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Critiques filtrées sur 5 étoiles  
Je ne veux pas vous raconter d'histoires, je veux simplement que vous appréciiez les embruns piquants du sel de la Mer Rouge gifler votre visage. Je veux que vous ressentiez vos pieds s'enfoncer dans le sable meuble et brulant du désert. Je veux que vous observiez vos équipiers exténués, l'ombre de leurs pommettes avachies, rougies et rendues mobiles par les flammes vivantes d'un feu de camp qui crépite tout en écoutant les chants entêtants de vaillants guerriers.

Je veux, comme moi que vous vous laissiez emporter par l'aventure brute et virile où l'on se forge des amitiés loyales à la densité rare que l'on a autant de difficultés à clore qu'à couper le cordon ombilical de votre chair, de votre sang.

Bien sûr, vous allez penser que j'en fait des caisses mais c'est à la mesure du plaisir d'avoir renoué avec ce genre que j'ai tant adoré et pourtant délaissé depuis deux à trois années : Les romans d'aventures.

Et moi qui suis plus sérieux que cavalier, qui mieux que Joseph Kessel aurait pu me remettre le pied à l'étrier dans ce sujet où il excelle ? J'apprécie vraiment cette remise en selle.

Incontestablement, dans ce Kessel, il y a du Jules Verne et du Pierre Benoit.
De notre grandiose visionnaire, la beauté racontée des paysages, la douceur et la rudesse des climats et des mers, la hardiesse légendaire des animaux et la prodigieuse diversité de la botanique mais sans l'excès de précision monotone du romancier magnifique du 19ème siècle. de notre écrivain inoubliable de l'Atlantide, de Koenigsmark ou de la Chatelaine du Liban il y a toute la puissance et l'épaisseur des personnages confrontés à des situations inextricables où la valeur et l'honneur de l'homme font la différence. Cet écrivain controversé aimait tellement les femmes qu'il a élevé certains hommes au rang de chevalier…servant.
Lui, devait être plus cavalier que sérieux. (Hihihi)

Et puis, avec quelques notes de musique on embellit toujours la solitude de l'aventurier tel le Capitaine Nemo devant son orgue sur le Nautilus on écoute Mordhom et son clavecin sur le plateau Abyssin.

De toute évidence, ce roman fait la part belle aux castes, aux tribus, aux ethnies du Yémen, de Somalie et d'Abyssinie en général et à trois personnages en particulier : Igricheff, le bâtard kirghiz, Mordhom et Philippe Lozère, les aventuriers français.

La fortune carrée est en fait une voile de tempête qui soudera l'amitié sans voile de ce triangle d'hommes insolites.

Au-delà des faits d'armes, on croise la destinée de contrebandiers, de mercenaires, de pécheurs de perles, de guides, de matelots et de guerriers tous fiers de porter haut leur dessein avec un dévouement allant parfois jusqu'au sacrifice ultime.

"Vous savez, j'ai l'impression de sortir d'un songe, d'avoir rêvé que je vivais les histoires que je lisais dans mon enfance. Je le regrette déjà."

En définitive, je veux que vous partagiez mon émoi à faire revivre ces pages foisonnantes de péripéties, écrites à la suite d'authentiques voyages avec le cran, la frénésie et l'envie de la grande aventure « Kessel » de la vie.
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Ah les étiquettes ! Ca vous colle à la peau… Littérature jeunesse pour celui-ci ? Oui pourquoi pas mais les adultes y verront peut être autre chose, un truc en plus. Alors j'ajoute amour aux étiquettes. Parce que c'est un grand livre d'amour : amour de la terre, des paysages, de l'aventure, des hommes, d'un homme. Un hymne à la beauté des paysages, des corps, des éléments de l'univers, la mer rouge déchaînée était splendide, tout comme le sable du désert ou les roches et forêts et Chaïtane, bien sûr ce fier destrier. Je me sentais prise dans un tourbillon élémentaire, une partie intrinsèque d'un environnement luxuriant même dans sa dureté. Quel régal que cette lecture !
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Un immense roman d'aventure, la vraie, et comme on n'en fait plus.
Très heureuse de découvrir une nouvelle facette de Joseph Kessel que je connaissais par des romans plus intimes construits autour de personnalités puissantes et hors des normes (La passante du sans souci, Belle de jour, L'armée des ombres).
Il y a pourtant un élément commun entre ces romans et Fortune carrée, dont mon père me répète depuis des années qu'il a ébloui ses jeunes années: c'est le courage qui anime ces hommes, cruels mais justes, allant jusqu'au bout d'eux-mêmes dans une nature sauvage à la mesure de l'immensité de leur coeur: Igricheff le moscovite que porte et qui domine fièrement le destin, Mordhom le marin intrépide torturé par la part de finesse et de hauteur que la civilisation a déposé en lui, et Lozère le frêle millionnaire qui trouvera la force dans ses faiblesses.
Mais la lumière que dégagent ces hommes serait bien pâle sans le cadre prodigieux dans lequel ils évoluent, et qu'on sent que Kessel revit littéralement dans son écriture : Fortune carrée est le produit romancé de son voyage au Yemen, en mer Rouge et en Abyssinie, contrées aux paysages grandioses desquels il a rapporté le reportage Marchands d'esclaves avant de lâcher son coeur dans ce roman puissant comme Chaïtane le cheval.
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Et voici une nouvelle lecture de Kessel, quelle aventure ! Bien que la première partie ne m'a tellement emballée, je me suis bien rattrapée à bord du bateau de Bruno et encore plus au sein de la caravane de Philippe.

C'est bien la 3ème partie la plus admirable par les descriptions, la vie d'une caravane, l'angoisse de trouver le point d'eau à temps, la peur de se faire attaquer, de se perdre tout simplement, mais aussi le beau chemin en soi.
"Il pensa que la lenteur même à laquelle elle l'astreignait était son plus sûr instrument de découverte, de révélation. Qu'aurai-il vu par les rapides moyens de voyage qu'il avait aimés jusque là ? Des images, des perspectives effleurées. Mais le long contact avec le grain de sol et de la lumière, cette notion des valeurs minérales, ce sens de la sécheresse et de l'approche de l'eau, ce dessin des vallées, des plateaux, des cirques et des monts qui, peu à peu entraient en lui, cette communication efficace, directe, brute avec la peau ardent de la terre, comment les eut-il pu connaître sans cette avance pas à pas, où le corps s'unissait à la route, sans le déroulement presque immobile des crevasses mystérieuses, des piliers et des rouges murailles ?"

Cette partie dans le désert est digne d'un récit de Théodore Monod, j'ai retrouvé toute cette splendeur, ce vaste monde qui émerveille tant, le néant est empli de découvertes.
J'ai aussi préféré cette partie pour le côté humain de Philippe et ses retrouvailles avec Bruno.

C'est un excellent récit d'aventures parfois un peu cruel mais tellement bien écrit qu'on a du mal à le quitter.
Un petit côté "Lion" et un autre "Cavaliers" pour ceux qui ont aimé ces deux romans, ils aimeront sans aucun doute celui ci.
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De part et d'autre de la mer rouge. Dans les années 20. L'aventure à l'état pur

Nul n'est besoin de présenter Joseph Kessel, tour à tour militaire, journaliste, correspondant de guerre, résistant, romancier, … au destin extra ordinaire, et c'est bien une part de lui que l'on retrouve dans chacun des trois protagonistes de ce grand roman d'aventure.

Difficile pour autant de l'identifier à Igricheff, représentant bientôt déchu des soviétiques à Sanaa, batard kirghize, impitoyable, rompu à la solitude des steppes, qui sera le fil conducteur des trois épisodes de ce roman. Difficile aussi vis à vis de Mordhom, un breton aussi à l'aise sur mer que sur terre, dans lequel on reconnaitra assez facilement Henry de Monfreid (Les secrets de la mer Rouge), impénétrable, qui cache son humanité derrière un masque de pudeur. Difficile enfin vis à vis de Philippe, le plus jeune des trois, idéaliste dont on se demande ce qui a pu l'entrainer dans ces contrées aussi belles qu'inhospitalières et que Mordhom a pris sous son aile.

Kessel a écrit ce texte publié en 1930 à son retour d'un séjour dans la région alors qu'il n'est âgé que de trente-deux ans. Les mots du futur académicien n'ont pas pris une ride. Les paysages magnifiques succèdent aux scènes d'une violence inouïe pour nos yeux du vingt-et-unième siècle, mais violence naturelle, intemporelle, dans ce creuset de l'humanité, aux confins de l'Arabie, de l'Afrique noire et de l'Asie, contrées hostiles où se côtoient depuis la nuit des temps des peuplades qui luttent pour leur survie.

Un grand roman d'aventure initiatique où l'on peut lire en filigrane les contradictions qui habitent Joseph Kessel à l'aube de sa vie.
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"Fortune carrée" est peut-être le plus réussi de tous les romans d'aventures. Il peut être lu et apprécié à sa juste valeur, dès l'adolescence comme à l'âge adulte. Le livre tient le lecteur en haleine tout le long des trois parties (presque indépendantes) qui le composent. L'histoire se place au premier tiers du XXème siècle, mais dans des contrées reculées, exotiques, voire barbares, qui n'ont rien à voir avec le monde occidental.

La première partie, qui a pour cadre le Yémen, est époustouflante par son rythme effréné; c'est un aventurier sans peur et sans scrupule, Igricheff, le "fils de la Kirghize", qui y joue le premier rôle. La seconde partie - peut-être le plus faible des trois ? - se déroule sur un voilier voguant en Mer Rouge, dont le skipper Mordhom est le personnage dominant.
La dernière partie a pour héros Philippe, ami de Mordhom, chargé d'une mission difficile et dangereuse en Somalie (française, à cette époque). Le jeune Philippe est présenté avec une sorte de tendresse, car il est à l'opposé d'aventuriers endurcis comme Mordhom ou Igricheff. Cette dernière aventure est haletante, comme une "course contre la montre" dans le désert implacable. Le roman s'achève d'une manière magistrale, sur une tragédie dont on devine peu à peu le caractère inévitable. Elle laisse le lecteur véritablement époustouflé.
On n'oublie plus ce roman qui, pour une raison qui m'échappe, reste assez méconnu dans l'oeuvre de J. Kessel.
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J'ai beaucoup aimé lire Fortune Carrée. Kessel met tout son talent et son coeur dans ce roman d'aventure, pittoresque et trépidant. J'ai particulièrement apprécié les caractères bien trempés des trois héros dont les destins se croisent.
L'impétueux Igricheff guidé par son instinct et porté par son courage.
Mordhom, le colossal navigateur, courant les mers du globe et leurs éphémères richesses.
Philippe, le frêle rentier français, en quête de sensations fortes et de reconnaissance.
Chacun apprécie les autres à leur juste valeur : entre bienveillance, admiration et amitié. Mais leurs aspirations propres et la mauvaise fortune les séparent pour toujours.


Lien : http://axel-roques.iggybook...
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En s'inspirant de son reportage relaté dans "Marché d'esclaves", Joseph Kessel a écrit ici, un des classiques du roman d'action, un récit tumultueux et divers comme la vie elle-même.
"Fortune carrée" ?
C'est le nom d'une voile, la misaine carrée d'une goélette.
C'est pour l'auteur l'aventure aussi, la chevauchée dans les sables de l'orient, la fuite dans les vagues chaudes de la mer rouge, le trafic de l'or et des esclaves...la rencontre, aussi, avec un autre des plus talentueux écrivains et marins, Henri de Monfreid, le détenteur des secrets de la mer rouge.
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Incontestablement, quand on lit un livre de Kessel , on sait qu'on est dans la cour des « grands » écrivains. Il n'y a pas de qualificatif à rajouter . Catégoriser ce livre en roman d'aventures ou de jeunesse serait trop réducteur .

C'est un grand livre . Tout est maitrisé : le fond , la forme : Trois histoires avec trois personnages dans trois décors différents :
Les montagnes et la côte yéménite .
Parce que marin, j'ai été encore plus sensible à la deuxième partie pendant la tempête en mer rouge. Cette partie-là peut moins passionner si on n'a pas la mer dans ses tripes.
Enfin la vallée cachée en Abyssinie, sorte d'Eden et la course folle de la caravane jusqu'à la côte.

Une critique fait mention des similitudes entre les principaux personnages du roman : Philippe serait une déclinaison de Joseph Kessel lui-même .
Daniel Mordhom serait l'aventurier Henri de Monfreid.
Qui serait donc le bandit kirghize Igrichefff ? Si quelqu'un a une idée, je suis preneur. Pour l'instant ma seule piste c'est que ce serait le côté Mr Hyde de Kessel lui-même . L'indice c'est qu'Igricheff est opiomane et un peu « s'en fout la mort » comme Kessel l'était mais c'est tiré par les « chevaux"

Bref , je pourrais continuer à disserter longtemps sur ce formidable livre mais je veux terminer par l'essentiel : Il vous prend dès la première ligne et ne vous lâche pas jusqu'à la dernière. Quand vous n'êtes pas dans le Djebel attendant l'attaque des yéménites, vous êtes agrippé au cordage pendant la tempête et, en arrivant sur l'île noire, vous touchez du doigt le bonheur d'être encore en vie .
Les magnifiques descriptions de paysage viennent en contrepoint des relations complexes entre les trois personnages, et notamment entre Philippe et Lionel ; le troisième larron, si j'ose dire, le bandit Kirghize reste une énigme.
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"Courses, caravanes, privations, combats et solitude, tous les signes de la grande aventure" sont éminemment présents dans "Fortune carrée", génial roman d'action (et de réflexion) écrit par un écrivain qui fut lui-même grand reporter aux quatre coin du monde, du temps où le journalisme de terrain requérait de solides qualités d'endurance et la nécessité de se mettre en danger.
Ce roman du "Grand dehors" (comme le qualifierait @Michel le Bris) fait la part belle à la témérité mâtinée parfois d'inconscience d'un trio de personnages hors du commun, attirés par le dépassement de soi et les situations extrêmes comme le papillon l'est par la lumière.
Par ordre d'entrée en scène, voici IGRICHEFF, bâtard d'un comte kirghize, prompt à aller où le vent le mène. le vent mais aussi un superbe étalon -Chaïtane (le diable)- que lui a offert un imam yéménite. de Sanaa à la mer rouge, le couple aérien vole de batailles en razzias, de situations inextricables en rétablissements miraculeux. Jusqu'au moment où poursuivi par l'armée yéménite, ce couple prodigieux atteint les rivages maritimes et est sauvé (du moins le cavalier) in-extremis par un boutre qui effectue de la contrebande d'armes. IGRICHEFF, l'insondable, le taiseux, le cynique, vacille un moment lorsqu'il est contraint d'abandonner aux flots Chaïtane avec qui il formait sur terre un centaure indomptable. Il pensa alors "à ses aïeux, les Khans des steppes, qui faisaient égorger leur cheval préféré sur leur tombeau."
C'est un Breton taciturne, Daniel MORDHOM, qui dirige le bateau -Ibn-el-Rihèh (Fils du vent)- Il n'a sauvé le Kirghize , précise-t-il sans ambages, uniquement parce que ce dernier a eu le réflexe de l'appeler en français. Ce à quoi ce dernier répond sans sourciller : "A votre place, je n'eusse pas retardé d'une seconde l'appareillage, même si l'on m'avait hélé en russe." Les rapports entre les deux hommes sont ainsi fixés d'entrée : de l'estime certes, mais aussi une certaine méfiance voisine du mépris.
Et à leur côté, un jeune homme simple, bienveillant, prompt à s'émerveiller, tel est Philippe LOZERE qui accompagne MORDHOM dans son périple maritime. Lui, le néophyte, garçon de la ville désormais confronté aux éléments, mesure bientôt "l'exacte puissance de son corps à se mouvoir dans l'étendue"; comprend que "le monde était d'une ampleur infinie et d'une substance difficile pour l'homme"; connaît "le prix du soleil, l'interdiction terrible des ténèbres, la magie de l'eau, le sang précieux des nourritures."
Kessel entraîne le trio d'abord dans une traversée mouvementée de la mer rouge et s'avère, à travers le regard de Philippe, le peintre inspiré de la tempête qui les saisit : "Fasciné, le jeune homme, de nouveau accroché au roof, contemplait ces montagnes mouvantes de lumière et d'eau mêlées, traversées de flèches d'or, cette chevauchée énorme et magnifique, qui brassait dans sa furie le soleil, l'écume, l'azur et l'émeraude."
Puis ce sera la traversée de montagnes dont les pièges et les difficultés ne seront pas moindres. Avec, présent à tout instant, le danger qu'il vienne de la nature ou des hommes comme une épée de Damoclès au-dessus de ces trois vaillants compagnons.
Vous aurez compris que Joseph Kessel est un immense styliste qui possède un don rare pour décrire la nature, ses splendeurs et ses excès. En contrepoint, il se montre habile à sonder les coeurs et les âmes de ceux qui osent se confronter à elle, à affronter ses périls.
Connu pour être un baroudeur impénitent, un témoin attentif de son temps et un journaliste inspiré, Kessel, soyez-en sûrs, est avant tout un écrivain, et quel écrivain !
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