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Critique de Orazy


Un livre passionnant et déroutant à plus d'un titre. Si je ne lui donne "que" cette note, c'est pour deux raisons principales : premièrement, son titre est trompeur. D'ailleurs l'auteur s'en justifie dans les grandes longueurs, comme revenant sur un malentendu. Il ne s'agit pas ici d'un livre sur les forêts en tant qu'écosystèmes végétaux et animaux, mais en tant que lieux de rencontre d'êtres vivants.

Ce que l'on peut reprocher à Eduardo Kohn, c'est justement que ces forêts restent des lieux, des théâtres de rencontres humains-animaux, dont les végétaux ne constituent que des objets au plus utiles, au moins décoratifs. Ainsi, son ambition de d'englober tout le vivant dans une perspective nouvelle, bien que fascinante, est d'emblée réductrice. D'un côté, les humains, 'cantonnés' ici à la tribu des Runa d'Avila, de l'autre les animaux, mais pas n'importe lesquels : d'abord et avant tout ceux qui interagissent avec les hommes - les autres à l'instar des végétaux étant relégués à l'arrière-plan.

On me rétorquera qu'il s'agit d'anthropologie, et que dans anthropo il y a humain, donc que celui-ci doit être le centre et/ou le point de retour de toute approche, même celles qui visent à décentraliser les perspectives. Certes, mais il semble tout de même y avoir contradiction (que Descola pointe d'ailleurs dans la préface) avec l'ambition avouée de l'auteur.

Le deuxième point d'achoppement concerne les passages les plus théoriques de l'ouvrage, en premier lieu desquels le Chapitre 1 qui tient lieu pour l'auteur d'exposé théorique. Ceux-ci sont longs et souvent indigestes, à tel point que Kohn semble parfois s'y perdre lui-même.

Par moments, on le voit passer une page ou davantage à caractériser un phénomène particulier et à le rattacher par des convolutions plus ou moins naturelles au canon anthropologique, celui de Pierce en premier lieu. Puis, à la fin du long paragraphe, une courte phrase qui commence par "Autrement dit" ou un équivalent, vient clarifier le tout, et on se demande pourquoi on vient de se donner tant de peine à lire les lignes précédentes quand toutes ces idées pouvaient être si clairement exprimées. Je n'ai pas l'habitude de lire de l'anthropologie, et je n'y connais à peu près rien, il s'agit donc peut-être d'un procédé typique voire d'une manie partagée. Toujours est-il qu'elle m'a rendu la lecture aride en de nombreux endroits.

Restent les passages ethnographiques récoltés de premières mains au sein des Runa d'Avila, et les explorations de leurs croyances et de leurs imaginaires, dont Eduardo Kohn montre dans des passages fascinants combien elles ont été influencées par la colonisation. Ces passages ont constitué, pour ma modeste part, les plus intéressants de la lecture de Comment pensent les forêts.
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