Les nazis avaient promis de tendre la main aux ouvriers,mais ils ont manque leur coup et nous ont pris a la gorge
Lorsqu'on cherche à définir les grandes lignes de l'évolution des attitudes politiques sous le IIIe Reich, l'une des difficultés majeures vient de ce que les expressions directes et authentiques de l'opinion sous leur forme originelle sont rares et peu nombreuses. Dans le climat envahissant de peur et de répression, les commentaires politiques directs, dans les journaux intimes, les documents et les lettres de particuliers étaient naturellement peu nombreux. Pour se faire une idée de l'opinion sous le IIIe Reich, il faut donc s'en remettre à l'opinion rapportée, dans des sources qui étaient de surcroît compilées à des fins administratives et politiques et qui sont donc fortement entachées de partis pris. Mais il est un autre obstacle évident : la répression draconienne de l'opinion critique encourageait la dissimulation, voire le mensonge, les paroles masquant alors les vrais sentiments : souvent, les gens ne disaient pas ce qu'ils voulaient dire ni ne voulaient dire ce qu'ils disaient ; par peur, ils préféraient plus souvent encore se taire. Nous pouvons donc affirmer, sans crainte de nous tromper, que les commentaires hostiles aux régimes rapportés n'étaient que la pointe émergée de l'iceberg.
Reste que ce serait simplifier à outrance que d’attribuer à la seule paranoïa idéologique et criminelle de Hitler, de Heydrich et de quelques autres dirigeants du IIIe Reich la mise en œuvre des politiques qui aboutirent aux camps de la mort. [...] Elle eut été impossible enfin, sans le silence des hiérarchies ecclésiastiques, qui se gardèrent de dire leur opposition aux politiques raciales des nazis, et sans le consentement, pouvant aller jusqu'à la complicité active d'autres sections éminentes des élites allemandes : de la bureaucratie, de l'armée et, ce qui ne fut pas moins important, de certains grands secteurs industriels.
En fin de compte, la haine dynamique des masses s'avéra inutile. Leur antisémitisme latent et leur apathie suffirent à donner à la haine "dynamique" et de plus en plus criminelle du régime nazi l'autonomie dont elle avait besoin pour mettre en œuvre l'holocauste.
Largement indifférente et imprégnée d'un antisémitisme latent que la propagande s'employait à cultiver, l'opinion populaire définit le climat dans lequel l'agression nazie contre les juifs pu se déployer sans rencontrer d'obstacle. Mais ce n'est pas elle qui fut à l'origine de cette radicalisation. Si elle fut le fruit de la haine, la route d’Auschwitz fut pavée d'indifférence.
Si elle fut le fruit de la haine, la route d'Auschwitz fut pavée d’indifférence.
[] dans son étude pénétrante de la montée du nazisme à Northeim, en Basse-Saxe, où le NSDAP fit un score près de deux fois supérieur à la moyenne nationale en 1932, W.S Allen en est arrivé à la conclusion que les juifs de la ville étaient intégrés suivant les clivages de classes avant 1933 et que les habitants "se laissèrent attirer par l'antisémitisme parce qu'ils étaient attirés par le nazisme, non l'inverse".
On ne saurait donc, apparemment, accorder à l'antisémitisme un rôle significatif dans l'accession de Hitler au pouvoir, même si le fait que l'on s'accordât généralement à reconnaître dans la Question juive un problème politique - que les nazis n'étaient pas seuls à exploiter - ne fit rien pour enrayer sa propagation accélérée. Reste qu'en raison de la relative indifférence de la plupart des Allemands envers la Question juive avant 1933, les nazis eurent fort à faire, après la "prise du pouvoir", pour les persuader de la nécessité d'une politique active de discrimination et de persécution des juifs.
Probablement aurais-je été des leurs si j’avais été allemand.