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EAN : 9791091555081
350 pages
Atelier des Cahiers (01/04/2014)
4.7/5   5 notes
Résumé :
Crépuscules - ces moments du jour qui meurt, d'une beauté à couper le souffle? C'est la fin d'une époque dans des éclats de pourpre, aussi intenses que le sang répandu par les hommes sur la terre divisée de Corée, en ces années précédant la guerre. C'est sous le signe de ces couleurs brûlantes comme la passion que commence ce récit, rapporté par un petit garçon dont le père, boucher et paria, est un homme violent qui donne tout à la cause communiste. L'enfance dans ... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (4) Ajouter une critique
Un récit émotionnellement dense, chargés de souvenirs douloureux d'une période où un peuple se déchire et se divise pour une idéologie.

Gapsu a 43 ans, travaille dans la rédaction d'une maison d'édition et vit à Séoul avec son épouse et ses trois enfants. Il reçoit un télégramme lui annonçant la mort de son oncle resté au village de son enfance. Il va se rendre sur place alors qu'il n'y était pas retourné depuis 29 ans, fuyant des évènements tragiques. Les souvenirs affluent et le blessent encore, bien qu'il ait passé tout ce temps à tenter d'oublier. Par le biais de ces souvenirs d'enfance narrés à la première personne, Gapsu évoque l'occupation japonaise puis l'indépendance, nous fait revivre l'insurrection communiste en Corée du Sud dans les années 40, et nous amène à comprendre davantage le « drame de la séparation » Nord-Sud du pays.

Il s'agit du premier auteur coréen que je lis et j'avoue connaître très peu l'histoire de ce pays. J'ai donc particulièrement apprécié le soin de Kim Won-il de faire expliquer par son personnage la duplicité des sentiments, le trouble des coréens face à ce conflit idéologique qui souvent les dépasse et les divise au coeur même des familles. Le protagoniste enfant tente de comprendre la réalité autour de lui en lisant sur le visage des adultes, ce qui offre de superbes portraits de cette population campagnarde qui survit comme elle peut, luttant contre la misère. Les dialogues sont savoureux et j'imagine pleinement le délicat travail de traduction pour rendre leur « parler » en français. On comprend qu'ils ont un fort accent et s'expriment peut-être aussi dans une sorte de dialecte régional. Leur langage est toutefois très cru, même celui des enfants, et cela a contribué pour moi à renforcer ce côté violent et réaliste du récit.
Les paysages sont superbement dépeints dans cette campagne où l'auteur lui-même a grandi. Mais la nature y est ingrate et nourrit peu les hommes : les plantes sont recouvertes de poussière au moment de la canicule, puis noyées sous les trombes d'eau quand arrive la pluie. Un des leitmotivs du roman est la faim cruelle et fidèle qui tenaille les estomacs de Gapsu et son jeune frère. Cela dit la nature n'en est pas seule responsable, il y a aussi le comportement irresponsable du père.
Une enfance très difficile, ce qui n'empêche pas Gapsu de développer de l'affection pour ce père violent. A cause des évènements vécus, il grandira avec un complexe de persécution qui ne le quittera plus. La peur et l'inquiétude font partie de son quotidien même lorsqu'il est adulte et se rend aux funérailles de son oncle, accompagné de son fils aîné à qui il a bien du mal à parler du passé.
Le récit est ponctué par des cauchemars terrifiants et de magnifiques évocations de crépuscules très poétiques. Ainsi la plume de Kim Won-il peut-elle susciter la beauté d'un moment comme la pire horreur d'une page à l'autre.

Toujours est-il que cette écriture émeut, impressionne, alarme, et ne peut que faire vibrer ce qu'il y a d'humain en nous. En cela ce roman a une portée universelle.

Je remercie chaleureusement les éditions Atelier des cahiers pour cet envoi-découverte, ainsi que Babelio pour l'organisation de cette Masse Critique qui ouvre d'autres horizons.
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L'histoire fait naître des traumatismes, craquelle brise modèle les hommes à mesure qu'elle dessine ses cartes. Jeu de hasard aussi bien que de massacre. La Corée. Pays du matin calme...pays des trois royaumes... royaume de Silla, nostalgie d'un ensemble. Les chinois, les mongoles, les japonais, les américains, les soviétiques...Invasion, protectorat, annexion, partition, exploitation, violation, déportation, spoliation, division..Guerre d'indépendance, victoire des alliés, guerre froide, guerre de Corée, guerre du crabe.. Pyongyang ... Séoul.
Une ligne. Un point d'indignation.
Les hommes font naître l'histoire et d'autres hommes qui feront naître des livres. Des livres qui parlent des hommes, des hommes qui traversent l'histoire et qui subissent les coups du sort.
Kim Won-il, auteur sud coréen, est un des auteurs représentatifs du mouvement de la littérature de la division. Coupé, tranché, écartelé, par la lame de l'histoire. Survivant espérant, désirant, renaissant.
Roman autobiographique, écrit d'un traumatisme. Kim Won il nous permet d'entrer dans l'histoire en nous plaçant aux côtés d'un enfant : Lui même. Vivre sa déchirure, connaître sa faim, la misère d'un peuple, vivre l'horreur, la violence et le basculement. Comprendre la folie impossible d'un choix. Au nord le père, au sud la mère. L'enfance l'enfer de deux royaumes.
Le retour d'une mémoire, le ressouvenance d'une blessure, le bruit assourdissant d'une absence. Mémoire traumatique ici activée in situ. Résilience. Transmission, parole, rendront le retour possible. Retour sur soi sans lequel aucune reconstitution ne peut être possible, aucune unité ne peut être envisagée.
L'histoire craquelle, brise, décompose, modèle et recompose. Sur sa route, les hommes écrivent des pages.
Des pages composent les livres, ces livres qui rassemblent parfois les hommes puisqu'ils ressemblent comme deux gouttes d'eau à l'histoire de tous les hommes, enfants venus du même fleuve.
« Crépuscules » est un roman qui nous permet de comprendre l'impossible partage de l'humanité, la complexité des peuples que l'on veut injustement assembler ou diviser, comprendre leur résistance face aux douleurs infligées.
La responsabilité peut engendrer le pardon . Ici point de pardon. Mais une attente, un regard, un espoir. L'innocence qui attend calmement de revoir un matin se lever.
« Crépuscules «  de Kim Won – Li, publié en feuilleton de 1977 à 1978, est traduit en français par Hélène Lebrun. Il est paru , en France, aux éditions « Atelier des Cahiers » en 2014.

Opération masse critique Babelio / Editions Atelier des Cahiers. Septembre 2017
Astrid Shriqui Garain
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Crépuscule, de Kim Won-il raconte l'enfance d'un petit garçon, fils d'équarrisseur. Cette enfance le poursuivra ensuite jusqu'à Séoul et dans sa vie d'adulte. L'auteur alterne alors entre souvenirs ranimés par la mort de son oncle, et sa vie actuelle.

Ce roman est très bien construit et permet de mieux comprendre les racines du conflit coréen. Voir ces tensions à travers les yeux d'un enfant permet d'effacer toute trace d'engagement idéologique, et de comprendre l'atrocité du déchirement interne à une société. La traduction est bonne et l'écriture fluide permet de se laisser happer facilement par le livre. Je le recommande !
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De nombreuses critiques de Crépuscules de Kim Won-Il ont mis l'accent sur le caractère autobiographique, sur la période historique contemporaine qui sous tend ce récit.
Un autre sujet, central, m'a personnellement interpellé : comment une mère, victime des violences de son mari, peut-elle fuir (emportant avec elle sa fille uniquement) abandonnant ainsi ses deux jeunes garçons aux mains même de son oppresseur, les condamnant ,de ce fait à la faim, aux mauvais traitements, au manque d'affection, à la solitude, qu'elle a elle-même vécu ?
Alors que d'autres y verront à juste titre une fresque historique, la poursuite d'un idéal, la revanche de l'exclusion sociale, la solidarité intergénérationnelle…cette question reste centrale pour moi .
Cet ouvrage est une suite d'allées et venues dans le temps (l'auteur enfant, puis adulte), une mosaïque de vignettes du quotidien…
Un rayon de soleil vient illuminer momentanément ce tableau lugubre avec le retour de la maman, revenue voir ses deux garçons après des années d'absence. Leur bonheur ne sera que de courte durée, quand on se prenait à espérer une vie meilleure. . On apprend que la soeur ainée, ayant perdu son emploi au service d'une famille, tombée dans l'alcoolisme et la prostitution, est morte.
« Crépuscules « ferait un excellent film noir.
Les dialogues, sur lesquels la traductrice Hélène Lebrun a fait un travail admirable, notamment en ce qui concerne le personnage du père, y trouveraient toute leur dimension phonétique. le style parlé, très populaire, avec ses contractions, ses structures grammaticales très relâchées, ralentissent quelque peu la lecture et la compréhension.
A lire, absolument
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Citations et extraits (2) Ajouter une citation
Se battre entre compatriotes, quelle honte ! Voilà qu'on peut encore moins dormir tranquille que du temps des Japs ! Puisque j'en parle, faut bien qu'j'le dise, pourquoi not'pays, y l'est coupé en deux, avec les Russes qui commandent au Nord et les Américains qui commandent au Sud ? Avec les Japs au moins, c'était un seul pays qui occupait. Maintenant , c'est-y pas entre frères qu'on se bat et qu'on se tue ! Y racontent que la ligne trente-huit, ou j'sais pas quoi, c'est tout à fait fermé et qu'on peut pas passer librement. Si on fait pas gaffe, not'pays, y va être coupé en deux morceaux et ça sera comme sous les Japs, aller en Mandchourie, ça s'ra un rêve impossible.
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C'est terrible d'avoir faim. Ça ne t'es jamais arrivé, alors tu ne peux pas savoir. Mais vraiment, c'edt épouvantable la faim ! Quand on dit que ceux qui ont faim finissent par manger de la terre, ce n'est pas une invention. Moi, ton père, il m'est arrivé d'en manger, de la terre..
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