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EAN : 9782262078935
336 pages
Perrin (24/09/2020)
4.38/5   4 notes
Résumé :
Des cinq grands protagonistes de la Seconde Guerre mondiale, Charles de Gaulle est le seul à avoir reçu une formation d'officier général, les quatre autres – Hitler, Staline, Roosevelt et Churchill – pouvant être considérés comme des stratèges amateurs. Mais l'ironie du sort a voulu qu'il ait été aussi le seul à n'avoir pratiquement pas d'armée... 
Pourtant, cet homme à la vocation militaire très précoce, ce général de brigade engagé malgré lui en politique, a... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (1) Ajouter une critique
« De Gaulle, stratège au long cours » est le titre étonnant du remarquable ouvrage que François Kersaudy publie, à l'occasion du cinquantième anniversaire de la mort du Général, dans la collection « Maitres de Guerre » consacrée aux chefs militaires de la seconde guerre mondiale.

Etonnant, car l'expression « au long cours » évoque traditionnellement la mer … qui n'est pas le terrain de jeu habituel du célèbre fantassin et que les neuf parutions précédentes de cette collection manquent de marins et d'aviateurs (quand les rejoindront les Amiraux Darlan, Dönitz ou Nimitz ?).

Etonnant, mais finalement logique, car cette synthèse, qui se défend d'être une biographie, se focalise sur ses ambitions, ses anticipations et ses décisions, et, après avoir évoqué rapidement (50 pages) la formation, la grande guerre, la captivité et la campagne de Pologne du capitaine De Gaulle, analyse ses théories, ses livres, ses conférences à l'Ecole de Guerre et son long murissement de 1920 à 1940.

Au printemps 1940, le Colonel mène son régiment à la bataille de Montcornet, puis le Général, à titre provisoire, entre au Gouvernement de Paul Reynaud, avant de rejoindre Londres le jour où le Maréchal Pétain devient chef du gouvernement en demande l'armistice. Commence alors l'épopée de la France Libre et l'auteur analyse finement (200 pages) le parcours semé d'embuches de l'été 1940 à l'été 1943, où, à Alger, De Gaulle devient le chef incontesté qui l'été suivant entre à Paris et prend la tête de l'état après s'être imposé sur le front intérieur et sur le front international face à un Roosevelt méfiant et réticent.

Les 25 années suivantes (1945/1970), en 80 pages, survolent la traversée du désert, la guerre d'Algérie, la création de la V République, et les 10 années de Présidence en les inscrivant dans le fil de ses intuitions initiales, notamment l'arme de dissuasion nucléaire, et démontrent ainsi « le long cours ».

L'iconographie, comme toujours dans cette collection, est remarquable. le lecteur y trouve, ou y retrouve, les photos « historiques » qui forgent le « roman national » et une cartographie aussi claire que synthétique. A noter, malgré tout, l'ambiguité de la légende (page 142) désignant la Reine, épouse du Roi Georges VI, comme « reine mère » … L'éditeur Perrin nous offre une mise en page attrayante et simple avec une série de notes insérées lisiblement en bas de page. Ne manque qu'un index des personnages et lieux, hélas, mais cet ouvrage de référence se distingue par sa clarté et sa beauté.

En conclusion, j'ai apprécié cette évocation « au long cours » qui sculpte un des grands personnages de notre histoire avec une indéniable objectivité et une grande hauteur de vue.

Toute comparaison avec ses successeurs serait cruelle, mais l'histoire enseigne qu'à chaque tragédie nationale, la France a toujours engendré celui ou celle qui lui rappelle sa vocation et la rétablit dans sa grandeur.
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Citations et extraits (8) Voir plus Ajouter une citation
Et pourtant, ce général si démuni peut à lui seul infléchir la stratégie de deux groupes d'armées ! Le 17 décembre, à son retour de Moscou, de Gaulle apprend que trois armées allemandes viennent de passer à la contre-offensive dans les Ardennes belges, au centre du dispositif allié.

(...)

Comme une division et une brigade blindée SS menacent également Strasbourg depuis la poche de Colmar au sud, le général Eisenhower ordonne l’évacuation de l'Alsace et le repli sur les Vosges de la 7e armée américaine du général Patch et de la lre armée française du général de Lattre.

(...)

On assiste alors à un duel à fleurets mouchetés, qui tient à la fois du jeu d'échecs et de la partie de poker ; de Gaulle annonce qu'il a donné l’ordre à la 1’ armée de tenir sur ses positions, quelle que soit la stratégie adoptée par le commandant suprême ; Eisenhower lui demande d'imaginer quelle serait la situation de cette armée si les Américains cessaient de la ravitailler en carburant et en munitions ; sur quoi de Gaulle l’invite à réfléchir à ce qui se produirait si «le peuple français, dans sa fureur», privait les Américains de l'utilisation des chemins de fer et des transmissions nécessaires à leurs opérations... De Gaulle met un terme à cette escalade de propos intimidants échangés entre gentlemen par une phrase apaisante. «Plutôt que d'imaginer de pareilles perspectives, je croyais devoir faire confiance à la valeur stratégique du général Eisenhower et à son dévouement au service de la coalition, dont faisait partie la France.» Le commandant suprême, beau joueur, finit par céder, non sans avoir formulé une dernière objection : « Pour que je change mes ordres militaires, vous invoquez des raisons politiques.» À quoi de Gaulle fait cette réponse prévisible pour qui le connaît : « Les armées sont faites pour servir la politique des Etats. Personne, d ailleurs, ne sait mieux que vous que la stratégie doit embrasser, non seulement les données de la technique militaire, mais aussi les éléments moraux.» N’est-ce pas ce qu'il expliquait depuis deux ans déjà à Churchill, à Giraud et à Roosevelt ?
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On connaît la suite : à l’issue d une chevauchée fantastique, les premiers chars de la 2e DB arrivent sur la place de l’Hôtel de Ville dans la soirée du 24 août. Le lendemain matin, Leclerc lui-même entre dans Paris avec le gros de sa division, et le général von Choltitz signe la reddition de la garnison allemande. Au cours de l’après-midi, le général de Gaulle entre à son tour dans la capitale, rejoint Leclerc à la gare Montparnasse, puis,
au lieu de se rendre directement à l'Hôtel de Ville, va droit au ministère de la Guerre, rue Saint-Dominique - un geste hautement symbolique à bien des égards . ayant quitté les lieux quatre ans plus tôt en tant que sous-secrétaire d’Etat à la Guerre, il s'y réinstalle à présent en tant que chef de gouvernement - et aussi en tant que chef de guerre, bien sûr, car il faut montrer au peuple que la guerre est loin d'être terminée... « Immédiatement, écrira-t-il, je suis saisi par l’impression que rien nest changé à l’intérieur de ces lieux vénérables. Des événements gigantesques ont bouleversé l'univers. Notre armée fut anéantie. La France a failli sombrer. Mais, au ministère de la Guerre, l’aspect des choses demeure immuable. Dans la cour, un peloton de la garde républicaine rend les honneurs, comme autrefois. Le vestibule, l’escalier, les décors d'armure sont tout juste tels qu'ils étaient. Voici, en personne, les huissiers qui, naguère, faisaient le service. J’entre dans le "bureau du ministre" que M. Paul Reynaud et moi quittâmes ensemble dans la nuit du 10 juin 1940. Pas un meuble, pas une tapisserie, pas un rideau n’ont été déplacés. Sur la table, le téléphone est resté à la même place et I’on voit, inscrits sous les boutons d'appel, exactement les mêmes noms. [...] Rien n’y manque, excepté l’État. Il m'appartient de l’y remettre. Aussi my suis-je d'abord installé.»
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Ayant quitté la scène politique, de Gaulle n’exerce plus aucune fonction civile ou militaire, mais ses éventuelles prises de position politiques inquiètent le gouvernement, et son grade de « général de brigade à titre temporaire » pose quelques problèmes administratifs. Près de trois mois après son départ, le ministre des Armées Edmond Michelet lui écrit : «à plusieurs reprises, le président Gouin m'a demandé de lui soumettre un décret fixant votre situation dans l’armée, situation que, naturellement, il désire la plus élevée.» La réponse du Général, en date du 12 avril 1946, est intéressante à plus d'un titre : «Depuis le 18 juin 1940 - date du jour où je suis sorti du cadre pour entrer dans une voie assez exceptionnelle les événements qui se sont déroulés ont été d'une telle nature et d'une telle dimension qu'il serait impossible de "régulariser" une situation absolument sans précédent. [...] Toute "solution administrative" qu'on tenterait d’y appliquer aujourd hui prendrait donc un caractère étrange et même ridicule.»

A première vue, cette réponse pourrait apparaître comme une marque d'insubordmation du militaire à l’égard du civil. Seulement, on sait que depuis 1940, de Gaulle ne se considère plus comme un militaire, mais comme une autorité civile d'une nature toute particulière, liée à des événements eux-mêmes exceptionnels. A ce titre, il ne saurait reconnaître aucune subordination hiérarchique ou administrative.

Et puis, on se souvient de cette réflexion en famille : « Moi, maréchal ? Mais pour qui me prend-on ? [...]

Vous imaginez les enfants défilant devant ma porte en chantant : "Maréchal nous voilà !" »
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Mais dans l’intervalle, alors qu’il s’entretient avec Paul Reynaud au ministère de la Guerre, survient un incident caractéristique : le général Weygand, faisant irruption dans la pièce sans avoir été convoqué, annonce que la bataille est perdue et qu'il faut capituler. Lors de la discussion qui s’ensuit entre Weygand et Reynaud, de Gaulle intervient pour faire remarquer qu'«il y a d’autres perspectives ». Weygand demande alors, « d'un ton railleur» : «Avez-vous quelque chose à proposer ? » À quoi le nouveau sous-secrétaire d'Etat à la Guerre répond sèchement : « Le gouvernement n'a pas de propositions à faire, mais des ordres à donner. Je compte qu'il les donnera.» En une seule réplique, il résume deux décennies de ses écrits militaires, allant à contre-courant de vingt années d'abandon résigné des civils face à l’emprise des militaires.
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Une heure plus tôt, le général de Gaulle atterrissait à Bordeaux pour apprendre la démission de Paul Reynaud. Peu après, on l'informe de l'accession au pouvoir du maréchal Pétain, et il en comprend aussitôt la signification : la France va capituler. Tard dans la soirée, il rend visite à Paul Reynaud, qu’il trouve « comme soulagé d'un fardeau insupportable », et il lui fait part de sa décision de repartir pour l'Angleterre. C’est pratiquement un réflexe : « Les vaincus, disait Foch, sont ceux qui acceptent la défaite»... et de Gaulle, en vertu de son éducation, de sa mentalité, de son expérience et de ses réflexions, ne saurait accepter la défaite. C’est pourquoi, le 17 juin 1940 à 10 heures du matin, il s’envole pour l'Angleterre...
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Videos de François Kersaudy (3) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de François Kersaudy
Extrait de "Winston Churchill" de François Kersaudy lu par Vincent Schmitt. Editions Audiolib. Parution le 13 février 2019.
Pour en savoir plus : https://www.audiolib.fr/livre-audio/winston-churchill-le-pouvoir-de-limagination-9782367628233
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