belle écriture et belle incursion dans un monde carcéral_ romance ou réalité ?... ; de belles ou moins belles personnes (mais de quel côté des barreaux ?...)
La recherche du crime perpétré ; mais la fuite de la mémoire. Des personnages riches, et complexes à souhait.
Commenter  J’apprécie         00
Certains hommes se réveillent le matin pour voir le visage d’une épouse dévouée posé sur l’oreiller d’à côté, savourent la respiration douce de l’endormie et l’odeur rassurante du talc bon marché. Peut-être aperçoivent-ils les yeux mi-clos d’une petite amie aimante, gouttes de parfum de luxe derrière des oreilles délicates. Ou peut-être s’étonnent-ils de ce regard d’étrangère inconnue qui soutient le leur, un baiser passionné chassant les relents d’alcool. Tout autour du monde des hommes ouvrent les yeux pour scruter des femmes et absorber leur chaleur, noyés dans de gigantesques vagues d’amour et de respect, mais pour certains d’entre nous, les errants qui parcourent la terre au gré des vents, les vagabonds et les clodos et les paumés, eh bien ça ne se passe pas toujours tout à fait comme ça. Pour les gens comme moi, le matin, c’est le fracas de la matraque d’un flic contre les barreaux d’une cellule, la puanteur de chiottes ouverts et un visage masculin, mal réveillé, qui aboie des ordres.
Cinq criminels jugés coupables et moi, l’homme innocent qui ne fait que passer, globe-trotteur pacifique et romantique qui n’a rien à faire ici et ne mérite pas d’être traité de la sorte. J’étais sûr qu’il y avait six autres prisonniers, mais en recomptant je n’en trouve que cinq. Je suis crevé et paumé et sans savoir si tout cela est vraiment en train d’arriver, je regarde fixement le mur.
Ce que je sais c’est que demain j’irai en prison. Les vertueuses mises en garde du juge sont travesties par l’interprète, qui lui-même dissimule sa propre satisfaction, elles s’insinuent dans mon cerveau, remuent une vie entière de conditionnement social, le grand mythe de la prison et de l’incarcération et la cruauté crasse de l’humanité soudain tangible, mon crâne, une bibliothèque vide et fermée où leurs mots résonnent et se reforment, des frissons qui descendent le long de ma colonne vertébrale.
Je fais ce qu’on m’a toujours dit de faire et tends l’autre joue. Je ne dis rien. Me refuse à entendre ses paroles obscènes. Mais c’est très dur. Et en fermant les yeux de toutes mes forces je cherche un sanctuaire, et trouve le juge qui m’a condamné plus tôt dans la journée, son visage rouge sang coagulé qui tourne au violet, son poing serré, levé tandis qu’il déclame un sermon tonitruant, la fureur de sa harangue plus encore que ses paroles me rappelle que je suis la lie de l’humanité, plus bas que terre, indigne même de lécher ses semelles. Personne ne peut endurer indéfiniment un tel niveau d’insulte et je finis par rouvrir les yeux, le violeur aux esquimaux m’adresse un baiser humide et se frotte les couilles, balançant son bassin d’avant en arrière en gémissant je baise toi bien.
L’interprète revient et explique l’horreur qui m’attend en prison, les psychopathes qui aiguisent leurs couteaux et lubrifient leur queue, une orgie de mutilation et de sodomie. L’enfer est sur terre et je suis sur le point d’y pénétrer, le juge et ses laquais s’en félicitent, les petits sourires suffisants des bureaucrates et les médias qui se repaissent de cette forme faussée de rétribution. Le viol masculin, c’est leur fantasme et ma terreur. Je préfère encore mourir. Et la mort aussi m’a été promise.
...et à l’école on apprend qu’il y a des conifères et des arbres à feuilles caduques et que conifère signifie qui ne perd jamais ses feuilles, et ça signifie qu’ils ne meurent jamais, et déjà à cette époque je sais qu’il vaut mieux ne pas s’éloigner de l’aire de jeux pour traîner là-bas, comme dit Maman, on ne sait jamais, ce monde est plein de gens gentils mais il y en a aussi des méchants, il vaut mieux rester là où on peut nous voir...
John KING et Richard NEBERSKY : Prague
A l'occasion d'une manifestation littéraire qui se déroule autour de la
littératuretchèque,
Olivier BARROT s'est rendu à Prague pour enregistrer quelques émissions. Depuis un bistrot, il présente le livre de
John KING et Richard NEBERSKY "Prague" paru aux éditions Lonely planet. Cet ouvrage rescense tout ce qu'il faut savoir sur la ville. On apprend aussi que Pivot veut dire bière en...