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Critique de JIEMDE


JIEMDE
24 décembre 2020
À propos d'un monument…

S'attaquer à Et quelquefois j'ai comme une grande idée, de Ken Kesey – traduit par Antoine Cazé – est déjà une aventure en soi. Tenter de le chroniquer ensuite, confine à l'inconscience. Ou à une forme extrême de suffisance. Deux raisons de refuser l'obstacle et de me limiter à quelques conseils adressés aux futurs lecteurs de ces 894 pages.

D'abord, commencer par la fin, et ce conseil de « l'époustouflant » éditeur, Monsieur Toussaint Louverture : « Ne vous laissez pas décourager, prenez le temps, remettez à plus tard si besoin, mais n'abandonnez pas, c'est l'un des plus grands livres qu'il nous ait été donné de lire ». Dont acte.

Ensuite, se laisser porter et emporter par le souffle épique (bien qu'en prose) qui balaie cette vengeance familiale au sein de la famille Stamper, sur fond de fronde et de grève dans les forêts de l'Oregon. Apprécier l'incroyable précision apportée dans la construction des personnages, que ce soit le clan Stamper – Leland, Henry, Hank, Joe Ben ou Viv – ou les autres, qu'on ne peut pas vraiment qualifier de secondaires : Teddy le barman du Snag, Jenny l'indienne la prostituée qui connaît le passé ou Floyd Evenwrite le syndicaliste aux petits pieds.

Essayer de s'accrocher pour comprendre la psychologie des liens qui séparent ou relient les frangins Stamper, interpréter ce qui se transmet dans ce qui ne se dit pas, s'y retrouver dans les époques dont Keysey se joue, tout comme des personnages dont les noms et les prises de paroles peuvent changer à chaque page.

Et aussi se délecter de ces paysages exceptionnels, tout aussi indispensables à l'oeuvre que le sont les Stamper : la rivière, la forêt, un arbre qui tombe, une plage, la pluie, l'eau qui monte… Et avoir le souffle coupé par quelques scènes d'anthologie : un bras suspendu, une chasse de nuit, un bucheronnage mortel…

Le reste se résume à un gigantesque ouragan littéraire dans lequel Keysey te prend, te retourne, te perd, te câline, te réconforte et te remet dans ta lecture avant de t'abandonner à nouveau comme une loque épuisée sur les pentes boisées de la Wakonda.

Cette lecture est une contradiction permanente : réjouissante et épuisante, addictive et inabordable, douloureuse et impossible à lâcher. Comme souvent les grands livres. Comme toujours les monuments. Qu'il faudra que je relise pour essayer d'en faire une vraie chronique !
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