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Critique de nostromos


Le physicien italien Ettore Majorana a disparu le 27 mars 1938 , à l'âge de 32 ans, sans laisser de traces, ayant au préalable annoncé sa probable disparition à ses proches. Pourquoi un physicien comme Etienne Klein lui dédie-t-il un ouvrage entier ? Parce ce quasi-inconnu du grand public était un physicien exceptionnel, hors du commun même, et ce petit livre fait un bon travail en nous démontrant pourquoi.

Klein nous présente un homme très atypique, calculateur de génie, presque autiste dans sa timidité et son refus des honneurs, et qu'il n'hésite pourtant pas à comparer à des géants comme Galilée et Newton. Une très lourde comparaison, s'il en est! Klein étaye ce grandiose hommage par une argumentation qui fait mouche: les thèses défendues par Majorana étaient si en avance sur son temps que ce n'est qu' aujourd'hui qu'il devenu un nom incontournable de la physique moderne. En fait , un demi-siècle avant même que le concept de Matière Noire n'émerge comme LE mystère et LA priorité de la physique d'aujourd'hui, les théories du jeune génie italien contenaient peut-être déjà en germe une possible solution, réalisant ainsi une extraordinaire prouesse intellectuelle, incomprise pendant longtemps. Cela reste à prouver, bien sûr.

Ce livre n'est pas du tout technique, et s'attarde bien en effet sur la courte vie et la personnalité hors du commun du savant italien. Klein fait en passant un très chouette portrait de la bande de ragazzi qui entouraient le fabuleux Fermi et de l'ambiance qui régnait chez les physiciens durant la période qui vit naître la physique quantique. On sent bien que Etienne Klein est personnellement motivé par son sujet, rencontrant les descendants, visitant les lieux de vie de Majorana, s'interrogeant pertinemment sur les raisons qui poussent un tel homme à renoncer à sa vie. La lecture de son enquête est aussi agréable qu'informatrice, jetant de la lumière sur la carrière de Majorana, mais aussi sur ses idées philosophiques, source peut-être d'un certain mal de vivre.

Klein termine son ouvrage en nous livrant des hypothèses fondées sur les dernières informations concernant la dernière journée du physicien, ce qui laisse celui-ci un peu comme le proverbial chat de Schrödinger, à la fois mort et vivant. Si les circonstances de la disparition sont intéressantes, cela reste un peu anecdotique et l'on sera plus sûrement ému en pensant à ce qu'aurait pu accomplir cet homme étonnant.
En lisant sur Majorana, on ne peut s'empêcher de penser à Evariste Gallois, génial mathématicien de 21 ans qui n'eut qu'une seule nuit pour écrire sa théorie fondamentale, avant de se rendre au duel à l'aube dont il devinait l'issue fatale. Voilà deux jeunes hommes exceptionnels dont la science a été privée trop tôt, l'un par une coutume barbare et l'autre par une blessure intérieure que l'auteur ici ne peut qu'esquisser.

A noter que le livre finit par un appendice plus technique mais bienvenu sur les théories de Majorana.

Un bon livre donc, facile à lire, presque émouvant et toujours intéressant sur un homme qui mériterait d'être plus célèbre. Recommandé !!
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