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Critique de argali


Epoustouflant. C'est le premier mot qui me vient à l'esprit pour caractériser l'intrigue de ce roman. J'avais déjà beaucoup aimé « La trilogie berlinoise » mais j'ai envie de dire que ce 4e tome est encore un cran au-dessus.
On retrouve l'atypique détective Bernie Gunther aux prises avec les démons du passé. Les siens d'abord, les ex-nazis en fuite ensuite. Plus l'histoire avance, plus l'intrigue s'épaissit pour ne vraiment s'éclaircir, c'est paradoxal, que lors d'une nuit de brouillard intense, à la toute fin du récit.
Tout au long des cinq cents pages de ce roman, l'atmosphère est oppressante tant les cruautés qui sont évoquées sont ahurissantes. J'ai beau bien connaitre la Seconde Guerre mondiale et les exactions commises pendant ces années noires, je ne peux m'habituer à lire à quel point l'homme peut se montrer bestial et cruel. Cependant, et c'est un des génies de Kerr, rien n'est jamais décrit en détails. Les actes ne sont que suggérés, effleurés mais les mots choisis font mouche à chaque fois malgré tout.

Ici, nous plongeons dans le passé de deux camps. Celui de Dachau d'abord, près duquel Gunther a hérité bien malgré lui d'un hôtel qui périclite. Celui de Janowska ensuite où s'illustrèrent les odieux bouchers Friedrich Warzok et Eric Gruen. Là où fut aussi incarcéré Simon Wiesenthal.
Ce camp où la barbarie régnait en maître était connu pour être dirigé par des bourreaux impitoyables ayant chacun leur manière favorite d'exécution : qui la hache, qui le fusil, qui le couteau ou les expériences « médicales ». Deux cents mille personnes y furent mises à mort. Les scènes de tir dans « La liste de Schindler » - où le dirigeant du camp se défoule chaque matin en assassinant quelques prisonniers au hasard, qui ont juste le malheur d'être dans son champ de vision - ne sont rien à côté des sévices et atrocités perpétrés là-bas.

C'est dans ce monde pernicieux et hypocrite, celui des anciens nazis cherchant à échapper à la justice pour crimes de guerre, qu'évolue Gunther. Bien qu'expérimenté, il fait montre dans cette histoire de légèreté et de naïveté, sans doute un temps amoindri par les événements de sa propre vie. Il sera balloté au gré des turpitudes de certains jusqu'à ce que le vrai détective, clairvoyant et déterminé, ne refasse surface pour nous offrir un festival de réactions à la hauteur de sa réputation.

La fidélité de l'auteur à l'Histoire est une fois de plus stupéfiante. Documenté d'une manière précise, Philip Kerr ne laisse rien au hasard dans cette intrigue. Tout y est rigoureusement exacte (même les articles de Life de juin 45) au point que l'on ne sait plus où finit l'Histoire et où commence la fiction. Son travail est remarquable et ciselé avec art. Ce roman (comme les autres d'ailleurs) n'est pas seulement un très bon policier. Il est aussi un excellent récit historique. Récits que chacun devrait lire pour ne pas oublier
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