfried Keller prévient. La suite « serait un conte assez oiseux, s'il ne reposait pas sur une aventure vraie, qui prouve une fois de plus combien chacune des belles fables qui sont à la base des chefs-d'oeuvre de la poésie, a ses profondes racines dans la vie réelle ».
Tout commence donc bien pour « Romeo und Julia », sauf que ce sont deux paysans, « Manz et Marti », avec deux enfants « Sali et Vérène ». Reste à savoir qui vont être les deux amants, non pas de Vérone, mais de Seldwyla. Ils « labouraient les deux champs de droite et de gauche. Celui du milieu, enclavé entre les deux autres, semblait inculte et abandonné depuis de longues années, car il était couvert de pierres et de hautes plantes parasites, et un monde d'insectes y bourdonnait tout à son aise ». Voilà pour le décor, quant aux protagonistes. « A quelque distance, ils se ressemblaient parfaitement, ils incarnaient le caractère originel de cette région et, au premier regard, on pouvait seulement les distinguer parce que l'un portait la pointe de son bonnet blanc vers l'avant, l'autre en arrière sur la nuque. Or c'était l'inverse quand ils labouraient dans la direction opposée ».
Voilà que le champ du milieu est mis en vente. Ce sont les enfants qui sont chargés de le nettoyer et de le dépierrer. « Bientôt il y eut là toute une société joyeuse. Mais dès que Vérène et Sali étaient séparés l'un de l'autre, celui-ci cherchait à rejoindre de nouveau sa compagne ; Vérène contente se glissait aussi vers lui en souriant, et il semblait aux deux heureuses créatures qu'un si beau jour ne devait et ne pouvait jamais finir ».
Brouille des parents. « À partir de ce jour, les deux paysans furent en procès, et n'eurent plus de repos qu'après s'être ruinés l'un et l'autre ». Les Capulet et Montaigu de la Suisse allemande. En place du balcon, c'est un tas de pierres, ramassées sur le champ qui fait office. Les jours passent et les deux paysans se ruinent. « Ils étaient tous deux criblés de dettes, n'ayant plus qu'un pied posé sur leurs propriétés, comme des cigognes, et prêts à culbuter au moindre souffle ».
« Pour gagner au moins de quoi mettre sous la dent, et aussi pour tuer le temps, le père et son fils se mirent à pêcher à la ligne dans la rivière voisine. C'était la principale occupation des Seldwylois ruinés ».
Un peu bousculé par sa fille, le père Marti perd la tête. « Il ne faisait que des folies, courait et furetait par toute la maison, toujours riant, venait s'asseoir au soleil en tirant la langue, ou bien tenait de longs discours aux carrés de haricots ».
Survient un ménétrier, ancien propriétaire du champ, qui va rétablir les relations entre les familles. « le ménétrier commanda le silence, et exécuta une cérémonie burlesque, qui devait représenter un mariage ». Reste à terminer le conte. « Célébrons nos noces sur l'heure, et puis sortons du monde. Là-bas l'eau est profonde, là personne ne nous séparera ». Ce n'est plus Roméo et Juliette, mais Ophélie et Hamlet. On les retrouve le lendemain, et comme on est en Suisse, c'est un « nouvel exemple des progrès de l'immoralité et de l'empire croissant des mauvaises passions ».

« Mme Régula Amrain et son fils cadet ». On l'a deviné, Mme Amrein était la femme d'un habitant de Seldwyla. Tout le monde n'est pas parfait. Elle voudrait tellement que son fils n'ait pas le caractère de son père. « Monsieur Amrain était un homme considérable, qui devait consommer une quantité considérable aussi de viande, de poisson et de vin à son dîner, et qui employait de larges pièces de soie pour ses beaux gilets bleu de ciel ou rouge cerise majestueusement quadrillés ». pour de sombres raisons financières, il s'exile de « l'autre côté de l'Atlantique, et ne reviendrait plus ». Reste Fritz, le contremaître, célibataire, qui a d'autres idées en tête.

« Histoire de trois justes » C'est « l'histoire des trois compagnons peigniers, par contre, nous enseigne que trois justes ne peuvent vivre longtemps sous le même toit sans se prendre aux cheveux ». Il faut dire qu'à Seldwyla, « il y avait une fabrique de peignes dont le propriétaire changeait d'ordinaire tous les cinq à six ans ». « On y fabriquait, pour les belles du village et les servantes, de merveilleux peignes en corne de boeuf transparente, dans laquelle les compagnons (les maîtres ne travaillaient jamais) imprimaient un beau nuage écaillé de couleur brun rouge, selon leur imagination. En tenant les peignes contre la lumière, on croyait voir de splendides levers et couchers de soleil, des cieux rouges moutonnés, des tempêtes ou d'autres phénomènes naturels mouchetés ».
Trois hommes sont couchés raides comme « des crayons » dans le même lit dans une chambre sordide. Ce sont « Les trois honnêtes artisans peigniers ». Job, Fridolin le Bavarois et Dietrich le Souabe ont atterri à Seldwyla, où ils sont employés par un fabricant d'articles en corne. Leur vie n'est pas toujours facile, ni même intéressante, sinon il n'y aurait pas d'histoires. Job, le premier arrivé, coulait une existence tranquille, à amasser un petit peu de sous, caché sous le plancher. Mais deux autres compères débarquent, qui lui ressemblent fortement et ont le même but. Ce trio va être manipulé par la jolie Suzon Bünzlin, « une vertueuse demoiselle, qui demeurait dans la même rue que lui, et que par ses prudents entretiens avec les vieilles femmes, il savait posséder en toute propriété une cédule de sept cents florins ». Leurs déboires vont faire s'attrouper tout Seldwyla, comme par un jour de carnaval.

« le chat Spiegel. Conte » commence par un dicton. « Quand un Seldwylois a fait un mauvais marché ou s'est laissé duper, on dit à Seldwyla : Il a acheté la graisse du chat ». Evidemment, lorsque l'on ne dispose pas du décodeur…
« Il y a plusieurs siècles, dit l'histoire, demeurait à Seldwyla une vieille personne, qui habitait seule avec un beau chat gris et noir ». le chat s'appelait Spiegel (miroir) « à cause de son poil lustré et brillant ». Sa maitresse meurt et voilà le chat à la rue, jusqu'à sa rencontre avec « Maître Pineiss, sorcier en titre d'office de la ville ».
Ce dernier lui fait une proposition « Écoute, chat, veux-tu que je t'achète ta graisse ? », graisse dont il a besoin pour ses sortilèges. Mais, on s'en doute, c'est un marché de dupes.

Ainsi allait la vie à Seldwyla, petite ville renfermée encore dans sa vieille ceinture de murailles et de tours.

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Retrouvez ici ses conseils prodigués à La Grande Librairie ce 25 novembre 2020. Inès Delamottestpierre vous emmène à la rencontre de Philippe Touron qui anime depuis trente ans le Divan - Librairie à Paris ! Voici ses conseils de lecture : le livre extraordinaire : Rodney Hall, "Secrets Barbares" (Editions de l'Arbre vengeur) le livre qui fait du bien : Eskhol Nevo, "La dernière interview" (Gallimard) le classique à découvrir absolument : Gottfried Keller, "Les gens de Seldwyla" (Editions Zoé) de la poésie : Norge, "Poésies" (Gallimard)
La sélection disponible ICI https://bit.ly/33iHvy6 Suivez le Divan sur les réseaux sociaux : Facebook www.facebook.com/divanlibrairie/ Twitter https://twitter.com/divanlibrairie Instagram //www.instagram.com/librairieledivan/
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