Par idéalisme sioniste les parents de
Victor et Macha se sont installés en Israël au début des années 70, lorsque le gouvernement soviétique a autorisé plusieurs centaines de juifs à immigrer. Après leur décès accidentel les enfants ont été placés, l'un en internat et l'autre dans un kibboutz.
Afin de réunir la famille leur grand-mère se décide à quitter sa Russie bien qu'elle répugne à s'établir dans "cet Izraël de merde, ce pays oriental plein de zhids"(juifs). Elle y retrouve deux ados difficiles qu'elle n'est pas sûre d'aimer mais ensemble ils vont devoir essayer de se reconstruire une nouvelle vie dans leur pays d'adoption.
Le roman examine de près les personnalités de Victor et de Macha, leur relation complexe, entre séduction et aversion, dans un monde où ils ont du mal à se faire une place au soleil. Laissés livrés à eux-mêmes par leur grand-mère qui passe le plus clair de son temps auprès d'une épicière, chacun à sa façon cherche le bonheur dans l'amitié et différentes transgressions.
Macha, l'ainée, est une jeune fille rebelle qui veille à son indépendance, rien ne palpite en elle si ce n'est la volonté de survivre tandis que Victor se montre désireux de s'intégrer et d'être aimé. Habitée par une étrange nécessité, Macha interfère sans cesse dans la vie de son frère et s'efforce de toujours le ramener vers elle pour tenter de lui redonner ses racines.
Au delà du regard sur les parcours individuels, cette histoire dénonce les difficultés d'assimilation des nouveaux immigrants qui, bien qu'étant devenus citoyens de l'état hébreu, demeurent pourtant considérés comme étrangers à l'ethos israélien. Ils restent des juifs de diaspora, russes, marocains ou géorgiens, tous définis précisément par leurs différences nationales et culturelles. Différences qui les empêchent de devenir de "vrais" israéliens, statut privilégié réservé à une élite, c'est à dire ceux installés de longue date et les sabras nés sur place. La lancinante question de l'identité, sujet maintes fois rebattu, prend avec cette histoire une dimension particulièrement cruelle.
Victor et Macha m'ont réconciliée avec leur mère,
Alona Kimhi, que je n'avais pas du tout appréciée dans
Lily la tigresse. Alors que j'étais bien décidée à ne plus rien lire d'elle, ils m'ont donné envie de découvrir les autres romans de cette auteure si particulière.