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A l'issue de cette lecture, une seule question s'impose à moi : comment un écrivain que j'ai découvert et aimé dès 1994 avec Cul-de-sac, paru dans la Série noire, puis qui m'a procuré tant d'émotions avec L'homme qui voulait vivre sa vie, Une relation dangereuse, Les charmes discrets de la vie conjugale, a-t-il pu commettre La femme du Vème puis perpétrer Isabelle, l'après-midi ? Cher Douglas, j'ai voulu te donner une nouvelle chance, espérant que tu avais tenu compte de mes objurgations contre ton laisser aller littéraire depuis ta virée dans le Vème. Comme tu ne m'as pas écoutée, je t'informe de ma rupture définitive avec toi. J'ai bien dit définitive, car je ne m'appelle pas Isabelle-la-girouette. Te voilà cette fois dans le VIème, toujours équipé de cette vision caricaturale de Paris, où tu bois du vin rouge « ordinaire » pendant que les éboueurs dès potron-minet agrémentent leur petit noir d'un calva, merci de nous avoir épargné le béret basque et la baguette sous le bras ; tu écris le mot "rustre" dans ton carnet parce que tu aimes l'argot ; tu loges dans une misérable chambre de bonne avec les commodités au bout du couloir ; tu prends tes repas bon marché dans des troquets popus et tu fumes des gauloises ; tu es obligé en raison d'un budget étriqué d'étudiant américain sans le sou, de te fringuer aux surplus américains, c'est rigolo. Mais à vouloir trop flatter ton lectorat français, tu finis par le ridiculiser. Un jour, sans tambour ni trompette, un coup d'oeil échangé entre Isabelle et toi dans une librairie où elle « lance » un roman, modifie à tout jamais le cours de ta vie. Si une telle passion instantanée est crédible, et les excuses pour ne pas la vivre stupides, ce qui m'a gênée, c'est son aspect caractériel initié par une femme instable qui fait tourner en bourrique un homme opportuniste et lâche, qui le siffle ou le rejette en fonction de ses détraquages bi-polarisés. Cette femme qui travaille à domicile sans aucune contrainte apparente, a une crainte de voyager presque provinciale (!!) , va en week-end à Dêâûvîîlle dans sa maison de famille et prétend respecter son mari tout en le trompant allègrement. le seul personnage intéressant, voire émouvant est Rebecca, l'épouse de Sam, consciente que la présence d'une ex dans le rétroviseur est une concurrence déloyale qui peut se transformer en menace pour son couple. Le style est poussif, affligeants les dialogues ; les quelques références médiocres à Madame Bovary - le mari d'Isabelle se prénomme Charles, Ha ! Ha ! - ou à Kierkegaard - On doit vivre sa vie en regardant devant soi, mais on ne la comprend qu'en regardant en arrière - ne masquent pas la pauvreté de l'intrigue ni ses rebondissements usés jusqu'à la corde. Enfin, cher Douglas, et c'est là mon reproche le plus sévère, je t'en veux d'avoir utilisé, faute de mieux sans doute, le handicap et le cancer (je sais malheureusement de quoi je parle) comme ressort émotionnel pour faire vibrer la corde de la sensiblerie, du sentimentalisme et faire pleurnicher, trop facilement, le lecteur. Adieu l'ami ! + Lire la suite |