AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
EAN : 9782330016425
240 pages
Actes Sud (10/04/2013)
3/5   4 notes
Résumé :
Peu après avoir réussi à s'arracher à la prostitution, une jeune Haïtienne découvre un jour que, sous ses apparences de bourgeoise protégée, la propriétaire de l'hôtel qui l'emploi désormais n'est, comme elle, qu'une femme en souffrance.
Mais, durant l'inattendu dialogue qui s'engage alors, la "domestique" ne cesse de voir surgir les images du terrible passé qui a irrémédiablement fait naufrager son destin et brisé tous ses rêves.
Comment ne serait-ell... >Voir plus
Que lire après Le désespoir des angesVoir plus
Critiques, Analyses et Avis (2) Ajouter une critique
Si le paradis n'est pas de ce monde, l'enfer sur terre lui, s'appelle Haïti !
« le désespoir des anges » porte la couleur noire de la désespérance, des illusions perdues, du découragement, des rêves piétinés sur l'autel de la haine, de la perversité, de la justice sommaire et barbare. Un livre dur et saisissant ; un roman brutal, saturé d'une sauvagerie glaçante.
Quelques pages à peine et déjà la scène d'un viol, insoutenable, bouleversante, nous propulse d'emblée dans les cités-bidonvilles de Port-au-Prince et dans la mémoire tourmentée de la narratrice, une jeune haïtienne dont on va découvrir au fil des pages l'effroyable passé et la vie comme un champ de ruines.

« Avec son corps marqué par le fouet de l'existence », la jeune femme, qui n'a que 28 ans, a le sentiment d'être déjà morte. Les cicatrices physiques et morales tatouant son corps meurtri sont autant de scarifications entaillant chair et mémoire.
Des sillons profonds qui rongent sa conscience comme des lézardes sur un mur lépreux et témoignent à jamais de tous les sévices infligés, de toutes les brutalités endurées, de toutes ces atteintes à la personne qui laissent les êtres douloureusement broyés, pulvérisés dans leur corps, dans leur chair, dans leur âme.

C'est qu'elle en a vécu des souffrances et des tourments depuis 12 ans ! Et il est loin le temps où la belle jeune fille de 16 ans, issue d'un milieu très modeste, affichait fièrement de brillants résultats scolaires, la tête emplie de rêves et de projets d'avenir !
Le présent, ce n'est pas la carrière de médecin à laquelle elle aspirait, mais plutôt un emploi précaire dans un hôtel, où, pour avoir cassé un plateau de verres, Madame la patronne l'a convoquée dans son bureau. L'employée s'y rend alors avec peu d'espoir sur la finalité de leur entretien…Pourtant, derrière les mots comme des épines de Madame, la jeune haïtienne a senti une faiblesse, une brisure secrète, la fragilité d'une femme en souffrance. Et tandis que la patronne joue encore son rôle de bourgeoise hautaine et condescendante, la narratrice, en une confidence intérieure secrète adressée à la femme qui lui fait face, déroule son douloureux parcours comme un long chemin de croix depuis l'aube des années 2000, lorsque les gangs investissent la cité, jusqu'à cet ultime face-à-face où se rejoint le désarroi de deux êtres confrontés au quotidien à la violence des hommes.

Par cette construction originale où l'entretien entre patronne et employée donne naissance aux terribles révélations silencieuses d'une vie de misère, l'auteur haïtien orchestre une tragédie urbaine dont les relents de vérité et les problèmes de société qu'elle soulève ne laissent pas d'ébranler les nerfs du lecteur, totalement captif et impressionné par des faits qui ne relèvent pas uniquement de la fiction mais ont pour beaucoup véritablement eu lieu à Haïti au début des années 2000.
Henri Kénol, qui signe ici son premier roman, s'est en effet inspiré de « l'invasion » des cités par les gangs armés au tout début du millénaire, un épisode largement méconnu en France qui a pourtant occasionné un déferlement inouï de violence, de terreur et d'abjection chez une population déjà victime de la pauvreté et des abus des classes dirigeantes.

A travers la narration de son personnage féminin, entraînée dans une spirale frénétique de violences et d'excès, Henri Kénol décrit crûment, sans complaisance, les exécutions sommaires, les viols collectifs, la prostitution, la justice expéditive, les tortures inimaginables mises en scène publiquement devant une population terrorisée, prise en otage par des groupes armés jusqu'aux dents, pour qui la vie n'a pas plus de valeur qu'un grain de sable dans le désert.
Ces bandes de voyous, constituées de très jeunes adultes n'ont connu que misère et violence et sont devenues de véritables hordes d'animaux assoiffés de sang, sans moralité ni repère, avec pour seul credo celui de tuer et faire régner la terreur telle une meute de loups sanguinaires.

Ce qui se définissait au départ comme un mouvement de rébellion de la jeunesse contre le monde vicié des adultes devient très vite un raid meurtrier aux allures de vengeance aveugle, de domination et d'intérêts personnels.
Après avoir aboli les rares systèmes éducatifs et culturels en place, les bandes transforment la cité en un immense état dictatorial, bâti sur un système hégémonique de servage et de fiefs à l'image des domaines moyenâgeux.
La cité devient une prison à ciel ouvert nécessitant laissez-passer et passe-droits ; les habitants n'ont plus aucun contact avec le reste de Port-au-Prince. La guerre des gangs faisant rage - les jeunes barbares s'entre-tuant pour quelques arpents de terre à régenter - l'endroit devient un gigantesque charnier où macère une multitude de cadavres.

Corruption, dépravation, trafic….sur fond de rap jamaïcain et de culture vaudou, Henri Kénol ne nous épargne rien dans la description souvent insoutenable de cette antichambre de l'enfer. Son livre est le résultat de longs mois d'enquête par lequel il se fait le porte-parole d'une population littéralement à bout, écoeurée par la complicité tacite et l'inertie du gouvernement alors en place ; un pouvoir politique qui, loin de tenter d'enrayer le phénomène, utilise ces bras armés bon-marché lors d'opérations répressives, confortant ainsi les jeunes barbares dans leur sentiment de toute-puissance et d'invulnérabilité.

Paru en Haïti en 2009 et édité en France en 2013 avec le soutien de Lyonel Trouillot, le tumulte excessif de ces pages pourra heurter la sensibilité des âmes fragiles. Pourtant, la qualité d'une écriture belle et maîtrisée, le phénomène de société dont il s'inspire, l'intensité du rythme sur lequel il se construit, font du « Désespoir des anges » un livre qu'on ne lâche pas un instant et qui nous happe dans une sorte de frénésie folle, pied au plancher, scotché comme dans un bolide lancé à pleine vitesse sur l'autoroute de la violence.
Une découverte intimidante et dérangeante mais très efficace pour toucher du doigt la réalité sordide de ce pays.
Commenter  J’apprécie          626
Après une cinquantaine de page, j'ai décidé de ne pas le terminer car il parle à nouveau d'une Haïti violente et désespérée...
Un viol au début, la violence des bidonvilles, plus le reste...
Je n'ai pas envie de me replonger dans cet univers...
Commenter  J’apprécie          00


autres livres classés : littérature haïtienneVoir plus
Les plus populaires : Littérature étrangère Voir plus

Lecteurs (17) Voir plus



Quiz Voir plus

Les écrivains africains (2)

Je suis un écrivain, un diplomate et homme politique camerounais, né le 14 septembre 1929 à Ngoulemakong, près de Ebolowa (Cameroun) et mort le 10 juin 2010 à Yaoundé à l'âge de 80 ans. Je suis l'auteur des livres : Une vie de boy et Le vieux nègre et la médaille, publiés en 1956.

Ahmadou Kourouma
Ferdinand Oyono
Amadou Koné
Birago Diop
David Diop

1 questions
17 lecteurs ont répondu
Thèmes : littérature africaine , culture générale , culture , homme , écrivain femme , écrivain homme , femmesCréer un quiz sur ce livre

{* *}