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EAN : 9782809702606
478 pages
Editions Philippe Picquier (02/04/2011)
3.91/5   86 notes
Résumé :
Kim Kiyeong, importateur de films étrangers, père de famille sans histoire, voit sa vie basculer à la lecture d'un haïku de Bashô. Les vers du célèbre poète japonais contiennent un message codé qui le replonge dans un lointain passé. Vingt ans plus tôt, Kiyeong quittait clandestinement la Corée du Nord pour infiltrer Séoul ; l’absence de mission a finalement fait de lui un agent dormant. Son brusque réveil le place au moment du choix : va-t-il obéir à l'ordre de ren... >Voir plus
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''Au fond de la jarre
sous la lune d'été
une pieuvre rêve.''
Un haïku de Bashô, simple en apparence, et pourtant, il va bouleverser la vie de Kim Kiyeong. Ce quadra, marié et père de famille, mène à Séoul une vie sans histoires, occupé à gérer sa petite entreprise d'importation de films étrangers. Mais pour lui, ce haïku, reçu dans sa boîte mail, est un choc car il recèle un sens caché. Oui, pour Kim Kiyeong, espion nord-coréen installé au Sud depuis plus de 20 ans, ce haïku correspond à l'ordre n°4 : ''Abandonne tout et rentre immédiatement. Cet ordre est irrévocable.'' Après 10 ans sans nouvelles, le coup est rude. Il a 24 heures pour faire un choix : rentrer au Nord sans savoir pourquoi on le rappelle, rester à Séoul au risque d'être éliminé par Pyongyang, s'enfuir à l'étranger et essayer de se faire oublier. Les questions tournent dans sa tête et, avec elles, l'angoisse du faux pas, de la mauvaise décision et le retour de ses réflexes d'espion.

En plus d'être un roman d'espionnage avec sa dose de filatures, de messages codés, d'angoisse, de paranoïa, L'empire des lumières est surtout une réflexion sur la vie, celle qu'on mène et celle dont on rêvait, les idéaux pour lesquels on se bat et, bien sûr, un portrait des deux Corée, la complexité de ce qui les unit, leurs différences et leurs ressemblances. Au travers de cette journée particulière dans la vie d'un homme à cheval sur le 38è parallèle, Young-ha Kim raconte la dureté du régime des Kim au Nord mais aussi les profondes mutations du Sud qui ont conduit le pays de la misère et la dictature à la modernité et au capitalisme le plus débridé. Infiltré dans les milieux contestataires étudiants des années 80, l'espion découvre l'adhésion d'une partie de la jeunesse à l'idéologie du Juche d'une société sans classes et auto-suffisante en vigueur au Nord. Une raison de plus de penser qu'il est dans le vrai et qu'il agit pour le bien du Nord et du Sud. le sentiment patriotique qui l'anime et qu'il retrouve d'ailleurs à Séoul s'en trouve renforcé. Mais au fil des ans, oublié de Pyongyang, il a évolué e même temps que la société coréenne. Il s'est implanté dans son nouveau pays, a profité du confort, de l'opulence, de la liberté. Tout n'est pas rose évidemment, l'argent a pris le pas sur d'autres valeurs plus essentielles. Dans son couple, il n'y a plus d'amour. Sa femme le trompe et oublie dans le sexe qu'elle n'aime pas sa vie. Sa fille, adolescente, vit ses propres expériences et prend son autonomie. Dans ces conditions, rentrer au pays pourrait être le bon choix s'il n'y avait le doute sur ce que lui réserve les services secrets. A-t-il commis une faute sans le savoir ? Va-t-il être exécuté ? Où est son devoir ? Au Nord pour le bien de la patrie comme il a été conditionné à le croire ? Au Sud en se préoccupant de son seul bien-être comme le Sud le lui a enseigné ?
Une journée racontée heure par heure sur un rythme haletant, un homme pris entre deux feux, une histoire passionnante qui va bien au-delà du simple roman d'espionnage. L'auteur se garde bien de porter un jugement sur les deux pays ennemis, préférant axer sa réflexion sur la méconnaissance mutuelle de ces deux états qui se côtoient sans communiquer. Une lecture captivante.
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L'empire des lumières est une lecture captivante. La construction du roman est une réussite puisqu'elle se déroule sur 24h a la manière d'un compte a rebours. Chaque chapitre s'égraine avec trois personnages principaux : le père de famille Kim Kiyeong, espion nord coréen, infiltré depuis 20 ans en Corée du Sud, sa femme Mari, qui ne sait rien de la double vie de son mari et leur fille, une adolescente de 15 ans. Autour d'eux gravitent plusieurs personnages secondaires qui au final on leur importance a la fin du récit.
Or cette journée n'est pas ordinaire car Kim Kiyeong reçoit un ordre bien particulier :
"Enfin le message décisif apparaît :
Au fond de la jarre
sous la lune d'été
une pieuvre rêve
Kiyeong ravale sa salive. En fait, il serait plus exact de dire que chaque particule de sa salive se fraie difficilement un chemin dans sa gorge. Il boit d'un trait son café qui est en train de refroidir à côté de la souris. Si sa mémoire est bonne, ce haïku doit être le message codé signifiant l'ordre n°4."
L'ordre n°4 signifie, retourner immédiatement en Corée du nord. Mais dans ce pays qu'il a quitté 20 ans plus tôt, il ne sait pas ce qu'il l'attend...... Et je vous certifie que le suspense est la, jusqu'à la dernière page !

J'ai beaucoup aimé découvrir le visage de ces deux Corée. L'auteur ne fait pas l'apologie d'une au détriment de leur mais montre les défauts de chacune d'elle. C'est un roman avant tout, mais tout est vraiment richement documenté pour les lecteurs, comme moi, qui au final ne connaissent pas grand chose de ces deux pays.
Lien : http://missmolko1.blogspot.i..
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Kiyeong, espion du Nord, vit dans le Sud à Séoul depuis 20 ans. Mais comme ça fait 10 ans qu'il n'a pas reçu de consigne de Pyongyang, il fait sa petite vie, avec sa femme et sa fille, et a plutôt bien réussi. Mais un beau matin, il reçoit brusquement l'ordre de rentrer au Nord. Lui qui s'est habitué à la vie de ce côté du 38ème parallèle, choisira-t-il d'obéir ou de rester ? En 20 ans, tout a bien changé, des deux côtés...

Dès les premières pages, le lecteur est aspergé de détails dont il n'aurait habituellement cure comme la routine presque totale du matin des personnages (cela inclut comment ils se lavent les dents ou avec quelles céréales ils démarrent leur journée). Une avalanche de précisions pour néanmoins mieux insister sur ce qui pour nous ne sont que des banalités mais une approche de la liberté pour les Coréens du Nord. Dès les premières pages, on assiste à l'opposition entre deux mondes de la plus simple des manières avec les plus simples des objets.
Alors certes, l'écriture de Kim est assez factuelle, les phrases sont souvent simples. Mais le fond et ses implications l'emportent clairement sur la forme, ce livre développant, de façon très claire, l'évolution des deux Corée depuis la partition peu avant 1950 ainsi que la guerre qui a suivi au-travers du dilemme que vit le personnage de Kiyeong. L'intérêt majeur de cette histoire se retrouve dans ses recontextualisations historiques et surtout les enjeux politiques et personnels qui impliquent de venir du Nord mais de vivre au Sud.
L'auteur réussit à nous captiver de bout en bout (malgré de nombreux passages sur la vie des personnages qui entourent Kiyeong mais qui, à la rigueur, ont pour valeur de témoigner des différences de vie entre chacun des deux pays, du moins au début car après on se fiche royalement des histoires d'adolescents de la fille ou d'émancipation sexuelle/perdition de l'épouse), et surtout dresse un bilan sans a-priori sur l'évolution des deux côtés, en nous narrant même la Corée du Nord des années 1970-80 d'un point de vue généralement laissé de côté par les médias occidentaux, sans pour autant bien sûr l'idéaliser. Il est intéressant d'en apprendre davantage sur la situation du pays avant la grande famine qui l'a frappé au début des années 1990, surtout pour une lectrice comme moi de la génération Y qui a toujours entendu parler de la Corée du Nord dans son état actuel. Tout comme il est vraiment intéressant de revivre l'évolution fulgurante de la Corée du Sud vers l'économie de marché mondiale et la république, bien que celle-ci reste encore très frileuse sur certains sujets ou n'autorise pas non plus à 100% certaines libertés, notamment celle d'expression.
Ainsi, jalonné de retours sur images de moments historiques capitaux ou plus insolites mais révélateurs d'un contexte à un instant T, ce roman nous entraîne vers la décision ultime, celle qui définira le reste de la vie de Kiyeong : rentrer ou rester ? La mort ou la fuite ? le coup de maître final de l'auteur réside dans le fait que Kiyeong, ancien agent du Nord, ne pourra jamais échapper à son destin d'espion, quel que soit le pays dans lequel il réside. Piégé par la politique, sa vie est fichue, et tout cela à cause des deux côtés. Espionnage, contre-espionnage, Kiyeong est au final coincé dans un engrenage qui prouve que la guerre est entretenue des deux côtés et que la paranoïa est partagée. Une montée en puissance sans fin, une guerre des égos ; jusqu'à quand ?
Ce qu'on regrettera peut-être, c'est le titre en référence au travail de Magritte, voire même son utilisation en tant que couverture dans la version française grand-format de l'ouvrage. Quand on lit le passage en question, il n'y a pas vraiment de quoi y voir le tableau de Magritte en question...
Mais c'est dans l'ensemble un livre captivant, malgré les temps morts pré-cités.
Lien : http://livriotheque.free.fr/..
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Vingt-quatre heures dans la vie d'un homme. Vingt-quatre heures pour décider de son avenir, de façon irrévocable.
Vingt-quatre heures dans la vie de sa femme, aussi, que tout sentiment semble avoir quitté. L'amour ? Elle n'aime plus son mari depuis longtemps. La peur, le remords, la compassion ? Elle semble ne jamais en avoir éprouvé - voir le froid détachement avec lequel elle pense à l'accident qui a laissé son frère aîné handicapé, ou son incompréhension face à la mélancolie de sa mère. Il lui reste les regrets de la vie qu'elle aurait aimé mener, et son attachement à sa fille unique - vous me direz que ce n'est déjà pas mal.
Son mari, Kim Kyeong, est bien plus tourmenté, et avec lui, c'est toute l'histoire des deux Corées contemporaines que nous découvrons. C'est aussi tous les tourments d'un homme qui a toujours voulu servir son pays. Il repense à ses années de formation, à ceux qui l'ont formé, qu'il voit maintenant d'un oeil neuf. Il retrouve ses réflexes d'agent, mais il n'est plus l'homme qui, embarqué dans un sous-marin, a quitté la Corée du Nord pour infiltrer le Sud et aider au mieux d'autres agents à s'intégrer. Il n'est pas non plus un authentique coréen du Sud. S'il est capable de se fondre dans la masse, de respecter leur code, de capter les modifications du langage, des comportements - et de voir les différences avec le Nord - il n'est jamais pensé comme un coréen du Sud, il est toujours resté extérieur à ce qu'il étudiait. Prêt à retourner d'où il vient ? Il en sait les conséquences, qui n'ont rien à voir avec le MI-6 des James Bond. Il sait aussi les conséquences s'il reste - pour lui, pour les siens.
Mais qui sont les siens ? Sa femme, sa fille, brillante lycéenne ? Ou son père, ses frères, restés au Nord ? Et si la cause de son comportement (un agent sûr de lui n'aurait pas hésité) n'était pas à rechercher des actes qu'il a dû commettre, et surtout, dans un acte, fondateur pour lui, dont il fut le témoin et la victime ?
Beaucoup d'interrogations, parce que le personnage principal n'a cessé de s'interroger, là où d'autres avaient des réponses toutes prêtes, et des solutions radicales.
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Kiyeong, jeune étudiant de Corée du Nord est envoyé à Séoul comme espion pour infiltrer une université. Après avoir été actif pendant 10 ans, il ne reçoit plus de signes de ses supérieurs et devient un agent dormant. Il s'installe dans la vie de Seoul, devient importateur de films, marié, père d'une adolescente.
Un matin à son travail, il reçoit un email, c' est un haïku de Basho, c'est un code pour lui intimer l'ordre de rentrer dans le nord. le ciel semble lui tomber sur la tête, il se croyait oublié et pensait pouvoir passer sa vie confortablement à Séoul, loin du régime dictatorial et des privations de la Corée du Nord.
Le récit est articulé en 24 chapitres, les 24 heures du jour ou Kiyeong reçoit le message maléfique qui bouleverse sa vie. Après la réception du message, il sort de son bureau et erre dans la ville, assailli de questions, de doutes, de craintes. Il se demande s'il doit obéir à l 'ordre, fuir à l' étranger...
L'auteur a signé un thriller rythmé, tout en se penchant sur le destin tragique d 'un homme piégé entre deux mondes diamétralement opposés.
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Citations et extraits (12) Voir plus Ajouter une citation
À son arrivée à Séoul, ce qui l’avait le plus intimidé, c’étaient justement ces Lotteria. Dans les souterrains de Pyongyang, les fast-foods comme McDonald’s, Burger King ou Lotteria n’existaient pas encore. Aujourd’hui, fréquenter ce genre d’endroit est devenu banal. Mais à l’époque, en 1986, ces enseignes étaient toutes récentes, même au Sud. Au début, Kiyeong n’osait pas entrer dans un Lotteria. Il hésitait sur le trottoir, essayant de comprendre le sens du mot self-service affiché sur la vitrine. Des gens se dirigeaient vers la caisse, d’autres allaient jeter le contenu de leur plateau dans une poubelle et sortaient sans avoir payé. Tous, même des collégiens, se conduisaient avec le plus grand naturel, comme s’ils avaient reçu une formation collective. Kiyeong ne pouvait tout de même pas demander à quelqu’un de l’aider. Un jour, il se décidé enfin à entrer et s’assit à une table. Il resta là un bon moment, mais personne ne vint lui demander ce qu’il voulait. Il observa les clients qui passaient leurs commandes et comprit enfin ce que signifiait le mot “self-service”. Chacun commandait ce qu’il voulait, apportait lui-même son plateau à une table puis débarrassait les restes. C’était ça ça un self-service ? Il finit par s’y habituer. Et il y eut quantité d’autres choses auxquelles il dut s’adapter, des choses qu’on ne lui avait pas apprises à Pyongyang.
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Et finalement, ce fameux "jour de la révolution", secrètement redouté par les jeunes révolutionnaires, n'arriva pas. A la place, la grande crise économique causée par l'endettement envers le FMI bouleversa totalement la Corée du Sud, tout autant que l'avait fait la venue de l'armée américaine dans le pays en 1945. Au moment où je suis arrivé au Sud, dans les années quatre-vingt, cette société ressemblait davantage à celle de la Corée du Nord qu'à ce qu'elle est devenue aujourd'hui, songe Kiyeong. La plupart des travailleurs étaient assurés de conserver leur emploi, jusqu'à l'âge de la retraite. Les étudiants n'avaient aucun mal à trouver du travail dès leur sortie de l'université. Les banques et les grandes entreprises, avec leurs halls d'entrée en marbre d'importation, semblaient devoir durer éternellement. Les enfants prenaient soin de leurs parents âgés, qui exerçaient encore une certaine autorité. Les présidents étaient élus au suffrage indirect avec une majorité écrasante au palais des Sports, comme de coutume. L'opposition n'existait que de nom. La plupart des gens s'intéressait peu à ce qui se passait au-delà de leurs frontières. Le slogan "Nous sommes heureux" - qu'on voyait partout dans le Nord - représentait littéralement la mentalité des Coréens du Sud à cette époque. En matière de distribution des ressources, l'Etat prévalait sur le marché. Aussi la corruption des fonctionnaires était-elle monnaie courante, pots-de-vin et fraudes de toutes sortes se pratiquant un peu partout. Dans ce domaine aussi, le Sud avait des points communs avec le Nord. Tous les lycéens et étudiants faisaient partie de l'Association patriotique des jeunes et, plusieurs fois par semaine, se rendaient à l'école en uniforme kaki. Chaque mois, dans une grande effervescence, le pays tout entier participait à un gigantesque exercice de simulation de guerre. Et plusieurs fois par an, Séoul, comme Pyongyang, plongeait dans les ténèbres à l'occasion de l'extinction des feux imposée par l'exercice d'entraînement en vue d'une éventuelle attaque aérienne.
Mais le Sud d'aujourd'hui est un pays neuf qui n'a presque plus rien à voir avec cette époque, radicalement différent de ce qu'est resté le Nord. Il est peut-être plus proche de Singapour ou de la France que la Corée du Nord. Les couples mariés ne font plus d'enfants ; les revenus moyens atteignent 20 000 dollars ; la longévité des banques et des grandes entreprises est imprévisible ; chaque année, plusieurs centaines de milliers d'étrangers entrent dans le pays pour se marier ou trouver du travail ; tous les jours, un grand nombre d'étudiants quittent le pays pour poursuivre leurs études dans les pays anglophones. A Pusan, on vend des revolvers made in Russia. On cherche des partenaires sexuels sur Internet. On suit la retransmission des JO d'hiver sur l'écran de son mobile. L'ecstasy fabriquée à San Francisco est transportée par FedEx. Plus de la moitié de la population investit dans des fonds offrant à la fois sécurité et rendement. Les chefs d'Etat n'ont plus le charisme qui prévenait la critique et les moqueries. Pour la première fois depuis la libération du pays, le parti politique représentant la classe ouvrière est entré à l'Assemblée nationale. Si en 1984, année où Kiyeong est passé au Sud, quelqu'un avait prédit ce que deviendrait la société sud-coréenne vingt ans plus tard, on l'aurait pris pour un fou.
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Le nationalisme insufflé dans l'esprit des Coréens du Nord dès leur plus tendre enfance leur était devenu aussi naturel que le sang qui coulait dans leurs veines. Il perdurait plus que leur vénération quasi religieuse pour les deux Kim qui finirait, elle, par se dissiper un jour ou l'autre. C'était ce que pensait Kiyeong. Chaque rencontre avec Jeong-hun le raffermissait dans sa conviction. Pour ce qui était de la confiance et de la loyauté envers le gouvernement du Nord, Jeong-hun y avait peut-être renoncé. Dès lors qu'il avait quitté le Nord, il ne pouvait que perdre toutes les illusions symptomatiques de la maladie infantile du communisme quant à l'admiration inconditionnelle que les peuples du monde entier vouaient au grand dirigeant Kim II-sung et à la doctrine du Juche. Mais quand il s'agissait des valeurs qu'on lui avait inculquées depuis l'enfance, il refusait d'y toucher. Jamais il ne céderait une parcelle de son attachement aux idées nationalistes, et plus particulièrement à cette notion de peuple uni par la pureté du sang, ni de sa conviction que le peuple coréen constituait une élite parmi les peuples du monde.
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La science des hommes ne fait que retarder les désastres ou les inondations, c'est tout. La dernière guerre a été le règne du feu. A cause des bombardements américains, Pyongyang est retourné à l'âge de pierre, puis à l'âge de terre. Nous avons reconstruit nos villes avec des pelles. Grâce au mouvement Cheollima, nous avons édifié une république dont nous pouvons être fiers. Maintenant, c'est l'âge de l'eau. En surface, l'eau semble paisible, mais dans ses profondeurs se cache une énergie incroyable. C'est pourquoi nous devons la maîtriser parfaitement. Jusqu'à présent, nous avons l'impression de nous en être bien sortis, mais en réalité personne ne peut le garantir. Ensuite, viendra l'âge de l'air, je crois. A ce moment-là, nous souffrirons peut-être beaucoup plus que pendant les âges de feu, de terre et d'eau. L'ait est invisible. Sans lui, nous ne pourrions respirer.
Ce jour-là, Kyyeong ne saisit pas ce que son père voulait dire. Mais en y repensant plus tard, il comprit que son père s'était en fait moqué de la vision creuse et bornée de la doctrine du Juche et avait prédit avec exactitude l'avenir de la Corée du Nord. En effet, dès le début des années quatre-vingt-dix, le pays subit plusieurs inondations successives et ainsi commença un "long cortège de souffrances" dans le sillage d'une grande famine. Plus rien à manger. La population se nourrit de racines et d'écorces, alla jusqu'à manger de la terre pour se remplir le ventre. Les estomacs vides n'émirent plus que des éructations douloureuses. Ce fut littéralement l'âge de l'air. Acculé, le gouvernement militaire, nostalgique de l'âge du feu, aurait encore préféré faire la guerre contre le Sud ou l'Amérique afin d'en finir une bonne fois pour toutes.
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Kim Jong-il, fou de cinéma et d'opéra, avait transformé le pays entier en scène de théâtre. Des rassemblements de quatre-vingt mille jeunes donnaient des spectacles de masse ; chaque jour, aux accents de chants guerriers, de jeunes hommes couraient dans les rues en brandissant des drapeaux rouges. Kim Jong-il avait créé une grande oeuvre épique dans laquelle une poignée de héros côtoyaient plusieurs millions de figurants.
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