The Darkness / Pitt

Ce tome peut se lire sans connaissances préalables des 2 principaux personnages. Il contient les épisodes de la minisérie, initialement parus en 2009, écrits par Paul Jenkins, dessinés et encrés par Dale Keown, mis en couleurs par Frank d'Armata (épisodes 1 & 2), et Felix Serrano (épisode 3). Il comprend également l'épisode 75 de la série The Darkness, initialement publié en 2009, écrit par Phil Hester et dessiné par une dizaine d'artistes différents, ainsi que le numéro 1 de la série The Pitt (1993) écrit par Brian Hotton, dessiné et encré par Dale Keown. Il se termine avec la reproduction de 6 couvertures variantes.

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The Darkness / Pitt - Jackie Estacado est en train de déguster une escalope de veau milanaise dans le restaurant Mama Luccesi, préparée par le chef Harold. Il a l'autorisation d'y déjeuner un après-midi par mois, dans la mesure où il évite de s'en prendre à la famille du crime organisé des fils de la Mama. Alors qu'il s'apprête à savourer son plat, des coups de feu éclatent dans la salle. Il doit s'interrompre. Il relève la tête et il découvre une horde de zombies en train de déferler dans le restaurant. Il bat en retraite à la recherche d'un coin enténébré. Il se réfugie dans un recoin sous l'escalier et conjure les diablotins des ténèbres. À sa grande surprise, une main griffue arrive à percer le rempart de ténèbres qui le protège, mas les diablotins lui font rebrousser chemin. Une fois le calme rétabli dans la salle, il va se réinstaller à sa table et attend la police. Un inspecteur lui pose les questions de circonstance, qu'il se fait un plaisir de détourner avec des réponses sarcastiques. Il repère 2 agents spéciaux qui se tiennent à l'écart tout en l'observant. La nuit même, Pitt avec Timmy sur ses épaules progresse dans les rues de la ville en direction du port. Bientôt une horde de zombies grimpe sur le ponton en bois et se dirige vers Pitt et son protégé. Jackie Estacado se mêle à l'affrontement en envoyant ses diablotins dans la mêlée.

La série The Darkness et le personnage Jackie Estacado ont été créés par Garth Ennis, David Whol et Marc Silvestri en 1996 et a bénéficié d'une série rééditée dans The Darkness Origins Volume 1. Pitt (et Timmy) a été créé par Dale Keown en 1992, et tout d'abord publié par Image Comics, avant que Keown opte pour l'autoédition avec Full Bleed Studios. En découvrant l'équipe de créateurs, le lecteur part plutôt confiant. Paul Jenkins a écrit de très bonnes histoires comme The Sentry ou Inhumans. Dale Keown a acquis sa renommée en illustrant des épisodes mémorables de Hulk écrits par Peter David. PaulJenkins a imaginé une invasion de zombies, en fait des êtres humains affectés par un virus extraterrestre, ce qui permet à Pitt et à Estacado de faire usage de leurs pouvoirs, sans trop avoir à se soucier des civils ou des innocents, puisque toute infection est définitive. le lecteur suit donc le trio avancer tout droit vers une confrontation frontale pour essayer d'éradiquer la source de l'infection, après avoir débité un maximum de zombie. Cela lui permet de concocter des scènes dans lesquelles Keown peut s'en donner à coeur joie pour montrer la force des 2 héros. Il intègre des observations à son intrigue sur des thèmes inattendus. En réaction au comportement agressif du virus, Pitt effectue des remarques sur le caractère attardé de la race humaine, sur son comportement destructeur et puéril, avec quelques exceptions qui confirment la règle. le lecteur découvre également la stratégie de l'agence gouvernementale, basée sur un cynisme et sur l'efficacité. Il s'amuse également en organisant un combat de coq entre Estacado et Pitt, auquel le jeune garçon doit mettre fin grâce à sa sagesse, plus pragmatique que celles de ceux deux hommes se mesurant pour savoir qui a la plus longue.

Paul Jenkins assure donc plus que le minimum syndical en termes de scénario, mais le lecteur est quand même venu pour la rencontre entre Pitt et Estacado, et surtout pour la prestation de Dale Keown. Au fil des pages, il se rend compte que l'artiste s'est réellement investi dans toutes ses planches, en y passant le temps nécessaire pour peaufiner les contours en les lissant par des traits très fins, en ajoutant des textures dans les formes, et soignant les personnages. Dale Keown connaît et maîtrise les trucs et astuces pour ne pas dessiner les arrière-plans de manière systématique. En outre, le combat final se déroule dans les cales d'un navire, de nuit, ce qui justifie que les décors ne soient pas visibles. D'un autre côté, quand il les représente, le lecteur peut laisser errer son regard dessus pour contempler les détails de l'aménagement intérieur du restaurant, de deux ou trois bâtiments autour des quais du port, de la magnifique villa de Jackie Estacado, ou encore du bureau d'un haut responsable du FBI à Langley.

Le vrai spectacle réside plus dans les personnages et dans les affrontements que dans les environnements. le lecteur ressent le plaisir que Dale Keown a pu avoir à dessiner Timmy. Il est visible qu'il se sent en sécurité assis sur l'épaule gauche de Pitt. L'artiste lui donne un corps réellement proportionné comme celui d'un enfant, avec de petites touches mignonnes comme ses baskets ou quelques moues, un regard d'ange avec des yeux bleus délavés. Keown s'amuse tout autant en représentant sa création Pitt. le lecteur retrouve cette montagne de muscle dont la silhouette évoque celle de Hulk, version Mike Deodato. L'artiste a ajouté une coupe de cheveux avec une queue de cheval, des chaînes dont 2 qui se croisent sur son torse nu, une autre en guise de ceinture, une autre enroulée autour du poignet droit. Elles n'ont pas d'utilité pratique, encore moins de justification, mais elle participe au facteur cool du personnage. En plus, Pitt porte une sorte de blouson en cuir sans manche beaucoup trop petit pour lui ce qui fait ressortir encore plus sa stature et sa musculature. Jackie Estacado est tout aussi impressionnant en gravure de mode, impeccable, avec sa coupe de cheveux chic, son maintien altier, son autorité naturelle. Autant les yeux un peu trop grands de Timmy peuvent sembler maniérés, autant les expressions du visage de Jackie Estacado sont parfaitement calibrées et justes.

Le lecteur prend donc un grand plaisir des planches qui savent utiliser les conventions des comics de superhéros avec une compréhension de leur fonctionnement. Pitt dispose d'une carrure impossible, et dans le même temps c'est l'incarnation de la force virile, massive et élégante, avec une exagération sciemment calculée créant une connivence avec le lecteur familier de ces codes. Les éléments gore sont gentiment exagérés avec de la tripaille mise à l'air et du sang trop fluide, pour faire des arabesques esthétiques. Les pseudo-zombies s'avancent toutes dents et toutes griffes en avant comme dans un film d'horreur de série Z. Les agents secrets sont beaux et ténébreux, inquiétants à souhait. Les coursives du bateau sont assez spacieuses pour que Pitt puisse y évoluer sans se cogner, et faire de grands moulinets avec ses bras pour trancher dans le vif des zombies, sans jamais se heurter aux parois. le lecteur peut ressentir le plaisir de l'artiste à mettre en scène ces affrontements primaires et décomplexés, pour le fun de l'impact des images, pour un esthétisme codifié et virile à souhait.

Cette rencontre intéressée (d'un point de vue monétaire) entre Pitt et The Darkness ne révolutionne ni un personnage ni l'autre, n'enrichit aucune des 2 mythologies associées, et ne dresse pas un portrait subtil de l'un ou l'autre en les opposant. En revanche, Dale Keown est investi à 100% dans ce projet soigne chaque case pour offrir un spectacle au dessinateur, avec Pitt massif et relativement réfléchi, Timmy un véritable enfant plein d'entrain, mais capable de se montrer plus raisonné que les adultes, Jackie Estacado magnifique de dignité et de superbe élégante, avec ses petits diablotins pleins de dents dans des bouches ricanantes. Paul Jenkins ne se contente pas de servir une intrigue linéaire et artificielle. Il y intègre quelques réflexions en passant, qui ne forment pas une tapisserie sur une thématique donnée, mais qui viennent donner plus de substance à un récit fun et bien rythmé. 4 étoiles.

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The Dakrness 75 - Dans un futur distant de quelques dizaines d'années, les ténèbres ont recouvert la Terre. Des nuages chargés de poussière enveloppe tout le globe. La civilisation humaine s'est effondrée. Il ne reste qu'une poignée de communautés d'une centaine d'individus qui survivent tant bien que mal, avec quelques femmes guerrières composant l'ordre de Magdalena et s'opposant contre vents et marées à la toute-puissance de The Darkness toujours manipulée par Jackie Estacado plus âgé.

Pour ce numéro anniversaire, Phil Hester propose au lecteur de voir un futur possible dans lequel Jackie Estacado a gagné. Les ténèbres règnent en maître, et rien ne lui résiste. Un individu semble détenir un secret capable de créer une brèche dans ce règne sans partage. le lecteur se laisse emmener dans ce futur possible, constatant l'aigreur de Jackie Estacado ayant triomphé, sans plus personne pour lui opposer une alternative. Pour illustrer cet épisode d'une quarantaine de pages, 10 dessinateurs se relaient : Matt Tinson, Joe Benitez, Michael Broussard, Lee Carter, Jorge Lucas, Marc Silvestri, Frazer Irving, Dale Keown, Ryan Sook et Stjepan Sejic, que du beau monde. le spectacle est assuré tout du long, avec quelques pages sublimes, et toutes de haut niveau. le lecteur se régale d'une fable bien tournée, combinant une narration spectaculaire avec un constat amer sur la tristesse d'une vie d'un dictateur régnant sans partage. 5 étoiles.

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Pitt 1 - à New York, un gang de bikers roule à fond la caisse en buvant des bières. Ils ont la surprise de découvrir sur leur route un gros balèze sans nez, qui ne s'écarte pas de leur chemin. Une baston s'en suit. le gros balèze fracasse les crânes et défonce les cages thoraciques à main nue. Dans le Connecticut un jeune enfant se réveille en hurlant dans sa chambre, ayant assisté en rêve à cette boucherie.

Image Comics a été fondé en 1992 par Erik Larsen, Todd McFarlane, Rob Liefeld, Marc Silvestri, Whilce Portacio, Jim Lee et Jim Valentino. Dès leur début, ils incitent d'autres artistes en vue à quitter DC et Marvel et à venir les rejoindre. Dès l'année suivante, Dale Keown répond à l'appel et créé sa propre série. le lecteur découvre un épisode plein de bruit et de fureur, dans lequel l'artiste peut se faire plaisir avec des dessins qui en mettent plein la vue, pouvant dessiner ce qu'il veut, et asservissant son histoire à ces moments d'épate visuelle. Effectivement, c'est impressionnant. Dale Keown est encore sous influence de Jim Lee et de Marc Silvestri. Il y a quand même une histoire, au rythme un peu haché, avec peu d'éléments d'informations. C'est une curiosité constituant un témoignage assez direct d'une époque pivot dans les comics américain, sympathique pour les moments choc, pas entièrement satisfaisante comme histoire.