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La fin du 20e siècle, nous la connaissons suffisamment bien et nous manquons encore de recul pour en apprécier le leg encore largement incertain (quoique Virgine Despentes y soit parvenu, à mon humble avis, avec Vernon Subutex). Donc, à quoi rime Mon combat ? Une autobiographie comme une autre ? Dans tous les cas, Karl Ove Knausgaard a réussi à m'accrocher. Après l'adolescence et la vie de jeune adulte, le troisième tome Jeune homme, raconte son enfance. L'auteur-narrateur décrit son arrivée sur l'île Tromoya en Norvège alors qu'il n'est encore qu'un bambin mais, après la description des lieux et du voisinage, ses aventures ne commencent réellement que lorsqu'il débute l'école. Puis, le temps passe, les années aussi. Mais combien ? Les indices du passage du temps sont vagues. Est-il rendu à six ans, huit ou dix ? Quand il se sent attiré par les filles et qu'il se fait des petites amies, je me dis qu'il n'est plus si jeune. Éventuellement, l'année 1980 est mentionnée puis, peu après, on apprend qu'il a douze ans. le roman se termine alors que, rendu à treize, sa famille déménage à nouveau. Il doit abandonner ses amis et le monde qu'il a connu. Je suis abasourdi par la précision avec laquelle Karl Ove Knausgaard a réussi à reconstituer cette enfance. Certains événements remonentent à loin, très loin. Par exemple, moi, il me reste quelques souvenirs de mes cinq ans mais pas autant que cet auteur. Je me demande donc si tout est vrai et, sinon, quelle en est la part de vérité ? Par moment, je me demandais aussi si cet exercice de mémoire était un règlement de compte à l'endroit de son père (décédé il ya longtemps). Ce dernier joue le rôle du méchant. Il n'était pas violent physiquement, mais l'auteur-narrateur le dépeint toujours comme quelqu'un de froid, extrêment sévère, le punissant parfois sans raison, l'humiliant souvent, le terrorisant toujours. Même dans les moments plus agréables comme en vacances, il est dépeint comme un monstre, sinon ridiculisé (par exemple, lors de leur sortie en ski). Il faut dire que c'est la mort de ce père tyrannique qui constitue la petite madeleine de cet ouvrage proustien. Même si le style a encore beaucoup à envier au génie français, Jeune homme est extrêmement bien écrit, mieux même que les tomes précédents qui nous balançait du présent au passé sans crié gare, au gré de… je ne sais toujours pas. Ce roman-ci est complètement linéaire. Et le peu de marqueurs temporels mentionnés plus haut ne nuisent aucunement à la compréhension. En ce sens, ce troisième tome me semble un peu plus cadré. Il y a un début, un milieu et une fin, une ligne directrice. C'est là qu'on reconnaît un esprit classique : malgré toutes les circonlucutions qu'il emprunte et les digressions dans lesquelles il entraine ses lecteur, il revient sans cesse aux mêmes points. Quand j'ai refermé le livre, j'ai vraiment eu le sentiment que Knausgaard avait bouclé la boucle de cet épisode. Un autre chapite de sa vie était terminé, il allait passer au suivant dans le quatrième tome. Même si ce n'est pas un coup de coeur, Jeune homme reste une lecture agréable. le style est si fluide qu'on se laisse emporter par ces anecdotes sans fin semblables à celles que probablement beaucoup ont vécu eux-mêmes quand ils étaient petits. Il faut dire que Knausgaard-enfant est un personnage assez typique. Il est un garçon comme tant d'autres, il a ses forces et ses faiblesses, il est peut-être un plus intelligent que la moyenne (ou, du moins, il se débrouille mieux à l'école), et conséquemment il se montre vantard sans le vouloir. Et je le trouve un peu pleurnichard, il chiale souvent. À part cela… N'importe qui peut s'identifier à lui. Sinon le prendre en pitié même si parfois il agit de façon insupportable. Il faut saluer l'honnêteté de l'auteur de ne pas se montrer seulement sous son meilleur jour, de s'embellir aux yeux du monde. + Lire la suite |