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Dellarobia n'a pas une vie de rêve, ça non !
Coincée avec ses 2 enfants de 5 ans et 18 mois dans une ferme des Appalaches, dans une région pauvre, quasi sinistrée, avec un mari qu'elle n'aime plus, apathique - « Que fallait-il donc pour bouger un homme qui, lorsqu'il était à bout de souffle, et il n'en avait guère au départ, ressemblait à une montagne ? » - , qu'elle n'aurait jamais dû épouser, et à côté de beaux-parents indifférents...quel tableau, allez-vous me dire !
Et je continue : il pleut depuis des mois ; tout ce qu'elle possède, ce sont des objets « soit incassables soit cassés » ; le commerce de la laine de leurs moutons ne rapporte plus rien ; elle ne sort jamais de chez elle et ne voit quasi jamais d'adultes, à part ceux que je viens de citer, et heureusement, sa meilleure (et seule) amie Dovey, la délurée.
Je continue ? Non, car Dellarobia, malgré tout, est une femme de caractère, qui assume : « Les gens font des erreurs. Les erreurs fichent ta vie en l'air. Mais c'est à cause d'elles qu'on a ce qu'on a. Ca forme un tout. Un jour où on s'occupait des moutons, Hester a dit que ça sert à rien de se plaindre de son troupeau, parce qu'il représente la somme de tous les choix passés ».

Elle assume, donc. Enfin, presque...Car au début du roman, elle est prête à partir, elle s'en va, elle monte la colline...Et puis là, il lui arrive quelque chose d'extraordinaire :
« Une beauté surnaturelle lui était apparue, une vision de gloire qui l'avait clouée sur place. Pour elle seule ces branches orange se soulevaient, ces longues ombres se changeaient en une levée de lumière. On aurait dit l'intérieur de la joie » : des centaines de milliers de papillons ont élu domicile dans les arbres derrière chez elle.
Cette découverte déclenche chez elle un sursaut d'espoir : « J'étais tellement focalisée sur ma petite vie. Ma petite personne. Et j'étais face à quelque chose de tellement plus grand. J'étais forcée de revenir et de mener une vie différente. »

Et là, on peut dire qu'elle change, sa vie : des médias (ceux qui veulent faire à tout prix de l'audience, qui filment et coupent au montage, qui font semblant d'écouter mais qui ne veulent que du sensationnel) aux scientifiques (les vrais, ceux qui testent, qui apportent tout le matériel, qui sont payés par l'Université, qui squattent le bout de sa prairie pour faire leurs analyses au millimètre près), elle doit s'adapter. Elle doit changer. Et elle entraine sa famille dans son sillage, son amie, son village.

Barbara Kingsolver aborde sans ambages le thème de la science et du changement climatique, crucial, auquel les gens accordent encore si peu d'importance. Elle traite de la pauvreté, également, sans honte ni langage de bois. Mais elle reste malgré tout profondément humaine et proche de la sensibilité féminine de l'héroïne, ce qui nous la rend attachante.
Pas de morale, ici, rien que du concret. Face aux papillons, des actions, des explications. Et la remise en cause d'une femme, une toute petite femme.
Roman peut-être un brin bavard, mais quel engagement, quelle vérité !
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Une sympathique écofiction, qui chante la splendeur des monarques, une espèce de papillon menacée par la déforestation et les dérèglements climatiques.
Le fond est intéressant bien sûr, mais Barbara Kingsolver m'ayant habitué à des mariages beaucoup plus réussis entre le côté militant de son écriture et sa capacité à offrir au lecteur un vrai plaisir de lecture, j'ai été déçue. En fait, ça marche assez bien quand elle parle de fracture sociale, quand elle évoque le mur d'incompréhension qui peut séparer le scientifique, l'universitaire, d'une communauté rurale frappée par la crise. Mais pour ce qui est d'alerter sur la cata écologique, sa forte motivation et son louable désir de provoquer une prise de conscience semble lui faire parfois un peu oublier de puiser dans tout son talent romanesque.
J'aime bien les personnages, surtout Dellarobia qui, enceinte à 17 ans, se retrouve coincée dans une vie qui ne lui convient pas vraiment, qui grâce aux papillons va sortir de sa chrysalide et prendre son envol. Mais niveau rythme, ce n'est pas ça. L'intrigue aurait eu besoin d'être sérieusement enrichie. Je me suis un peu ennuyée alors que je m'attendais à une histoire prenante.
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Depuis l'âge de dix-sept ans, la vie de Dellarobia est confinée dans cette ferme du Tennessee, dans cette maison, partagée entre son mari et ses deux enfants. Insatisfaite de sa vie, elle étouffe, a soif d'autre chose et ne se sent plus la force de suivre sa raison. Pourtant bien consciente de son erreur et des dégâts qui vont en découler, elle se dirige vers la petite cabane de chasse, vers une aventure extraconjugale.
Cet automne des plus pluvieux a détrempé les lieux mais elle grimpe la piste raide et rocailleuse. Même les arbres couchés à cause de ce sol imbibé qui ne les retient plus ne l'arrêteront pas.
C'est en premier lieu une petite tache orange qui capte son attention dans la forêt de sapins puis, comme suspendus aux conifères, une multitude d'amas brunâtres, « telles d'énormes grappes de raisin » tremblant dans la canopée. À la percée d'un rayon de soleil, l'embrasement des arbres avec une couleur orange crépitant de toute part la cloue sur place et s'envole alors l'envie de l'adultère qui allait être commis.

Dellarobia revient dans son foyer et ne peut annoncer la nouvelle car il faudrait expliquer sa présence là-haut dans la forêt.
La famille vit sur les terres des parents de Cub, son mari. Dellarobia vit au rythme de ses deux enfants, allège sa routine monotone en se confiant à son amie Dovey. Ses tâches, en dehors du foyer, se résument à débarrasser des impuretés la toison fraîchement tondue des moutons. Ses plus proches voisins sont ses beaux-parents qui prennent toutes les décisions et son mari l'exaspère souvent par sa soumission envers eux. Hester, la belle-mère est sèche et fière, autoritaire, et pour elle toutes choses se rapportent à Dieu.
La ferme ne rapporte plus, enfin pas assez. Les emprunts contractés asphyxient la famille et l'unique remède financier est le déboisement de la forêt. Dellarobia va insister pour que Cub se rende sur place avant de concéder à la vente du bois afin qu'il constate la présence des papillons qui s'avèreront être des monarques. Ceux-ci on décidé de passer l'hiver dans le sud des Appalaches au lieu du Mexique en raison de catastrophiques glissements de terrain qui ont tout ravagé sur leur lieu de repli hivernal.
Cub, et par ricochet toute la congrégation, pensent qu'elle a été touchée par la grâce puisqu'elle a « senti » que quelque chose d'extraordinaire, de miraculeux, avait eu lieu sur leur petit bout de montagne. Cela donne lieu un chapitre entier, long comme un sermon, sur la lourde influence de la religion dans ces contrées.
La nouvelle de la présence des papillons attire une équipe de scientifiques qui s'installent sur la propriété. Dellarobia se passionne pour ces monarques et sa soif de connaissances lui permet de côtoyer un monde auquel elle aurait pu avoir accès si elle n'avait pas dû interrompre ses études en raison de sa première grossesse qui s'était pourtant terminée trop prématurément. Elle comprend que la vie de famille est trop étriquée pour elle. Elle va s'épanouir lorsqu'ils lui confieront certaines tâches. Son fils de sept ans sera aussi de la partie, avec sa maman, et il aura un comportement magnifique de maturité, un sacré petit bonhomme curieux du monde qui l'entoure !

Fatalement, nous aurons le cliché des évènements extraordinaires qui ameutent leur lot de curieux et de journalistes voyant là le prétexte à un scoop de plus en passant à côté de l'alerte climatique de cet évènement inhabituel.

Mon enthousiasme pour ce roman est sans bornes. J'y ai trouvé l'exhaustivité des sujets qui me passionnent. On sent vraiment l'attachement de Barbara Kingsolver à la nature, au vivant, quand elle parle des ces papillons. Chaque évocation est féérique.
Le quotidien de Dellarobia est décrit longuement et précisément si bien que j'ai eu le sentiment d'être à ses côtés presque physiquement. Cette proximité en a fait une amie le temps du roman. Son complexe d'infériorité face aux étudiants et aux scientifiques m'a particulièrement émue.
On est vraiment dans le concret lorsque l'auteure aborde les préoccupations du monde agricole impacté économiquement par le climat et pris en tenaille par les banquiers et d'un autre côté le monde scientifique qui voit l'écosystème en péril et essaie de tirer l'alarme. Ils dénoncent une évidence exponentielle : «un monde qui se désagrège dans le feu et l'eau ». Même les saisons sont diluées.
Tous les passages liés aux monarques ont nourri mon intérêt pour la biologie dont l'extraction de leurs lipides, source énergétique pour leur survie face aux températures qui chutent. Quel prodigieux travail de documentation !

Pour terminer, le « pacte de durabilité » proposé par un sensibilisateur montre bien le décalage entre les propositions des gens bien-pensants et la réalité du quotidien des foyers modestes. Celui-ci cherche à expliquer à Dellorobia qui n'a pas un sou, ne sort jamais de sa ferme, comment maîtriser son empreinte carbone : « moins » d'avion ? Elle ne l'a jamais pris. Moins de voiture neuve ? Ils ont changé déjà deux fois le moteur de la leur pour la faire durer. Acheter d'occasion ? Elle ne fait que ça. Changer l'électroménager pour des moins énergivores ? Elle n'a pas du tout les moyens… Tout est dit : elle n'a pas les moyens de contribuer activement au dérèglement climatique ! Ce luxe destructeur est plutôt réservé à tous ceux qui gagnent trop d'argent.
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J'aime beaucoup Barbara Kingsolver, ses personnages sont consistants et leur psychologie n'est pas le fruit du hasard, ils ont toujours un passé qui explique ce qu'ils sont aujourd'hui. Ensuite, ses jolies histoires s'entremêlent avec des problèmes environnementaux pas fantaisiste (Etant biologiste de formation on peut compter sur elle pour ne pas dire de bêtises).

C'est à nouveau le cas ici, avec d'un coté, Dellarobia, une jeune mère de famille qui s'interroge sur le sens de sa vie, les événements plus ou moins dramatiques du passé l'ayant coincée dans une vie pas folichonne. D'un autre coté, les monarques, ces papillons qui s'installent dans leurs montagnes des Appalaches pour la première fois (fait fictionnel), alors qu'habituellement ils passent l'hiver au Mexique. le réchauffement climatique serait à l'origine de ce déplacement aussi merveilleux qu'inquiétant. Ils sont des millions, survivront-ils à l'hiver beaucoup plus rigoureux que celui du Mexique ? Toute l'espèce est menacée, il ne semble pas qu'il y ait une autre issue que la fin des monarques.
Le personnage de Dellarobia évolue en parallèle avec les phases de l'hivernation des papillons. Collaborant avec un scientifique venu étudier ce phénomène, elle se révèle et s'affirme. Aura-t-elle une vie plus consistante ? Ou, comme pour les papillons, est-il trop tard ?

On en apprend beaucoup sur les monarques et on prend conscience du fragile équilibre qui régit notre monde, combien il est menacé... tout ceci sans ennui, ni leçon de morale.

J'ai pris un très grand plaisir à cette lecture et peut-être, ai-je aussi récupéré une once de la sagesse de l'auteure.
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Coup de coeur! C'st magnifique. Un thème captivant, des personnages d'emblée sympathiques une écriture toujours aussi remarquable, tout est au rendez vous pour quelques heures de pur bonheur pour le lecteur.

Nous sommes en plein coeur de l'Amérique profonde, dans les Appalaches. C'est moins la crise que le climat devenu fou qui pèse sur les épaules de ces paysans. La pluie incessante pourrit tout. Il pleut aussi dans la vie de Dellarobia, mariée à 17 ans pour « réparer » la faute. Isolée au sein d'une belle famille hostile, affublée d'un benêt de mari soumis à ses parents, ce sont ses enfants, son amie de toujours et ses rêves lui évitent de perdre pied.

C'est un papillon qui va changer le cours de son existence, ou plutôt des millions de papillons : les monarques, cette année se sont arrêtés avant le Mexique, et leur couleur a embrasé la vallée. le trou perdu sort de l'anonymat. Médias, militants, gourous mais aussi scientifiques accourent. Et Dellarobia se retrouve au coeur de la farandole qui va bouleverser son destin.

J'ai frissonné sous les trombes d'eau, écarquillé les yeux devant la beauté des myriades de papillons, trépigné avec Dellarobia face à l'obstination de ses proches, rit aux réparties de son amie et admiré la précocité de son fils.


Le thème du dérèglement climatique n'est pas abordé à la légère. Barbara Kingsolver sait de quoi elle parle, le sujet n'est pas traité par une groupie de la dernière heure. de même qu'elle connait bien le terrain : diplômée en écologie et biologie, elle vit dans sa ferme des Appalaches. C'est certainement ce qui confère à ce roman son authenticité et sa crédibilité.

Un immense merci aux éditions Rivages et à Price Minister pour ce partenariat.
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Dans le sud des Etats-Unis ,dans une petite ville des Appalaches vit Dellarobia. Cette jeune personne s'est mariée très jeune suite à une grossesse non désirée ; finies les études la voilà femme au foyer avec deux enfants, la trentaine qui arrive et la voilà qui décide de tromper son mari .Le rendez-vous est pris sur la colline dans une petite cabane à l'abri des regards. Tout en se rendant à ce rendez-vous elle s' interroge si oui ou non elle va le faire , toute à ses pensée elle se rend compte qu 'elle voit des petits nuages oranges , une fois , deux fois , trois fois …… ce sont de minuscules choses qui volent autour d' elle , des milliers de papillons migrateurs .Les habitants découvrant ce phénomène la petite ville verra arriver des touristes..Cela va changer la vie de Dellarobia , elle va s' affirmer ,elle commence a tenir tête à sa belle-mère cette femme sans coeur qui lui mène la vie dure .Lorsque des scientifiques arrivent sur place pour étudier les papillons , elle va travailler avec eux au grand désarrois de sa belle-famille. Belle histoire racontée sans jugement et avec beaucoup de sagesse.


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Dans la lumière raconte l'histoire d'une femme dans une petite ville des Appalaches, dans le sud des Etats-Unis. Dellarobia s'est mariée jeune, suite à une grossesse non désirée. Elle a arrêté ses études, s'est installée dans la propriété agricole de ses beaux-parents, a eu deux enfants et est devenue femme au foyer. Quand commence le roman, elle est à l'aube de la trentaine. L'histoire débute le jour où elle décide pour la première fois de tromper son mari. Rendez-vous est pris dans une cabane sur la colline. Dellarobia grimpe jusque là-haut en s'interrogeant sur sa vie et sur l'acte qu'elle est prête à commettre. Puis une particule orange traverse son champ de vision, puis, une deuxième, une troisième,… Elle se rend compte que d'étranges petites choses volent autour d'elle par milliers. La forêt flamboie, les arbres semblent se changer en feu. Dellarobia est dans un état si intense qu'elle décide de rebrousser chemin. La couverture du roman ne nous cache pas ce que sont ces particules orange. Il s'agit de papillons migrateurs, de monarques plus précisément, qui de façon exceptionnelle et jamais vue, ont décidé de s'arrêter dans la propriété des beaux-parents de Dellarobia.

L'arrivée des papillons crée des réactions en chaîne. Surmédiatisation, afflux de touristes, récupération religieuse et débarquement d'une équipe de scientifiques en sont les principales conséquences. La présence des papillons a également un impact plus personnel chez Dellarobia. Elle commence à tenir tête à sa belle-mère, une femme sèche et sans compassion et surtout, elle se lie avec les scientifiques qui viennent analyser les papillons. Ce contact réveille beaucoup de choses en elle et renforce le sentiment que sa vie est particulièrement étriquée. le fil qui conduit tout le roman est justement là : aura-t-elle le courage d'aspirer à ce qui la rendrait plus heureuse ?

Fable écologique, critique de l'éducation aux Etats-Unis, réflexion sur la médiatisation, sur les problèmes liés à la crise économique, roman psychologique sur les choix de vie, sur les poids des secrets familiaux, … «Dans la lumière» est tout cela à la fois.
Passionnant et doux-amer, ce roman est remarquable. Nous sommes plongés dans le coeur d'une petite ville américaine, bousculée par des problèmes écologiques qui s'opposent aux intérêts économiques. Les personnages sont profondément humains, l'auteur réussit à leur insuffler une force et une justesse hors du commun. L'histoire est racontée avec beaucoup de nuances et sans aucun jugement. J'ai adoré.
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Pour vous parler correctement de ce livre je devrais me lâcher quitte à faire ressurgir des souvenirs désagréables. J'ai vécu dans une telle région, là où le climat est dur, là où les gens vivent de l'élevage des animaux et de l'environnement, là où les difficultés de la vie font jaillir une croyance solidement ancrée dans la religion et un Dieu.


C'est une histoire sur une région hostile où les hommes ne font pas attention à la diversité biologique, au climat qui se réchauffe mais se dégrade en même temps amenant des pluies diluviennes. Les forêts sont arrachées pour survivre et se chauffer, les animaux se débrouillent pratiquement seuls, de toute façon ils finissent à la casserole, alors pas de sentiments.

Et dans tous le chaos de cette histoire Della, orpheline, mariée par hasard ou mauvais choix, détestée par ses beaux parents, ignorée le plus souvent par les autres, va faire prendre conscience à la communauté que leur survie dépend du respect de la nature. Elle devra faire son chemin, avec des erreurs, des réussites. Elle apprendra la mauvaise interprétation de ses paroles, à ne pas argumenter sans nécessité. Et tout ça par l'arrivée intempestive de milliers de papillons qui ont changé le chemin de leur migration. Les moments bouleversants de la vie de Della et des membres de sa famille sont tempérés par les explications sur les papillons, le climat et la diversité. Un très beau livre à savourer sans se presser.
Lien : http://pyrouette.canalblog.c..
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Imaginez cette partie du Tennessee au pied des Appalaches: des fermes éparpillées à quelques kilomètres du petit bourg le plus proche, constitué d'une école, une église, un café, un fast-food et une bibliothèque fermée.
Des pâturages à flanc de montagne, des moutons bruns et blancs, des fleurs au printemps, et une route qui sillonne entre les fermes, un bus scolaire, quelques pick-up, une moto de temps en temps.
La population: des familles de fermiers se réunissant le dimanche à l'église, des enfants qui arrêtent l'école à seize ans car les études, c'est pas pour eux et une méfiance généralisée de la culture, la science, de tout ce qui vient d'ailleurs et qui ne correspond pas à ce que la radio partage avec eux.
Dans l'une de ces fermes, Dellarobia, mariée en hâte à 17 ans au père du bébé qu'elle porte, partageant maintenant sa vie entre son mari gentil mais pas très dynamique et les parents de celui-ci, et ses deux enfants. Sur son CV: forte en gestion de conflits et en achats au plus bas prix pour tout, tout le temps.
Un jour, elle veut en finir. Pas avec la vie, mais avec son couple. Folle un instant, elle part dans la montagne rejoindre un jeune don Juan avant de se retrouver face à un événement incroyable: des millions de papillons orange et noirs ont colonisé la forêt!
Miracle, comme le pensent les paroissiens? Ou catastrophe environnementale comme le constatent une équipe de chercheurs venus observer ce phénomène?
Barbara Kingsolver nous parle avec justesse de cette Amérique à deux vitesses et plus particulièrement de la vie dans cette Amérique profonde si souvent moquée et critiquée, qu'elle ne revendique pas mais tente d'expliquer.
En parallèle, nous suivons la vie même de Dellarobia, entre déceptions, frustrations et sa soif de comprendre, d'apprendre, même si c'est pour y perdre ses dernières illusions.
J'avais beaucoup aimé le livre autobiographique Un jardin dans les Appalaches, et j'ai beaucoup aimé ce roman, très bavard certess (et parfois maladroitement traduit à mon avis) qui nous donne à penser de tous les côtés, nous fait revoir nos convictions et nous alerte sur la situation catastrophique vers laquelle nous nous dirigeons.
J'ai apprécié le fait que tout en voulant rester dans une narration aussi proche de la réalité que possible, elle a réussi à donner une tonalité poétique désespérée à ce récit. Une belle lecture militante et féministe.
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La vie dans les Appalaches décrite par Barbara Kingsolver est loin de ressembler à un désir de conquête du Nouveau Monde. Dans ce roman, on y découvre une vallée encaissée où les générations se succèdent avec une permanence jamais altérée et des montagnes rarement franchies. Une terre agricole abandonnée par les saisons où vivote une population pétrifiée par le destin qui se contente de régler sa boussole sur l’essentiel lorsqu’elle n’est pas à l’église ou au Wal-Mart. Les deux seules "attractions" du coin.


Comment vit-on à Feathertown lorsqu’on se sent à l’étroit avec des rêves qui se heurtent au flanc des montagnes ? Comme le dit Dellarobia, on traverse la vie en somnambule. On se réfugie dans ses pensées, la seule révolte à la portée de cette femme à l’humour désenchanté, enfermée dans un mariage qui a expiré il y a bien longtemps…jusqu’à la survenue d’un évènement inédit : la découverte d’une lumière de rare intensité embrasant la forêt qui domine les collines.
Une "flamme [qui] semblait jaillir de chaque arbre en une pluie d’étincelles oranges". Des millions de papillons inconnus dans cette région qui viennent se reproduire, et le récit s’engage dans une course d’attente face à une catastrophe à venir. On espère une histoire de métamorphose, mais rien à voir avec l’atmosphère de Kafka. Plutôt la grâce qui sommeille en attendant de pouvoir quitter sa chrysalide et de prendre son envol loin d’un monde qui chasse ces papillons ou qui étouffe Dellarobia.

Car au-delà du défi environnemental et des questions de société soulevés avec talent par l’auteur, j’ai perçu Dans la lumière avant tout comme le récit d’une narratrice obligée de devenir une héroïne malgré elle pour s’en sortir. Cette fille de menuisier peine à se frayer un chemin entre des personnages qui ont la force tellurique des montagnes, à l’image de la belle-mère, une figure écrasante taillée à la faux. Comme les papillons, elle doit résister pour exister et devenir elle-même.
En prêtant sa plume à Dellarobia que l’on voudrait courageuse et indépendante, B. Kingsolver met alors le lecteur à l’affût des signes d’espoir de changement dans un univers gagné par la capitulation.


Avec une écriture dépouillée mais nourrie d’une conscience éveillée, l’auteur a donc écrit un roman qui mêle les déflagrations de l’intime avec un désastre écologique en cours. Ça marche malgré la traduction parfois hasardeuse donnant lieu à des dialogues un peu bancals et de belles perles grammaticales.
Lecture captivante.

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