En décembre 1920, Lloyd George et
Churchill, contraint pas les événements, proposèrent une partition de l'Irlande qui aboutit un an plus tard à la création de l'Etat libre d'Irlande (catholique au sud) et de l'Ulster (loyaliste au nord).
Cette indépendance relative, avec statut de dominion, divisa les irlandais.
Michaël Collins fut assassiné par les troupes d'Eamon de Valera et l'écrivain
Erskine Childers, auteur de «
L'énigme des sables », fusillé pour trahison.
Joseph Kessel et
Henri Béraud suivirent, comme envoyés spéciaux, ce drame irlandais et « Mary de Cork » est la première, et la meilleure, histoire du recueil «
Les coeurs purs ». Unité d'action, de lieu et de temps, la rencontre de Mary et de son époux Art, noue une tragédie de quarante pages que leur fils achève dans un des sommets de l'oeuvre de
Kessel.
La dédicace « A mon cher
Henri Béraud, en souvenir de Dublin et de Cork, cette histoire irlandaise » rappelle que
Kessel, âgé de 22 ans, était l'envoyé du quotidien conservateur « La liberté » alors que Béraud, âgé de 35 ans, enquêtait pour le journal radical « L'oeuvre ». La révolte irlandaise fut à l'origine d'une amitié de quinze ans, forgée alors sur une commune anglophobie, et les articles de
Kessel furent accusés de fragiliser nos relations diplomatiques avec le Royaume Uni.
En 1925, quand
Kessel écrit «
Les coeurs purs », Béraud publie « Ce que l'ai vu à Moscou » dédié à
Kessel « Cher compagnon, je t'offre ce livre en souvenir des jours d'Irlande où nous luttions ensemble de tout notre coeur pour aider les plus hardis et les plus pauvres révolutionnaires de monde à conquérir la liberté ».
Kessel et Béraud se rejoignent alors au « Journal » puis en 1928 participent au lancement de « Gringoire » dont
Kessel prend la Direction littéraire et les deux amis créent le Prix
Albert Londres en 1932, précise
Yves Courrière, le biographe de
Kessel.
L'affaire Salengro et le Front Populaire menèrent à la rupture entre les deux hommes en décembre 1936,
Kessel reprochant à Béraud son antisémitisme qui répondait « je ne suis pas antisémite, je suis anti-parasite ».
Kessel créa « Le chant des partisans » et Béraud fut condamné à mort à la libération.
«
Makhno et sa juive », la deuxième histoire, semble aussi improbable que l'amitié entre
Kessel et Béraud, et parait invraisemblable dans notre époque traumatisée par la Shoah.
« Le thé du Capitaine Sogoub » qui conclut ce recueil, permet à
Joseph Kessel de revenir sur une rencontre survenue chez ses parents.
«
Les coeurs purs » sont ainsi de la même pureté qu'un poison et associent un parricide, un égorgeur et un expatrié douteux dans l'entre deux guerres, un contexte qui rend finalement éternel ce recueil.